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La commune argentine

vieuxcmaq, Jueves, Enero 10, 2002 - 12:00

Marco Rascón (daemon9@caramail.com)

La crise en Argentine est la première d'une économie politique globale et pas seulement d'une politique économique locale. Crise de l'État, des partis, de la transition et de la démocratie électorale.

Voyons voir:

L'étrange disparition du mouvement globalifobique à partir du 11 septembre confirmerait seulement la thèse selon laquelle ce mouvement a triomphé, non pas grâce à ses bannières, mais bien à celles de Bush et au retour des États-Unis au national patriotisme et à l'économie basée sur la production belliqueuse. La lutte contre le terrorisme est simplement une bannière simulée, sorte d'épitaphe où l'on peut lire: "ici repose la globalisation".

Cela confirmerait aussi que les luttes de résistance du Tiers-monde, l'Amérique latine, l'Afrique, l'Asie et tous les pays pauvres, n'étions pas invités aux protestations contre les réunions des élites économiques et financières, car là bas s'exprimait non seulement la vision des marginaux du Premier monde, mais aussi les intérêts des riches tels que les Ross Perot et le nationalisme impérial, affaibli par la même globalisation commerciale et financière et qui pour cela avait une aversion instinctive contre l'immigration venant du sud.

Les bénéfices jumeaux du terrorisme ont permis non seulement l'ascension de Bush et de la droite étasunienne à des nivaux inespérés de popularité, mais aussi de débloquer la production et la vente d'armes, l'implantation de restrictions à l'immigration, la légitimation de la censure, le foisonnement du racisme et la mise au rencard des traités commerciaux. Seulement au Mexique, l'ALENA fut envoyé à la même filière où reposent les traités de Guadalupe, de McLean-Ocampo et de Bucareli, signés dans des contextes d'expansion étasunienne pour ensuite être archivés à la renaissance de leur patriotisme.

Face à tout ceci, il semble que le Tiers-monde n'existe même pas comme champ de questionnement, car le protagonisme légitime en faveur ou contre la globalisation venait seulement des rues des villes du Premier monde.

C'est dans ce contexte que nous vient le premier enseignement du cas argentin: le sud existe bel et bien, ainsi que les peuples et les alternatives. Argentine est maintenant un modèle dans la mesure où elle révèle les limites des transitions politiques sans changement économiques. Argentine reflète la faiblesse des partis de droite, du centre et de gauche, défigurés devant le pragmatisme électorale et leur soumission aux politiques d'austérité du FMI et de la Banque Mondiale.

Le soulèvement des quartiers argentins et la massification de la mobilisation de la classe moyenne avec les marginaux des périphéries reconstruit le tissus social à partir d'une nouvelle vision du pays et de sa relation avec le monde, tout en apportant un effondrement des mites selon lesquels le néolibéralisme serait la voie unique. La politisation accélérée entourant la crise de la stabilité économique remet en question pour toute l'Amérique latine non seulement le schéma économique, mais aussi politique, avec l'exigences de structures qui ne répondent plus seulement aux conditions macro-économiques, mais à la clameur populaire.

Le cas argentin et les mouvements globalifobiques jusqu'à Gêne 2001 sont radicalement distincts, car l'Argentine représente une scène économique et politique qui reflète nos réalités sous-développées, alors que la globaliphobie du Premier monde est, à la rigueur, la décomposition économique du Premier monde, la Tiers-mondialisation de ses condition de vie, mais, avec ses aspirations nationalistes de grande puissance, elle nous rejette.

Une grande partie du contenu antiglobalifobique pourrait être mis en parallèle avec les sentiments allemands contre le Traité de Versailles. D'ailleurs, pourquoi la globaliphobie attrapée dans les pièges idéologiques du 11 septembre n'a-t-elle pas répondue ni s'est prononcée devant la mobilisation populaire en Argentine ou le vent de droite étasunien?

L'Argentine est, d'une certaine manière, une crise de la métropole étasunienne avec l'affaiblissement de toutes les chaînes de subordination. Argentine fut le maillon faible de la chaîne de l'intégration, non pas de ses égaux du Groupe des huit, mais plutôt de ses alliés dépendants et leur sphère néocoloniale. Argentine donne un virage nouveau pour mieux comprendre Cuba et la dimension de sa position; pour comprendre Vénuzuela, lequel arrête d'être une île pour se convertir en une tentative de rupture constitutionnelle par la voie électorale grâce à l'antécédent du "caracazo" qu'a affronté Carlos Andrés Pérez il y a plus d'une décennie et que n'a pas pris en compte De la Rúa.

Les événements en Argentine ouvrent un nouveau panorama encourageant pour les peuples latino-américains; la globaliphobie qui est arrivée jusqu'à Gêne, a démontré ses limitations idéologiques pour être représentative comme identité alternative du Tiers-monde et son reflux a seulement démontré la faiblesse et la dépendance face aux folies de la droite étasunienne, laquelle s'est appropriée ses revendications et a enterrée le rêve d'une globalisation équitable des impérialismes. Grâce à l'Argentine, la résistance tiers-mondiste à la globalisation cesse d'être un élément de folklore et d'ethnologie politique pour avoir aujourd'hui une identité propre qui pourraient, à court terme, se refléter sur le Brésil et le Mexique, donnant ainsi une espérance.

- Texte traduit par Gys Landry du journal mexicain La Jordana



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