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Sécurité,...vieuxcmaq, Martes, Diciembre 11, 2001 - 12:00
LSIjolie Mobilisation contre les lois sécuritaires (cdesjardins10@hotmail.com)
Pourquoi une saisie citoyenne du Conseil constitutionnel, par Louise CADIC Pourquoi une saisine citoyenne du Conseil constitutionnel, par Louise CADIC mardi 11 décembre 2001 En cette époque de pré-campagne électorale, la sécurité vient d'être hissée au rang de droit fondamental, droit presque naturel que les parlementaires se font fort de garantir à tout citoyen. Les chiffres concernant la hausse de la délinquance sont affolants, notamment ceux relatifs à la délinquance des jeunes. Les policiers sont que de plus en plus la proie des délinquants et manifestent haut et fort leur mécontentement. Les terroristes viennent de frapper au coeur de l'Etat le plus intouchable que compte ce monde. La France a peur... Les voix sont assourdissantes pour se féliciter de la nécessité, en ces temps troublés de terrorisme, de prendre des mesures exemplaires. Et il n'est pas très seyant de remettre en cause certaines de ces mesures, sans se féliciter au préalable de la valeur ou de la réalité des objectifs poursuivis. Et pourtant, pourtant... Les chiffres de la délinquance sont stupéfiants. En un an, les criminels et les délinquants s'en seraient donnés à coeur joie, profitant du laxisme bien connu des institutions répressives. En effet, le chiffre avancé par le ministère de l'intérieur annonce une hausse de celle-ci de 9,85%. On en reste coi : presque 10% en plus de transgressions de la loi pénale. On en oublierait presque de rappeler que ce chiffre est simplement révélateur de la délinquance constatée, et non pas de la délinquance réelle. Et la délinquance constatée, elle, dépend, entre autres facteurs, du nombre de signalements effectués par des citoyens de plus en plus habitués à recourir à l'appareil répressif, de la démarche plus ou moins pro active des policiers, de l'obligation plus ou moins respectée de la part desi nstitutions, telles que les écoles, de transmettre des signalements, de la criminalisation plus ou moins grande de comportements auparavant anodins. Ce qu'on peut dire, avec certitude, à la lueur de ces chiffres, c'est que le nombre d'infractions constatées a globalement augmenté. C'est tout ! Or, on nous fait croire que si la délinquance constatée augmente, c'est que la délinquance réelle croît également, comme si le " puits " de la criminalité, à force d'y puiser des criminels, était de plus en plus fourni en délinquants. Même si ces appréciations sont contraires à toute rigueur et à toute logique, cela marche formidablement bien puisque l'on joue sur les peurs : la peur de l'étranger, la peur du jeune, la peur du pervers et du partenaire sexuel, la peur de la nourriture, la peur du terroriste... Le constat est dressé : la hausse de la délinquance est inquiétante, terrible. Pour apporter encore plus de poids à cette affirmation, on retient l'angoisse des policiers, des gendarmes, ceux-là mêmes qui sont censés oeuvrer contre ce déploiement de violences. Le processus de victimisation des policiers est aussi inéluctable, semble-t-il, que la hausse de criminalité. Ils se voient, ou, du moins, sont présentés, comme les victimes des délinquants... souvent jeunes et toujours invulnérables. Ces derniers jours semblent constituer l'acmé de ce mouvement de victimisation. La délinquance, avec ses figures emblématiques de jeunes " sauvageons ", d'étrangers, de pervers sexuels et de terroristes, ne cesse d'augmenter. Les policiers, nous dit-on, en sont les premières victimes. On entend rassurer ces derniers à coup de gilets pare-balles et endiguer la première à coup de loi sur la sécurité quotidienne. En dehors du fait qu'elle ratisse large, la loi sur la sécurité quotidienne a également le mérite de se saisir de la tendance actuelle de la délinquance polymorphe à se cacher là où on ne l'attend pas. Ainsi, les parlementaires se sont entendus aussi bien sur la criminalisation du voyage sans titre de transport ou l'élargissement du champ d'application du fichier d'empreintes génétiques, que sur des mesures de lutte contre le terrorisme, et d'autres encore touchant à la cryptographie ou à l'occupation des halls d'immeubles. Le Sénat avait tenté d'y introduire deux ou trois dispositions quant à l'âge de la responsabilité pénale des enfants, que l'Assemblée Nationale a eu cependant la décence de ne pas juger (pour l'instant ?) propices. Si le caractère temporaire des mesures liées à la lutte contre le terrorisme a été affirmé, il semble de même nature que celui de l'occupation de locaux par la Préfecture de police de Paris : un temporaire qui dure. Et si le caractère nécessaire et approprié de ces mêmes mesures a été unanimement approuvé, c'est que le texte de la loi n'a pas été correctement lu ou perçu. Comment est-il possible de justifier, sous couvert de lutte contre la délinquance, et plus spécifiquement contre le terrorisme, des mesures plus que sécuritaires, portant une atteinte sans comparaison au respect de la vie privée, au respect du domicile, à notre droit à la sûreté (qu'on a trop tendance à confondre avec la sécurité !), à l'idée qu'on peut se faire d'un Etat de droit ? La lecture de cette loi et le défaut, partagé quasiment universellement, de questionnement éthique du législateur lors du vote de celle-ci a coupé le souffle à plus d'un citoyen, le privant du même coup du seul moyen de se faire entendre. Conscients de la censure inévitable de certaines dispositions, les parlementaires ont affiché leur volonté de ne pas saisir le Conseil constitutionnel. Une telle abstention réduit le peuple au silence. Au moins pour un moment. Même au temps béni de la tendance sécuritaire, lorsque la loi sécurité et liberté était votée, le législateur avait cru bon de conserver la notion de liberté, proposant un équilibre, par ailleurs improbable et très critiqué entre ces deux notions. Vingt ans plus tard, la loi sur la sécurité quotidienne est frappée d'un lourd handicap : l'idée de liberté y fait cruellement défaut ; et pour cause ! Non satisfait de ce tour de passe-passe, le législateur, en soustrayant cette loi au contrôle du Conseil constitutionnel, assure le recul net et définitif de l'idée même de liberté. Nous entrons, dès lors, de plein pied dans une période d'obscurantisme répressif, marquée par des amalgames incessants entre jeunes, étrangers, musulmans et délinquants, sous le sceau du tout-sécuritaire, au détriment bien évident des libertés, dominée par la peur. Lorsqu'un Etat renonce à ses libertés, abandonne sa mission sociale, oublie toute distinction et toute distance, pour le veau d'or de la sécurité, ses citoyens peuvent effectivement commencer à s'inquiéter. Cette peur est aujourd'hui relayée par un certain nombre de citoyens. Mais ceux-ci n'ont pas choisi la voie de la peur ou du non-droit pour s'exprimer. Ils ont choisi la voie du droit tel qu'il devrait être, lorsque les pouvoirs de l'Etat défaillent : la saisine du Conseil constitutionnel par tout citoyen concerné par une loi portant potentiellement atteinte à ses droits et libertés fondamentaux. Nous vous invitons à venir porter, au Conseil constitutionnel, la saisine citoyenne concernant la loi sur la sécurité quotidienne. Geste inutile diront certains, mais geste symbolique de refus de ces dérives de l'Etat de droit, qui au nom des valeurs qui justifient son existence, les sacrifie sur l'autel de la sécurité, et, par là-même, saborde ses propres fondements. |
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