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Quel changement propose donc l’ADQ(EMD) ?

jplarche, Jueves, Junio 20, 2002 - 00:21

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Mario Dumont disait en conférence de presse, un peu avant les élections partielles que le site internet de l’ADQ avait de plus en plus de visites depuis qu’on attaque son programme. Il veut dire que les Québécois qui ont internet vont voir son programme, le lisent et se disent : oui, je vais voter pour Mario Dumont.

Ce «séisme» adéquiste est très préoccupant… Enfin, pour les pauvres, les travailleurs, surtout les syndiqué-es ! Pour les vieux aussi. Mais pas pour tout le monde, bien entendu.

L’Action démocratique du Québec (Équipe Mario Dumont) et son chef, Mario Dumont, ont le vent dans les voiles. Mais, comme péquistes et libéraux l’ont vite réalisé, on aurait tort de démoniser la vieille nouvelle formation politique du Québec.

Il est manifeste que son programme politique est largement inspiré des idées de la droite nord-américaine mais il a le mérite de comporter des propositions nouvelles aux yeux des Québécoises et des Québécois. Le concept de droits d’émission de gaz à effet de serre, par exemple. Des droits de polluer en bon texan. Là réside probablement la raison principale de cet engouement soudain.

Ce qui est écrit dans le programme est vertueux et prometteur. Ce qui n’y est pas soulève de grandes questions.

Mario Dumont souligne que son programme est en constante évolution et qu’il sera revu au cours de l’assemblée démocratique du parti, cet automne. Mario et son équipe auront tout ce temps pour répondre aux questions.

L’exemple du travail
Un gouvernement adéquiste, s’il appliquait son programme tel quel, lancerait probablement une guerre de classes à la grandeur du Québec. On se rappelle les images de l’Italie, il y a quelques semaines, lorsque Sylvio Berlusconi a tenté d’imposer reculs semblables. Bien sûr, un programme, ça reste un programme ( ça les vieux partis ont tout fait pour qu’on s’en rappelle !). Celui de l’ADQ s’attaque sans détour aux acquis des travailleuses et des travailleurs québécois. Obtenus de haute lutte par le passé, ces gains expliquent la relative paix sociale qui règne sur le Québec depuis au moins deux décennies. L’ADQ semble totalement mettre de côté l’hypothèse d’un chaos dans les relations de travail au Québec.

Le chapitre sur le marché du travail du programme adéquiste comporte sept « paquets » de propositions. Les buts vertueux de l’ADQ sont :

de favoriser l’accès équitable des jeunes au marché du travail ;

de prendre acte des nouvelles réalités du marché du travail ;

de donner un nouveau souffle à la fonction publique ;

de réformer le Code du travail.

Soulignons d’abord que ces grands enjeux d’actualité répondent à des préoccupations réelles de la population. Reconnaissons que l’ADQ vise juste avec de tels thèmes. Ces débats auraient dû se faire au sein de la gauche depuis des lustres.

Dynamiser les pratiques syndicales (sic)
Pour dynamiser les pratiques syndicales, l’ADQ veut les bouleverser sensiblement. Avec Mario Dumont comme premier ministre, les travailleuses et les travailleurs pourraient dorénavant adhérer individuellement à l’organisation syndicale de leur choix ! L’ADQ veut briser ce qu’elle appelle les «monopoles syndicaux». Le programme précise que c’est pratique courante ailleurs dans le monde. C’est vrai mais le Québec est justement le seul endroit en Amérique du Nord où il y a une telle diversité syndicale ! Quel monopole veut-il briser ? Celui exercé par les centaines de syndicats du secteur de la santé ?

De toute façon, c’est ouvrir une jolie boîte de Pandorre. Qui va négocier ? Quel groupe de salariés va décider du projet de convention collective ? Les employé-es qui auront librement choisi d’adhérer aux organisations minoritaires auront-ils voix au chapître ? Ce n’est pas dans le programme de l’ADQ qu’on va trouver réponse. Cette volonté de «briser les monopoles syndicaux» fait inévitablement sourire alors que Mario Dumont dénonce sur tous les tons le trop grand nombre de conventions collectives au futur CHUM !

