Il s'agit d'un commentaire à paraître dans notre édition du 15 décembre prochain relatant ma présence au colloque des médias alternatifs. N'y allant pas avec le dos de la cuillère, j'espère tout de même voir ce texte sur le site.
merci à l'avance de votre ouverture d'esprit

J'ai participé au Colloque des Médias alternatifs du Québec, le 4 novembre dernier, à Drummondville. Autant y ai-je trouvé du bien, qu'y ai-je trouvé du « noyautage ».

Commençons par les choses positives. Je repensais au chemin parcouru et je me suis rendu compte qu'en juin dernier, je fêtais mes 30 ans de carrière journalistique. Radio, télé, écrit, je les ai tous faits. Je suis maintenant propriétaire d'un journal mensuel régional qui n'a jamais, n'a pas et n'aura jamais de subvention. Je suis donc indépendant de toutes attaches et je finance mon opération par la publicité. Les gens que j'ai rencontrés, pour la plupart, étaient formidables. Chez ces jeunes, j'ai revu ce feu sacré que m'avaient donné mes mentors au début de ma carrière. Ce désir de faire un travail honnête et essayer de faire une différence, je l'ai vu dans leurs yeux. Je l'ai entendu aussi, de certains. Moi qui croyais que ce feu s'éteignait, j'ai dû me raviser et constater, non avec joie, mais avec bonheur, que ma profession est toujours entre certaines bonnes mains. Quel sentiment d'appartenance extraordinaire que de partager nos expériences et discuter avec passion de notre médium d'information. Si cette journée avait été entièrement comme je la décris ici, nous aurions pu crier au Nirvana.
Hélas!Je vais être dur et très incisif, je vous en avertis.

Quand j'ai fait mon inscription, je l'ai complétée en pensant que mon journal était alternatif puisqu'il ne coulait pas dans le moule du conglomérat et qu'il a une pensée tout à fait libre. J'espérais que nous allions jeter les bases d'un réseau alternatif de communication destiné à nous éveiller sur l'information tel qu'elle doit être livrée, avec honnêteté et profondeur. Dans une opération comme la mienne, il n'est pas toujours facile d'aller en profondeur, faute de temps, mais je profite de mon commentaire pour faire part de mon opinion, qu'elle soit partagée ou non et je fais des choix éditoriaux au montage.

J'ai donc demandé au premier conférencier de définir le médium alternatif, de manière à me rassurer, à savoir si j'entre dans la définition. Il me rassure. En atelier, je reviens avec cette question posée différemment, même réponse. Je me sens rassuré et nous travaillons sur le manifeste. Tout le préambule, qui prend la moitié du manifeste, est de la bouillie marxiste-léniniste avec laquelle je ne suis pas d'accord. D'autres participants à l'atelier croient aussi qu'on devrait apporter des nuances. D'autres croient qu'il faut le laisser tel quel. J'espère qu'en plénière, nous pourrons y apporter des nuances.
Fausse impression!

Arrive la plénière et je me rends compte qu'elle est noyautée par des gauchistes véritables, des nostalgiques de la gauche des années '70 et des gauchistes d'opérette. Je suis extrêmement déçu d'entendre que nous menons un combat contre la méchante Pepsico, Coke ou Québécor. « Finissons-en avec le corporatisme! » scandent-ils. Et moi qui croyait naïvement que nous allions CRÉER un réseau alternatif alors qu'on se retrouve plutôt dans les vieux clichés éculés du « Ce n'est qu'un début, continuons le combat! »

Tout médium qui adhérera à ce manifeste devra le publier. Ma réponse est NON. Ce manifeste est à des années-lumière de la réalité des années '90. On ne va pas à la guerre avec des tire-pois mais avec des bazookas. Je n'ai plus envie de me battre, à mon âge. J'ai plutôt envie de créer une différence. Créer de toutes pièces un contre-poids à ce corporatisme envahissant qui façonne nos vies. La gauche, je m'en fous éperdument. C'est de la petite politique pour les peureux. La droite, pas mieux. La politique est l'art de pelleter de la boucane. Vos manifestations n'ont rien donné, sauf des blessés. Ne dit-on pas que la plume est plus forte que le glaive? Vous ne m'avez pas démontré que vous appuyiez cette maxime le 4 novembre dernier; vous m'avez plutôt démontré que vous vouliez jouer les victimes face à la grosse méchante police. Puisque je ne laisse jamais les choses à-moitié faites, voici ma version du manifeste que je vous invite à comparer au manifeste accepté par 14, refusé par 5 et, je pense, 9 abstentions. Il est disponible sur internet à :
www.ao.qc.ca/altermedia/home.html.

MANIFESTE DES MEDIAS ALTERNATIFS DU QUÉBEC

Dans un contexte de mondialisation qui fait que les medias de masse s'inscrivent dans une logique commerciale où on assure ses parts de marché et ses revenus publicitaires. Étant au fait d'une concentration malsaine de propriété dans les medias publics, nous croyons que la liberté d'expression est opprimée et ceci force les journalistes de ces conglomérats à effectuer une autocensure docile. Des citoyens et des citoyennes n'en sont pas dupes et plusieurs d'entre eux, à travers la diversité des medias alternatifs, réclament ce à quoi ils ont droit.

Parce que nous sommes tout à fait concients du rôle de citoyens que nous devons jouer dans ce monde, parce que nous croyons fermement à la nécessité du débat démocratique, nous comptons poursuivre le développement d'un contre-pouvoir critique nécessaire à toute société. Notre initiative est lancée dans un désir de dénoncer le corporatisme, le cynisme politique et l'autocensure. Notre désir de changement exige un retour à l'audace journalistique face aux pratiques traditionnelles qui nous sont présentées comme immuables. Une ouverture d'esprit est une condition préablable au débat démocratique et nous devons unir nos efforts pour relier entre eux des medias libres et indépendants de toutes forces politiques et/ou financières et affranchies de toutes positions idéologiques basées sur des caractéristiques sexuelles, religieuses, ethniques ou économiques.
En conséquence, nous décidons, à l'issue de ce deuxième Colloque des medias alternatifs du Québec, de créer un lien durable entre nous sous la forme d'un Réseau de solidarité des medias alternatifs du Québec, ouvert à tous les médias qui, sur les bases de ce manifeste, souhaiteraient partager avec nous des idées et des expériences dans les actions individuelles et collectives qui en seront issues.

C'est pourquoi nous nous déclarons dès ce jour solidaires:
- afin de nous porter mutuellement assistance et aide dans nos droits pour préserver notre liberté d'éditer, de produire, de diffuser et de mettre en ligne nos médias,
- afin que puisse émerger, dans l'avenir, de nouveaux espaces de libre expression.

Nous nous engageons dès ce jour à:
- diffuser ce manifeste dans nos medias respectifs,
- assurer la visibilité des medias signataires au gré de nos affinités,
- assurer la tenue d'une rencontre annuelle des medias alternatifs québécois afin de favoriser une meilleure connaissance réciproque, une collaboration régulière et des projets communs.
Et nous avons signé, (...)

Je veux travailler sur un réseau alternatif mais pas sur un outil de propagande gauchiste.

À bon entendeur, salut!

Daniel Poulin
Journal MRG