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L'occupation est la cause fondamentale et profonde de toutes les violations et injustices!

gabrielgbernier, Viernes, Abril 5, 2002 - 01:19

Hanan Ashrawi

Allocution prononcée par le docteur Hanan Ashrawi au nom du président palestinien, Yasser Arafat, à la 58e session de la Commission des droits de l'Homme, le 26 mars 2002 à Genève.

L'occupation est la cause fondamentale et profonde de toutes les violations et injustices!

Monsieur le président, je me permets de vous transmettre ma profonde appréciation à vous et au défendeur mondial indomptable des droits humains, la Haut Commissaire Mary Robinson, dont l'intégrité et l'enthousiasme ont établi des normes élevées pour ce bureau. Sa franchise, sa ténacité, son indépendance d'esprit et son engagement résolu ont atteint les coins les plus sombres du globe avec ce cadeau rare qu'est la promesse de secours et d'espoir. Nous regrettons tous sa décision de ne pas renouveler son mandat mais restons confiants que, en quelle que qualité que ce soit, elle continuera de faire la différence.

Je me permets également de présenter mes respects aux membres distingués de la commission, cette assemblée qui collectivement représente la conscience du monde et les gardiens des personnes réduites au silence et des victimes, des ignorés et des opprimés, des exclus et des marginalisés. C'est pour moi un honneur qui me touche profondément d'être présent parmi vous et de pouvoir discuter de la situation critique du peuple martyr palestinien qui aspire à la liberté, la dignité, l'indépendance et la paix dans le monde et dans l'ensemble de la région.

Permettez-moi également d'exprimer notre appréciation de la déclaration du 13 février 2002 de la Haut Commissaire sur la situation des droits humains au Moyen-Orient, du rapport du rapporteur spécial, monsieur John Dugard, dont les recommandations forment un plan fiable d'action pour votre commission et des commentaires du secrétaire général des Nations unies qui se distinguent par leur force morale et le courage des convictions. De plus, nous reconnaissons le travail inestimable entrepris par le bureau de la Haut Commissaire dans les territoires palestiniens occupés, notamment le programme sur la primauté du droit, et je voudrais insister sur l'urgence d'élargir le mandat et les activités de ce bureau. Nous restons confiants que le point de convergence et l'orientation de ces efforts combinés porteront fruit et allégeront le fardeau du peuple palestinien en redressant les torts dont il est victime continuellement.

Monsieur le président, je m'adresse à vous le coeur lourd de la douleur d'une nation en captivité, d'un peuple privé de ses droits les plus élémentaires, des libertés fondamentales, privé de la protection du droit international tant individuellement que collectivement.

Languissant sous la dernière occupation militaire de l'histoire, le peuple palestinien est assiégé, bombardé, assassiné et terrorisé par tous les moyens possibles. Nos terres, nos maisons, nos récoltes, nos arbres, notre infrastructure, notre économie, le tissu même de nos vies sont tous devenus la cible des attaques militaires israéliennes continuelles. La violence effrénée, délibérée contre une nation déjà assiégée et en captivité dépasse toutes les formes de châtiment collectif pour entrer dans le domaine de l'application brutale d'une politique cruelle et immorale, d'un moyen actif de coercition, une forme préméditée d'infliger des souffrances.

En essence, mesdames et messieurs, nous avons été systématiquement violés au plus profond de notre être, dans nos vies et notre dignité en tant qu'êtres humains, dans nos maisons en tant que refuge, dans nos moyens de subsistance en tant que moyens de survie, dans nos services de santé et d'éducation en tant que droits fondamentaux, dans notre liberté de mouvement en tant que condition fondamentale de la vie, dans notre identité nationale en tant qu'expression de notre droit à l'autodétermination. Notre espace humain a été envahi et nous est refusé, réduit à la trajectoire d'une balle de fusil, d'un obus de char, d'hélicoptère Apache, de F-16 qui frappent dans nos chambres à coucher, dans nos écoles, nos jardins et dans les autres lieux où nos corps vulnérables de chair cherchent refuge.

Rabaissé au niveau de statistiques abstraites, les Palestiniens ont été systématiquement déshumanisés et leur vie dévaluée. Les 1 246 victimes assassinées, dont 435 enfants, depuis le 28 septembre 2000 sont toutes des personnes ayant leur identité, leurs proches, leurs espoirs et leurs rêves. Chacune est unique et irremplaçable. Les 18 488 blessés, dont la moitié environ sont des enfants, devront vivre avec ces cicatrices et ces invalidités pour le reste de leur vie. Nombreux sont ceux qui demanderont des soins spéciaux, une attention et des ressources qui pèseront sur l'ensemble des familles et des communautés pour les générations à venir.

