Mon experience à Asuncion
ce que j'y ai vu
8 mars, etc.
Mouvements sociaux au Paraguay
Petit pays enclavé au centre de l’Amérique du Sud, le Paraguay est un pays dont on entend peu souvent parler. À peine 5 millions d’habitants (et la plus grande ville n’en a qu’un demi-million) intégrés au Mercosur, marché insignifiant mais plaque tournante de toute la contrebande du continent.
C’est un peu grâce à une suite de hasards un peu tordue que je m’y suis retrouvé, il y a un peu moins de deux semaines. Depuis mon arrivée, je m’efforce de découvrir la situation du pays et des forces sociales existantes. C’est probablement le seul endroit en Amérique Latine dont je n’ai aucune idée d’un passé révolutionaire quelconque et dont mes connaissances se limitent à la longue dictature de Stroessner et à l’époque ‘glorieuse’ du Plan Condor.
En ce lieu où tout semble ‘plus petit’, les mouvements sociaux existent mais évidemment avec une importance réduite. Bien qu’Internet soit accessible, nul ne doute que seul une minuscule partie privilégiée en profite. Ainsi, j’ai remarqué un certain isolement des petits groupes comparativement au Brésil. Les ‘contacts’ avec l’ extérieur m’apparaissent assez pauvres, tant quantitativement que qualitativement. Bien sûr, les grandes organisations syndicales et paysanes (qui étaient présentes au FSM) sont en contact formel avec leurs alliés du Brésil ou d’ailleurs, mais au niveau des groupuscules autonomes (et nécessairement plus radicaux) il n’y a presque rien. Les vieilles tendances gauchistes (Staliniens, trotskistes...) sont toujours présentes et en lien avec leurs camarades du reste du monde, mais inversement, les nouveaux courants et ceux qui ressurgissent un peu partout, comme l’anarchisme, ont de la difficultés à y parvenir et demeurent très isolés. Il y a tout de même quelques expériences intéressantes du côté des radios communautaires, comme la Radio Rebelde, un projet assez récent et autogéré par une vingtaine de jeunes. Mais ici, on ne sait rien d’Indymedia (plus maintenant!), de l’Action Mondiale des Peuples et des autres réseaux en formation tout autour du globe.
Malgré cela, il y a des gens qui résistent bien qu’ici aussi il y a un État qui réprime. Le 2 mars dernier, une manifestation s’est organisée pour dénoncer la séquestration et la torture par la police de 2 dirigeants du mouvement marxisant Patria Libre. Un rassemblement a eu lieu devant la maison où avaient été retrouvés les 2 militants quelques jours auparavant. Peu de gens y étaient, une soixantaine de personnes tout au plus, mais on y criait des discours et chantait des slogans avec une passion et une énergie rageuse comme on ne peut en voir dans le Nord-Est de l’Amérique.
Plus intéressante fut la marche du 8 Mars, journée des femmes. Entre 700 et 800 personnes (au 2/3 femmes) se sont rassemblées au couché du soleil sur la Plaza Italia, avant de commencer la marche de nuit. Initialement, le rassemblement devait avoir lieu sur la Place du Gouvernement, mais au premier signe négatif des autorités, les organisatrices ont décidé de changer le lieux de rendez-vous. Leur attitude est loin d’être confrontationelle et comme elles ont une sorte de contrôle absolu sur la foule, il n’y a pas eu discussion. Les organisations officielles derrière cet événement étaient principalement la CONAMURI (Coordination nationale des femmes rurales et indigènes), la CMP (Coordinacion de mujeres campesinas) et 2 ou 3 autres grandes organisations officielles, plus ou moins amies de l’État.
Tout au long de la marche, jusqu’à ce qu’elle aboutisse à la Place des Disparus, une toute petite femme en jaune, probablement Guaranie, s’époumonnait fortement, sans peur devant les rangées de policiers anti-émeutes. Malgré sa taille minuscule, cette femme, Maggy Balbuena, porte parole du CONAMURI, prenait vraiment toute la place. Je me rapelle l’avoir vu (et entendu!) également à la manifestation du 2 mars.
Bien que je n’ai pas trouvé à Asuncion un grand foyer de résistance populaire, je remarque que tout est en construction ici et que l’état des choses ne peut que s’améliorer au cours des prochaines années. En effet, les luttes locales n’ont pas encore de racines, contrairement aux pays voisins, car pratiquement aucune base n’a survécue aux 35 années de terreur qui se sont achevées en 1989.
Alors que l’isolement du Paraguay rétrécit de jour en jour, l’espoir, lui, ne fait que grandir.
Denis Valiquette
Asuncion, Paraguay
11 mars 2002
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