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«Catastrophes»: Mode de vie du Capital

Anonyme, Miércoles, Mayo 21, 2008 - 13:49

GCI

Mai 2008: cyclone en Birmanie (100.000 morts), tremblement de terre en Chine (50.000 morts), etc.

Seveso, Bopal, Tchernobyl, Sandoz, etc., la liste est longue. Ce ne sont pas des bavures accidentelles, mais c'est la tendance inéluctable de la production capitaliste. Les bandes de loups gauchistes, écolos et philanthropes en tout genre, se mobilisent et aboient au travers du spectacle de la misère, sur le manque d'informations, le manque de sécurité, de précautions, sur le mutisme des médias; et l'on tombe dans les débats confus sur la responsabilité des collectivités et des organismes publics; et l'on commence à pleurnicher sur les excès du capitalisme, à proposer des solutions miraculeuses pour aménager l'ordre capitaliste, comme si les dangers du nucléaire ou de l'industrie chimique n'étaient pas une des expressions fondamentales, parmi bien d'autres, de l'horreur de la domination du capital.

Ils s'indignent de cet état de chose et réclament un capitalisme propre, un capitalisme rationnel, dirigé par la Science. La Science et la rationalité qui ne sont rien d'autre que la recherche du profit. La Science, la "pute", du capital. Le gaspillage capitaliste correspond à la rationalité du capital, dont la raison d'être est de produire du capital. Les industries chimiques, celles du nucléaire civil et militaire, représentent certes une menace en raison des nuisances graves sinon irréversibles pour l'espèce humaine, mais surtout parce que le capital engendre par la logique de son système la soumission à son fonctionnement anarchique de l'ensemble de l'espèce humaine, à commencer par les prolétaires, ainsi que des ressources de la nature.

MAIS, c'est dans tous les domaines de la vie quotidienne que le capital, sans cesse à la recherche d'un meilleur profit, mutile, massacre les individus par l'intermédiaire de la technique prostituée.

Le capital, c'est aussi la concentration des villes où l'on ne peut plus respirer, la messe sans cesse accrue des automobiles individuelles, la pollution de l'air, de l'eau, etc.

Le capital, c'est encore les "accidents" de travail, des décès dus au développement de la misère, l'urbanisme, les nourritures trafiquées (dernier exemple en date: la "vache folle"), l'entassement dans des cages à lapins, dans un univers de béton, les grandes famines non pas dues à des causes naturelles, mais au capital qui mine l'agriculture non rentable pour lui, la construction des barrages et des villes sur des terrains à risques, etc.

Economie(s), profits...

Le capital n'est jamais innocent des catastrophes. Elles ne sont pas le produit de la fatalité, mais de la course au profit, à la rentabilité. Les catastrophes sont directement provoquées et aggravées par des causes sociales.

Hier:
L'homme primitif, tout comme l'animal, cueille et consomme les fruits que la nature produit elle-même; et tout comme l'animal, il fuit les déchaînements naturels qu'il est incapable de contrôler et les phénomènes qui menacent sa vie.

Aujourd'hui:
L'apparition du capital et de la production marchande suppose la domination de l'homme sur la nature. C'est la variété des produits naturels du sol et la nécessité de s'en servir, de l'économiser qui jouent un rôle décisif dans l'histoire du développement des rapports marchands et des rapports de l'homme avec le "milieu naturel".

Au-delà de leur gravité particulière, les catastrophes traduisent une situation plus générale. Le développement technique et militaire, la course aux profits, imposent la logique du profit et de la rentabilité au détriment des prolétaires.

Le capital, affamé de surtravail, aboutit non seulement à extorquer aux vivants la plus grande partie possible de force de travail, au point d'abréger leur existence, mais fait de la destruction du travail mort (matériel, bâtiments,...) une bonne affaire dans la mesure où elle permet de remplacer les produits encore utiles (uniquement pour les besoins des prolétaires) par un nouveau travail vivant.

Lorsque les catastrophes détruisent les habitations, des cultures, etc., elles détruisent une certaine richesse. Cette richesse disparue était une accumulation de travail passé. Pour éliminer les effets de la catastrophe, il faut une masse énorme de travail actuel, vivant. Il est plus intéressant pour le capital de ne pas engager de frais pour l'entretien, la sécurité,... Par contre, la reconstruction permet d'"utiliser" du travail vivant, donc d'exploiter les prolétaires. Le capital, dans sa logique, doit anéantir du travail mort encore utile -- destruction des choses qui ne sont plus rentables pour lui, qui n'ont d'utilité que pour satisfaire des besoins --.

"Le capital oppresseur des vivants, assassine aussi les morts."

