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Du nationalisme à l’internationalisme (4ième partie)Anonyme, Lunes, Septiembre 22, 2008 - 16:12 (Analyses | Economy | Imperialism | Politiques & classes sociales | Resistance & Activism | Solidarite internationale | Syndicats/Unions - Travail/Labor)
Steve Tremblay
Les militants de l’Atelier Ouvrier (AO) complètement ignorants des conclusions de la Gauche communiste en sont arrivés à une position très semblable sur les syndicats. La naissance de l’Atelier Ouvrier remonte au mois de mars 1973 jusqu’à sa dissolution au printemps 74. Ces membres après une autocritique forcée se retrouvèrent dans En Lutte! Je considère que cette disparition de l’Atelier Ouvrier fut un recul pour la classe ouvrière parce qu’ils passèrent dans un groupe stalinien. Les communistes internationalistes de Montréal publient en sept parties, avec l’accord de l’auteur, la brochure Du nationalisme à l’internationalisme. Ci-dessous : la 4ième partie. 1ère partie : www.cmaq.net/node/30896 2ième partie : www.cmaq.net/node/30929 3ième partie : www.cmaq.net/node/30974 L’Atelier Ouvrier De tous les groupes que j’ai connus avant la Gauche communiste, un seul était vraiment prolétarien tant du point de vue des idées que de sa composition. C’est l’Atelier Ouvrier (AO) dont la naissance remonte à mars 73. C’est autour d’une lutte perdue par la faute du syndicat que des ouvrières et des ouvriers de la chemise, de la fourrure, de la chaussure et des chemins de fer se regroupent pour constituer le groupe. Très vite, leur analyse les amène à comprendre que leur défaite est attribuable aux structures mêmes du syndicalisme. Ils doivent agir pour « pousser » sur le syndicat ou agir en dehors en créant des comités de lutte. Dans un deuxième temps, ils écrivent « c’est parce que nous croyions que les luttes économiques ne débouchent pas automatiquement sur la conscience des intérêts politiques de classe des travailleurs [que nous cherchons] par cette réflexion à dépasser cette situation. » Les militants de l’AO cherchent une organisation politique révolutionnaire… Hélas ils seront récupérés par une organisation gauchiste. Parallèlement, l’EDJ (Equipe Du Journal qui donna naissance au groupe maoïste En Lutte! au printemps 73) a des liens avec l’AO. Jusqu'à son premier congrès en novembre 74, EL (En Lutte!) a la même position sur les syndicats que l’AO. Un cahier sur le syndicalisme critiquant les syndicats comme étant intrinsèquement intégrés à l’État est même publié. Les discussions sur les textes préparatoires au 1er congrès par le comité fondateur d’EL, dont je faisais partie, reviennent à la position classique des staliniens. Ce sont les directions syndicales qu’il faut remplacer. Une militante de l’AO et moi défendons le même point de vue. Les critiques d’économisme et de gauchisme sont lancées contre l’AO : économisme parce que trop de temps est mis sur l’étude du carcan qu’est la convention collective et pas assez de temps est mis au ralliement des prolétaires au groupe m-l; gauchisme parce que les syndicats sont dénoncés. Je dirais aujourd’hui que la dénonciation du syndicalisme par l’AO n’allait pas aussi loin que l’a fait la Gauche communiste. Mais s’en était trop pour la majorité des m-l du comité fondateur. Le débat sur le syndicalisme a été quasiment nul lors du premier congrès et la position classique des staliniens a passé. Par la suite, il y a eu une attitude typiquement stalinienne. Une directive de la direction (je n’en faisais plus partie) ordonna à tous les militants de détruire toutes les copies du cahier critique du syndicalisme car un cahier plus conforme à la ligne stalinienne allait le remplacer. Dans son texte La question du syndicalisme au Québec, l’AO répond à la critique d’économisme : « Pourquoi notre travail n’est pas économiste. En intégrant EL, l’AO, quelles que puissent être son origine de classe et sa tendance initiale, a été happé dans l’engrenage de l’idéologie maoïste et il a cessé de faire partie de ce qu’on appelle le marais gauchiste, marais ambivalent quant à ses intérêts réels et instinctivement prolétariens desquels aurait pu émerger une conscience de classe véritable, affutée, en vue de s’organiser autour d’une organisation internationaliste : la seule menace véritable pour la bourgeoisie. EL par la suite a aidé