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Une minière hors de ses frontières : La canadienne Ascendant Copper en ÉquateurAnonyme, Lunes, Noviembre 20, 2006 - 17:12 (Analyses | Aboriginal Nations | Droits / Rights / Derecho | Ecologie | Economy | Globalisation | Resistance & Activism)
Mayda & PouleT
Équateur, 16 septembre 2006. On lit dans les journaux que des écologistes ont pris en otage des ingénieurs d’Ascendant Copper, une compagnie minière enregistrée en Colombie-Britannique et figurant à la Bourse de Toronto sous le sigle ACX. Cette entreprise est actuellement en phase d’exploration d’un gisement de cuivre. En fouillant sur le Net, on se rend compte que cet événement n’est que le dernier épisode d’une longue bataille, pourtant passée inaperçue dans les médias. Le conflit prend place dans les communautés de la vallée de l’Intag, située dans le canton de Cotacachi au nord-ouest de l’Équateur. Cette vallée fait parti du Chocó bio régional, une aire de forêts vierges de la côte Pacifique considérée comme la deuxième zone la plus riche en biodiversité au monde. Mais au-delà des conséquences écologiques, nous partons à la recherche des réponses autonomes de la population en lutte contre les traditionnelles formes de dépendance ...mais également contre les nouvelles . UNE MINIÈRE HORS DE SES FRONTIÈRES LA CANADIENNE ASCENDANT COOPER EN ÉQUATEUR Équateur, 16 septembre 2006. On lit dans les journaux que des écologistes ont pris en otage des ingénieurs d’Ascendant Copper, une compagnie minière enregistrée en Colombie-Britannique et figurant à la Bourse de Toronto sous le sigle ACX. Cette entreprise est actuellement en phase d’exploration d’un gisement de cuivre. En fouillant sur le Net, on se rend compte que cet événement n’est que le dernier épisode d’une longue bataille, pourtant passée inaperçue dans les médias. Le conflit prend place dans les communautés de la vallée de l’Intag, située dans le canton de Cotacachi au nord-ouest de l’Équateur. Cette vallée fait parti du Chocó bio régional, une aire de forêts vierges de la côte Pacifique considérée comme la deuxième zone la plus riche en biodiversité au monde. Mais au-delà des conséquences écologiques, nous partons à la recherche des réponses autonomes de la population en lutte contre les traditionnelles formes de dépendance ...mais également contre les nouvelles . Une histoire, deux tentatives, des milliers d’opposant-es La première entreprise à s’être intéressée aux gisements est la Bitshimetals (filiale de la géante japonaise Mitsubishi) qui, en 1994, fait réaliser une Étude d’impacts environnementaux (EIM d’après son acronyme espagnol) exposant les principaux impacts de l’exploitation minière dans la région : {la déforestation massive, la désertification, le changement du climat local, le déplacement de plus de cent familles, la contamination des cours d’eau, }etc. Les résidant-es prennent rapidemment conscience de ces risques et s’organisent. Plusieurs recours légaux sont entrepris mais demeurent infructueux car, comme le dit Leonardo Alvear, président de l’Assemblé d’union cantonale de Cotacachi, (AUC), {les tribunaux ont toujours fait penchée la balance où se trouve l’argent (…) et c’est le pauvre paysan qui paye les pots cassés}. Face à la sourde oreille du gouvernement, les habitant-es utilisent ce que Leonardo qualifie de {l’unique langage que comprend le gouvernement (…) que comprend la police et que comprendra également l’entreprise : la force en tant que mesure préventive}. En 1997, 200 personnes brûlent le campement de la mine. La Bitshi abandonne les concessions et quitte la région. Aujourd’hui, la Ascendant en est à la même étape, celle de l’EIM. Selon la Commission de contrôle civique de la corruption du pays, {le document, présenté en tant qu’IEM (...) ne calcule pas les principaux impacts environnementaux du projet minier (…) Tout indique une étude superficielle sans aucun rapport avec la réalité du projet}(juillet 2006). De nombreux moyens de pression sont déployés par la population du canton, sans résultat. Réuni-es en assemblée, 300 habitant-es provenant des vingt communautés de l’Intag décident de recourir à une action de force pour chasser la compagnie minière et redistribuer son domaine aux paysan-nes sans terres de la région. José (Pepe) Rivera du Journal Intag explique que{le gouvernement n’a rien à faire du problème que peut nous causer la mine ici. Ce problème nous allons le régler nous-même. Nous nous soulevons : s’ils ne nous écoutent pas avec les bonnes actions, ils nous écouteront avec les mauvaises!