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AFGHANISTANvieuxcmaq, Lunes, Noviembre 12, 2001 - 12:00 (Analyses)
Micheline Carrier (michecar@globetrotter.net)
Les femmes afghanes n'ont plus de droit et sont victimes de persécution de genre depuis l'installation du régime taliban en 1996. La guerre en Afghanistan n'améliore pas leur sort ni celui de leurs enfants. L'après-taliban ne garantit pas que les Afghanes recouvreront leurs droits fondamentaux à moins que l'ONU et divers pays exigent du futur gouvernement afghan qu'il souscrive aux conventions internationales sur les droits de la personne, incluant les droits des femmes. Cette exigence devrait une condition de l'aide à la reconstruction. Tout le monde peut faire des pressions en ce sens auprès du gouvernement national et de l'ONU. Depuis six ans, un groupe de terroristes religieux qui se sont donnés le nom de «talibans » (étudiants en religion) opprime la population de l’Afghanistan au vu et au su de la communauté internationale. Cette dernière s’émeut et s’indigne plus facilement pour la destruction de statues de bouddhas que pour la destruction systématique de milliers de vies humaines. La principale cible des talibans est la population féminine. Il serait plus court d’énumérer ce qui n’est pas interdit aux femmes que ce qui l’est. Presque tout leur est interdit (Voir pour détails le site de l’Association révolutionnaire des femmes afghanes: http://www.rawa.org). Les talibans voudraient exterminer les femmes qu’ils ne procéderaient pas autrement. Ils ont érigé en système, au nom d’une loi qu’ils se sont inventée, les atteintes répétées à l’intégrité physique, psychique et intellectuelle des femmes. Les femmes de l’Afghanistan sont emprisonnées non seulement dans un vêtement qui les couvre des pieds à la tête, mais aussi dans leur maison (quand elles en ont une). On a poussé la cruauté jusqu’à les obliger, du moins dans les villes comme Kaboul, à peindre les fenêtres de leur maison afin qu’aucune femme ou fille de plus de dix ans ne soit visible de l’extérieur. Si les femmes afghanes veulent sortir, elles doivent avoir «une bonne raison» (définie par les talibans) et être accompagnées d’un homme de la famille. Si elles sont surprises à prendre un peu de liberté avec le burqa, ne serait-ce que pour mieux respirer ou se mouvoir, elles encourent les mêmes risques. Aucun autre pays au monde n’a jamais assigné à résidence la moitié de sa population pour cause de féminité, mais tous les pays ont laissé faire les talibans avec une complaisance déconcertante. Le régime taliban interdit aux femmes l’accès au travail, à l’éducation, aux soins de santé publics et aux distractions quelle qu’en soit la nature. La situation est particulièrement dramatique pour les nombreuses veuves de guerre (des dizaines de milliers), souvent en charge de plusieurs enfants, qui n’ont pas le droit de travailler et, par ailleurs, qui n’ont pas d’homme parent pour leur fournir une aide financière ni les accompagner dans leurs déplacements. Comment peuvent-elles s’en tirer ? Il y avait jusqu’ici les organismes d’aide humanitaire sur place, quand ces femmes pouvaient s’y rendre. Selon l’Association révolutionnaire des femmes afghanes (RAWA), de nombreuses femmes sont réduites à mendier, voler ou se prostituer, avec toutes les conséquences qu’on imagine: lapidation, torture, mutilation et parfois exécution publique sans autre forme de procès. Les talibans sont capables de tout, y compris de couper les doigts d’une petite fille de 10 ans qui se polit les ongles ou de battre au sang une femme qui porte des bas blancs . La guerre anglo-américaine en Afghanistan aggrave la situation dramatique des femmes qui représentent, avec les enfants, les 3/4 des réfugiés aux frontières des pays limitrophes. Plusieurs meurent de faim et de soif en cours de route. L’après-guerre est tout aussi inquiétant. Qu’est-ce qui arrivera aux femmes afghanes quand la Grande-Bretagne et les États-Unis quitteront ce pays après avoir achevé de le dévaster ? Quel groupe prendra le pouvoir ? Et quelles seront leurs dispositions vis-à-vis des femmes? Les représentantes des femmes afghanes ont déjà renvoyé dos à dos le régime avant-taliban et l’actuel régime taliban, en précisant que le premier tuait les femmes avec des fusils alors que le second les tue avec du coton (http://www.rawa.org). Il faut craindre que le statut des femmes demeure inchangé ou même que leur situation empire à l’issue de cette guerre. On négocie déjà la présence de talibans au sein du futur gouvernement. En outre, les porte-parole des femmes afghanes qui peuvent s’exprimer à l’étranger (Pakistan, France, États-Unis) ne font pas confiance à l’opposition actuelle, l’Alliance du Nord (ou Front uni). Le secrétaire américain à la Défense a annoncé récemment qu’il n’appartient pas aux États-Unis de former le futur gouvernement afghan. Ce qui serait une position honorable si elle était crédible. Qui croira en effet que les États-Unis ne feront