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Le 1er mai, manifestons contre la Caisse de dépôt, dénonçons les gestionnaires du capital!Eric Smith, Domingo, Abril 12, 2009 - 21:55 (Communiqués | Economy | Globalisation | Politiques & classes sociales | Resistance & Activism | Syndicats/Unions - Travail/Labor)
Le Drapeau rouge-express
Le Premier mai, fête internationale des travailleurs et travailleuses, est une date importante. Haut symbole des luttes historiques du prolétariat depuis plus de 120 ans, c’est aussi une occasion de dénoncer le pouvoir de la classe dirigeante bourgeoise sur l’ensemble de la société. C’est une occasion unique de révéler, par la manifestation publique, l’agitation et la diffusion, les exemples les plus évidents de l’exploitation et de l’injustice que génère le système capitaliste. À Montréal et au Québec en 2009, il ne peut y avoir meilleure cible à dénoncer que la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ). Par ses actifs évalués à 120 milliards de dollars, la CDPQ est un des plus puissants gestionnaires de fonds en Amérique du Nord. Par ses investissements, elle possède aujourd’hui des actions dans plus de 3 000 entreprises à travers le monde. Comme on peut le lire sur son site Web, elle effectue chaque jour des transactions totalisant près de 8 milliards de dollars et gère l’un des 10 plus grands actifs immobiliers au monde. Ce n’est donc pas ce qu’on peut appeler un organisme populaire ou au service des travailleurs et travailleuses. C’est au contraire une énorme force de frappe capitaliste, qui a joué un rôle majeur, par exemple, dans l’acquisition de Vidéotron par Quebecor. Et comme tout bon capitaliste – pour qui l’unique but est de maximiser les profits – son avidité est aujourd’hui responsable de la perte de 25% des actifs financiers provenant des différents fonds de retraite des travailleurs et travailleuses, soit 40 milliards de dollars. Car d’où viennent les sommes faramineuses gérées par la Caisse? Elles proviennent de ses clients qui sont pour la plupart des caisses de retraite, dont le Fonds du Régime de rentes du Québec qui fut à l’origine de sa création. Elle compte aujourd’hui quelque 25 «déposants» dont le Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, le Régime supplémentaire de rentes pour les employés de l’industrie de la construction du Québec, mais aussi des régimes d’assurance comme celui de la CSST ou encore de la Société d’assurance automobile du Québec (SAAQ). Financée par les travailleurs… gaspillée par la bourgeoisie Les sommes énormes récoltées annuellement par ces Fonds et gérées par la CDPQ proviennent donc en grande partie des travailleuses et travailleurs: elles sont générées indirectement, de diverses cotisations déduites de leur paie et qui devraient normalement leur assurer un revenu au moment de leur retraite. Or, si ces fonds constituent la sécurité pour bien des travailleurs et travailleuses, leur gestion en est exclusivement assurée par la bourgeoisie. On s’attendrait à ce que ces avoirs soient gérés de façon «sécuritaire»… Mais les lois du capitalisme financier n’incluent pas la sécurité des travailleurs et travailleuses. Elles servent d’abord à enrichir les capitalistes et les fonctionnaires du capital à leur service, gestionnaires de fonds de toutes sortes – dont le Fonds de solidarité de la FTQ et Fondaction de la CSN – toute cette cohorte de financiers, courtiers, membres des hautes directions ou des conseils d’administration des entreprises, qu’elles soient privées, publiques ou parapubliques. Et ce sont les futurs retraitéEs du travail, les chômeurs et chômeuses, les prestataires vivant avec un misérable chèque de moins de 600$ par mois, qui prennent dans les faits tous les risques. C’est ainsi que la Caisse, dirigée alors par Henri-Paul Rousseau, a investi en 2007, la somme de 12,7 milliards de dollars – 10% de ses actifs!