}Le 10 décembre 2005, le campement d'exploration d'Ascendant Cooper est incendié. Leonardo de l’AUC rappelle qu’il s’agit là d’un acte {d’autodéfense (…) les camaradas se font justice eux-mêmes}. Le message est clair mais pas suffisament semble t-il, puisque le 12 septembre 2006, quatre ingénieurs d’Ascendant Cooper pénètrent dans la réserve écologique de Junin, propriété collective de la communauté délimitée par des panneaux annonçant « entrée de miniers interdite ». Face à cette intrusion, les habitant-es {les poursuivent, avec les femmes à la tête du groupe, et ils les gardent dans la communauté. Ils n’étaient pas séquestrés, ils étaient détenus}, nuance Pepe. Si les journaux n’hésitent pas à parler d’actes violents, les ingénieurs n’ont pourtant jamais été malmenés, ils ont reçu un souper, un bon lit et ont été relâché le lendemain. {Maintenant, disent les gens, s’ils nous infiltrent une autre fois, nous prendrons d’autres mesures (…) d’autres mesures qui pourraient être fatales}...poursuit Pepe, {les gens sont fatigués, ça fait maintenant 11 ans}[qu’ils luttent contre les compagnies minières] {et les concessions continuent à être vendues}[par le Ministère]. {On les a taxé d’ écoterroristes mais ça n’a rien à voir avec le terrorisme. Les terroristes ce sont plutôt ceux qui menacent les gens, qui les divisent, qui les piègent, qui tentent de les faire se battre, qui achètent les consciences… }Leonardo Alvear, AUC Minauderies et beau minois: le vrai visage d’Ascendant Copper inc Afin de séduire les gens, la compagnie arrive dans la zone avec tous les aspects de la générosité bon enfant: cadeaux de T-shirts, d’ordinateurs, commandites d’équipes de futbol, etc. Elle prétend même apporter des services de santé qui ne sont en fait destinés qu’à leurs employés. Ces soins sont offerts par Daimi Services, une entreprise qui {a comme unique objectif d’ouvrir le pas et de nettoyer le chemin pour l’entrée [d’une compagnie] dans nos communautés} dénoncent les autochtones de Sarayaku qui ont chassé cette même entreprise de leur territoire au cours de leur lutte contre l’exploitation pétrolière en Amazonie équatorienne. L’entreprise inonde la région d’une puissante stratégie médiatique pour dorer son image. Elle crée le Trabajando Juntos (Travailler ensemble), un « journal communautaire » et gratuit, où l’entreprise se targue d’appuyer plusieurs projets régionaux, comme celui des vétérinaires bovins, alors que les responsables du projet disent n’avoir jamais été approchés par Ascendant. La compagnie a également recours aux medias de masse : {pour l’entreprise, ce n’est pas un problème de payer une page, deux pages, chaque semaine pour faire connaître les bénéfices de la mine}, fait remarquer Leonardo. Face à cette offensive médiatique, les habitant-es répliquent. C’est lors d’un atelier portant sur le problème minier que la communauté décide de créer « le journal des organisations » de la région. Naît donc en 2000 le périodique Intag. Cette initiative ne plait pas à l’entreprise et {les gens pro-mine font tout leur possible pour faire taire le journal}, s’insurge Mary Ellen Fieweger, éditrice du journal, {Ils ont intenté une poursuite en diffamation contre moi pour un million de dollars!} L’objectif était uniquement d’intimider l’équipe du journal. La poursuite fût abandonnée. Alors que, d’un côté, l’entreprise judiciarise ses opposant-es, elles s’assure des allié-es, de l’autre, explique Leonardo ; {ils achètent les terres, c’est leur manière d’acheter les consciences (…) ils les achètent à un bon prix et laissent les gens y vivre. Ce qui revient à donner de l’argent! Mais, un bon jour, ils leur diront : vous devez quitter vos terres!