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De l'enfer des services à la révolte des précairesAnonyme, Lunes, Septiembre 11, 2006 - 11:05
Réseau de solidarité des travailleuses et travailleurs
L’histoire des travailleurs est une histoire de remarquables innovations et de renouvellement constant. À chaque fois que les patrons pensent avoir enterrés pour toujours la menace d’une révolte du travail, quand il semble que la force des travailleurs a finalement été vaincue, ceux-ci trouvent encore et toujours les moyens de riposter. La récente montée des luttes chez les travailleurs à bas revenus, partout dans le monde, est un signe que cette riposte voit de nouveau le jour. Pendant des décennies, les compagnies du secteur des services - des géants comme Wal-Mart aux petites entreprises locales – ont été capables d’hyper-exploiter les travailleurs, en imposant des bas salaires, des horaires irréguliers, du travail précaire, des conditions de travail non-sécuritaires, du harcèlement et de la discrimination tout en dégageant des profit colossaux. Même si les travailleurs ont résisté de plusieurs manières individuelles (absentéisme, petits actes de réappropriation, etc. ), le manque de résistance collective a permis aux patrons d’avoir le dessus haut la main. Cette absence de résistance que nous constations jusqu’à récemment a plusieurs causes. Plusieurs des travailleurs qui forment le secteur des services proviennent de groupes sociaux qui ont été historiquement exclus du mouvement syndical traditionnel, comme les femmes et les immigrants, et sont par conséquent peu familiers avec sa tradition de lutte. Plus encore, le secteur des services lui-même a émergé en partie comme une attaque faite contre le mouvement ouvrier traditionnel, au moment ou les emplois manufacturiers étaient délocalisés et remplacés par des emplois non-syndiqués à bas salaires. Le secteur des services a été organisé par les patrons de façon à fragmenter et isoler les travailleurs les uns des autres, dans le but d'éviter que les travailleurs puissent s'unir. La production actuelle, organisée en réseau de petites unités de travail reliées ensemble mais physiquement séparées et généralisation des heures irrégulières, qui fragmentent les travailleurs dans l'espace et le temps, témoignent de ce fait. En d'autres mots, la structure même du secteur des services est conçue pour affaiblir la capacité de résistance des travailleurs. À tout cela doit s'ajouter la faillite du mouvement syndical traditionnel. En plus d'avoir été passablement affaiblis par la restructuration de la production (les déménagements d'usines dans d'autres pays), les grands syndicats ont été incapables et souvent réticents à organiser le secteur des services. Perdus dans un brouillard de bureaucratie qu'ils ont eu-mêmes construits, paralysés par les procédures légales et des moyens de lutte inadéquats et dépassés, par leur collaboration avec les patrons et leur structure hiérarchisée, les grands syndicats ont été incapables d'offrir aux travailleurs des services des formes de lutte adaptées à leur situation. Plus souvent qu'autrement, les bureaucrates syndicaux considèrent le secteur des services comme inorganisable et ne valant pas, en terme de cotisations, les efforts pour l'organiser. Heureusement, comme c'est souvent le cas, les travailleurs ne sont pas restés inactifs en attendant que les professionnels du mouvement syndical arrivent avec des solutions. Comme nous l'avons souligné au début de cet article, les travailleurs trouvent constamment de nouvelles façons de riposter et formulent constamment des alternatives au système des patrons. De la multitude de discussions sur l'heure du lunch, de l'exploitation et des résistances mineures, de petits gestes de solidarité et des moments de révolte individuelle surgissent éventuellement de nouvelles formes de luttes, de nouvelles façons de s'organiser. Les deux cas qui suivent en sont des exemples vivants. Contre les divisions des patrons, le syndicalisme géographique. Le cas du Syndicat des travailleurs de South Street Le Syndicat des travailleurs de South Street (SSWU), basé à Philadelphie, a été fondé en 2003 et est affilié aux IWW (Industrial Workers of the World). Le syndicat regroupe des travailleurs de la restauration et du commerce de la plus importante artère commerciale de la ville. Le SSWU, comme tout les locaux membres des IWW, pratiquent ce qu'ils appellent le syndicalisme de solidarité, qui est radicalement différent du