— dans des produits financiers à très hauts risques, les fameux papiers commerciaux. Quelques mois plus tard, en raison de la crise financière et immobilière qui s’annonçait aux États-Unis, ces actions se sont effondrées. La Caisse de dépôt a perdu près de 6 milliards de dollars dans cette aventure. Cet investissement serait un des facteurs expliquant les résultats désastreux de la Caisse l’an dernier. Celle-ci a vu ses actifs – les avoirs de l’ensemble des fonds de retraite qu’elle gère – fondre de 25%, soit près de 40 milliards de dollars en 2008. Et bien sûr, la crise financière mondiale qui affecte tous les pays impérialistes du monde explique le reste. Ce sont donc les millions de cotisants à la RRQ et aux différents fonds qui ont vu concrètement ces pertes sur le total de leur fonds de pension. Le PDG de la Caisse lui, qui a pris la responsabilité de l’échec de l’investissement dans les PCAA, a quitté son poste et reçu une indemnité de départ de 378 750$. Et parlons de ces autres fonctionnaires du capital, ceux du comité de gestion de la taxe scolaire de l’Île de Montréal, qui ont investi 75 millions dans ces mêmes produits financiers à hauts risques que sont les papiers commerciaux: ils ont ainsi perdu… 35 millions de dollars quand ceux-ci se sont effondrés. À la suite de quoi le président de ce comité, Fernando Barberini, annonçait le 3 avril dernier qu’en raison de ces pertes, il sera «incapable de financer des repas gratuits, des berlingots de lait ou encore d’embaucher des enseignants spécialisés». Et pour éponger le tout, il demande une aide financière au gouvernement! L’histoire ne nous dit pas la teneur de son fonds de retraite mais chose certaine, on peut deviner que son salaire annuel et son compte de dépenses lui donnent largement de quoi se payer des «repas gratuits» et des berlingots de lait à profusion, contrairement aux centaines de milliers d’enfants pauvres qui seront privés de ce service. Nationalistes et grands syndicats à la défense de la caisse Depuis sa création en 1965, les nationalistes ont toujours voulu donner à la Caisse de dépôt un rôle déterminant dans la création d’un capitalisme typiquement «québécois». Par cette défense de la Caisse, le mouvement nationaliste, auquel les grandes centrales syndicales se sont historiquement associées, a semé la confusion auprès des travailleurs et travailleurs. À nous de faire la lumière là-dessus: les nationalistes et les centrales syndicales – les uns depuis la création de la Caisse de dépôt, les autres depuis la création de leurs propres fonds d’investissement – sont devenus de véritables écoles du capitalisme, qui s’activent au cœur même du mouvement ouvrier à nous faire avaler cette nouvelle forme d’exploitation de l’épargne des travailleurs. Aujourd’hui, on veut nous faire croire que la «crise économique mondiale» et des erreurs d’investissements ont mené aux énormes pertes de la Caisse de dépôt. Mais dans les faits, ces pertes s’expliquent d’abord par l’appât du gain et le désir d’obtenir des rendements rapides. Ce désir est la raison d’être du capital financier: le rendement de ses capitaux, indépendamment de toute autre motivation. La Confédération des syndicats nationaux (CSN) a pris la peine d’émettre un communiqué le 25 février dernier pour défendre le bilan désastreux de la Caisse: «La Confédération des syndicats nationaux est déçue des résultats annoncés par la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ). “[…] Par ailleurs, il serait malhonnête intellectuellement de prendre la photo qui nous a été livrée aujourd’hui sans conserver une vision à long terme”, de commenter la présidente de la CSN, Claudette Carbonneau.» Or, madame Carbonneau peut difficilement s’élever contre les aléas du marché capitaliste: non seulement siège-t-elle au comité de vérification de la Caisse de dépôt, mais la CSN gère elle-même un fonds d’investissement selon ces normes de rendement qui régissent le merveilleux monde du capitalisme financier. Ce n’est donc pas une surprise de lire dans le communiqué que «pour la CSN, la Caisse de dépôt et placement du Québec a appris au fil des années à naviguer avec les déposants et à leur offrir des services exceptionnels. La CDPQ est une institution phare du domaine financier pour le Québec.» On ne s’attend pas à voir les syndicats faire la révolution sous le capitalisme: mais on a le droit d’être surprisE – sinon fâchéE!