} Il ajoute que, à travers de ses manigances, {l’entreprise, comme toute les entreprises, cherche à diviser les gens pour gagner}. Et il ne manque pas de rappeler que derrière ces magouilles, {c’est l’État qui soutien la compagnie, à travers la Police et l’Armée}. À preuve, le gouvernement fait tout son possible {pour implanter une base militaire et un poste de police à proximité de la zone de conflit afin de faire entrer la main d’œuvre de la compagnie}. Autre exemple, lors de la mobilisation en décembre 2005, des militaires équatoriens sont aperçus patrouillant la région dans des véhicules blindés de la compagnie alors que des hélicoptères de l'Armée sillonnent le ciel. Quant à l’événement du 12 septembre (la dite « séquestration »), Leonardo déplore que {ce genre de friction plait à l’entreprise et lui permet de justifier la présence policière et militaire}. Pepe, pour sa part, nous raconte que, suite à cette action, {la police a attrapé deux camarades qui n’ont rien à voir avec [les faits du 12 septembre] et les ont fait prisonniers}. Des avocats de la mine sont allés les voir pour leur dire : « Prennez 20 000 $, accusez votre leader » leur laissant entendre qu’ils resteraient en prison s’ils refusaient. En plus des pots de vin et autres tentatives de corruption, la compagnie ne montre aucun scrupule à recourir à l’intimidation armée. Mary Ellen nous confie par exemple que {Sylvia Quilambungo}[présidente de Defensa y Conservación Ecologica de Intag, DECOIN] {fait partie des personnes qui ont reçues des menaces de mort}. Dans leur journal, l’équipe du périodique publie le récit de Polibio Perez, président du Conseil de développement communautaire, qui fût pour sa part menacé par un civil armé qui lui pressa le canon de son revolver sur la tempe en lui affirmant que s’il le rencontrait dans un lieu isolé, il le tuerait. Bref, nous nous permettons de rire jaune en voyant, sur les t-shirts et autre publicité de l’entreprise, son slogan : « Un citoyen corporatif socialement responsable » ! Entre résistance et dépendance, quelle distance ? En fuite face à « notre » culture de mort plastique qui éventre la terre, nous étions en quête de l’Esprit de la Pacha Mama qui, le croyions-nous, fertilisait la lutte d’Intag. Nous découvrons plutôt {une zone de récente colonisation [composé de] gens de différentes cultures}, comme nous explique Mary Helen. {Je ne veux pas le mettre dans des termes romatiques… les Indiens… la Nature… Non, les indiens, comme tout le monde, ont détruit la nature, certains avec des machines, d’autres avec leurs mains.} Pas de tradition millénaire donc, mais une culture toute jeune, bourgeonnante... À Apuela, à quelques heures des concessions minières, nous sommes frappés par la quantité d’organisations ayant vitrine sur les trois rues qui forment ce village isolé. À l’étage au-dessous du Journal Intag se trouve la {Asociacion Agroartesanal de Caficultores Rio Intag}(fondée en 1998, l’AACRI est une coopérative de café équitable et écologique regroupant 270 membres). Nous remarquons aux alentours de nombreuses entreprises d’écotourisme, plusieurs appartenant à des Comité de jeunes ou liées à DECOIN (regroupement créé par les habitant-es en 1995 pour appuyer l’organisation contre la mine et promouvoir un nouveau mode de pensée écologique). Nous voyons aussi le Consorcio Toisan faisant la promotion des produits locaux et qui regroupe plusieurs groupes dont la Coordination des femmes, qui organise des activités de sensibilisation portant sur les rapports hommes-femmes, ainsi que de nombreux projets productifs, écologiques et artisanaux. À ce propos, les rapides changements survenus dans les rapports de sexes nous apparaissent comme une preuve qu’à travers cette résistance une nouvelle culture émerge, ce que nous confirme Pepe: {Avant, les femmes ne venaient pas aux réunions ou aux ateliers. Maintenant, s’il y a 30 hommes dans une réunion, il y a 40 femmes. Les femmes ont joué un rôle très important dans cette lutte et, pour elles, ce processus en a été un d’empowerment}, ajoute Mary Ellen. L’ensemble de ces organisations, et bien d’autres, participent activement à l’AUC, un processus de démocratie participative composé d’assemblées annuelles et de comités de travail permanents, ayant parole et influence reconnues au gouvernement cantonal. L’Assemblée met de l’avant un autre type de développement et a décidé il y a déjà quelques annés de promouvoir trois types d’économie pour le Canton de Cotacachi : l’écotourisme, l’agriculture écologique et l’artisanat. Tout comme les activités minières dans la région, la majorité des différentes initiatives et organisations du Canton de Cotacachi naissent dans les années 1990’ alors que {débute la fièvre du développement}, commente Hugo Carrera, coordinateur de projet à l’UNORCAC (association paysanne créé en 1979). Si l’organisation populaire constitue le moteur des initiatives du Canton, nos interlocuteurs/trices ne peuvent passer sous silence l’outil qu’est l’appui des ONGs du Nord (pour la médiatisation, les pressions internationales et, bien sur, le financement). Toutefois, les gens d’ici ont aiguisé leur sens critique face à la nouvelle vague de colonisation qui envahit leur territoire à coup de développement et les ONGs n’y échappent pas. L’arrivé massive d’ONGs {nous a un peu fait perdre la perspective parce que les projets sont maintenant écrits par des techniciens de l’extérieur}, déplore Hugo Carrera, {les organisations d’ici commencent à penser en terme de projets finançables}. Pour sa part, Mary Ellen soulève le fait que les ONGs {sont devenues un prétexte pour que le gouvernement puisse se laver les mains} [ de ses obligations au niveau social et environnemental]. L’équipe du Journal d’Intag nous confie également sa crainte de voir se former, dans leurs communautés, une nouvelle classe aisée vivant du business de la coopération, ce qui aurait l’effet pervers de miner les efforts d’organisation à la base selon des structures horizontales. Enfin, Hugo Carrera condamne le fait que les ONGs internationales fonctionnent selon leur propre agenda politique sans prendre suffisament en compte les besoins des organisations de base, qui ont leurs propres projets, lesquels demeurent trop souvent sur les tablettes, faute de financement. Et pourtant, d’insister Marie-Helen, {les organisations de base donnent, aux ONGs internationales, la justification de leur existence}. Si l’appui et l’argent des ONGs peuvent être temporairement utilisés comme des outils stratégiques dans ce processus de construction de l’autonomie locale, qu’en est-il de l’écotourisme, lequel amènera de plus en plus d’Occidentaux-à-la-mode-Porto-Alegre jetant au passage des pièces au plus mignon des enfants en cherchant leur végé burger puis leur bar dansant sécuritaire et branché ? Que se passera-t-il avec la vente d’artisanat si ces écotouristes décident de se méfier de l’Équateur pour cause de dite « instabilité politique »? Quelles sont les conséquences du commerce équitable, si celui-ci se spécialise dans des monocultures d’exportation qui, loin de renverser la tendance historique des économies du Sud, accaparent les meilleurs terres pour des produits de luxe (le café bio en exemple) réduisant ainsi la quantité de terres accessibles aux paysan-nes pour assurer leur souveraineté alimentaire ? Avant d’être un produit à la mode altermondialiste, la résistance d’Intag est une réponse locale aux pressions d’une économie colonisatrice. Toutefois, si les alternatives à cette économie doivent s’ajuster à l’agenda politique des multinationales de la coopération et aux préférences touristiques de la nouvelle gauche …qu’en brisera-t-on l’étreinte dorée de la dépendance ? À écouter tous ces gens nous raconter comment elles et ils bâtissent les alternatives à l’exploitation minière, nous voyons émerger un défi de taille planté à la croisée des chemins entre les initiatives économiques solidaires s’opposant au développement imposé par l’État et les transnationales et celui du moteur central de cette lutte : la volonté d’autonomie locale. De notre côté, nous avons également notre bout de chemin à faire. Non pas en buvant notre café équitable trois fois par jour, mais en confrontant, dans leur enceinte (« nos » pays) les entreprises qui pillent le Sud pour notre confort. Mayda & PouleT Mayd...@gmail.com Pour en savoir plus : [DECOIN->http://www.decoin.org/](Intag, Équateur) [Intag Newspaper-> http://www.intagnewspaper.org/](Intag, Équateur) [Mining Watch->http://www.miningwatch.ca/]( Canada) Documentaire [La Maldicion del cobre-> http://www.ascendantalert.ca]
Comité chrétien pour les droits humains en Amérique latine
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