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L’EMPIRE CONTRE ATTAQUE?Anonyme, Domingo, Septiembre 22, 2002 - 18:54
André Bézoukof
L'empire américain défiera-t-il l'Europe et l'Asie en Irak? « Les États-Unis sont le pouvoir suprême du monde (…) Le président n’a aucunement l’intention de permettre qu’un pouvoir étranger atteigne l’énorme supériorité que les États-Unis ont acquis depuis la chute de l’Union Soviétique il y a plus d’une décennie… Nos forces seront suffisamment fortes pour dissuader les puissances adverses de promouvoir une accumulation militaire avec l’espérance de dépasser ou d’égaler le pouvoir des États-Unis. » Ce document, envoyé par Bush au Congrès le 20 septembre dernier, est on ne peut plus révélateur des luttes qui se jouent actuellement aux Nations Unis sur la question de l’Irak. Il n’est pas nécessaire d’être unE spécialiste en études stratégiques pour comprendre que « la puissance adverse » dont il est question ici n’est pas l’Irak dévastée par deux guerres et un embargo inhumain de plus d’une décennie, mais qu’il s’agit plutôt de l’une ou de plusieurs puissances telle que la Russie, la Chine, l’Europe et le Japon. Mais on ne peut analyser les motivations profondes des représentants de la dictature américaine sans jeter d’abord un bref coup d’œil sur la toile de fond, c’est–à–dire la situation économique américaine et internationale. Les États-Unis (et le monde) se trouvent au tout début d’une crise économique majeure qui, comme toutes les autres crises économiques du passé, en est une de surproduction et donc, de faiblesse de la rentabilité. Cette crise, qui sera certainement la plus importante des 70 dernières années (pour le niveau très bas de la rentabilité moyenne), avait été retardée par l’endettement des entreprises et des ménages, par les mesures néolibérales faisant baisser les salaires, par la mondialisation impérialiste, mais surtout, par la spéculation boursière. On pourrait même affirmer que la crise était latente, mais que les fraudes des grandes entreprises ont permis de la masquer jusqu’à ce que les scandales financiers en finissent avec une situation artificielle où les actions atteignaient des prix surréalistes, finançant ainsi la pitoyable balance commerciale américaine. Devant une telle situation, que peut faire l’impérialisme américain? La seule chose qu’ont fait tous les autres empires dans le passé : établir unilatéralement des mesures protectionnistes et se lancer dans une guerre de conquête dont les résultats sont toujours incertains, mais qui vise à s’approprier ou à détruire les capitaux d’autrui. Les États-Unis ont choisi comme première cible l’Afghanistan, croyant probablement qu’il s’agissait là d’une cible facile et très rentable : ils s’assureraient ainsi le pétrole de la Mer Caspienne en construisant leur oléoduc sans plus se soucier des compétiteurs, dont l’Argentine (une firme argentine avait en effet signé un accord avec les Talibans pour construire l’oléoduc). Ils se positionnaient aussi en Asie Centrale, se rapprochant ainsi de l’Irak, de l’Iran, de la Russie et de la Chine, toutes des cibles futures. Malheureusement pour eux, et heureusement pour les peuples, leur entreprise est, jusqu’à ce jour, un échec cuisant. S’ils ont pu retirer du pouvoir leurs anciens amis les Talibans, ils n’ont par contre pas pu assurer la stabilité du pays en ruine, chose indispensable pour que leurs consortiums construisent l’oléoduc donnant accès aux gisements de la Mer Caspienne. Le régime fantoche qu’ils ont installé est aux prise avec des attentats quotidiens, et les troupes impérialistes restent confinées dans leurs bases militaires, seul endroit où elles disposent d’une fragile sécurité, bien que souvent assaisonnée de missiles. Ainsi, en envahissant l’Afghanistan, les États-Unis n’ont, jusqu’à présent, tiré aucun avantage économique ou stratégique par rapports aux autres puissances mentionnées plus haut. Mais l’Afghanistan n’est pas la seule « colonie » de l’Empire qui cause des migraines à Bush et ses acolytes. Que l’on pense au coup d’état raté au Venezuela, échec qui constituait aussi une victoire de l’OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole, cartel dont font partie le Venezuela, l’Irak, l’Iran, l’Arabie Saoudite, etc.). Que l’on pense aux situations explosives en Argentine, en Uruguay, au Brésil, au Paraguay, en Bolivie, résultat d’une crise économique et financière, et n’aidant en rien le projet coloniale de la ZLEA (Zone de Libre–Échande des Amériques). Que l’on pense aux mobilisations monstres de la semaine dernière en Colombie qui, avec les guérillas, menacent déjà le nouveau pouvoir d’extrême droite de Uribe. Que l’on pense à la pauvre situation de Vicente Fox (au Mexique), incapable de réaliser les réformes néolibérales dictées par l’Empire mais refusées par le peuple et les mouvements révolutionnaires. En Orient, la situation n’est pas plus reluisante. La résistance palestinienne ne semble pas vouloir s’étouffer malgré et précisément pour les exactions du gens d’arme impériale : l’État d’Israël. La Turquie est presqu’en banque–route, l’Arabie Saoudite et le Pakistan risquent la guerre civile comme la plupart des autres régimes soumis à l’Empire. Donc l’Empire est en crise à l’intérieur et à l’extérieur, et il a besoin à tout prix d’une victoire sur ses supposés amis (l’Europe et l’Asie). L’Irak lui semble être son ultime opportunité et en se l’appropriant, il espère : 1–Détruire l’OPEP en s’appropriant les réserves de pétrole les plus importantes du Moyen–Orient après celles d’Arabie Saoudite, et ainsi, contrôler les prix de l’énergie. 