— de les voir parler comme de véritables courtiers de la finance. Et c’est ce qu’ils font aujourd’hui: de défenseurs des droits des travailleurs et travailleuses, ils sont devenus des gestionnaires de capitaux, qui tiennent le même discours que la bourgeoisie et de ce fait, se placent résolument dans son camp, alors qu’il nous faudrait combattre et se révolter devant ce véritable vol des avoirs ouvriers. Quant aux vieux nationalistes «de gauche», encroûtés dans le PQ comme Pierre Dubuc et l’ancien dirigeant de la CSN Marc Laviolette, ils en sont encore à regretter le Québec inc. de Jacques Parizeau et à voir dans les déboires de la Caisse, l’action des «méchants fédéralistes». On peut en effet lire dans la dernière édition de L’aut’journal, un long article de ces deux messieurs qui veulent à tout prix défendre l’éventuel démantèlement de la Caisse. Ils y font bien sûr ressortir leur éternelle paranoïa du complot fédéraliste, tout en défendant l’héritage laissé par Jacques Parizeau comme ministre des Finances et artisan d’un rôle plus interventionniste de la CDPQ: «L’importance stratégique de la Caisse de dépôt n’est plus à démontrer. Elle a permis au gouvernement du Québec de se libérer de la tutelle qu’exerçait sur les finances publiques le syndicat financier de la rue Saint-Jacques. La Caisse est intervenue activement dans l’économie du Québec et a servi de levier pour le développement du Québec inc.» se félicitent les deux «progressistes» du PQ. Mais dans le même souffle, ceux-ci déplorent le «changement» actuel qui fait en sorte que la Caisse de dépôt «a été gérée en fonction du rendement optimal». Et d’associer cette nouvelle philosophie aux fédéralistes, comme si nos capitalistes québécois ne pratiquaient pas la même recette. Pourtant, le fait que grâce à la Caisse de dépôt, Vidéotron aujourd’hui appartienne à Quebecor Media et à Pierre-Karl Péladeau – sans contredit le patron le plus anti-syndical au Canada – plutôt qu’à Rogers, n’a certainement rien amélioré aux conditions des travailleurs et travailleuses. Ne reste, dans les rangs de ceux qui croient encore au capitalisme gentil, qu’à ajouter Québec solidaire, pour qui il faudra modifier le mandat de la Caisse pour qu’elle investisse «d’abord et avant tout dans l’économie réelle, notamment dans des entreprises écologiquement et socialement responsables, de préférence au Québec», a indiqué Amir Khadir. Or, si les syndicats et leurs fonds de solidarité ne le font même pas, on se demande bien pourquoi la Caisse de dépôt le ferait! Décrochons de l’école du capital: apprenons plutôt à la combattre! Les gaspillages et pertes de milliards de dollars dont sont victimes collectivement les travailleurs et travailleuses par la faute de la Caisse de dépôt et de tous les petits et grands fonctionnaires du capital, sont un scandale qu’il faut dénoncer. S’ils ont été amplifiés par la crise, ces gaspillages demeurent quand même le reflet d’un système fondé sur l’exploitation du prolétariat par la bourgeoisie. Le fait que des milliards en capitaux, qui proviennent du travail ouvrier, puissent ainsi servir à l’enrichissement et au gonflement artificiel de toute une classe de fonctionnaires de la bourgeoisie, totalement improductive et parasitaire, a de quoi scandaliser. Et de voir les directions syndicales se métamorphoser elles aussi en parasites improductifs, dont le seul mérite est de miser à quitte ou double avec l’argent des autres, a de quoi nous dégoûter de l’action syndicale. Le mouvement ouvrier dont on a besoin n’a rien à voir avec cela! Et la révolution socialiste non plus! Le mouvement des prolétaires et le parti qui les dirige doivent détacher les travailleurs et travailleuses de cette école du capitalisme que constituent les fonds d’investissement auxquels on veut les faire adhérer. Nous n’avons rien à faire avec ces gestionnaires du capital. Nous avons au contraire, à les dénoncer et à les combattre. Nous devons démasquer ceux et celles qui dans nos rangs mêmes, prétendent travailler pour nous, alors qu’ils ont fait du mouvement ouvrier un colosse désarmé et un élève modèle de la bourgeoisie. Assez, c’est assez! La bourgeoisie contrôle tout, y compris notre avenir. Seule la fin du capitalisme nous permettra de repenser complètement ce système pourri pour imaginer un monde où ce sont ceux et celles qui travaillent, qui dirigeront leurs destinées. Dénonçons les gestionnaires du capital et leurs défenseurs! Démasquons les gaspilleurs de la bourgeoisie! Finissons-en avec ce système pourri! -- Article paru dans Le Drapeau rouge-express, nº 208, le 13 avril 2009.
Manifestation anticapitaliste du 1er mai
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