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Un an après, les travailleurs américains subissent toujours les retombées du 11 septembreCarl Desjardins, Jueves, Septiembre 5, 2002 - 17:15
Chris Kutalik
Le 12 septembre 2001, les commentateurs disaient déjà aux Américains que "rien ne serait plus jamais pareil." Depuis lors, au cours de l'année écoulée, les travailleurs ont constaté que si des choses avaient beaucoup changé, et d'autres pas du tout, il existait bien maintenant une nouvelle logique de raisonnement : la guerre déclarée au terrorisme. De plus en plus régulièrement, la sécurité nationale est invoquée pour masquer le mot d'ordre anti-syndical de l'administration Bush et des employeurs. - Par Chris Kutalik Le 12 septembre 2001, les commentateurs disaient déjà aux Américains que "rien ne serait plus jamais pareil." Depuis lors, au cours de l'année écoulée, les travailleurs ont constaté que si des choses avaient beaucoup changé, et d'autres pas du tout, il existait bien maintenant une nouvelle logique de raisonnement : la guerre déclarée au terrorisme. De plus en plus régulièrement, la sécurité nationale est invoquée pour masquer le mot d'ordre anti-syndical de l'administration Bush et des employeurs. Les plans visant à restructurer les relations entre les travailleurs et la direction à la fois dans les secteurs publics et privés et qui existaient souvent longtemps avant le 11septembre sont devenus partie inséparable du nouvel ordre. Que ce soit par le biais de licenciements massifs et d'autres délocalisations économiques ou par les effets plus directs de la politique gouvernementale, les travailleurs découvrent que des forces qui peuvent changer beaucoup nos vies quotidiennes et nos lieux de travail sont en entrées en action. Un an après, Labor Notes observe les effets cumulatifs des événements du 11 septembre et la réponse qu'y a apporté le gouvernement. RETOMBÉES IMMÉDIATES Les retombées des événements du 11 septembre furent immédiates pour beaucoup de travailleurs. La plongée rapide dans la récession d'une économie déjà très mal en point du fait de sa faiblesse structurelle a provoqué une vague massive de licenciements. Durant les 18 semaines qui suivirent le 11 septembre, 125.637 ouvriers provenant de 430 lieux de travail, travaillant pour la plupart dans des compagnies aériennes et dans des entreprises actives dans le tourisme et l'industrie hôtelière, furent congédiées, un résultat direct des attaques. Les déficits budgétaires qui en résultèrent ont également mené au gel des salaires pour les employés des secteurs publics dans beaucoup de communautés. À Miami, par exemple, professeurs et fonctionnaires ont récemment réagi en organisant un congé maladie massif . Bien avant que le World Trade Center ne s'écroule, un mouvement pour exiger des concessions de la part des syndicats existait déjà, mais certaines compagnies, des compagnies aériennes en particulier, ont tiré profit de la crise pour exiger plus de sacrifices. Selon Joshua Freeze, un membre de l'association des personnels navigants « des mois avant le 11 septembre, les compagnies aériennes ont commencé à demander des concessions aux syndicats des employés. Il est important de noter que la raison pour laquelle ils ont pris la peine d'exprimer cette demande est que le personnel des compagnies aériennes est syndiqué à plus de 80 % - ce qui constitue probablement le secteur le plus fortement organisé aux États-Unis. » En plus de subir ce retour de souffle indirect provoqué par les événements du 11 septembre, des milliers de travailleurs ont été directement affectés par des politiques gouvernementales enracinées dans la guerre contre le terrorisme. De la fusillade des non-citoyens au retrait de la protection syndicale pour 170.000 employés fédéraux en passant par l'enrôlement des travailleurs dans un système national d'espionnage, l'impact est déjà tout à fait évident. SÉCURITÉ DE LA PATRIE Les efforts déployés pour créer le nouveau Département de la Sécurité de la Patrie (DSP) [Department of Homeland Security] ont eu des implications bien plus significatives pour les travailleurs qu'une couche flambante neuve de bureaucratie. Enfouie à l'intérieur des 35 pages que constitue le projet de loi original pour créer la super-agence du DSP, une phrase longue de 68 mots (section 