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Pourquoi les services secrets voulaient pieger Hani RamadanAnonyme, Martes, Abril 24, 2007 - 03:26
Claude Covassi
Les profils d'études des services secrets du SAP sur Hani Ramadan exposent qu’il pourrait représenter une tendance leadership de l’Islam politique en Europe d’ici cinq ou dix ans. Cette allégation est motivée par l’analyse de ses réseaux d’influence, plus discrets que ceux de son frère Tariq, mais beaucoup plus efficaces en termes de crédibilité islamique et de doctrine politique. Comme on le sait, Hani Ramadan est un des petits fils de Hassan el-Banna, fondateur des Frères Musulmans, et les services secrets du SAP le suspecte depuis toujours d'être un des responsable de la branche internationale de cette organisation. Il s’avère que tout cela ne tient que par le fantasme obsessionnel de quelques commissaires du SAP, car la branche internationale des Frères Musulmans n’existe pas. AFFAIRE COVASSI I. L’hebdomadaire dominical évoque les propos d’un inspecteur de la police genevoise « qui connaît bien le dossier », mais préfère garder l’anonymat. Il tient la révélation suivante : « Claude Covassi aurait fait croire aux services qu’il existerait un lien entre le Centre Islamique que dirige Hani Ramadan et des organisations terroristes, et les services secrets ont eu la faiblesse d’avaler ses bobards ». Pendant toute la période de mon activité pour les services secrets du SAP au Centre Islamique des Eaux-vives, j’ai rédigé plus de quatre-vingts mémos. Aucun d’eux ne mentionne une quelconque organisation terroriste en lien avec le Centre Islamique ou même Hani Ramadan. Je relate par contre, dans ces mêmes mémos, l’omniprésence d’agents et d’informateurs issus de services étrangers qui opèrent sans contrainte sur le territoire helvétique. Par ailleurs, après mon retour de mission en Syrie, en février 2005, j’ai rédigé un rapport qui indique noir sur blanc, à propos des « volontaires » que j’avais accompagnés à Damas, et dont un rapport des services secrets libanais signalait qu’ils voulaient aller combattre en Irak : « On peut être persuadé que s'ils venaient à se réunir au CIGE, Hani Ramadan les en exclurait immédiatement (Menes – Rapport sur mission en Syrie – Op. Memphis - III §7). Mais nos journalistes du Dimanche n’en restent pas là. Le ton de l’article monte vite, et l’on va passer des déclarations falsifiées d’un inspecteur anonyme à la conviction quasi générale que l’on prête à différents services sécuritaires fédéraux, sous forme d’aveu terrible : « Covassi aurait manipulé tout le monde ! ». Affirmation d’autant plus surprenante que quelques lignes plus haut je n’étais qualifié que de médiocre informateur. J’aurais donc ensorcelé tout le monde, inexplicablement, comme si je n’avais eu en face de moi que des imbéciles, ou des objets inertes. Seul, j’aurais hypnotisé la police genevoise, les services secrets intérieurs du SAP, la Police Judiciaire Fédérale, les services secrets extérieur du SRS, et qui d’autre encore ? À moins, peut-être que je n’aie usé de mes charmes, comme le laisse supposer la légende de la photo publiée, où je pose en maillot de bain : « un beau gosse manipulateur ». Dans ce dégorgement de mensonges monotones et répétitifs, l’inspecteur anonyme ose encore : « les services secrets suisses sont incompétents pour tout ce qui touche à l‘Islam ». Cette ligne de défense n’est ni nouvelle ni très originale. La tâche la première et la plus évidente des services secrets est de faire croire à leur inexistence ou, du moins, à leur incompétence, et qu’il n’y a ainsi pas lieu de tenir compte de leurs activités tout à fait secondaires. En réalité, tout individu déclaré ennemi de l’organisation sociale ou politique de son pays, et, d’avantage encore, tout groupe d’individus contraint de se déclarer dans cette catégorie est connu de plusieurs services de renseignements. De tels groupes sont constamment sous surveillance. Leurs communications internes et externes sont connues. Ils sont rapidement infiltrés par un ou plusieurs agents, parfois au plus haut niveau de décision. Les services secrets suisses du SAP surveillent depuis plus de quarante ans, à tous les niveaux, les moindres faits et geste de la famille Ramadan. Saïd Ramadan, le père de Hani, avait d’ailleurs en son temps déjà fait les frais des manipulations de la Police Fédérale. Ces derniers allant, par exemple, jusqu’à faire photographier des membres de sa famille sur les plages de Biarritz lors de vacances estivales. Cet article du Matin Dimanche permet de confirmer l’idée qu’une rumeur propagée par un simple supplétif des services secrets prend à l’instant le poids indiscuté de preuve séculaire. On invente d’un bout à