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Militarisation pré-électorale du «Homeland» nord-américainRichard Huot, Martes, Octubre 7, 2008 - 13:19
Michel Chossudovsky
Des troupes de combat rapatriées d'Irak pour «intervenir en cas de troubles civils» Un article de l'Army Times a rapporté que le groupe de combat de la 1ère Brigade de la 3ème Division d’infanterie rentre d'Irak afin de défendre la mère patrie et d'« assurer une force d'intervention permanente à l'intérieur du pays en cas d'urgences de tout ordre et de catastrophes naturelles ou provoquées, y compris en cas d'attaques terroristes ». Le groupe de combat a été placée sous le commandement de l’US Army North, la composante armée de terre du Commandement Nord US (USNORTHCOM) (voir l'article de Gina Cavallaro dans l'Army Times du 8 septembre 2008, Brigade homeland tours start Oct. 1, Le déploiement de la Brigade à l'intérieur de la patrie commence le 1er octobre). Dès le 1er octobre, pendant 12 mois, le groupe de combat de la 1ère Brigade sera placé sous de l’US Army North, la composante armée de terre du Commandement Nord US (USNORTHCOM), avec la mission de défendre le pays contre les urgences de tout ordre et les catastrophes naturelles ou provoquées, y compris les attaques terroristes. Ce n'est pas la première fois qu'une unité militaire en service actif est utilisée pour nous aider à l'intérieur du pays... Mais c'est la première fois qu'une unité de combat active est affectée au North Com, un commandement conjoint créé en 2002 avec la mission de fournir un commandement et un contrôle militaires à la défense intérieure des USA et pour coordonner la défense et le soutien militaire aux autorités civiles. Après que le GC1B aura achevé sa mission temporaire, une autre brigade en service, encore non déterminée, devrait le remplacer et la mission deviendrait alors permanente. Le commandement est situé sur la base de l'armée de l'air de Peterson, à Colorado Springs, Colorado, mais les soldats du GC1B qui sont rentrés au pays après 15 mois passés en Irak, seront basés chez eux, à Fort Stewart,Georgie. Il est toujours prévu cependant que la 1ère Brigade BCT reparte début 2010, soit en Irak, soit en Afghanistan ; les soldats seront ainsi restés au pays, 20 mois avant de repartir. Durant ces 20 mois, ils acquerront de nouvelles compétences, utiliseront celles qu'ils ont déjà acquises dans les zones de combat mais, avec très peu de risque, durant cette période, de se faire tuer.(ibid) Le GCB est une unité de combat militaire destinée à affronter un ennemi sur un théâtre de guerre. Mais avec des forces US en difficulté en Irak, pourquoi le Pentagone déciderait-il d'engager ce redéploiement à l'intérieur des USA, à peine un mois avant l’élection présidentielle ? La nouvelle mission du GC1B sur le sol des USA est de participer à la “défense” du territoire et d'apporter un “soutien aux autorités civiles”. Le plus significatif dans ce redéploiement d’une unité d'infanterie US est qu'on puisse supposer que l'Amérique du Nord devienne, en cas d'urgences nationales, une “zone d'intervention”, justifiant ainsi le déploiement d’unités de combat. Les nouvelles compétences qui doivent être transmises consistent en une formation à la répression des troubles civils, une tâche qui incombe normalement aux forces de sécurité « civiles » [police et garde nationale, NdR]. En fait, ce qui est en train de se passer est la militarisation des activités de la police civile, en dérogation au principe du Posse Comitatus* (principe de non-ingérence de l'armée dans les affaires civiles). Les procédures d'urgences actuelles de la FEMA (l'Agence Fédérale des Situations d'Urgences) prévoient la promulgation de la loi martiale en cas d'attaque terroriste. Le GC1B et d'autres unités de combat seraient appelées à remplir des fonctions militaires spécifiques : On pourrait faire appel à elles en cas de troubles civils et pour contrôler les foules ou pour intervenir en cas de scénarios d'épouvante comme un empoisonnement de masse, ou une situation de chaos conséquent à un attentat chimique, biologique, radiologique, nucléaire ou avec un explosif à forte portée (CBRNE). Une formation pour répondre à de tels scénarios à l'intérieur du pays a déjà commencé à Fort Stewart et elle comprend des tâches spécialisées comme savoir intervenir sur des accidents pour extraire des personnes de véhicules endommagés avec des « mâchoires de vie » [terme populaire pour désigner les engins hydrauliques de sauvetage produits par la Hale Products Inc., NdR], des connaissances médicales complémentaires pour pouvoir aider les gens en cas d'attentats CBRNE et un travail en coopération avec des experts du service gouvernemental des forêts afin de savoir se servir de tronçonneuses et de pouvoir défricher pour dégager une route ou une zone. Les