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Minuit moins une pour Narco News

vieuxcmaq, Domingo, Marzo 18, 2001 - 12:00

David Kavanaght-----------------------------7d12bc3957 (david_kavanaght@altavista.com)

Note du traducteur: cet article soulève des enjeux intéressants mais je suis en désaccord avec certains thèmes développés. Il s’agit d’un appel en faveur d’une campagne de financement publié sur le site d’Indymedia le 16 mars dernier.

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16 mars 2001,
Minuit moins une pour Narco News

S.V.P. faites circuler dans vos réseaux.

Publiez ce message partout où vous le pouvez

Lien vers cette missive : http://www.narconews.com/webbletter.html (en anglais)

Une lettre du journaliste récipiendaire du prix Pulitzer Gary Webb

Cher ami,

Peu après la publication d’une série d’articles pour le San Jose Mercury News à propos d’un réseau de trafiquants de drogue ayant inondé le centre-sud de Los Angeles avec de la cocaïne à bon marché au début de l’explosion du «crack» à cet endroit, un chose bizarre m’est arrivée. J’ai été réduit au silence.

Cet événement m’est tombé dessus, croyez-le ou non, à ma grande surprise. Ça faisait 17 années que j’écrivais des copies pour un journal à propos de graffiteurs, de banquiers corrompus, de politiciens véreux et de meurtriers – tout en gagnant mon lot de prix de journalisme pour mon travail. Certaines de mes histoires ont amené des causes devant les tribunaux en convoquant des grand jury et envoyé des gens haut placés en prison alors qu’ils le méritaient bien. D’autres ont abouti à 20/20 – une émission télé d’affaires publiques très populaire -, et se sont transformées en best-sellers (pas écrits par moi, malheureusement.) J’ai commencé à faire des apparitions aux nouvelles à la télé, à faire des conférences pour des cours de journalisme dans les collèges et des séminaires professionnels. J’avais les principaux journaux qui se faisaient concurrence pour m’embaucher.

Ainsi, lorsque je suis tombé sur une piste impliquant une section de l’Agence Centrale d’Espionnage (CIA, en anglais) dans le trafic de cocaïne, je n’ai eu aucune espèce d’hésitation à y sauter à pieds joints. Que pouvais-je craindre ? J’étais journaliste d’un journal dans une grande ville, une publication qui ne faisait pas de quartier. J’avais le premier Amendement (protection constitutionnelle de la liberté d’expression), un bureau d’avocats et une compagnie multimillionnaire qui pouvait me protéger.

N’empêche que cette histoire est un scandale. Des vendeurs de drogue latino-américains d’extrême droite aidaient à financer une guerre secrète menée par la CIA au Nicaragua en vendant des tonnes de cocaïne à des bandes de rue de Los Angeles, qui, à leur tour transformaient la marchandise en crack et l’injectaient dans tous les quartiers noirs de la nation. Et tous les éléments de preuve convergent vers l’amère conclusion que des responsables du gouvernement américain étaient au courant, l’ont encouragé tacitement ou, au minimum, n’ont rien fait pour l’arrêter.

C’est à ce moment-là que m’est arrivé cette chose étrange. Au lieu d’utiliser leurs forces vives afin de faire dire la vérité à notre gouvernement, les médias de masse nationaux ont décidé que leur temps serait mieux investi à me scruter à la loupe de même qu’à examiner soigneusement ma façon de faire du journalisme. Ils m’ont critiqué vertement je dois dire. (À un moment donné, j’ai même été accusé de négocier des ententes pour faire un film à propos d’un vendeur de crack sur lequel j’avais écrit. La DEA, Drug Enforcement Agency ou Brigade anti-drogue, a perquisitionné les bureaux de mon agent cherchant tout ce qui pourrait supporter ce mensonge et a été désappointée de n’avoir rien trouvé.)