Hier:
La bourgeoisie a glorifié la science et la technique en les présentant comme un bien absolu et a répandu l'idée selon laquelle la société, par son développement technique, scientifique et productif, place l'espèce humaine dans les meilleures conditions pour lutter contre les difficultés du milieu naturel. C'est le progrès, s'exclame-t-elle, qui va résoudre tous les problèmes de l'humanité et les prolétaires doivent se soumettre à cette nouvelle divinité et la servir.

Aujourd'hui:
Plus le progrès s'est développé et plus les conditions de vie du prolétariat ont empiré.
"L'histoire révolutionnaire ne définira pas l'âge capitaliste comme l'âge du rationnel, mais comme celui de la camelote. De toutes les idoles que l'homme a connues, c'est celle du progrès moderne et de la technique qui tombera des autels avec le plus grand fracas." - Marx -
Le capital doit être détruit, il n'y a rien à en retirer.

La théorie selon laquelle, une fois anéanti le capital et ses contraintes de profit, les forces techniques de production pourront être utiles aux générations futures par la prodigieuse productivité de travail obtenue, signifie en fait pour le prolétariat aujourd'hui toujours plus d'exploitation.

Le capital, dans sa lutte effrénée pour la valorisation, ne peut être que progressif -- produire toujours plus pour se valoriser sans tenir compte des besoins humains -- c'est-à-dire destructif -- la course au profit entraîne obligatoirement la destruction de tout ce qui est humain --.

Mais il n'est pas non plus suicidaire. Alors il produit ses propres organisations humanistes pour lutter contre ses propres excès.

Lorsque la classe capitaliste s'est rendu compte que sa douillette existence risquait d'être menacée par le monstre pourrissant, l'écologisme est apparu. Les écologistes ne sont que des régulateurs du capital, ils font partie intégrante de l'Etat. Leur myopie et leur impuissance leur interdisent de remonter aux causes réelles et surtout de s'y attaquer.

Le responsable de l'empoisonnement de la nature et de la vie de l'homme, ce n'est pas l'homme en général, ni la société en général, c'est un mode de production bien précis, régi par des lois précises, caractérisé par la généralisation de la production de marchandises au moyen du travail salarié. Pollutions, désastres, etc. ne sont que des aspects, des conséquences du développement de la production marchande, de la course effrénée du capital pour sa valorisation.

Les radotages écologistes font l'apologie systématique de la nature et de tout ce qui est naturel.

"A trop radoter sur la nature, on en arrive à idéaliser l'état où les hommes nus grattaient la terre avec leurs ongles pour trouver des tubercules comestibles." - Marx -
Il ne s'agit pas de prôner un retour à la "nature", à des "conditions naturelles".
Il s'agit de bien autre chose que de planter trois arbres dans le béton ou d'instituer un contrôle sur la mort lente par asphyxie et abrutissement progressif. L'écologisme représente la réaction du capital contre ses propres excès, sa tentative de contrôler et limiter ses destructions anachroniques.

Il en appelle à l'homme ou à la société en général, à toutes les bonnes volontés. Il est pire qu'inefficace car il s'indigne de certains effets du capital et se garde bien de s'attaquer à leurs causes. S'adressant à tout le monde, il noie le prolétariat dans une union générale de tous les citoyens.

Il est absurde et criminel de revendiquer un capitalisme propre, non polluant, aussi absurde et criminel que de revendiquer un capitalisme sans oppression, sans massacre, sans misère, etc. Aussi longtemps que le capitalisme existera, il exploitera et opprimera les hommes, et aussi longtemps il dévastera la nature. C'est avec cette société qu'il faut en finir, et pour la détruire, il faut que le prolétariat brise toute solidarité avec le capital et retrouve le terrain de la lutte de classes.

"Le fleuve immense de l'histoire humaine a lui aussi ses crues irrésistibles et menaçantes. Lorsque le flot s'élève, il mugit contre les deux digues qui l'enserrent. A droite, c'est la digue conformiste, pour la conservation des formes existantes et traditionnelles -- un passage continu de prêtres psalmodiant en procession, de flics et de gendarmes en patrouille, de maîtres d'école et de charlatans débitant les mensonges officiels et la scolastique de classe. A gauche, la digue réformiste: s'y entassent les membres des partis "populaires", les professionnels de l'opportunisme, les parlementaires et les chefs des syndicats progressistes. Echangeant des injures de part et d'autre du courant, les deux cortèges prétendent posséder la recette pour faire en sorte que le fleuve puissant continue son cours réprimé et forcé. Mais aux grands moments de l'histoire, le courant brise toutes les entraves, sort de son lit et "bondit", comme le Pô à Guastalla et au Volano, dans une direction inattendue, emportant les deux bandes sordides dans la vague irrésistible de la révolution, renversant les digues de toute sorte, et donnant à la société comme à la terre une face nouvelle."
Amadeo Bordiga: Espèce humaine et croûte terrestre

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