soldats du GC1B seront également formés à l'utilisation du “premier pack d'équipement non mortel utilisé par l'armée de terre”, indique le Commandant de l'Unité, Roger Cloutier, en faisant référence à l'équipement destiné à contrôler les foules et la circulation et à ces armes non mortelles conçues pour maîtriser des individus factieux ou dangereux sans les tuer. “C'est un nouveau pack modulaire de possibilités non mortelles qu'ils sont en train d’apprendre à utiliser. Certains éléments en ont déjà été utilisés en Irak mais c'est la première fois que tous les éléments sont présentés dans leur ensemble et, avec cette nouvelle mission qui nous est assignée, nous sommes les premiers à l'utiliser.” Le pack comprend un équipement pour la mise en place rapide de barrages routiers, des herses pour ralentir, arrêter ou contrôler la circulation, des boucliers et des matraques ainsi que des balles à grenaille. Les troubles civils conséquents à la crise financière sont clairement envisagés, étant donné les nombreux impacts dus à l'effondrement financier, sur les épargnes de toute une vie, sur les fonds de pension, la propriété... Le moment choisi pour cette militarisation est crucial : en effet, ceci pourrait affecter les élections présidentielles du mardi 4 novembre. La brigade en activité sur le sol des États-Unis sera baptisée la Consequence Management Response Force, ou CCMRF (prononcer sea-smurf). Quelles sont ces “conséquences” envisagées ? Dans une conférence qui s'est tenue sous la direction du Northcom en février dernier, la mission du CCMRF était définie comme suit : “La protection des communautés contre les attaques terroristes et biologiques est une priorité pour la centaine de membres de l'unité et de civils réunis au QG de la “Joint Task Force Civil Support” (Force conjointe de soutien aux autorités civiles) à Fort Monroe, Virginie. La conférence des commandants sur la réponse du US NorthCom aux attaques de type CBRNE qui s'est tenue du 21 au 23 février, a amené le groupe de travail et les commandants de la JTF-CS à traiter de leurs préoccupations communes concernant les conditions opérationnelles nécessitées dans la mission de gestion des conséquences d'attaques CBRNE et à commencer les préparations à la série d'exercices Ardent Sentry 2007 (exercices bilatéraux de préparation interarmées et de coordination d'efforts). “Nous sommes en train de donner des instructions précises d'ordre opérationnel à nos unités du CCMRF (Consequence Management Response Force) pour les aider à se préparer et à se déployer avec efficacité dans une mission de réponse à des attaques CBRNE dans tous les USA et dans leurs territoires” a déclaré le Spécialiste des Opérations courantes du JTF-CS, Hawley Waterman, qui a aidé à l'organisation de la conférence. “C'est également une opportunité pour mieux se connaître et établir de meilleures relations avec les différents Commandants.” (NorthCom, March 2007, mars 2007) Ce qui est envisagé est l'éventualité d’un attentat terroriste du type false flag**aux États-Unis, qui pourrait être utilisé comme une justification à des actions militaires de représailles ou dites de prévention à l'étranger (en Iran par ex.) ainsi qu'à des actions sur le front intérieur. L'objectif premier de ce déploiement du GC1B est l’application de l’expérience acquise au combat [en Irak, NdR]à l’intérieur des USA. “Je ne connais pas de mission plus noble que celle-ci,” a indiqué Cloutier, qui a pris le commandement en juillet. “Nous avons été partout dans le monde durant le temps du conflit, mais maintenant notre mission est de nous occuper de nos concitoyens chez nous... et suivant l’endroit où un incident se produit, vous rentrez chez vous pour vous occuper de votre ville, des êtres qui vous sont chers.” Alors que la formation au combat des soldats est applicable, a-t-il ajouté, certaines nuances ne le sont pas. Officiellement, l'opération a un mandat d'urgence pour “aider les citoyens américains sur le sol américain, sauver des vies, apporter une assistance aux personnes en danger, aider à dégager les décombres”, mais ceci implique aussi la poursuite d'opérations d'ordre plus militaire : en fait, il semblerait que les tâches d'urgence pour aider les civils ne soient qu'une couverture. Nous sommes ici en présence d'une unité de combat, formée et équipée pour tuer des gens : “Certains éléments de la brigade seront en service 24h sur 24, temps pendant lequel ils effectueront leur entraînement habituel de tireurs d'élite, d'artillerie et autres interventions militaires. En effet, l'unité continuera de s'entraîner et de se préparer pour la prochaine intervention même si elle est au service de la mission CCMRF. Si, par exemple, du personnel était nécessaire en Californie à cause d'un tremblement de terre, tout ou une partie de la brigade pourrait se