Une vallée. Non loin de Ramallah, la végétation y est luxuriante, l'endroit est pour le moins paisible, bref en quelque sorte un petit coin de paradis.

Sous un soleil splendide et agréable, nous nous enfonçons dans la vallée, au-delà du village de Dura Alqri. Le chemin est étroit, à droite la colline, à gauche des champs cultivés et prometteurs.

Et puis au fond s'ouvre un espace, il y a là une des sept sources de cette vallée qui va de Ofrah à Beit El. Deux femmes y lavent des radis fraîchement récoltés. On a envie de s’installer au soleil, de prendre le temps d’écouter le chant des oiseaux, le bruit de l'eau qui coule… Seulement voilà, il y a un point noir dans le paysage.

On l’aperçoit en levant la tête : en haut, au sommet d’une des collines qui entourent la vallée se trouvent quelques maisons. Les gens qui y habitent ne sont pas des Palestiniens et pourtant nous sommes en plein cœur de la Cisjordanie. Ces maisons sont habitées par des colons. Que font-ils ici ? On se le demande...

L'implantation de cette colonie au milieu de villages palestiniens est partie intégrante d’un plan calculé et quasi chirurgical d'occupation et de colonisation des terres palestiniennes par les Israéliens. Un plan stratégique et tellement limpide quand on y regarde de plus près, composé de quadrillages et de parcellisation des territoires occupés, un plan d'isolement des Palestiniens destine à insulariser de plus en plus chaque village palestinien.

Dans cette zone que les Israéliens veulent leur, ils comptent construire une route de contournement pour relier deux colonies, sorte de saignée au cœur de cette vallée paradisiaque.

Un véritable crime écologique si l'on y regarde de plus près puisque la construction de cette route va rendre les terres incultivables et anéantir toutes les ressources en eau non seulement sur son parcours mais aussi sur 40 mètres de large de chaque coté.

En effet, cette voie inutile puisqu'il existe déjà d'autres moyens d’accès utilisés par les Palestiniens (qui n'auraient d'ailleurs pas l'autorisation de l'emprunter), anéantirait les sources d'eau naturelles et ferait aussi barrage aux eaux qui coulent du haut des collines en hiver.

En bref ce projet de route de contournement est scandaleux. Il a pour conséquence la destruction de 7 sources d'eau et des terres cultivables pour 200 fermiers et la démolition des maisons d'un camp de réfugiés qu’elle doit traverser. C’est une violation du droit à la terre et du droit à l'eau, il est une menace sur l’écosystème.

L’Autorité palestinienne avait, elle, pour projet de réaliser dans la région une zone d'écotourisme, mais désormais l’idée est bien lointaine.

Et le grand paradoxe dans cette histoire est que cette zone est considérée et même classée, à juste titre, comme réserve naturelle est une zone C, c'est à dire sous contrôle palestinien, comme toutes les réserves naturelles, un classement destiné à priori à les protéger !!!

Cette initiative israélienne, le Jerusalem Legal Aid and Human Center avec le concours d'un de ses avocats basés à Ramallah, entend le faire reculer autant qu'il le pourra.

Le Jerusalem Legal Aid and Human Center est un centre d’aide juridique pour s’opposer aux lois et dispositions légales sur lesquelles s'appuient les Israéliens pour imposer les colonies et les routes de contournement par la force et par les chars. Et démontrer qu'elles sont en totale contradiction avec les lois internationales,

Nous allons lancer une campagne internationale pour faire avorter ce projet criminel.

Le Jérusalem Legal Aid a donc déposé une objection auprès de la Cour militaire (il faut savoir que, à partir de 1967, les militaires se sont arrogés le droit de régler les affaires civiles et de propriété).

Cette objection consiste à prouver que la terre vous appartient depuis au moins 6000 ans...

Quels sont les espoirs de tels recours ? Obtenir des délais, modifier les plans, faire jurisprudence.

Il y a urgence à se mobiliser sur la question.

Nous donnerons plus de détails sur les moyens de cette mobilisation dans les prochains jours.

Les travaux doivent commencer très prochainement. L'objection déposée devant la cour militaire, la pétition et la mobilisation palestinienne sur le sujet, peuvent tout au plus faire reculer les travaux de 3 à 6 mois.

Après cette visite dans la vallée, un petit tour a l’Université de Birzeit, fort réputée mais dont les étudiants qui viennent tous les jours de Jérusalem ou de Ramallah ont de plus en plus de difficultés à atteindre.

En effet avec l'Intifada et plus particulièrement depuis 7 mois, ils mettent 3 heures pour arriver à leur lieu d’étude.

Le check point de Sourda qu'ils doivent franchir est très difficile à passer. Mêmes les ambulances ne peuvent le franchir. Il faut donc y aller à pied. Beaucoup d’étudiants ne sont pas rentrés chez eux depuis les débuts de l'Intifada.

Petite action dans la journée sur ce check point particulièrement dur. Des étudiants se font par ailleurs arrêter régulièrement. Il n’y a même plus de manifestation tellement c'est devenu monnaie courante.

Visite en fin de journée auprès du chef de l’Autorité palestinienne, assiégé à Ramallah, Yasser Arafat. Visite de solidarité auprès d'un chef d'Etat quasiment emprisonné par son agresseur, par son occupant.

Une lueur d'optimisme dans tout ce paysage détruit. Nous apprenons d'abord que 26 % des jeunes approuvent l'appel des 200 réservistes qui refusent d'aller dans les territoires occupés.

Et puis 10.000 personnes ont participé au rassemblement à l'appel des organisations anticolonialistes israéliennes de ce samedi 9 février sous le mot d'ordre : "The occupation is killing all of us". La suite et plus de détails au prochain épisode...