Toutes les morts violentes sont tragiques mais la cruauté est aggravée par la mort gratuite et inutile des blessés à qui on a refusé des soins médicaux. La plupart sont morts vidés de leur sang parce que l'on a refusé le passage aux ambulances et au personnel médical ou qu'ils ont été la cible de tir et de bombardements alors qu'ils allaient fournir leur aide vitale.

On veut effacer notre histoire et les témoins sont réduits au silence. Au cours des dernières incursions dans les villes, villages et camps palestiniens, l'armée d'occupation israélienne a visé les membres de la presse (un journaliste italien a été tué et plusieurs journalistes blessés); elle censure même la presse en Israël. Plus de 50 journalistes étrangers et palestiniens ont été blessés et quatre tués au cours des derniers dix-huit mois. L'ignorance délibérée et la censure imposée sont les ennemis de la vérité et de la justice, et, en dernière analyse, servent à prolonger le conflit tout en sapant les perspectives de paix véritable.

Nous ne sommes pas un «problème démographique», comme l'idéologie raciste dominante dans certains cercles israéliens tente de nous faire passer, qui menace la majorité juive ou la pureté de l'État d'Israël. Nous somme le peuple de la terre de Palestine qui possède une continuité historique, culturelle et humaine qui constitue l'ensemble de notre mémoire collective et de nos aspirations pour l'avenir. Notre société a toujours été une société d'inclusion et de pluralité possédant une puissante tradition de tolérance et d'hospitalité.

L'État que nous avons l'intention d'édifier non seulement conservera ces principes mais les renforcera de nouvelles valeurs et réalités mondiales pour engendrer un plan humain général de développement enraciné fermement dans la pratique d'une démocratie active et l'état de droit comme conditions essentielles du bon gouvernement. Un tel État de Palestine indépendant, souverain, viable et démocratique est non seulement un droit et une rédemption des injustices du passé, c'est un engagement et un investissement dans l'avenir. Jérusalem arabe est au centre d'une réalité humaine revitalisée où convergeront toutes les valeurs, cultures, religions et espérances.

La tragédie et l'ironie sont que le gouvernement israélien actuel semble tourné vers la régression au sionisme intégriste. Cependant le nettoyage ethnique perpétré contre le peuple palestinien en 1948 ne doit pas et ne se répétera pas. Le mythe «d'une terre sans peuple pour un peuple sans terre» a été renversé définitivement. Il est impératif de reconnaître le compromis historique de la solution de deux États, une solution qui établira l'État de Palestine sur 22% de notre patrie historique (la Cisjordanie, y compris Jérusalem Est, la bande de Gaza, soit les territoires occupés par Israël lors de la guerre du 5 juin 1967). L'État d'Israël aura alors des frontières définies comprenant 78% de la Palestine historique, soit les lignes de 1967 qui constitueront «les frontières reconnues et sûres« que demande la communauté internationale conformément aux résolutions pertinentes des Nations unies, la plus récente et la plus exécutoire étant la Résolution 1397 du Conseil de sécurité.

Il n'est pas fortuit, monsieur le président, que les camps de réfugiés sans défense et vulnérable aient essuyé le plus fort des plus récents raids et incursions d'Israël. Dépossédés, expulsés et dispersé, les réfugiés palestiniens restent l'incarnation humaine incontestable de la grave injustice historique commise contre le peuple palestinien. Privés des plus simples refuges dans les conditions sordides des camps de réfugiés, ils étaient sans défense devant les chars qui ont démoli leurs maisons, détruit l'infrastructure squelettique et semé la mort violente chez leur proches. Il est donc impératif que tout accord de paix comprenne une solution juste et légale à la question des réfugiés conformément à la résolution 194 des Nations unies et aux autres résolutions antérieures portant sur le déplacement forcé des populations en temps de guerre et de conflit armé.

La même chose s'applique à la question de la terre, particulièrement si nous voulons appliquer la primauté du droit international, du droit humanitaire international et de la 4e Convention de Genève au territoire palestinien occupé. Doivent cesser immédiatement toutes les formes de confiscation de la terre, d'annexion et d'activité de peuplement, sous quelque prétexte que ce soit. En particulier, il faut sauver Jérusalem de l'action unilatérale préjudiciable, de la cupidité et des acquisitions. Nous, en tant que Palestiniens, avons soutenu avec conséquence l'application des résolutions des Nations unies et le respect de la légalité internationale comme étant la base de tout accord et le cadre d'une solution juste.