et soutenu en militants et en propagande, la mise sur pied du Comité de Solidarité avec les Luttes Ouvrières (CLSO). Ce comité était le fruit d’une coalition de groupes gauchistes et de groupes populaires qui appuyaient les luttes ouvrières sans critiquer le syndicalisme. Son activité était très semblable à ce que fait la NEFAC aujourd’hui. En septembre 75, le CSLO fut dissout. L’Équipe du journal En Lutte! En février 1973, je participe donc à la création de l’Équipe du journal En Lutte! (EDJ) qui deviendra en 74 l’Organisation Marxiste-léniniste du Canada En Lutte! (OMLC). L’ignorance, encore une fois des acquis de la Gauche communiste, m’a fait militer dans une autre organisation stalinienne moins pire que le PCC (m-l), aventureux et dogmatique mais plus dangereuse idéologiquement. J’ai démissionné de cette organisation six mois avant sa dissolution en mai 82. La brochure qui est à la base de la formation d’EL, Pour un Parti Prolétarien, écrite par Charles Gagnon, applique les thèses staliniennes au Québec et au Canada : 1° C’est le postulat stalinien du « socialisme dans un seul pays ». 3° L’auteur met de l’avant la lutte de libération nationale du Québec dans une première édition pour l’abandonner dans les éditions suivantes (Décision du 1er congrès d’EL en novembre 74) mais en appuyant les luttes de libérations nationales dans le monde. À l’époque de la décadence du capitalisme depuis la fin de la première guerre mondiale, cet appui revient à soutenir des bourgeoisies nationales qui se basent sur une puissance impérialiste contre une autre. Exemple, Cuba qui se libéra de l’impérialisme américain en devenant de plus en plus soumis à l’impérialisme russe. Ainsi, Cuba a été le fournisseur de chair à canon du bloc russe dans les guerres africaines (Ethiopie, Angola, Guinée-Bissau, Mozambique) et au Yémen du Sud, guerres qui ont coûté la vie à des milliers d’ouvriers cubains. 4° La critique des directions syndicales et non des syndicats eux-mêmes. D’ailleurs les membres de l’Atelier Ouvrier ont critiqué cette approche marxiste-léniniste de la question syndicale. Devenus membres d’EL, ils furent obligés de faire une autocritique parce qu’ils avaient été « économistes ». Le but de l’EDJ était de publier régulièrement un journal qui serait diffusé dans tout le Québec. L’avant-premier numéro a été publié au dernier jour d’avril 73 et diffusé le lendemain à la manifestation du premier mai. Une anecdote cocasse, dans cet avant-premier numéro tiré à 10 000 copies, il y avait une coquille invraisemblable. La phrase de Marx « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous » était devenue lors de l’impression « Propriétaires de tous les pays, unissez-vous ». Il a donc fallu, pendant la nuit précédant la manifestation du 1er mai, corriger cette erreur sur les 10 000 copies. Le journal, de huit à dix pages, commença à paraître régulièrement en septembre 73 deux fois par mois. Nous n’étions que dix militants pour faire paraître le journal En Lutte! Il fallait rencontrer des travailleurs, des grévistes; il fallait l’écrire; il fallait discuter en commun chacun des articles. C’était une des raisons pour laquelle les articles n’étaient pas signés et aussi par sécurité parce que la police aurait aimé connaître les noms des signataires. Il fallait le diffuser; cela voulait donc dire se pointer à la porte des usines à 5h, 6h et 7h du matin pour le vendre. Tous les militants, au début, devaient y aller, profs, étudiants, chômeurs. Cependant dès qu’un militant grimpait dans la hiérarchie stalinienne, il était exempté de cette tâche. Il y avait aussi d’autres groupes maoïstes, au Québec (une année plus tard ce fut dans tout le Canada) qu’il fallait rencontrer pour discuter de nos idées politiques. L’horaire individuel de la dizaine de militants, au début, était d’une trentaine d’heures par semaine mise sur la production, la diffusion du journal et les rencontres internes et externes. Des rencontres jusque tard dans la nuit, des fins de semaine complètes. Cela n’était rien pour améliorer la vie de couple. J’en ai payé le prix personnellement surtout quand ma conjointe prolétaire n’était pas militante et que nous avions des enfants. C’était la forme de militantisme dans une organisation maoïste. Ça s’est amélioré par la suite avec la venue de nouveaux membres parce que nous