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Pérou, Vargas Llosa et la démocratie impériale

Anonyme, Lunes, Junio 5, 2006 - 13:51

fab

Dans une interview publiée vendredi dernier dans Clarín, l'ineffable Vargas Llosa assure que "avec Ollanta Humala la démocratie disparaîtrait". L'occasion permet à l'écrivain péruvien de recommencer à donner sa vision de la démocratie et, aux lecteurs, de s'étonner encore une fois devant la rusticité de ses raisonnements en la matière.

En bon dogmatique, le monde politique de Vargas Llosa est divisé en deux catégories manichéennes : le bien, la démocratie et le mal, personnifié dans des gouvernements comme ceux de Chávez ou de Velasco Alvarado, "deux modèles absolument autoritaires et antidémocratiques". Mais la conjoncture péruvienne d'aujourd'hui joue à l'auteur sans mémoire une mauvaise passe. Si Humala est la mal absolu, il n'y a pas d'autre remède que de voter pour un dinosaure comme Alan Garcia, dont le gouvernement a exhibé des niveaux de corruption, de répression et d'inefficacité qui ont ouvert la porte à la décennie infame du fujimorisme, version péruvienne de notre Menem. Mais il y a encore de l'espoir, et on peut voter Alan "en se couvrant le nez". L'homme a donné des preuves d'abandon de son archaïque populisme et semble s'être réconcilié avec l'économie de marché et avoir appris de gens comme Felipe González et Tony Blair. De plus, il se rapproche des États-Unis et est disposé à concrétiser le TLC (Traité de Libre Echange) signé par un autre grand démocrate péruvien, le président Alejandro Toledo, dont le parti a été écrasé dans les urnes lors du premier tour de la présidentielle et qui malgré son total manque de légitimité démocratique (à peine 7 pour cent d'approbation populaire) est allé à Washington hypothéquer l'avenir des Péruviens en signant les bases d'un traité profondément nuisible pour son pays. Une telle infamie, antidémocratique jusqu'à la moelle, n'a motivé aucune protestation de Vargas Llosa. Ce fut un geste démocratique, qui ne méritait aucun reproche. L'écrivain adhère sans problème à la doctrine impériale de la démocratie vantée ad nauseam par Condoleezza Rice et ses épigones. Il y a une gauche sensée, réaliste, pro-étasunienne qui croit dans le marché et est démocratique. C'est celle que représentent la Concertation chilienne, Lula et Tabaré Vázquez. Mais il y a aussi l'autre : autoritaire, étatiste et populiste, incarnée par les figures de Fidel, de Chávez et d'Evo, avec Kirchner affecté de manière suspecte par des "réflexes" qui, selon Vargas Llosa, vont dans cette malheureuse direction. Pour l'écrivain, qu'Evo Morales respecte scrupuleusement ses promesses électorales de nationaliser les hydrocarbures et avancer avec la réforme agraire, c'est une preuve irréfutable de son identification avec la gauche antidémocratique; que Tabaré Vázquez ait enterré le programme du Frente Amplio est en revanche un signe indubitable de son inébranlable vocation démocratique.

La répression contre les lycéens chiliens et sur les mapuches sont de claires démonstrations de sagesse démocratique de la Concertation, alors que la tolérance de Chávez avec une presse séditieuse et avec des forces d'opposition putschistes est motif de grande préoccupation pour le tandem Rice-Vargas Llosa. Qui n'existe pas d'"enfants des rues" à Cuba, ou que sa population jouit d'une attention médicale très supérieure à celle que les États-Unis offrent à ses habitants sont de très clairs démonstrations de la nature incurable despotique de son gouvernement; en revanche, des centaines de milliers de familles paysannes qui depuis des années campent dans les chemins du Brésil dans l'attente de la réforme agraire sont des exemples éloquents de la vitalité démocratique de Lula.

Pour l'empire et ses porte-parole, une démocratie est celle qui existe aux États-Unis, avec ses meurtres d'innocents civils en Irak autorisées par le secrétaire de Défense et par la propre Maison Blanche et, par conséquent, qui ne peuvent être attribués à "des excès" d'une patrouille de marines poursuivis. Une démocratie c'est organiser un réseau mondial de centres de détention où on envoie, dans des vls secrets, des prisonniers pour qu'ils soient "légalement" torturés. Une démocratie c'est abandonner à leur chance les quartiers pauvres de Nouvelle Orléans et la zone du Golfe et les laisser se transformer en chair des houragans Katrine et Rita. Une démocratie c'est faire en sorte que les riches paient moins d'impôts et la pauvres plus. Ceci est ce que Vargas Llosa propose comme modèle. Et en plus il s'énerve quand les péruviens ne le votent pas ! (il a perdu l'élection présidentielle en 1990)

ATILIO BORON, Pagina/12 (Argentine), 5 juin 2006. Traduction : Fab , sant...@no-log.org



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