Animée par sa mission de défendre les jeunes, l’ADQ veut également instaurer une cotisation syndicale à géométrie variable : selon sa proposition, les permanents devraient payer un pourcentage de leur salaire plus élevé que les plus jeunes. Une mesure qui paraît équitable. Enfin, elle le serait si les syndicats étaient responsables de la précarisation croissante du travail… Or le programme de l’ADQ ne comprend aucune mesure concrète pour contrer ce phénomène.

Une autre proposition de l’ADQ va dans le même sens : rembourser 60 pour cent de sa cotisation syndicale totale à un nouvel employé qui n’a pas réussi sa période de probation, et ce sans condition !

L’Équipe Mario Dumont a raison de proposer d’éradiquer ce « marché du travail à deux vitesses » mais il n’est pas le seul à le proposer.

L’Union des forces progressistes (UFP), par exemple, fait plus simple, :
37 q. … accorder les mêmes droits et conditions à toute personne salariée, quel que soit son statut d’emploi (temps plein, temps partiel, occasionnel, sur appel, etc.)
Trop simple même ! Sauf que l’UFP vient de terminer son congrès de fondation. Faut leur donner une chance…

L’ADQ propose également de faciliter le recours à la sous-traitance par une révision de l’article 45. Dans les chapitres sur l’administration publique, la santé et l’économie du savoir, notamment, on explique à quoi cette légère modification permettrait de rêver.

La fonction publique
L’ADQ souligne avec justesse que les jeunes sont fortement sous représentés au sein de la fonction publique et qu’un renouvellement de la main-d’oeuvre s’impose. Ce renouvellement doit se faire progressivement afin de permettre un transfert des connaissances. Ainsi, l’ADQ propose un programme de départs volontaires, de favoriser le transfert de connaissance en encourageant le partage entre jeunes et vieux et de cibler l’embauche de nouveaux fonctionnaires en priorisant ceux qui ont peu ou pas d’expérience dans leur domaine de compétence.

L’ADQ veut aussi mettre un terme au phénomène des faux-stagiaires, des faux-occasionnels et des faux-contractuels dans la fonction publique, qui constitue une véritable abbération. Toutefois, elle ne propose rien qui vaille pour lutter contre ce phénomène répandu partout au Québec, comme si c’était là le lot unique de la fonction publique.

L’ADQ veut aussi mettre fin à la règle d’ancienneté, sans préciser ce qu’elle entend par compétence et nécessité de perfectionnement. Son gouvernement idéal instaurerait aussi des primes au rendement.

On suppose que les militants adéquistes s’attendent à ce que l’Équipe Mario Dumont négocie ces arrangements «mineurs» en même temps que la décentralisation des fonctionnaires.

En effet, l’ADQ voudrait envoyer des fonctionnaires en région.
Par exemple, cette sous-proposition en caractères gras citée hors contexte puisqu’elle est tirée du volet «développement régional» et non «marché du travail» :

Un gouvernement de l’ADQ assurera des conditions efficaces et équitables quant au transfert de fonctionnaires sous la direction de l’autorité régionale
dans des proportions correspondantes aux responsabilités que les régions choisissent d’assumer.

Les clauses orphelin
Les clauses orphelins sont un cheval de bataille de l’ADQ depuis longtemps. La réponse législative des péquistes a été assez timide. Les jeunes sont encore discriminés à plusieurs égards par rapport aux plus anciens. Seulement, là où le bât blesse, c’est lorsque l’ADQ pointe du doigt les anciens en leur faisant porter l’odieux de « protéger certains acquis sur le dos des nouveaux travailleurs ».