Jusqu’à ce jour, personne n’a pu me montrer la moindre erreur factuelle dans tout ce que j’ai pu écrire au sujet de ce réseau de revendeurs de drogue, incluant un livre de 600 pages à propos du gâchis que ça a causé. Bien sûr, la plupart de qui a été rendu public depuis lors montre que mes articles sous-estimaient grandement l’étendue de la connaissance des autorités gouvernementales, une erreur que je suis tout à fait prêt à admettre. Mais, en fin de compte, les faits ne comptaient pas vraiment. Ce qui importait, c’était d’évacuer ce sujet de l’avant-scène, de faire taire les gens, et de rendre tous ceux qui demandaient la vérité semblables à des adeptes farfelus des théories de la conspiration. Ça a marché.

Finalement, la CIA a pu faire une enquête interne, elle a publié un rapport censuré au possible admettant qu’elle a travaillé avec des trafiquants de cocaïne, tout en se déclarant innocente d’un quelconque acte répréhensible. Et c’est cette histoire là que nos médias nationaux qui pètent le feu nous servent jusqu’à maintenant.

Maintenant, c’est au tour de Narco News d’avoir droit à la thérapie du silence. Et, si j’avais à deviner, j’irais jusqu’à dire qu’il est plus important pour les tenants de la guerre à la drogue de faire taire Al Giordano que de réduire au silence les journalistes des médias de masse qui, selon les dires de mon père, ne parlent pas la bouche pleine.

Personne ne peut compter sur les rédacteurs de Narco News, sur leurs patrons, ou sur son conseil d’administration pour dompter Al, ou en cas d’échec, le muter au bureau des copies du soir. La seule personne sur laquelle ils peuvent compter est Al, qui n’aime pas qu’on le prenne pour quelqu’un qui accepte ce genre de faveur. Et ils peuvent abolir Internet aussi. Alors deux choix demeurent.

Ils peuvent serrer les dents et endurer le style de Al, pire de jour en jour, alors qu’il expose les dessous grenouillants de cette éternelle guerre à la drogue – et qu’il provoque réellement des choses, comme tout journaliste devrait le faire. Ou bien, ils peuvent lui rendre la vie impossible en l’harcelant de poursuites judiciaires frivoles, le tourmenter avec des avocats, des dépositions, interrogatoires et subpoenas et ainsi le pousser à s’accrocher à sa position. Pourquoi ? Pour le faire taire. Pour le chasser. Pour l’empêcher de regarder en dessous des pierres que les journalistes ne sont pas supposés retourner.

Ne faites pas erreur. Cette bataille judiciaire ne se situe pas au niveau de certaines publications faites par Narco News. Ce sont toutes les publications passées et à venir qui sont en jeu. Cette lutte est autant celle de l’indépendance d’Internet que celle du journalisme. Le bâillon imposé à Al Giordano et Narco News n’est pas une possibilité théorique qui peut survenir dans quelques années. Ça arrive maintenant. Al et ses avocats bénévoles y sont jusqu’au cou au moment où l’on se parle. Ils ont besoin de notre aide.

Narco News et Al Giordano doivent comparaître le 9 avril prochain pour répondre à une poursuite de censure de la part de Banamex ou bien ils seront déclarés coupables par défaut – coupables sans la moindre preuve dans une cause où tous les faits leur donnent raison.

Une poursuite civile est de nature différente d’une cause criminelle: des points de droit complexes nécessitent des efforts soutenus de la part d’avocats expérimentés afin de se conformer aux exigences procédurales rigides tellement éloignées des vérités évidentes des photographies montrant le trafic de drogue sur les côtes du Mexique. Les avocats banquiers d’Akin Gump ont des honoraires astronomiques qui leur donne le temps de soulever chaque détail procédural et de repousser le jour où les faits seront rendus publics dans la cour municipale de New York.