n’aurions pu continuer cet activisme bien longtemps. Nous avons diffusé le journal En Lutte! dans tout le Canada avec un tirage de 10 000 copies par semaine à partir de 1977. Lors des élections tant fédérales que provinciales, le journal s’est toujours prononcé pour l’annulation du bulletin de vote. Les élections vous laissent le choix entre plusieurs personnes qui feront le jeu des exploiteurs pour les trois ou quatre prochaines années. Cette position sur l’annulation était une position complètement bourgeoise car elle laissait entendre qu’il y avait des possibilités parlementaires pour les travailleuses et les travailleurs. La position de la Gauche communiste est qu’il n’y a rien à attendre des élections et du parlement. C’est l’abstention totale qui doit être mise de l’avant. Ce sont les conseils ouvriers – ou une autre forme d’organisation encore plus efficace pour le prolétariat mais qu’il n’a pas encore trouvée – qui seront les représentants de la classe ouvrière, guidée et non pas dirigée par un parti révolutionnaire international. La police a continué son travail d’espionnage. En effet, pendant un certain temps, dans un grand logement qui était situé au 3939 rue St-Denis, il y avait un membre et sa conjointe sympathisante qui restaient là et deux des pièces étaient réservées pour En Lutte! À un moment donné, le militant qui y demeurait nous apprend qu’il a entendu un vacarme vers 3h du matin la nuit précédente. J’examine alors une des pièces qui nous était réservée et j’aperçois une petite éraflure sur un mur près du plafond. En soulevant la peinture qui s’en détachait, je remarque ce qui ressemble à un petit bout de tuyau et qui en fait était un bout de micro. Ça faisait à peine trois semaines que nous avions pris possession des lieux que déjà la police installait son poste de surveillance depuis le logement connexe qui était vacant... Face à cet espionnage policier, nous avons eu une attitude discutable. Nous avons fait semblant de n’avoir rien vu et entendu. Pendant une année, on faisait attention à nos paroles comme si nous ne savions pas qu’il y avait un micro. Quelques années plus tard, nous avons su que la GRC installait des micros un peu partout comme à l’Agence de Presse Libre du Québec et chez des militants. Je me souviens à ce sujet d’avoir été filmé par un flic en civil, alors même que j’empruntais une ruelle tranquille, en revenant de l’imprimerie avec les journaux d’En Lutte! Cette façon de faire est d’ailleurs un des plus vieux modus operandi utilisé par la police pour intimider les personnes, mettant en cause, d’une façon ou d’une autre l’ordre établi. Jusqu’en novembre 74, En Lutte! était un groupe qui préconisait l’indépendance du Québec. Dans le langage maoïste, cela voulait dire prendre des positions politiques en faveur de la lutte de libération nationale du Québec à la condition qu’elle soit dirigée par le parti révolutionnaire de la classe ouvrière. Aujourd’hui, je fais mienne l’idée que depuis que le capitalisme est entré dans sa phase de décadence lors de la Première guerre mondiale, les luttes de libération nationale ne visent qu’à faire prendre parti, aux prolétaires pour une fraction ou une autre de la bourgeoisie. Ces luttes les mènent à se dresser les uns contre les autres, cela pouvant aller jusqu’à la guerre où c’est encore au prolétariat à mourir en ligne de front. L’extrait ci-dessous de Socialism or Barbarism de la Communist Worker’s Organisation (CWO) , section britannique du Bureau International pour le Parti Révolutionnaire, écrit en 1994 est très bien explicite sur ce point. "À ceux et à celles qui avancent que Marx soutenait certains mouvements indépendantistes ou que Lénine soutenait une politique d’appui à l’autodétermination, nous répondons qu’un «marxisme» aussi mécaniste n’est pas du marxisme du tout. Marx écrivait à une époque où il pouvait constater que le capitalisme développait la classe ouvrière, des nouvelles technologies, de la machinerie ainsi que la pensée scientifique. Tout ce qui était nécessaire pour rendre possible le communisme. Conséquemment, Marx et Engels appuyèrent certains mouvements nationalistes lorsqu’ils les croyaient capables de se débarrasser du féodalisme et autres structures sociales précapitalistes. Ce fut la base d’une nouvelle zone de développement capitaliste. Durant cette