Ce que le parti de Mario Dumont ne semble pas avoir encore compris c’est que les patrons sont au moins autant responsables de l’introduction de telles clauses. Ce sont eux qui ont refusé et refusent encore d’accorder aux nouveaux employé-es les mêmes conditions qu’aux plus anciens. Bien entendu, les syndicats n’auraient jamais dû fermer les yeux sur l’introduction de telles clauses discriminatoires. Mais il reste que l’ADQ se trompe de cible et que la loi qu’elle promulguerait à ce sujet laisse craindre une intervention inappropriée dans le processus de négociation collective qui pourrait faire basculer le rapport de force : les jeunes maudiront l’ADQ lorsqu’ils seront vieux.

Be your boss
À la lecture du programme de l’ADQ, l’élection de Mario Dumont serait la panacée pour les travailleuses et travailleurs autonomes. Le parti veut attirer ceux-ci dans ses rangs en leur faisant miroiter une loi-cadre sur le statut des travailleurs autonomes qui leur garantirait certaines des protections sociales dont jouissent les autres travailleurs, notamment l’accès à un plan d’assurance collective privé. Il entend également modifier le code du travail et la fiscalité pour les adapter à leur réalité. L’ADQ mettrait aussi en place diverses mesures qui faciliteront l’accès des Québécoises et Québécois au statut de travailleurs autonomes.

Qu’en est-il des faux travailleurs autonomes tels les éducatrices en milieu familial, les ressources de type familial et toute cette panoplie de travailleurs dits autonomes, mais en réalité totalement dépendants fiancièrement de l’État qui leur a refilé de vieilles et de nouvelles responsabilités ? Ils luttent depuis des années (le gouvernement les traîne d’appel en appel) pour faire reconnaître leur droit de se syndiquer et de négocier des conditions de travail acceptables. L’ADQ n’en souffle pas un mot.

Pas plus que sur les camionneurs, les planteurs d’arbre, etc. Rien non plus pour favoriser l’accès des travailleurs autonomes à des négociations regroupées, seul moyen durable d’améliorer leur condition.

Enfin, l’ADQ mettra tout en place pour favoriser le démarrage d’entreprises créatrices d’emplois, particulièrement des PME. La philosophie adéquiste, en somme, c’est créez votre emploi ; fondez votre propre compagnie !

Faites comme le demande Mario aux journalistes et allez lire son programme :

http://www.adq.qc.ca/actualites/index.html

Enfin, je vous laisse sur cette proposition de Charte de l’innovation dont le choix des mots a de quoi laisser perplexe

En se dotant d’une Charte de l’innovation, un gouvernement de l’ADQ mobilisera tous les intervenants pour qu’ils puissent pleinement contribuer
à l’émergence d’une nouvelle prospérité dans le contexte de l’économie du savoir et du savoir-faire et ce, en identifiant les rôles et responsabilités
suivants :

a) l’État devra mettre à la disposition des réseaux d’entreprises une infrastructure technologique permettant la veille et l’échange d’informations sur l’ensemble du territoire du Québec ;

b) l’État devra concentrer son intervention tant financière que conseil auprès des entreprises, en appuyant les initiatives novatrices des
réseaux dans les secteurs de la recherche, du développement, de la mise en marché et de l’intégration des nouvelles technologies ;

c) l’État développera un indice d’innovation afin de mesurer l’impact des investissements en ce domaine;

d) les entreprises auront la mission de nourrir le réseau d’informations et d’expériences pertinentes qui viendront améliorer la compétitivité du Québec ;

e) les entreprises devront mettre en place des initiatives de tutorat afin de transmettre les connaissances de l’entreprise aux nouvelles
générations de travailleurs ;

f) les travailleurs auront la mission de saisir les opportunités de formation et de participer activement par leur savoir-faire à l’émergence d’une culture d’innovation ;

g) les travailleurs devront participer activement à l’amélioration continue des processus dans la souplesse et la flexibilité qu’impose l’atteinte de
l’innovation.



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