précipiter là-bas, selon l'étendue des besoins et les spécialités requises. D'autres branches y compris la nouvelle mission temporaire de l'Armée de terre font partie d'un pack de ripostes du NorthCom et du Département de la Défense américaine. Les soldats en service feront partie d'une force militaire qui comprend des éléments d'autres corps d'armée et des équipes de soutien civil de la Garde nationale contre les retombées de l’usage d’armes de destruction massive. Un dernier exercice de répétition de la mission est prévu mi-septembre à Fort Stewart et sera organisé par la Joint Task Force Civil Support, une unité basée à Fort Monroe, Virginie, qui coordonnera et évaluera le déroulement de cette opération impliquant divers services. En plus du GC1B, d'autres unités militaires prendront part à l'exercice d'entraînement d'une durée de deux semaines, y compris des éléments de la 1ère Brigade Médicale basée à Fort Hood, au Texas, et de la 82ème Brigade d'aviation de combat de Fort Bragg, en Caroline du Nord. Il y aura également des unités d'ingénieurs et médicales de l'armée de l'air, la Force de Réaction Initiale à une attaque chimique et biologique du Corps des Marines, une équipe de météorologues de la Marine et des membres de l'Agence Logistique de Défense et de l'Agence défensive de réduction de la menace (DTRA). Los Angeles, avril 1992, après le soulèvement contre le meurtre de Rodney King, la Garde nationale patrouille Vogler a déclaré qu'ils vont faire particulièrement attention aux capacités de communications entre les services. “ C'est un de nos soucis et nous essayons de corriger ça et un des moyens de le vérifier est de faire ce genre d'exercices. Et pour s'en assurer encore plus, nous allons répéter et mettre en place certains des systèmes de communications afin de vérifier la bonne interopérabilité,” il a déclaré. Une urgence nationale peut être déclenchée. “Des scénarios épouvantables comme un empoisonnement massif et une situation de chaos consécutive à une attaque chimique, biologique, radiologique, nucléaire, etc”, ou un scénario de type CBRNE. On suppose qu’il s’agirait d’une forme quelconque d’attentat intérieur, prétendument par des terroristes. Mais, en même temps, le gouvernement Bush peut vouloir rechercher une justification pour placer le pays sous la loi martiale et intervenir militairement sur le sol des USA. “Je ne connais pas le plan du gouvernement dans sa globalité, je sais juste que 24h sur 24, 7 jours sur 7, il y a des soldats, des matelots, des aviateurs et des Marines qui sont prêts à intervenir et à aider s'ils sont appelés,” a indiqué Cloutier. “Je suis heureux en tant qu'Américain, de savoir que mon pays a dédié une unité pour intervenir et aider les gens de mon pays.” (Army Times, citation soulignée par l’auteur MC). “Ce genre d'organisation, de coordination et de formation est une priorité autant dans nos quartiers généraux qu’à NorthCom car nous croyons que nous avons la responsabilité d'être prêts au cas où, à Dieu ne plaise, cela serait nécessaire” (Army News Service, 15 septembre 2008). Le déploiement d'une unité de combat militaire sur le sol US, avec mission de juguler des « troubles sociaux », constitue un précédent historique dangereux. Cela crée une nouvelle légitimité, à savoir que des unités de combat peuvent intégrer des fonctions au sein de la force de sécurité civile et que ceci est finalement accepté autant par le congrès des USA que par le public étasunien. Il convient de préciser que les unités de combat rapatriées d'Irak pour « défendre la patrie » y seront remplacées par des mercenaires. Notes du traducteur * Le Posse Comitatus (lat. « pouvoir du comté ») est un principe politique selon lequel l'armée n'a pas le droit d'intervenir dans les affaires du gouvernement civil, dans celles de la justice ou dans une procédure judiciaire. Il a été institué par le Posse Comitatus Act une loi fédérale US adoptée le 16 juin 1878, après les 10 ans d'occupation des États confédérés par les troupes nordistes, à la fin de la guerre de Sécession. Cette loi visait explicitement à limiter les possibilités pour le gouvernement fédéral de recourir à l'armée pour les opérations de maintien de l'ordre. (NdR) ** Les opérations false flag (« sous faux pavillon » ou « sous fausse bannière ») sont des actions menées avec utilisation des marques de reconnaissance de l'ennemi, dans le cadre d'opérations spéciales.(NdR) Article original en anglais, Pre-election Militarization of the North American Homeland. US Combat Troops in Iraq repatriated to "help with civil unrest", publlié le 26 Septembre 2008 Traduit par Isabelle Rousselot. Révisé par Fausto Giudice. Isabelle Rousselot et Fausto Giudice sont membres de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique.
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