l’autre, mais on n’invente pas n’importe quoi, ni n’importe comment. Quand un scandale éclabousse l’Etat, la méthode de défense est toujours la même : La première phase consiste à nier l’existence du problème. La deuxième, lorsqu’il n’est plus possible nier, il faut expliquer que, certes, le problème est bien réel mais tout à fait mineur, sans conséquence aucune. Et la troisième phase, quand le pire est inévitable, où il est alors nécessaire de trouver la parade pour faire endosser les responsabilités à d’autres. Ainsi, pour la Délégation des Commissions de gestion, dont le rapport vient d’être reporté pour la troisième fois, il s’agit d’imputer la responsabilité de l’opération Memphis à la police du canton de Genève, laquelle avait la première exploité mes compétences de « bon agent provocateur », comme le relate les journalistes du Matin Dimanche. Ian Hamel et Ludovic Rocchi ont beau écrire que les services secrets « en ont assez de passer pour des charlots », il est à craindre que leur article ne serve qu’à confirmer davantage cette mauvaise réputation. II. Les profils d'études des services secrets du SAP sur Hani Ramadan exposent qu’il pourrait représenter une tendance leadership de l’Islam politique en Europe d’ici cinq ou dix ans. Cette allégation est motivée par l’analyse de ses réseaux d’influence, plus discrets que ceux de son frère Tariq, mais beaucoup plus efficaces en termes de crédibilité islamique et de doctrine politique. Comme on le sait, Hani Ramadan est un des petits fils de Hassan el-Banna, fondateur des Frères Musulmans, et les services secrets du SAP le suspecte depuis toujours d'être un des responsable de la branche internationale de cette organisation. Il s’avère que tout cela ne tient que par le fantasme obsessionnel de quelques commissaires du SAP, car la branche internationale des Frères Musulmans n’existe pas. Il faut noter également que le département de l’instruction publique du canton de Genève avait arbitrairement limogé Hani Ramadan de son emploi d’instituteur en 2003. Il a ensuite gagné tous ses procès contre ce gouvernement qui tôt ou tard sera contraint de le réintégrer. Selon les services secrets du SAP, cette victoire contre l’Etat Genevois pouvait lui permettre d’atteindre une posture emblématique et d’étendre plus rapidement encore son influence. Pour toutes ces raisons Hani Ramadan était une cible à éliminer politiquement. Pourtant, la raison principale, celle qu’il l’a emportée définitivement, est d’une toute autre nature. Depuis plusieurs années, les services secrets du SAP veulent que leurs pouvoirs d’investigation soient renforcés. Comme dans d’autres pays, ils se servent du prétexte de la lutte contre le terrorisme pour essayer d’obtenir un contrôle accru sur la société. C’est dans cette idée qu’ils ont élaboré un projet de révision de la loi sur la sécurité intérieure. Le texte prévoit notamment le fichage systématique des personnes suspectes, l'obligation d'information pour les fonctionnaires publics, la surveillance téléphonique, postale et électronique sans avis préalable de la justice, l’autorisation d’écoute dans les chambres d’hôtels, etc, etc. Ce projet de loi étant largement impopulaire, contesté par tous les partis politiques et même critiqué par le Conseiller Fédéral Christophe Blocher, il était nécessaire de fabriquer un choc assez puissant pour générer une forte réaction émotionnelle au sein de la population, de sorte à justifier ce renforcement des pouvoirs des services secrets du SAP. C’est dans cette optique qu’à été définitivement tranchée l’idée de piéger Hani Ramadan, dans le dessein d’en faire un mini « Ben-Laden » local qui serait à même de générer la dose de terreur suffisante dans la population pour qu’elle accepte ces nouvelles lois sécuritaires. Il s’agissait dans un premier temps d’impliquer Hani Ramadan dans le recrutement de volontaires désireux d’aller combattre en Irak. Puis ensuite par des perquisitions au Centre islamique qui auraient « permis » de découvrir du matériel de propagande terroriste et des documents « prouvant » l’implication du Centre Islamique dans le financement d’actions révolutionnaires au Moyen-orient et en Asie centrale. Bien évidemment, ce matériel aurait été judicieusement placé auparavant par une « taupe ». Ainsi, l’opération Memphis visait un double bénéfice : se débarrasser définitivement de Hani Ramadan et orienter l'opinion publique dans une approbation de lois restrictives en terme de libertés individuelles. III. En janvier 2005 le Commissaire Schatzmann était convaincu, suite à un rapport des services secrets libanais, qu’un « pipe-line » de combattants volontaires pour l’Irak était en train de se constituer au départ de Genève. Sur ses ordres, j’ai accompagné