période ascendante du capitalisme, il était possible que de nouvelles nations capitalistes indépendantes émergent et ainsi, élargissent les fondements de la classe ouvrière, cette future fossoyeuse du capitalisme. Cependant, depuis l’ouverture de la présente phase de domination impérialiste de la planète, aucune telle formation capitaliste indépendante n’est possible. C’est Luxemburg et non Lénine qui a le mieux saisi cette réalité, malgré son analyse erronée des racines de l’impérialisme. Le développement subséquent du capitalisme durant ce siècle n’a que confirmé la justesse de la position de Luxemburg sur la question nationale. Lénine avait prévu que la lutte politique des nations coloniales provoquerait une immense crise du système. En fait, cela n’est pas arrivé parce que lorsqu’eut lieu la décolonisation, cela n’a eut pour effet que de réduire les coûts militaires de l’impérialisme. Elle ne changea en rien la relation économique. Dans plusieurs cas, la décolonisation en soi fut une partie intégrante de la lutte inter-impérialiste car elle fut imposée par les USA sur les puissances impérialistes plus anciennes, après son émergence en temps que pouvoir impérialiste dominant en 1945. Lors du premier congrès d’En Lutte! en novembre 74, un vote unanime prit position en faveur de l’unité de tous les travailleurs canadiens et québécois. Le congrès, suite à certaines résolutions, se rendit compte que les travailleuses et travailleurs québécois avaient les mêmes ennemis que les travailleuses et travailleurs canadiens donc, ceux-ci devenaient leurs principaux alliés. Le raisonnement en était que des dirigeants politiques francophones comme René Lévesque, ainsi que des dirigeants économiques comme celles et ceux qui sont à la tête de Bombardier ou de la Donohue avaient peut-être intérêt à créer un Québec « indépendant » capitaliste avec ses timbres, son drapeau et ses dollars – et ce, même si à l’époque plusieurs nationalistes étaient prêts à opter pour le dollar américain comme devise québécoise. Cette résolution fut un changement organisationnel très important et entraîna la diffusion du journal ainsi que des rencontres avec des groupes maoïstes dans tout le Canada. Ceci entraîna donc la production d’un journal bilingue à toutes les deux semaines en 1975 et l’impression du même journal à toutes les semaines en 1976. Par ailleurs, malgré cette résolution qui semblait étendre le terrain d’action politique du prolétariat québécois confiné à des délimitations provinciales, En Lutte! demeura néanmoins dans le vacuum politique de la théorie stalinienne pour l’édification du socialisme dans un seul pays. Le soutien aux luttes de libérations nationales, qui se résume à appuyer une bourgeoisie au détriment d’une autre (position, il va sans dire, complètement anti-prolétarienne), dans les pays de la périphérie capitaliste continua donc. Durant ces années 75, 76 et 77, EL rallia beaucoup de petits groupes maoïstes tant au Québec que dans les autres provinces, sans compter tout une panoplie d’individus. Le nombre de membres à ce moment se chiffrait autour de 350. En Lutte! rencontrait ainsi d’autres groupes maoïstes en vue de débattre ou même de les rallier. Je me souviens d’une invitation à débattre de la part du PCC (m-l). Leur courrier n’était nul autre que le leader nationaliste actuel d’extrême droite, Raymond Villeneuve. J’étais présent lors de cette rencontre et il y avait deux autres membres d’EL avec moi. De l’autre côté de la table, Hardial Bains et deux membres de son « parti » nous faisaient face. Ce « parti » n’a jamais rien eu de commun avec un véritable parti prolétarien internationaliste. Il a été fondé en 1970 complètement coupé des luttes de la classe ouvrière. Comme tous les maoïstes, il mettait de l’avant le concept stalinien du « socialisme dans un seul pays ». Le gourou du « parti » Hardial Bains se prenait pour le « Mao canadien ». Il y avait au moins un point en commun avec Mao comme nous le verrons plus loin. Une énorme rotation des membres du « parti » était due entre autres à ses provocations avec la police. Son membership n’a jamais dépassé la cinquantaine. Dans les milieux gauchistes, le PCC (m-l) était surtout connu comme le parti du 2x4, nom des bâtons qu’il utilisait dans les manifs non seulement contre les policiers mais aussi contre les groupes