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Vers une loi sur la "sécurité" intérieure 100% répressive contre les prostitué-esNicole Nepton, Sábado, Noviembre 2, 2002 - 20:59
Nicole Nepton
Le 23 octobre 2002, en France, le Conseil des ministres entérinait le projet de loi sur la sécurité intérieure de Nicolas Sarkozy qui viendra durcir la législation envers la prostitution de rue et pénaliser les squats, la mendicité et les installations illicites de gens du voyage. Mais, alors que la loi Sarkozy devrait être adoptée en janvier 2003, la gauche se mobilise tout en restant divisée sur les moyens de lutter contre "l'esclavage moderne". Le 23 octobre 2002, en France, le Conseil des ministres entérinait le projet de loi sur la sécurité intérieure de Nicolas Sarkozy qui viendra durcir la législation au grand dam de la gauche et des associations de défense des droits humains. Le projet vise à interdire la prostitution sur la voie publique et à pénaliser les squats, la mendicité et les installations illicites de gens du voyage. Selon le ministre, ce projet serait destiné aux "plus modestes, ceux qui comptent sur l'État parce qu'ils n'ont personne d'autre pour les défendre" et aurait pour but "de faire en sorte que concrètement, quotidiennement, la vie de ceux à qui on s'adresse s'améliore"... en durcissant la loi sur les personnes sans papiers, itinérantes et celles qui se prostituent tout en accordant des pouvoirs supplémentaires aux forces de l'ordre (fouilles, palpations, etc.). Le projet Sarkozy suscite l'opposition des syndicats, des ONG et des partis de gauche, dont une trentaine lançaient le 21 octobre un appel contre cette "guerre contre les pauvres", ce "100% répression". De plus, 40 associations et fédérations nationales de lutte contre la pauvreté et l'exclusion, dont ATD-Quart Monde et Médecins du Monde, demandent le retrait d'articles de nature à renforcer l'exclusion. En réaction contre l'arrivée massive de jeunes femmes venues d'Europe de l'Est et d'Afrique, le ministre Sarkozy compte aussi inscrire dans la loi une peine d'interdiction du territoire sanctionnant toute personne étrangère coupable de racolage ou d'exhibitionnisme sexuel, qu'elle soit en situation régulière ou non. Claude Boucher, responsable du Bus des femmes, ne décolère pas: "Cette tendance à criminaliser à nouveau les prostituées me terrifie. On mélange tout. Les prostituées françaises sont minoritaires dans les rues, les autres, les 7.000 étrangères à Paris, ce ne sont pas des prostituées, mais des esclaves, victimes de criminels. Le pire pour elles, ce serait de les enfermer ou de les renvoyer dans leur pays". Même incompréhension au Mouvement du Nid. Pour sa part, le Mouvement français pour le planning familial dénonce ces mesures nuisibles à la santé publique : "La clandestinité augmente les prises de risques. Les conséquences en termes de contamination du sida risquent d'être dramatiques". Act Up-Paris s'insurge aussi : "les sans-papierEs vont devoir renoncer à se soigner, les prostituéEs vont devoir se terrer, la promiscuité et la surpopulation vont accentuer le manque d'hygiène dans les prisons, les usagerEs de drogues seront toujours plus criminaliséEs. De quoi anéantir 20 ans d'effort de lutte contre la précarité et le sida. De quoi provoquer une véritable catastrophe sanitaire. En préparant l'avènement de l'Etat policier rêvé par Jean-Marie Le Pen, Nicolas Sarkozy se rend complice du sida." C'est déjà concrètement qu'on observe le virage vers un État répressif et moral. Cependant, le projet Sarkozy ne susciterait pas le même émoi au sein des ONG selon qu'elles conçoivent la prostitution comme un métier ou comme une atteinte intolérable à la dignité humaine. Certes, toutes dénoncent la pénalisation prévue des prostituées qui risqueront 6 mois de prison et une amende de 3.750 euros (plus de 5.250 $CAN) en cas de flagrant délit de racolage - passif ou actif - sur la voie publique. Mais, tandis que le Collectif des prostituées de Paris, le Pastt (un collectif de défense des transsexuels), les Verts de Paris, Act up Paris et Cabiria lancent un appel à les rejoindre le 5 novembre lors de la première manifestation nationale depuis 1975 pour les droits des personnes prostituées, les représentant-es d'ONG abolitionnistes souhaiteraient plutôt se donner le temps de la réflexion afin d'éviter "d'être récupérés par un camp dont les revendications sont totalement opposées aux leurs", selon Bernard Lemettre, président du Mouvement du Nid. Nicolas Sarkozy lui-même l'a bien compris, qui aurait rencontré les principales associations abolitionnistes sitôt son projet de loi approuvé en Conseil des ministres. En échange de leur opportune discrétion, celles-ci espèreraient obtenir du ministre ce qu'elles réclament depuis des années : des fonds publics pour la prévention et l'insertion des prostitué-es. Pour sa part, la Commission nationale consultative des droits de "l'homme" n'est pas dupe. Le 31 octobre 2002, Liberation.fr rapportait que celle-ci s'élève contre le texte du projet de loi Sarkozy "au nom de l'Humanité". Selon la Commission, "veiller à la sécurité des personnes et des biens est un devoir pour l'État, mais il doit s'exercer dans des droits constitutionnellement reconnus". La Commission, qui s'inquiète de "l'inflation des règles encadrant l'exercice des libertés publiques et parfois même la vie privée des citoyens", estime que "la répression risque d'accroître inutilement les contrôles sur le plus grand nombre, sans faire progresser pour autant la sécurité". Elle s'oppose notamment à la répression pénale des prostitué-es. Le 23 octobre via le quotidien Le Monde, le ministre Sarkozy donnait une réponse cinglante aux "droits-de-l'hommistes" et autres "tartuffes" qui dénoncent le caractère liberticide de son projet. Inquiétant. Mais, alors que la loi devrait être adoptée à l'Assemblée en janvier 2003, la gauche se mobilise contre la loi Sarkozy tout en restant divisée sur les moyens de lutter contre "l'esclavage moderne". Profitera-t-elle de l'occasion qui lui est offerte d'intégrer les revendications légitimes d'un authentique mouvement social ou, à tout le moins, celles sur lesquelles tout le monde s'entend, dont la décriminalisation des prostitué-es? Le 5 novembre, n'est-ce pas ce qui les rassemble qui devrait avant tout peser dans la balance plutôt que la crainte d'être "récupérés"? -----------------------------
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