l’un d’entre-eux, Rachid H. jusqu’à Damas. Sur place, j’ai pu établir que les contacts de Rachid H. n’étaient en fait qu’un « pipe-line » d’escrocs et que lui-même ne fuyait l’Europe que pour échapper à une condamnation par contumace pour une affaire de droit commun. Rien ne permettait de penser, hormis le rapport des services libanais, qu’il ait réellement envisagé de se rendre en Irak. Dans un deuxième temps, et sur la base d’autres informations émanant des services suisses, j’ai quitté Damas et Rachid H. pour me concentrer sur un groupe réellement actif. Pendant plusieurs jours, j’ai rencontré des hommes, parfois des adolescents, qui avaient tout abandonné pour aller combattre l‘ennemi d’une guerre illégale. Je les ai trouvé admirables de courage et je n’ai jamais rapporté aucune information à leur sujet. Je ne sais pas si mon silence constitue une allégeance qui ferait de moi le complice de leurs actions, et ça m’est égal. À mon retour en Suisse, le Commissaire Schatzman a refusé les conclusions de mon rapport, voulant à tout prix établir un lien entre Rachid H. et le Centre Islamique. C’était, selon ses termes, l’occasion rêvée de se débarrasser de Hani Ramadan. Lorsque j’avais commencé à collaborer avec les services secrets du SAP j’étais trop flatté par la confiance que l’on m’accordait pour objecter les ordres reçu, ni donc à remarquer que dans tous les matériaux confidentiels auxquels j’avais accès, une part essentielle de la réalité m’était toujours cachée. Je m’étais identifié aux manipulateurs du SAP qui me laissaient jouer dans leur cour de tricheurs, avec un peu plus de cartes en main dans les rouages secrets de notre société. Toutefois, trahir la confiance que m’avait donnée Hani Ramadan m’était impossible. J’avais passé plus d’une année à le côtoyer et jamais je n’avais rencontré auparavant un homme aussi fidèle à ses principes, d’une intégrité et d’une honnêteté totale. Je crois pouvoir dire qu’Hani Ramadan m’a permis d’apprendre ce qu’est être un homme : dire ce que l’on fait et faire ce que l’on dit. Dès lors, il était pour moi exclu de continuer à participer à cette opération. J’avais un contact à la Police Judiciaire Fédérale, et dans un autre service. Je leur ai confié le plan de l’opération Memphis et ils m’ont permi de continuer un travail en relation avec la sécurité de notre pays. Malheureusement les services secrets du SAP n’ont pas apprécié ma défection et, quelques mois après les menaces, ils en sont venus aux actes. Ma sécurité étant menacée je n’ai eu d’autre choix que l’exil et la révélation de l’affaire aux médias. IV. Je passe le détail de la présence des services secrets, présentés par Philippe Schwab, secrétaire de la Délégation, comme des techniciens lors de mes auditions, puisque le président, Hans Hofmann, s’en est déjà excusé personnellement, admettant qu’il s’agissait-là d’une grave erreur de sa part. C’est par un procédé confusionniste bien connu que la Délégation falsifie la réalité, en altérant ci et là quelques mots, en mélangeant le vrai avec le faux, le tout assortis de quelques trucages, de sorte de donner à l’ensemble une illusion de vérité. Ils écriront sans doute, comme Le Matin Dimanche du 25 mars, que j’étais un agent « peu fiable ». Pourtant les services secrets qui m’ont mandaté auraient sans doute continué à me trouver très fiable, et même complètement professionnel, si je n’avais pas répandu leurs petites concussions dans les médias depuis plus de quatorze mois. Mais quelle est pour eux la définition de « fiable » ? Piéger un homme innocent ? Certains imaginent que tout est clair quand le gouvernement a établi un rapport, en l’agrémentant à sa guise de quelques mensonges. D’autres se contentent de savoir que presque tout est obscur, « monté » en fonction de l’intérêt de l’Etat. Et il y a ceux, minoritaires, qui voudraient connaître a vérité, malgré tout ce qui demeure à jamais caché. Ils en savent toutefois suffisamment pour comprendre que le terrorisme et l’utilisation de la peur qu’il génère n’est bien souvent qu’une arme de l’Etat. Le rapport de la Délégation des Commissions de gestion ne sera guère plus croyable que l’article du Matin Dimanche. Son intention ne sera d’ailleurs pas d’être cru, mais d’être la seule version en vitrine, et de couvrir au mieux les faits avérés. Bien évidemment, j’interviendrai ensuite, de plusieurs manières, afin de démonter leurs mensonges les uns après les autres, puis je livrerai ma version exacte des faits. Comme l’ont si bien écrit Ian Hamel et Ludovic Rocchi : «Les services secrets suisses n’ont pas fini de regretter d’avoir utilisé Claude Covassi » Claude Covassi, le 25 avril 2007
Article du Los-Angeles Times
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