730) permet - à l'appréciation du président - de dépouiller les 170.000 nouveaux employés du DSP de tous les droits d'accords collectifs et services de protection de la fonction publique repris sous le Titre 5. La phrase exige un nouveau système de gestion qui soit "flexible," "contemporain," et "fondé sur les principes du mérite et de la bienséance de la fonction publique." Bobby Harnage, président de la Fédération Américaine des Employés du Gouvernement (AFGE), a qualifié la langue employée dans le texte de "code d'une disposition d'esprit qui se prépare à miner le salaire de la fonction publique, l'assurance maladie, les systèmes de retraite, le recrutement basé sur les compétences, le droit à faire appel en cas de licenciement, les droits de protection en cas de dénonciation, et les droits de s'organiser et négocier collectivement." Le nouveau projet de loi fait suite à l'ordre exécutif présidentiel du 7 janvier 2002 qui a privé près de mille employés du Ministère de la justice de leurs droits de négociation collective. Parfois les objectifs anti-syndicaux de ces efforts ont été explicitement définis. Michael Franc, vice-président de l'influent groupe de réflexion de droite de l'Heritage Foundation déclare dans le Houston Chronicle du 20 juin que "cette nouvelle agence et la guerre au terrorisme constituent l'ordre du jour conservateur jusqu'aux élections." Franc ajouta que « asseoir la prééminence des droits managériaux sur les syndicats, garantir qu'aucun quota de race ou de sexe ne viendra interférer dans le recrutement et empêcher des tentatives d'appliquer les lois sur les salaires - constitueront une grande partie de la discussion. » Franc entretient de solides relations avec le républicain Richard Armey du Texas, qui a présidé le comité désigné par la Chambre pour faire passer le projet de loi au Congrès. L'AFGE représente actuellement environ 50.000 des travailleurs affectés dans un certain nombre d'organismes qui seront associées au DSP, ils proviennent du Bureau Fédéral de Gestion de Secours d'Urgence, des Garde-côtes, du Service Fédéral d'Immigration et de Naturalisation (y compris les garde- frontières), et le Service de Protection Fédéral. Jackie Simon de l'AFGE indique que le syndicat mobilise ses membres en vue d'une campagne de pression pour que la partie du projet de loi relative à l'action anti-syndicale soit retirée de la version finale. Les démocrates du Sénat se sont mobilisés pour rejeter les dispositions anti-syndicales, mais l'issue finale du projet de loi reste indéterminée tandis que le Congrès est ajourné durant l'été. Cependant, le Président Bush a prévu le veto au projet de loi si la section 730 est rejetée dans les délibérations postérieures. LICENCIEMENT DES IMMIGRÉS LÉGAUX La Loi sur la Sécurité de l'Aviation et des Transports interdit aux travailleurs qui ne sont pas des citoyens américains d'effectuer des travaux de détection par scannage dans les aéroports. Ce seront probablement plus de 6.000 non-citoyens employés actuellement (environ 25% de la main-d'oeuvre nationale affectée à ce type de travail), qui seront mis à pied quand la législation entrera pleinement en vigueur le 19 novembre prochain. La grande majorité de ces non-citoyens sont des résidents permanents légaux, beaucoup ont de nombreuses années d'expérience. En plus de l'injustice commise envers ces travailleurs qui seront licenciés, les militants craignent le fait que cette condition de citoyenneté « fasse tache d'huile vers d'autres secteurs d'activité », dans les aéroports et ailleurs. C'est le personnel affecté à ces tâches de détection dans les aéroports de la Côte Ouest qui sera le plus touché. Dans plusieurs principaux aéroports de Californie près de 80% de ce type de personnel est constitué d'immigrés, en majorité philippins. Le Syndicat des Employés des services [Service Employees Union], qui représente un grand nombre de ces contrôleurs, a ouvert officiellement une procédure judiciaire commune avec le Syndicat des Libertés Civiles Américaines [American Civil Liberties Union] en janvier au nom des travailleurs affectés. Une campagne populaire impliquant Philippins et militants de la Paix et de la Justice a été organisée autour de ce problème dans la région de la baie de San Francisco. OPÉRATION TIPS Les changements politiques qui