qui voulaient se placer en avant de son cortège dans les manifestations. De la Chine au début des années 70, puis à l’Albanie, il passa au soutien de Cuba dans les années 90, bref d’un capitaliste d’état à un autre. À un autre moment , nous avons discuté de la scission qu’il y avait eu à l’été 71 dans le PCC (m-l). Un des leaders de cette scission était Pierre Dupont qui fonda à l’automne 71 le Mouvement Révolutionnaire Ouvrier (MRO) qui ne dura qu’une saison. C’était toujours un groupe maoïste qui ne critiquait que l’aventurisme du PCC (m-l), son isolement des francophones et finalement l’égocentrisme du gourou Hardial Bains. Même s’il n’avait été qu’un sympathisant du PCC (m-l), Bains nous apprit que son parti avait envisagé à l’époque son assassinat mais que les conditions n’étaient pas alors propices pour ce faire. (sic!) Ce « Mao canadien» n’en dit pas plus sur ce règlement de compte qu’il envisageait. Le PCC (m-l) se situait bien dans la ligne politique des maoïstes. Du PCC de Mao, des maoïstes au Népal ou au Pérou sans parler des khmers rouges, l’assassinat des opposants politiques à l’intérieur de leur groupe ou à l’extérieur faisait partie de leurs mœurs politiques. Des maoïstes d’Halifax, de Toronto et de Vancouver avaient déjà rallié l’organisation. Mais pour développer ou consolider l’OMLC dans tout le pays, des québécois furent envoyés dans les autres provinces en vue de propager les positions d’ En Lutte! . Des militants quittaient volontairement pour des endroits comme Vancouver ou Edmonton au nom de l’organisation. Le chômage étant moins élevé à cette époque, il était relativement facile pour eux de trouver du travail et de s’intégrer pour faire de l’agitation politique en vue de rallier de nouvelles forces. En Lutte! organisa donc des conférences pour l’unité des marxistes-léninistes. Par exemple, à l’une de ces conférences, au Cégep Édouard-Montpetit, 3 000 personnes vinrent y assister. Environ un millier de personnes inféodées à l’organisation assistaient aussi régulièrement aux rencontres du premier mai, des fêtes du 8 mars et aux fêtes anniversaires d’En Lutte! À la même période, le Parti communiste Ouvrier, des maoïstes plus « pures » qu’EL, avait des assistances semblables à leurs rencontres publiques. Seuls les conférenciers dans la « ligne juste » maoïstes pouvaient s’exprimer. Des internationalistes du camp prolétarien n’auraient jamais pu s’exprimer librement parce qu’ils auraient à coups sûr démoli les personnages de Staline et de Mao, tout en pulvérisant la théorie du socialisme dans un seul pays et leur conception nationaliste et sectaire d’un parti qui n’avait rien de prolétarien. Note Ce texte de 71 pages, publié en décembre 73 par l’Atelier Ouvrier, analyse point par point les clauses d’une convention collective d’ouvriers de la chaussure. Deux ouvriers et une secrétaire en faisaient partie ainsi qu’une intellectuelle et ils avaient quelques sympathisants comme moi. Ces militants complètement ignorants des conclusions de la Gauche communiste en sont arrivés à une position très semblable sur les syndicats. La naissance de l’Atelier Ouvrier remonte au mois de mars 1973 jusqu’à sa dissolution au printemps 74. Ces membres après une autocritique se retrouvèrent dans En Lutte! Je considère que cette disparition de l’Atelier Ouvrier fut un recul pour la classe ouvrière parce qu’ils passèrent dans un groupe stalinien. Le groupe En Lutte! considérait qu’il fallait changer les directions syndicales, sans aller plus loin dans son analyse des syndicats. Les erreurs des syndicats étaient dues à des directions corrompues et non pas au fait, que le syndicalisme est complètement intégré au système capitaliste et à son État. …« B. Considérations générales sur le syndicalisme À mesure que le capitalisme se développait, s’étendait d’un pays à l’autre, d’une industrie à l’autre, le syndicalisme à son tour élargissait ses rangs. Ainsi on peut déjà donner une première définition du syndicalisme que nous complèterons plus loin. Le syndicalisme apparaît d’abord comme la FORME D’ORGANISATION CAPITALISTE DE LA CLASSE OUVRIÈRE. Précisons ces termes. Le syndicalisme est la forme d’organisation capitaliste de la classe ouvrière. C’est-à-dire est le mode regroupement des ouvriers qui tentent de défendre leurs intérêts économiques – salaires et conditions