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Les Nouveaux Maîtres du Monde et ceux qui leur résistenthombredelatierra, Martes, Junio 5, 2012 - 19:25 Jean Ziegler sur l'économie néolibérale, prognose et alternatifs: vers un nouvel avenir? Jean Ziegler: Les Nouveaux Maîtres du Monde et ceux qui leur résistent, (Fayard, 2002), 361 pages Réquisitoire du système néocapitaliste et tentative de remède pour en sortir.. "L'établissement de la tyrannie planétaire du capital financier, la monétarisation progressive des relations humaines, le bannissement des valeurs des Lumières on porté des dommages irréparables à l'État national républicain.. Après la mort de l'État républicaine, comment construire de nouveaux mécanismes de contrôle public capable de domestiquer un mode de production capitaliste plus dévastateur que jamais? Face à la jungle qui avance, comment lutter, pour la civilisation? Que faire pour préserver les valeurs humaines de solidarité, de justice sociale, de disposition de soi, comment s'y prendre pour empêcher l'homme de régresser" page 279 ".. tout ce que les experts des Nations unies font -avec courage et intelligence - pour aider les populations sinistrées est peu de chose, comparé aux dommages infligés à ces mêmes populations par les vautours de Fonds monétaire international." page 281 "En réalité, l'individu fabriqué par le capital mondialisé est réduit à sa pure fonctionnalité. Il a l'impression d'être libre parce qu'il ne peut reconnaître, dans le dédale des déterminations marchandes qui s'exercent sur lui, l'aliénation qui le gouverne et qui le prive de son individualité.. .. ainsi le mensonge néo-libéral de l'individualité produite par le capital: la machine a rejeté son pilote, elle court aveuglément dans l'espace. À l'instant même où s'accomplit son apogée, la raison est devenue irrationnelle et bête. Le projet de notre temps est l'autonomie du moi, son maintien, alors qu'il n'existe plus de moi à maintenir.. L'individu fabriqué par le capital mondialisé ne possède ni identité ni liberté d'aucune sorte. Le capital mondialisé produit des individus atomisés, de pauvres choses isolées les unes des autres, dépourvues de repères propres, dont l'existence est entièrement déterminée par des contraintes extérieures." page 294-5 "L'individualité civile n'est pas autre chose que cette aventure où l'être affirme pleinement sa singularité sans rien oublier de ses dépendances au monde.. L'autonomie de l'individu est un produit global de la société civile, puisque dans la nouvelle société civile les individus cessent d'être des ennemis ou concurrents potentiels: ils se reconnaissent comme membres d'une même communauté mondiale. Ils se renforcent par leur coopération, chacun affirmant par ailleurs son individualité." page 296-7 Un grand live - de taille et au sens figuré - qui appelle à la réflexion. Le ton est carrément polémique: "vautours, prédateurs, mercenaires.." mais, faisant exception, ce polémiste appuie ses brûlots par de touffues références à la presse y compris la presse économiste et à d'ouvrages techniques. Il fournit même des tuyaux pour accéder la plus vite possible aux ressources documentaires onusiennes informatisées (Ziegler a été employé de l'ONU). L'auteur croit que notre "Système" - néolibéral ou (néo-)capitaliste - est amorale, donc pas réformable, donc il nous faudra un autre.. Préalablement, faut une analyse du fonctionnement du système actuel - "le Killerkapitalismus", le capitalisme des tueurs (son nom en dit long!) Qu'est-ce qui ne vas pas donc? Les citations en exergue, ci-haut, donnent l'essentiel de son analyse. Le texte fournit bien des exemples concrets actuels pour la réflexion.. Le saillant, pour moi - sans doute parce qu'il s'accorde avec mes propres conclusions - est que l'"image" de l'individu que nous donne la société néolibérale est fautive, tronquée. L'individu - comme le dit si bien Edgar Morin dans sa "Méthode" (Seuil, 2004) - n'est pas exactement "en opposition" face à la collectivité / société. Il PEUT l'être, bien sûr, et c'est très souvent l'individu héroïque solitaire face au pouvoir qui aurait raison (Mandala - Afrique du Sud, Bonhoeffer et Satre face aux Nazis). Mais, au fond, la relation individu / société est très complexe, "symbiotique", dépendante, réciproque, complémentaire, récursive (la société crée / forme les individus qui créent / forment la société dans laquelle ils vivent. Question de l'oeuf et la poule..) L'"erreur" - la grand mensonge dis-je - des néolibéraux est de vouloir faire disparaître la société civile, incarnée dans un État ou non, et de rendre le pouvoir du peuple entre les mains des ploutocrates et des corporations mondialisées qu'ils contrôlent. Ainsi naîtra une sorte de néo-féodalisme technocrate. Ceci sera "contre nature" dans le sens que l'homme est un animal social que ne peut être réduit au seul individu: l'homme en dehors de la société civile n'est simplement plus homme! Ziegler ménage pas ses mots. Il passe en revue - en vrai réquisitoire - les défaillances du Système actuel: la paupérisation, l'épuisement des stocks énergétiques, minières, forestières, terres arables.. On en a pour ses 360 pages! (En passant: le Pic Pétrolier est en train de détruire l'économie mondialisée fondée sur le pétrole bon marché. http://www.cmaq.net/es/node/37988 Cette destruction me désole et m'exalte en même temps parce qu'elle ouvre une porte à d'autres avenirs possibles..) Enfin, qu'est qu'on peut FAIRE? Comment soigner cette maladie qu'est devenue notre modernité? Comment faire naître un nouvel monde? Est-ce même possible d'en rêver? À cette dernière question, Ziegler donne un "oui": oui, c'est possible, même si incertain.. Pour Ziegler, la mort de l'Étal républicain n'est que constat: les néolibéraux ont gagné cette manche. Passons.. Ziegler voit naître une société planétaire dans les luttes des démunis. On pense aux mouvements Occupons! (Wall Street, Les Indignés de l'Espagne..), contestations des réunions du G-8, le Printemps Arabe, Mouvement des Sans Terre (Brésil).. C'est la lutte "décentralisée" qui se caractérisent par une approche flexible, pragmatique, participante voire communautaire.. Les militants échangent / planifient - grâce à l'internet - avec leurs pairs partout dans le monde. Leurs hiérarchies comptent peu de niveaux. Ils ont appris à attaquer la Grande Bête Néolibérale par mil points, cherchant constamment ses parties molles, ouvertes.. Dans ces luttes se construit une nouvelle société civile.. J'aime ce livre parce qu'au fond c'est un livre "inspirant". Inspirant mais pas dans le sens "Nouvel Âge" où l'"inspiration" est plutôt illumination, compensation pathologique, évasion, égarement dans la pensée magique. Le texte de Ziegler est plutôt un livre qui inspire parce qu'il nous INCITE à agir, à sortir de nos coquilles existentielles, ces coquilles programmées dès notre naissance pour nous robotiser en bons "consommateurs" et "clients" passifs et domptés. Ce livre nous incite à SORTIR et nous MESURER à la taille de ceux et celles qui ont déjà amorcé la lutte pour un monde meilleur. Enfin, c'est un DÉFI lancé.. Meure Un monde - que Le Monde naisse! Des points? Je lui donne 10 sur 10 - une très grande rareté, ça. |
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