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Oui à la taxe TobinAnonyme, Jueves, Agosto 8, 2002 - 08:51
Sven Giegold
« Je pense que la Taxe Tobin a une valeur symbolique très forte. Ce qu'elle souligne, c'est que durant ces dernières années les marchés financiers ont dirigé le monde. Les marchés financiers ont généré de grandes instabilités. Le mouvement libre du capital n'a pas seulement apporté une instabilité à un coût énorme pour les gens des pays concernés, y compris les très pauvres, il a de fait changé le pouvoir de négociation à l'intérieur du pays - en effet si vous avez un mouvement libre du capital et que vous essayez de taxer le capital, ce dernier vous dit "nous partons". C'est symbolique, mais c'est quand même plus que symbolique : cela affecte l'avenir en fait ». Joseph Stiglitz, ex-économiste en chef de la Banque mondiale. « Je pense que la Taxe Tobin a une valeur symbolique très forte. Ce qu'elle souligne, c'est que durant ces dernières années les marchés financiers ont dirigé le monde. Les marchés financiers ont généré de grandes instabilités. Le mouvement libre du capital n'a pas seulement apporté une instabilité à un coût énorme pour les gens des pays concernés, y compris les très pauvres, il a de fait changé le pouvoir de négociation à l'intérieur du pays - en effet si vous avez un mouvement libre du capital et que vous essayez de taxer le capital, ce dernier vous dit "nous partons". C'est symbolique, mais c'est quand même plus que symbolique : cela affecte l'avenir en fait ». Interview de Joseph Stiglitz, ex-économiste en chef de la Banque mondiale diffusé par la télévision allemande le 13 mai 2002. Sonia Mikich (SM): Chaque jour 1.5 millier de milliard de US-Dollars - c'est le chiffre que j'ai lu quelque part sur le web - sont échangés sur les marchés spéculatifs de par le monde. Il existe aujourd'hui des appels à la taxation de ces flux. Quelle est votre position ? Joseph Stiglitz (JS): Il y a deux motivations pour introduire une taxe Tobin - qui est le nom d'une taxe sur ce type de mouvements de capitaux : l'une est que nous avons besoin d'une source d'argent pour financer les biens publics globaux. En effet, comme le monde devient de plus en plus intégré sous l'effet de la mondialisation, nous avons de plus en plus de besoins globaux et nous avons des besoins en terme de financement pour lutter contre le SIDA et contre les autres grandes maladies, pour mener la guerre contre le terrorisme, pour créer un meilleur environnement... etc. SM: ...et pour s'occuper de la pauvreté... JS: ...pour s'occuper de la pauvreté dans les pays en développement. La question du développement nécessiterait à elle seule 50 milliards de plus pour que l'on atteigne les objectifs minimums du Millenium. Donc nous avons besoin de revenus supplémentaires pour financer ces besoins globaux. Chacun voit bien que cela profitera à tous, je pense. Et nous n'avons pas ces revenus actuellement. Aujourd'hui, nous sommes dans une situation où les USA peuvent prendre en otage le reste du monde. Les Etats-Unis ont décidé qu'ils n'aimaient rien de ce que les Nations Unies aiment, alors ils ne payent plus leur écot. C'est une façon intolérable de gérer un problème dans un environnement international. La Taxe Tobin est une façon de lever des revenus supplémentaires. Je pense que la Taxe Tobin a une valeur symbolique très forte ! Ce qu'elle souligne, c'est que durant ces dernières années les marchés financiers ont dirigé le monde. Les marchés financiers ont généré de grandes instabilités. Le mouvement libre du capital n'a pas seulement apporté une instabilité à un coût énorme pour les gens des pays concernés, y compris les très pauvres, il a de fait changé le pouvoir de négociation à l'intérieur du pays - en effet si vous avez un mouvement libre du capital et que vous essayez de taxer le capital, ce dernier vous dit « nous partons ». C'est symbolique, mais c'est quand même plus que symbolique : cela affecte l'avenir en fait. Ce qui est important c'est que dans la proposition même de la taxe Tobin, l'argent généré doit servir à financer des biens et des services publics. C'est donc plus que symbolique. C'est une reconnaissance que dans cet environnement instable nous avons besoin d'une action collective à un niveau global. Et si nous voulons une action collective au niveau global, alors nous avons besoin de revenus. Nous avons besoin de ressources pour le développement, pour aider les pauvres, pour attaquer la pauvreté, pour corriger les problèmes mondiaux de la santé, pour corriger les problèmes environnementaux. Nous ne les avons pas encore aujourd'hui, ces ressources, et c'est pourquoi la taxe Tobin réalise deux objectifs en même temps: d'une part elle fournit les moyens de s'attaquer à ces très importantes questions à un niveau mondial, d'autre part elle apporte une réponse au déséquilibre associé aux mouvements libres de capitaux qui ont créé tant de dégats de part le monde. SM: Les partisans de cette taxe disent eux-même qu'elle ne peut être qu'une partie d'un mécanisme global- En effet, seule elle ne peut pas grand chose car, comme vous l'avez souligné, il y aurait alors beaucoup trop d'échappatoires - mais à votre avis, l'Europe est-elle une entité suffisamment grande pour commencer ? JS: Oh oui ! Mon point de vue sur la question est que, par opposition aux taxes sur des choses utiles, même si elle ne réussit pas complètement à stabiliser les marchés financiers, c'est une taxe qui ne peut pas nuire. Vous savez si vous découragez quelques spéculateurs, le monde n'ira pas plus mal. L'efficacité mondiale n'en sera pas affectée. Ce que l'Europe doit craindre, si elle n'arrive pas à établir une coopération au-delà de ses frontières, c'est que les transactions migrent off-shore, hors de l'Europe. Il est donc important que la taxe touche toutes les transactions de résidents européens quel que soit l' endroit où elles se déroulent. Il faut que cela soit une taxe qui concerne le lieu de résidence et non le lieu de transaction. C'est très différent de ce qui se passe actuellement en terme de taxation. C'est pourquoi je dis que la question importante est la suivant : pouvez-vous la mettre en pratique ? Je pense que c'est là un problème technique. SM: technique ou politique ? JS: Et bien, technique ET politique. Peut-on faire une loi qui ne peut pas être contournée ? Ma principale réserve est que l'application de la taxe aux produits dérivés et aux options semble être très délicate et difficile à réaliser. Je pense que ces problèmes ne sont pas du tout impossible à résoudre mais qu'une réflexion supplémentaire est nécessaire. Les financiers sont très imaginatifs dès qu'il s'agit de contourner les taxes. J'ai pu m'en rendre compte lorsque j'étais à la Maison Blanche. Je ne veux pas une taxe symbolique. Je veux une taxe qui marche.
Interview par Sonia Mikich, publié sur le bulletin Grain de sable de l'Association pour la taxation des transactions financières pour l'aide aux citoyens (ATTAC)
Traduction : Mathieu Capcarrère. Traducteurs bénévoles (coorditrad@attac.org)
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