2–Diviser l’Europe en partageant les ressources pétrolières avec la Grande Bretagne (l’opposition irakienne déclarait cette semaine que seulement les Américains et les Britanniques auraient accès au pétrole Irakien) au détriment des consortiums français et russe ayant déjà signé des contrats d’exploitation avec le régime irakien actuel, mais attendant la fin de l’embargo pour les mettre à exécution. 3–Se positionner militairement pour envahir ensuite l’Iran, la Russie et la Chine. Pour que ces sombres projets fonctionnent, il faut d’abord que tout cela se fasse rapidement. La semaine dernière, le FMI déclarait d’ailleurs être en faveur d’une guerre éclaire en Irak qui « serait bénéfique pour l’économie mondiale » mais qui, si elle perdurait, aurait des résultats incertains. Le déficit américain est en hausse, la balance des paiements aussi (ce qui veut dire que les capitaux sortent des État–Unis) faisant ainsi chuter le dollars. La guerre augmenterait encore le déficit ainsi que le prix du pétrole, et causerait à l’Empire d’importants problèmes financiers et économiques, et ce jusqu’à ce qu’il ait accès au trésor de guerre, c’est–à–dire au pétrole. Pour que cela soit possible, il faudrait que les États–Unis prennent non seulement les villes d’Irak, mais aussi qu’ils réussissent à installer un autre régime stable, chose pratiquement impossible. Il y a un autre problème : ce sont les « amis » de Washington, c’est–à–dire l’Europe et l’Asie. Bush père aurait pu, en 1991, entrer à Bagdad, mais il ne l’a pas fait pour ne pas avoir à partager le gâteau avec les alliés. S’il ne pouvait manger le gâteau seul, il préférait le laisser intact pendants quelques années, en espérant probablement qu’un jour, son rejeton soit assez puissant pour l’engloutir tout seul. Celui–ci est actuellement dans un bras de fer avec l’Europe, la Russie et la Chine, chacun de ces « amis » exigeant bien sûr une part du gâteau. Si, après ces négociations, les États-Unis considèrent que leur part restante est suffisante, ils attaqueront. Bien sûr, ils pourraient aussi agir unilatéralement, et attaquer sans le consentement des puissances rivales. Mais cela impliqueraient des risques importants, dont l’intervention directe ou indirecte de ces puissances rivales pour faire échouer les plans de Washington. L’idée qu’il n’existe qu’une seule puissance et que celle–ci est militairement trop supérieure aux autres pour qu’elles s’y opposent est une idée erronée. Si en l’espace de six ans (1933–1939), l’Allemagne a pu passer de la ruine complète à la première puissance militaire mondiale, imaginez ce que pourrait faire l’Europe ou le Japon s’ils transformaient leurs économies en économies de guerre, chose que les États-Unis n’ont même pas encore faite. Dans une crise d’excès de capitaux, construire une armée comparable à celle des États-Unis est une question de mois pour des puissances telles que l’Europe et le Japon.. Par ailleurs, un accord momentané entre les puissances ne veut nullement dire que cet accord sera respecté dans le futur. Rappelez–vous du traité de non agression entre l’Allemagne nazie et l’Union Soviétique qui était alors basé (secrètement) sur le partage de la Pologne entre ces deux puissances. Ce traité et ce partage n’a pourtant pas empêché Hitler, quelque temps plus tard, d’envoyer ses divisions de Panzers (blindés) en direction de Moscou. Enfin, d’autres facteurs jouent contre l’appropriation par les États-Unis de l’Irak et de ses richesses. Premièrement, l’ensemble de la classe dominante américaine n’est pas en accord avec l’aventurisme de Bush. Ces secteurs disposent de certaines armes (surtout en période électorale), comme par exemple « l’implication de l’administration actuelle dans les scandales financiers » ou encore, ce qui est pire, « de sa complicité dans les attentats du 11 septembre 2001 ». Je n’oublie pas les mobilisations populaires du nord contre la guerre et l’impérialisme. Mais ces mobilisations, pour qu’elles soient déterminantes, devront être beaucoup plus importantes qu’elles ne le sont actuellement et montrer une détermination qui fasse peur à la classe dominante. Pour cela, il faudrait sortir du légalisme ronronnant, maladie chronique dans nos belles sociétés de soumisES, c’est–à–dire « civilisées ». 22 septembre 2002
Analyse de la conjoncture économique des 70 dernières années.
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