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Contre la répression en Oaxaca, lutte prolétarienne anticapitaliste!Anonyme, Domingo, Diciembre 24, 2006 - 08:41
Parti Communiste International
Depuis plusieurs mois la ville d’Oaxaca, capitale de l’Etat mexicain du même nom, est le centre d’un important mouvement de lutte qui a connu les attaques répétées des forces de répression (police, armée et forces paramilitaires) qui ont fait de nombreuses victimes : fin novembre on comptait 22 morts et 34 disparus. Le point de départ a été la journée d’inaction rituelle qu’organise au mois de mai lors du renouvellement des contrats de travail, le Syndicat National des Travailleurs de l’Enseignement. Pour ce syndicat depuis toujours collabo du pouvoir, il ne s’agit que d’un pâle simulacre de lutte destiné à faire tomber la pression née des conditions difficiles que connaissent les instituteurs. Mais dans l’Etat d’Oaxaca, la Section 22 du SNTE, en opposition à la pratique de collaboration des classes de la bonzerie syndicale traditionnelle, décida de lancer le 22 mai une grève, en pensant que le gouvernement de l’Etat d’Oaxaca allait donner une réponse immédiate aux demandes de négociation. Cette réponse fut donnée le 14 juin: à 4 heures du matin les autorités locales lançaient une attaque contre les grévistes qui avaient installé, selon l’habitude mexicaine, un campement de protestation (planton) sur la place centrale: des milliers de policiers, hélicoptères, chiens, gaz lacrymogènes, etc. Pendant plusieurs heures des affrontements vont opposer forces de l’ordre bourgeois aux grévistes, rejoints par nombre d’habitants de la ville; il y aura des centaines de blessés, mais les policiers sont contraints de se retirer, tandis que les manifestants vont commencer à occuper les bâtiments administratifs et à dresser un peu partout des barricades gardées jour et nuit pour empêcher le retour des policiers; dans la période qui a suivi, des stations de radio et de télévision locales sont occupées pour empêcher la désinformation systématique des autorités et retransmettre les nouvelles de la lutte. A la suite de ces affrontements, le mouvement a pris une toute autre allure; des gigantesques manifestations de protestation ont lieu à Oaxaca, et les revendications sociales des enseignants (revalorisation des salaires) passent au second plan devant la revendication de démission du gouverneur. Les autorités, tout en jouant le pourrissement de la situation, ont sporadiquement recours à des «escadrons de la mort» qui la nuit tirent sur les manifestants. Les participants parlent d’une «Commune» en référence tant à la Commune de Paris qu’aux communautés indiennes (l’Etat d’Oaxaca est un de ceux où la population indienne est la plus nombreuse). Sous prétexte d’élargir le mouvement, la section locale du syndicat des enseignants est à l’initiative de la constitution d’une «Assemblée Populaire des Peuples d’Oaxaca». Signe du soutien face à la répression et du ras-le-bol général par rapport à la véritable mafia des dirigeants politiques inamovibles, l’APPO regroupe 340 organisations, associations et partis divers «de différents secteurs de la société de cet Etat» et à la mi-novembre, après la chute des barricades à la suite d’une nouvelle intervention brutale et massive des forces de répression, elle a même donné naissance à un «gouvernement alternatif». Cette APPO a fait couler beaucoup d’encre. Certains en Europe ou ailleurs veulent y voir une véritable Commune à l’image de la Commune de Paris ou une sorte de soviet populaire, un instrument de double pouvoir des ouvriers et des paysans, voire le début de la révolution au Mexique. En réalité, il s’agit d’un rassemblement interclassiste qui a eu pour rôle de diluer le mécontentement social explosif dans une lutte démocratique, pacifiste, de désobéissance civile. Après avoir soutenu la campagne présidentielle du parti de centre-gauche PRD, l’APPO a essayé de convaincre le Sénat mexicain (où la droite est majoritaire) de la vacance de pouvoir à Oaxaca en paralysant la ville, afin que soient organisées de nouvelles élections dans l’Etat. Puis elle a engagé des négociations discrètes avec le gouvernement, tandis que la fameuse section syndicale «combative» appelait les enseignants à la reprise du travail - ce qui était d’ailleurs inévitable après 5 mois de grève et l’absence de perspectives concrètes. Certains groupes trotskystes locaux très minoritaires peuvent bien dénoncer la trahison de la section syndicale 22 et les manoeuvres des dirigeants de l’APPO pour arriver à un compromis avec les autorités, ils ne savent rien proposer d’autre que la poursuite du mouvement sur sa base démocratique interclassiste avec l’objectif de la destitution du gouverneur. Au mois de décembre l'APPO a publié une déclaration adressée «aux peuples d'Oaxaca, du Mexique et du Monde» et à «tous les intellectuels, tous les artistes, tous les membres éminents de la communauté scientifique et autres, toutes les ONG». L'APPO n'a pas songé à l'adresser aux prolétaires, à la classe ouvrière du Mexique et du Monde, c'est-à-dire à la classe de ceux qui sont exploités par le capitalisme et qui peuvent le renverser par leur lutte révolutionnaire pour instaurer le communisme: une société sans classes et sans exploitation, sans argent et sans marchandises, sans frontières et sans Etats. Sans doute parce que le but ultime de l'APPO, selon cette déclaration, est celle d' «un Etat d'Oaxaca véritablement libre et souverain». Comme disait Marx, réclamer un Etat libre n'est que l'expression de «la mentalité bornée de sujets soumis»: les travailleurs conscients luttent pour détruire l'Etat des capitalistes, pas pour le «libérer»! La constitution par l'APPO d'un soi-disant gouvernement alternatif avec comme objectif de «construire un pouvoir qui va peu à peu détruire de lui-même le pouvoir existant», prenant en charge les fonctions dévolues à l’Etat (!), est sans doute une réponse à ce genre de critiques. Mais c’est évidemment le meilleur moyen d’épuiser le mouvement tout en évitant au maximum la confrontation avec cet Etat, qui comme tout Etat bourgeois ne peut pas être détruit petit à petit! Ce n’est pas un mouvement populaire et démocratique de désobéissance civile, mais une révolution prolétarienne violente et dirigée par le parti de classe, qui peut abattre l’Etat bourgeois et y substituer la dictature du prolétariat: «entre la société capitaliste et la société communiste se place la période de transformation révolutionnaire où l'Etat ne saurait être chose que la dictature révolutionnaire du prolétariat». Les illusions démocratiques contre la lutte de classe Les événements d’Oaxaca sont le fruit d’une situation politique, économique et sociale qui n’est pas seulement propre à cet Etat, l’un des plus pauvres du Mexique (mais aussi l’un de ceux où les activités liées au tourisme sont les plus prometteuses). Le taux de chômage mexicain était officiellement de seulement 3,6 % en 2005; mais les spécialistes estiment généralement qu’il est en réalité de 25%, et que pratiquement la moitié de la main d’oeuvre est en état de sous-emploi ou d’emplois informels (petits boulots). Selon les estimations le nombre de pauvres varie de 45 à 70 millions (soit de 45 à 70% d’une population d’un peu plus de cent millions d’habitants), alors que la richesse de la minorité capitaliste n’a cessé de croître. Le développement industriel du Mexique, que ce soit sous la forme des maquiladoras, ces usines où les prolétaires sont soumis à une exploitation bestiale de la part de sociétés américaines ou travaillant pour le marché américain, ou des entreprises internationales classiques (Volkswagen, etc.), souffre de la concurrence de pays où les salaires sont encore plus bas, comme la Chine. La dégradation des conditions de vie et de travail des prolétaires a été à l’origine de plusieurs grèves dures dans les derniers mois. Cela a été notamment le cas des longues grèves dans la sidérurgie. Les 500 grévistes occupant le complexe sidérurgique de Lazaro Cardenas (Etat de Michoacan) où existe une longue tradition de luttes, subissaient fin avril une attaque de près d’un millier de policiers et militaires qui faisait 2 morts et une quarantaine de blessés. Cependant malgré la répression, les travailleurs ont semble-t-il, en partie au moins, obtenu satisfaction. L’usure du parti bourgeois dirigeant le Mexique depuis près de 80 ans, le PRI (Parti Révolutionnaire Institutionnel), est le reflet des mutations économiques du pays. Un nouveau parti de droite, le PAN (Parti d’Action Nationale) expression des cercles bourgeois plus modernes, est venu concurrencer le vieux parti des caciques, tandis que sur sa gauche se créait le PRD (Parti de la Révolution Démocratique). En 2000 le candidat du PAN, Vicente Fox, devenait le premier président non membre du PRI. Cette année son successeur Felipe Calderon a été déclaré vainqueur devant le candidat du PRD Lopez Obrador. Ce dernier a dénoncé les fraudes électorales et s’estime le vainqueur des élections. Il a mobilisé ces partisans qui ont organisé à Mexico des manifestations et occupations de places de plusieurs centaines de milliers de personnes, peut-être plusieurs millions, et il s’est proclamé le véritable président. Le caractère massif de ces mobilisations est sans aucun doute un signe du mécontentement qui s’est accumulé envers les politiciens qui dirigent le pays; mais le fait que le candidat du PRD puisse incarner le changement est aussi le signe de la profondeur des illusions existantes. Le PRD est un parti modérément de centre-gauche, dont le programme économique n’est pas différent de celui du PAN et c’est un gouverneur du PRD qui avait autorisé l’envoi des forces de répression contre les grévistes de Lazaro Cardenas. L’instabilité politique qui paraît s’installer au Mexique ne doit pas induire en erreur. Les poussées sociales y sont encore contenues, comme c’est inévitable, par un mélange de répression ouverte et de diversion démocratique. Mais le déploiement de la lutte sociale ouverte, de la lutte de classe est inexorable; d’ailleurs les émigrés mexicains aux Etats-Unis ont déjà montré en manifestant massivement et en faisant grève ce premier mai, sans doute de manière encore confuse, mais puissante, que les prolétaires mexicains sont en train de reprendre ce long chemin. Pour continuer sur cette voie il leur faudra éviter les embûches démocratiques, les impasses interclassistes; il leur faudra retrouver les armes fondamentales de la lutte de classe, s’organiser de façon indépendante de toutes les autres classes, constituer leur parti de classe internationaliste et international. Cela ne se fera pas sans mal, ni rapidement. Mais c’est la condition pour que demain naisse la Commune prolétarienne du Mexique, et qu’elle soit victorieuse! A bas la répression bourgeoise dans l'Oaxaca et tout le Mexique ! Vive la lutte de classe anticapitaliste et internationale ! Parti Communiste International Imprimerie spéciale - décembre 2006 - supplément au Prolétaire n°482 Correspondence: Editions Programme 3 rue Basse Combalot 69007 LYON [ EDIT par un membre du collectif CMAQ) |
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