De plus, et cela depuis la convocation de la Conférence de Madrid, l'OLP et l'Autorité nationale palestinienne ont accueilli toutes les initiatives et interventions faites pour trouver une solution pacifique et juste au conflit, y compris la récente initiative saoudienne qui est discuté au sommet de la Ligue arabe. Nous avons demandé à maintes reprises des observateurs internationaux et collaboré à toute participation d'un tiers.

Malheureusement, monsieur le président, la dynamique fatale et tragique de l'occupation a prévalu, menace d'échapper à tout contrôle et de plonger l'ensemble de la région dans une nouvelle période d'instabilité et de violence. Alors que le monde arabe a annoncé son engagement stratégique envers la paix, nous sommes témoins d'une mentalité dépassée et anachronique chez les partisans extrémiste de la ligne dure au sein du gouvernement israélien qui est atteint de l'illusion que la supériorité militaire est suffisante pour réclamer des droits supérieurs. Toute tentative de diaboliser, d'humilier et de violenté les Palestiniens (et l'ensemble des Arabes) non seulement est vouée à l'échec mais se retournera contre Israël.

Malgré les souffrances et le deuil, nous n'avons jamais accepté ou «normalisé» le meurtre de l'innocent. Et même si nos civils innocents sont tués avec impunité, nous avons sans cesse déploré toute tentative qui vise des civils ismaéliens. Monsieur le président, l'occupation nous tue tous!!! Au lieu de s'attaquer à cette récente violation et atrocité, de lieu sans cesse blâmer et écraser les victimes, au lieu de réduire les efforts de la communauté internationale à une gestion de crise et à un contrôle des dommages et au lieu d'essayer de trouver des remèdes aux symptômes, je vous appelle à vous attaquer aux causes fondamentales, au mal fatal lui-même. Ce mal est la notion immorale et erronée qu'un État peut dicter sa volonté à une autre nation par la force des armes, que au troisième millénaire une situation coloniale d'asservissement puis continuer d'exister, que la volonté du peuple palestinien peut être asservie et brisée par la brutalité et le carnage ou que des valeurs différentes peuvent être appliquées à la vie aux droits d'un peuple sur la base de la religion, de l'origine ethnique ou de l'identité nationale.

Il est temps, monsieur le président, de parler courageusement du problème du terrorisme; les acteurs étatiques et non étatiques doivent être tenus responsables de leurs actions lorsqu'ils commettent des actes de violence et des violations contre des civils innocents dans le but d'atteindre des gains politiques. Personne, individu, organisation ou nation, ne doit être l'otage du programme violent d'autrui. Au même titre, définir le terrorisme et identifier les terroristes ne peut jamais être le monopole du plus fort ou de l'exercice unilatéral du pouvoir de la force dominante. Le subjectivisme et l'intérêt ont souvent teinté les efforts de protéger l’innocent en attribuant des étiquettes faciles et en lançant des accusations stéréotypées qui souvent ne servent qu'à déformer les problèmes et à empêcher d'y trouver des solutions. Les critères objectifs, les preuves irréfutables et les instruments universels doivent servir à instaurer l'état de droit international sur la base de la justice et de la parité.

Pour terminer, monsieur le président, nous sommes sans doute les otages d'un siège physique brutal mais la volonté et l'esprit humains ne peuvent jamais être assiégés ou dégradés. Nous pleurons également toutes les pertes de vie et de droits et nous cherchons à libérer tant l'oppresseur que l'opprimé de cette situation anormale et fatale de l'occupation. Alors que nous vous engageons à intervenir, a envoyer vos observateurs, a rassembler et diffuser les vrais faits, à appliquer toutes les lois et conventions pertinentes et à adopter vos propres résolutions pro- actives, nous vous demandons de ne pas perdre de vue que l'occupation elle-même est la cause la plus générale et la plus pénétrante de toutes les violations et injustices. En fin de compte, sur une paix juste apportera une solution complète et sur cette paix peut devenir l'expression véritable du droit ultime de l'humanité, le droit à une vie de qualité alimentée par la sécurité humaine, la dignité et la liberté.

-Tiré du Le Marxiste-Léniniste Quotidien no.62 2 avril 2002, quotidien du Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste)

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