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Le jugement des uns fait l'erreur des autres

vieuxcmaq, Martes, Enero 15, 2002 - 12:00

un commando « Critique immuable » (daemon9@caramail.com)

Le texte qui suit porte sur la déclaration de Jean Chrétien aux Communes, le 16 octobre 2001

« Nos ennemis ont commis une erreur fatale de jugement. Ils ont pris notre liberté pour de la faiblesse. Ils ont pris notre ouverture et notre générosité pour de la mollesse. Ils ont pris nos valeurs pour un manque de fermeté. Nous allons leur donner tort sur toute la ligne » nous dit Jean Chrétien.

Si je ne me trompe pas, nos « ennemis » sont les terroristes ; nos pires « ennemis » ne peuvent être que les terroristes qui terrorisent effectivement. Une fois admis que nos « ennemis » sont les terroristes, il faut se rendre à l'évidence qu'il est difficile de leur reprocher de manquer de jugement. Certains d'entre eux ont un talent certain pour se rendre introuvables - en regard de leur projet, n'est-ce pas là faire montre de tout le jugement qui leur est nécessaire ? Les autres sont morts par choix et déjà au paradis des martyrs. Est-il nécessaire de mentionner que ces derniers, nos pires « ennemis », n'ont aucunement subi leur sort fatal en tant que conséquence de leur mauvais jugement ? Est-il besoin de dire que ces martyrs ont incontestablement accompli leur fin d'une manière qui suppose une ruse à laquelle ne manque aucun jugement ?

Chrétien étonnera toujours : ses déclarations donnent chaque fois l'occasion de ressaisir autrement le réel. En l'occurrence ici, notre premier ministre nous donne l'occasion de réfléchir sur ce qu'est le jugement et de penser comment cette notion peut être rapportée au difficile problème du caractère fantomatique de nos « ennemis », qu'ils soient morts ou vivants. Laissons-nous emporter ; donnons une impulsion spéculative aux aléas neuronaux du cerveau de notre premier ministre.

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Une partie de nos prétendus « ennemis » sont morts et chacun d'entre eux a non seulement réussi sa tâche ultime grâce entre autres à son jugement, mais en tant qu'« ennemi », il est difficile de ne pas lui concéder qu'il a bel et bien gagné sa bataille. On dira que gagner une bataille n'est pas gagner la guerre. Qui contredirait cela ? Mais voilà justement où doit s'arrêter la métaphore de la guerre devenue imprudente s'il faut parler de l'essence du terrorisme et de l'essence de la réponse qu'on doit lui opposer. Est-il juste d'appeler « guerre » le cadre des opérations des martyrs terroristes s'ils gagnent toutes les « batailles » et s'ils sont les seuls à décider quand et où des batailles doivent être menées - en l'occurrence n'importe où et n'importe quand, pourvu qu'elles soient inattendues ? Le terrorisme n'est pas une guerre au sens occidental, et la « guerre contre le terrorisme » ne peut pas non plus en être une. La guerre « guerroie » avec l'intention de dominer. Si cette fin suppose qu'il faille terroriser, la guerre devient terroriste. Quant au terrorisme, il terrorise tout simplement et cela, les terroristes peuvent le vouloir et le perpétuer infiniment.

Gare à nous qui sommes pris avec une bande de crétins qui essaient de nous faire croire que nous sommes en guerre contre les terroristes et qui ont fini par se croire eux-mêmes ! Ils peuvent bien affirmer qu'ils prendront des moyens démesurés - des moyens militaires - pour anéantir les terroristes comme pour les intimider d'emblée. Ils peuvent bien déclarer rhétoriquement qu'ils considèrent l'agression terroriste comme une agression de guerre, mais il est extrêmement dangereux de prétendre marquer des points en bombardant le « Terroristan ». Le pays de la terreur est, en ce moment, la fédération invisible et silencieuse des coeurs haineux contre la puissance dominatrice mondiale, fédération qui n'a pas l'intention de conquérir la très libre Amérique, mais la seule intention de lui faire payer le prix de son insouciance. Ce que l'Amérique ne comprend pas, c 'est que la guerre à l'occidentale n'a rien à voir avec le terrorisme islamiste qui est imprégné de l'esprit immémorial de la vendetta, du rétablissement d'une justice terrestre et non abstraite par la vengeance.

Les pays alliés dans la « guerre au terrorisme » sont les seuls engagés dans des opérations qui sont le fruit d'une sublime erreur de jugement. Et qui, croit-on, devra subir les fatalités de cette erreur ? Ce sont nous qui avons été avertis le plus simplement du monde que cette guerre ne serait pas comme les autres : elle se livre aussi sur le « front interne » ! Rappelons à nos imbéciles d'élus que c'est le seul « front » qui existe pour les terroristes et qu'il est d'autant plus vulnérable que l'on a l'impression de dominer la situation sur le front externe !

La fermeté de nos valeurs démocratiques et la force de notre liberté ne pourront pas grand chose contre le manque flagrant de jugement de nos représentants. Sauvons notre liberté et nos démocraties d'abord en foutant à la porte ceux qui n'ont pas le jugement minimal pouvant contribuer à préserver les gens qui ont à coeur la liberté et la démocratie.

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Il s'agissait de la misson 3 contre l'opération américaine « liberté immuable ».

Ce texte a été écrit par un auteur qui tient à rester anonyme et qui ne doit pas être confondu avec Jean-Robert Sansfaçon. Il oeuvre pour la nouvelle opération de réflexion radicale : « Critique immuable ». N'hésitez pas à vous rendre aux quartiers généraux de la résistance de la raison : http://www.critiqueimmuable.org.

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