Si cette cause se rend jusqu’au procès, Narco News aura gagné. Ainsi tous ceux d’entre nous qui tiennent à ce que les faits véridiques entourant la corruption de la guerre internationale faite à la drogue soient révélés au grand jour à New York, centre médiatique d’importance, auront gagné aussi.

C’est ici que ça se corse, à travers le dédale de points de droit procéduraux non pertinents, comme tout journaliste couvrant les affaires judiciaires le sait. Narco News pourrait soit embaucher des avocats d’expérience pour l’accompagner à travers cette étape compliquée ou – je le vois déjà venir – Al devra faire ses propres recherches, abandonner le journalisme pour les prochaines semaines ou les prochains mois afin de mener sa défense. Alors vous et moi ne pourrons plus lire des articles sur Narco News au moment précis où le plan Colombie se déploie sur une base régionale et que de plus en plus de voix latino-américaines s’élèvent contre la guerre à la drogue, tel ce chef de police Mexicain dont nous avons entendu parler hier, qui, n’eût été de Narco News, n’aurait jamais été entendu par ceux d’entre nous qui parlent et lisent l’anglais.

Voici l’enjeu: est-ce qu’un bon journaliste doit se retirer du monde pendant des mois afin de devenir son propre avocat, ou bien peut-il continuer à nous rapporter des faits ?

On m’a fait taire mais je parle toujours. L’autre jour, quand les droits de production du film tiré de mon livre «Dark Alliance» au sujet de la complicité américaine dans le trafic de cocaïne ont été achetés pour en faire un film destiné à la télévision, j’ai écrit à Al pour lui donner une partie des profits pour sa défense. Soyez assurés qu’au cours des prochaines années, on apprendra que Narco News avait raison et que l’organisme était en train d’aider la génération suivante de journalistes dans sa lutte contre la censure.

Mais ne serait-il pas merveilleux si les censeurs échouaient complètement dans leur tentative de mettre Al hors circuit pendant un an, des mois, même pour une semaine ? Ne serait-ce pas là le meilleur moyen de dissuasion contre les banquiers et lobbyistes qui mènent ces luttes frivoles contre la liberté d’expression et Internet ? Je comprends que Narco News a besoin de seulement $13 000 de plus pour être en mesure de passer au travers de l’étape la plus difficile de la poursuite civile – à laquelle il doit répondre immédiatement – avec de l’aide professionnelle, ceci permettant à Al d’allouer son temps et ses énergies à nous rapporter les faits. Une personne en moyens pourrait régler ce problème avec un chèque. Deux douzaines de personnes donnant $500 pourraient en faire autant. 130 personnes donnant une centaine de dollars... vous pouvez faire le calcul: Si la moitié des lecteurs de Narco News donnaient un dollar chacun, Narco News pourrait continuer à diffuser du contenu.

Le plus difficile est que cet envoi doit se faire maintenant, aujourd’hui. SVP joignez vous à moi et envoyez un chèque à

Drug War on Trial
C/O Thomas Lesser, Esq.
Lesser, Newman, Souweine & Nasser
39 Main Street
Northampton, MA 01060

Comme Al le dit souvent, Narco News n’a jamais demandé un sou à ses lecteurs, et je sens que ça lui fait mal d’avoir à demander aux lecteurs qui bénéficient de son talent de journaliste d’appuyer sa défense en cour. C’est la raison pour laquelle je vous écris. Cette poursuite s’attaque à plus gros que le destin d’une publication. Ça ratisse plus large: la cause va en décider, les enjeux de la liberté d’expression dans le cyberespace pour les années à venir. Ce qui est en jeu est ni plus ni moins que la question de savoir si le public a le droit de savoir la vérité et les faits à propos de la guerre à la drogue dans notre hémisphère.

Si nous n’agissons pas aujourd’hui, nous serons dans le noir une fois de plus demain,

Bien à vous,

Gary Webb
Journaliste

Pour des informations à propos de la poursuite et de la défense de la cause:



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