pas les pressions nécessaires pour que ce gouvernement lui soit favorable? Comme plusieurs autres pays occidentaux (France, Grande-Bretagne, Canada peut-être, etc.), ils ont dans la région des intérêts cruciaux, via leurs multinationales exploitant du pétrole. Depuis des années, ils souhaitent que les oléoducs qui achemineront les hydrocarbures de la mer Caspienne passent sur le territoire afghan, ce qui ferait aussi l’affaire du Pakistan, mais pas celle de l’Iran, de la Chine et de la Russie. Pour atteindre leur objectif, braderont-ils les droits de la personne, les droits du peuple afghan et surtout des femmes afghanes, persécutées en tant que femmes? Agir tout de suite Je ne peux pas m’imaginer qu’au XXIe siècle, dans un monde qui se dit évolué et défenseur des libertés, on puisse laisser s’accomplir ce qui s’apparente à un génocide. L’indifférence est la façon la plus efficace de soutenir le régime terroriste taliban. Il faut s’indigner et ne pas cesser de s’indigner du statut imposé aux femmes afghanes. Les talibans n’agissent pas mieux qu’Hitler et Staline. Ils persécutent un groupe sur la base du genre (ou sexe) plutôt que sur une base ethnique ou religieuse. L’opinion publique internationale peut faire la différence si elle réagit en force et tout de suite. Il faut exiger des gouvernements qu’ils fassent des pressions auprès de tous les pays concernés par cette situation et auprès de l’ONU qui, espérons-le, supervisera la création du futur gouvernement. L’objectif est d’obliger le futur gouvernement afghan, qui aura besoin d’une aide financière massive pour la reconstruction du pays, à souscrire aux conventions internationales sur les droits de la personne, et nommément à respecter les droits fondamentaux des femmes. L’ONU pourrait associer des porte-parole des femmes afghanes au processus de négociation et de décision. Après tout, elles représentent bien plus et plus légitimement l’ensemble des femmes afghanes (au-delà de toute division ethnique) que les talibans et l’opposition aux talibans peuvent représenter l’ensemble de la population. Elles ont déjà défini une Charte des droits fondamentaux de la femme afghane, qui précise ces droits (http://worfa.free.fr/manifeste_soutien_charte.htm). On pourrait s’en inspirer dans le processus de négociation pour la création d’un futur gouvernement. En France, il y a déjà un an et demi, des personnalités des milieux artistiques et intellectuels (Catherine Deneuve, Alain Finkielkraut, Élisabeth Badinter, Robert Badinter, Jean-François Kahn, Anne Sinclair, Danièle Mitterrand, Daniel Cohn-Bendit, Benoîte Groult et des dizaines d’autres) ont pris la tête d’un mouvement de pression qui veut convaincre la classe politique d’agir auprès des pays qui maintiennent le régime taliban. La presse française, Le Monde et Le Nouvel Observateur en tête, ont grandement contribué au mouvement en ouvrant leurs pages aux groupes de soutien des femmes afghanes et en offrant une tribune aux personnalités qui se sont engagées. Encore le 23 octobre dernier, Le Monde consacrait un éditorial au sort des femmes afghanes dans le gouvernement d’après-guerre. Des personnalités et les médias d’ici pourraient faire la même chose. À Montréal, il existe un Comité de soutien aux femmes afghanes (télécopieur: 514-932-4544 ou Alternatives à l'adresse http://www.alternatives-action.org/fr/index.html ; voir aussi le site http://www.cybersolidaires.org/obs/index.html ) qui organise des rencontres et autres activités pour susciter un mouvement de réaction collectif. On pourrait soutenir ce comité, qui recueille également des fonds afin de secourir les femmes et les enfants d’Afghanistan, premières victimes des guerres présentes et passées. Sur le plan individuel, on pourrait écrire au premier ministre du Canada (p...@pm.gc.ca ou Chambre des Communes, Ottawa, sans aucun frais) lui demandant de faire pression sur l’ONU et les pays concernés afin qu’ils exigent du futur gouvernement afghan qu’il s’engage par écrit à respecter les droits de la personne et nommément l’égalité entre hommes et femmes. Si on veut s’adresser directement à l’ONU, on écrit à Mary Robinson, Haut-Commissariat pour les droits de l’homme (weba...@unog.ch). Pour information et suggestions: http://membres.tripod.fr/Micheline_Carrier/afghanes.html Tout le monde peut faire sa part, sans se décourager par l’ampleur de la tâche. Comme l’écrit Élisabeth Badinter, ce sera peut-être un long combat, «Mais si des millions de femmes - et d'hommes - ne s'arrêtent plus de crier à la place des Afghanes étouffées on a une petite chance de contraindre les politiques à faire leur devoir.» (Le Nouvel Observateur, 12 avril 2001). Micheline Carrier
Site officiel de l'Association révolutionnaire des femmes afghanes, RAWA. Cette association, basée à Quetta au Pakistan, défie le régime taliban en organisant clandestinement des cours pour les filles, en offrant des soins de santé aux hommes, femme
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