syndicalisme traditionnel. Plutôt que de se battre pour obtenir une accréditation légale et de signer des conventions collectives séparées pour chaque lieu de travail, l'objectif est de construire un seul grand syndicat pour toute la rue, selon un modèle de démocratie directe. Les travailleurs peuvent joindre le syndicat peu importe leur lieu de travail, et même s'ils sont entre deux emplois comme c'est si souvent le cas dans le secteur des services. Les travailleurs adhèrent sur une base individuelle, il n'est donc pas nécessaire de gagner une majorité dans chaque lieu de travail. Quand un nombre suffisant de travailleurs ont eu adhéré, alors le syndicat s'est mis à agir pour régler plusieurs problèmes spécifiques. Depuis sa fondation le SSWU a gagné des salaires impayés à des travailleurs, a défendu des travailleurs victimes de menaces et d'intimidation, a amélioré les conditions de travail et a organisé une campagne pour du transport en commun abordable. Le SSWU a aussi fourni une variété de services incluant des ateliers sur la santé, les impôts et les droits des travailleurs. Et tout cela sans bureaucratie, délais légaux interminables et avec des cotisations très abordables allant de 1,50$ à 4,50$ par semaine. Le SSWU est un des trois syndicat similaires membres des IWW, les deux autres étant le Syndicat des travailleurs du centre-ville de Montpellier (Vermont), et le Syndicat des travailleurs du centre-ville de Madison (Wisconsin). Ils font aussi partie d'une renaissance plus vaste des IWW, que l'on peut aussi voir dans leur succès récent dans la syndicalisation des café Starbucks à New-York. Il semble que la démocratie directe, l'action directe et l'approche de syndicalisme de solidarité des IWW touche une corde sensible chez les travailleurs sous-payés du secteur des services. Le résultat semble être un rapprochement entre les traditionnelles politiques radicales des IWW et la nouvelle vague de résistance des travailleurs à la base. Les IWW ont plusieurs locaux au Canada, dont un à Toronto et à Ottawa. Supersize my pay ! Le salaire minimum à 12$ Même quand des tactiques plus traditionnelles ont été utilisées, les travailleurs ont montrés un niveau de solidarité et de militantisme rarement vu depuis la deuxième guerre mondiale. C'est ce qui a été le cas avec la campagne Supersizemypay.com, qui a été organisée par le syndicat UNITE de Nouvelle-Zélande pour syndiquer les travailleurs des géants tels que Poulet Frit Kentucky, Pizza Hut, Starbuck (tous propriété de Restaurant Brand Corp.) Mc Donald's et Burger King. La campagne s'est concentrée sur les principaux districts de restaurants de Auckland et Wellington, les deux plus importantes villes du pays. La campagne a cherché dès le début à mobiliser un support communautaire large, qui s'est exprimé dans un mouvement social. La campagne demande un salaire minimum de 12$ l'heure, pas de salaire jeunesse, des heures garanties et plutôt que de faire ces demandes seulement pour les syndiqués, la campagne cherche à les faire accepter nationalement. La campagne s'est ouverte sur ce qui devait être une grève dans un Starbuck de Auckland, le premier Starbuck a entrer en grève au monde. Quand la nouvelle que Starbuck utilisaient des cadres comme briseurs de grève a circulé, les travailleurs de 10 autres Starbuck ont joint la grève et ont refuser de renter au travail même si les gérants les menaçaient de congédiements. Pendant les mois qui suivirent, les travailleurs ont frappé dans plusieurs fast-food ainsi que dans les centre d'appels qui prennent les commandes. Par plus d'une occasion, les grèves dans un commerce se sont répandues spontanément aux commerces voisins quand les travailleurs en grève marchaient de commerce en commerce demandant à leur collègues de joindre leur action. La campagne a récemment eu deux victoires majeures: une convention collective avec Restaurant Brand Corp couvrant Starbuck, PFK et Pizza Hut; et l'abolition du salaire jeunesse qui est présentement en cours au parlement. La campagne se continue encore contre McDonald's et Burger King. Et ceci de la part de jeunes travailleurs réputés inorganisables ! Comme toujours, c'est notre initiative qui fait que l'impossible devient possible. Ces trois exemples ne sont qu'une petite partie du mouvement qui se développe présentement dans le secteur des services. Dans les prochains numéros, nous continuerons à jeter un regard sur ce mouvement. ---------------- |
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