de travail – contre les patrons. Mais cette façon de s’organiser est dite capitaliste parce qu’elle correspond à la naissance et au développement du capitalisme, autour du 19e siècle. Avant, les ouvriers étaient organisés autrement parce que les patrons du temps régnaient de façon différente et que les conditions de travail et de production étaient aussi différentes. Cette façon de s’organiser est dite capitaliste aussi parce qu’elle obéit, à peu de choses près, aux mêmes règles de fonctionnement que celle régnant dans l’entreprise capitaliste. Cette dernière affirmation a deux sens. D’abord elle signifie comme nous le disions plus haut, que le syndicalisme est développé parallèlement au capitalisme. Ensuite, elle signifie que dans ses structures, son organisation interne, ses RÈGLES DE FONCTIONNENT, sa hiérarchie, le syndicalisme fonctionne à peu près comme l’entreprise capitaliste. C’est-à-dire que dans le syndicalisme, il y a la BASE et le SOMMET. Le sommet décide pour la base qui n’a pas grand chose à dire. En un mot, il y a des BOSS dans le syndicalisme comme dans l’entreprise. De plus, même si initialement le syndicalisme a été construit pour défendre les intérêts des travailleurs, aujourd’hui il semble plus souvent qu’autrement que ce sont les travailleurs qui sont faits pour financer le syndicalisme. En effet, le syndicalisme n’a plus son ardeur des débuts. Pourquoi? Parce qu’il est devenu une INSTITUTION RESPECTABLE DU SYSTÈME ÉTABLI. Parce que le système actuel a passé des lois qui régissent le fonctionnement du syndicalisme, des luttes ouvrières, des griefs, de la négociation, etc… Ces LOIS LIMITENT l’action du syndicalisme et par là EMBRIGADENT la classe ouvrière dans un CARCAN JURIDIQUE qui lui lie les pieds et les mains. La troisième raison pour laquelle le syndicalisme est dit la forme d’organisation capitaliste de la classe ouvrière réside précisément dans ce dernier point. À cause des nombreuses LOIS RÉGISSANT la pratique syndicale, le syndicalisme est obligé d’entretenir des relations avec l’ÉTAT, plus particulièrement avec le MINISTÈRE DU TRAVAIL. Ainsi le syndicalisme est-il toujours en situation de DÉPENDANCE vis-à-vis des pouvoirs publiques. Une des preuves en est donnée par les multiples rapports que les centrales syndicales envoient au gouvernement pour que celui-ci n’agisse pas de façon trop défavorable à la population. Mais cette intervention de l’ÉTAT dans le domaine des relations de travail a eu un effet crucial sur le syndicalisme. En effet au début du 19e siècle on ne faisait pas de distinction – à juste titre d’ailleurs – entre la lutte économique des travailleurs et les combats politiques qu’ils menaient pour s’affranchir des patrons. Les luttes économiques sur les conditions de travail et de salaires n’étaient pas aussi séparées au plan de L’ORGANISATION DES TRAVAILLEURS des luttes politiques qu’aujourd’hui. Or depuis plus de cent ans les interventions de l’État dans le domaine des relations de travail ont délimité les règles de la pratique syndicale, son champ d’action, etc… Parallèlement le syndicalisme surtout nord-américain, se perfectionnait dans la négociation collective et laissait à d’autres le soin de mener les actions politiques. C’est de là que date la séparation entre lutte économique et combat politique. Or pour la classe ouvrière, lutte économique et combat politique devraient être une seule et même chose. L’un impliquant l’autre. » Suite aux critiques d’économistes de la part des m-l d’En Lutte! sur leur travail, voici leur réponse : (les soulignés et les guillemets ne sont pas de l’auteur de la brochure mais de ses rédacteurs) « Pourquoi notre travail n’est pas économiste Dans Que faire ? Lénine combattra avec acharnement l'économisme : "Au lieu d'appeler à marcher en avant, à consolider l'organisation révolutionnaire et à étendre l'activité politique, on appela à revenir en arrière, vers la seule lutte trade-unioniste. On proclama que «la base économique du mouvement est obscurcie par la tendance à ne jamais oublier l'idéal politique» ". Le texte de l’Atelier Ouvrier montre bien qu’il n’était pas économiste quand ils écrivent : »Or pour la classe ouvrière, lutte économique et combat politique devraient être une seule et même chose. L’un impliquant l’autre.
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