affecteront directement les vies des travailleurs ne se limitent pas au monde économique. Le Ministère de la Justice a révélé un plan intitulé Operations TIPS [Terrorism Information and Prevention System](système de prévention et d'information sur le terrorisme), visant à attirer des millions de travailleurs américains dans un vaste réseau de surveillance. Selon les Citizen Corps récemment constitués (un groupe de volontaires sous l'autorité du Gouvernement Fédéral), les TIPS constitueront « un système national qui permettra à ces travailleurs, qui, grâce à leurs habitudes sont en bonne position pour ce faire, d'identifier des événements inhabituels et de rapporter toute activité suspecte. » Des entretiens ont commencé mi-juillet entre le Ministère de la justice et les directeurs des grandes sociétés dont les ouvriers ont des interactions fréquentes avec le public : sociétés de messageries, les employés de services publics, chauffeurs-livreurs, les capitaines de bateau, les conducteurs de camion, et les conducteurs de train. Le but final des TIPS est d'introduire un million d'ouvriers dans le système comme groupe d'informateurs potentiels. Un mouvement de résistance au projet s'est déjà créé du côté des libertaires civiques et des différentes sections des syndicats ouvriers. Une résolution votée par la Fédération du travail de la Californie le 24 juillet a vigoureusement condamné le plan, comparant les TIPS aux efforts de l'Allemagne nazie pour transformer la main-d'oeuvre de la nation en un réseau d'informateurs et d'espions. La National Association of Letter Carriers (NALC - Association Nationale des Transporteurs de Courrier) a annoncé le 17 juillet qu'elle ne coopérerait pas au projet. Les Représentants des Travailleurs des Services Publics des Etats-Unis ont annoncé peu après "qu'ils ne soutenaient pas l'idée de voir leurs membres agir comme informateurs." Quelques ouvriers non qualifiés ont encore été plus durs dans leurs critiques. Butch Traylor, un chauffeur d'UPS et membre de Teamsters for a Democratic Union [Chauffeurs de camion pour une union démocratique], commentait ainsi les TIPS dans une carte blanche du New-York Times : « je m'inquiète de savoir quelle définition du mot « suspect » va être utilisée. Je m'inquiète que ceux qui ont la charge de défendre notre liberté encouragent d'une façon aussi cavalière une telle atmosphère de crainte et de soupçon. » « Cela m'embête de penser que mon facteur pourrait prêter plus d'attention au fait de savoir d'où provient mon courrier plutôt qu'où il est supposé aller. Un programme qui demande à des personnes comme nous de faire de la surveillance menace la confiance que nous avons établie dans les communautés que nous servons chaque jour. » Toutes les sections du mouvement syndical ne désapprouvent pas les TIPS. ; James Hoffa, le Président de Traylor, a adopté le projet. Selon le porte-parole de Teamsters (des routiers syndiqués), Rob Black, « M. Hoffa dit que les membres de Teamster peuvent être les yeux et les oreilles de la guerre contre le terrorisme. » L'opposition grandissante au projet TIPS a déjà provoqué la réduction des projets originaux. Le Ministère de la justice a annoncé le 9 août qu'il ne chercherait plus à inclure les ouvriers postaux et les agents des services publics dans l'opération. REFROIDIR LES GRÈVES L'administration Bush, sous le couvert de la sécurité nationale, est intervenue directement dans des négociations contractuelles de l'un des piliers du mouvement syndical : les dockers de la côte ouest. Dès la mi-mai, quand les négociateurs de l'International Longshore and Warehouse Union (ILWU) et les employeurs s'assirent autour de la table de discussion, l'administration avait déjà commencé à élaborer une réponse en s'appuyant très vraisemblablement sur une injonction de la loi Taft-Hartley. Une pareille utilisation des dispositions "de secours national" de la Loi de Taft-Hartley n'a encore jamais été utilisée. Jimmy Carter l'avait tenté lors des grèves des mineurs en 1978. Ironiquement, en 1978, une des réponses les plus fortes à l'injonction est venue de l'ILWU, qui promit une grève générale d'une journée sur la côte ouest si des militaires étaient employés pour faire marcher les mines. - Publié dans le courriel d'ATTAC |
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