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Développements politiques rapides au Népal

Anonyme, Domingo, Junio 4, 2006 - 18:45

A World to Win News Service

Le 22 mai 2006. A World to Win News Service. Le paysage politique du Népal connaît des changements rapides et sans précédent. La grève générale qui a duré trois semaines en avril a forcé le roi Gyanendra à restaurer le parlement, qui avait été dissous en 2002.

Réunie de nouveau, la Chambre des représentants a tout de suite nommé un premier ministre puis, après quelques jours, formé un nouveau cabinet. Incapables de rompre avec la culture politique développée durant leurs longues années de service sous la monarchie, les parlementaires se sont entre-déchirés pour l'attribution des différents ministères. Le 18 mai, le cabinet a proposé une proclamation qui fut ensuite approuvée par la Chambre. Les leaders parlementaires ont qualifié cette journée de « glorieuse », voire d'historique. Le gouvernement est même allé jusqu'à décréter un jour férié national pour le lendemain, en espérant que des centaines de milliers de personnes se mobiliseraient pour appuyer la proclamation. Mais quelques milliers de personnes tout au plus ont pris la rue à travers le pays; et en plus d'appuyer la résolution votée par la Chambre, plusieurs ont scandé ce qui est maintenant devenu un slogan fort populaire:
« Dirigeants, prenez garde !
Ne nous trahissez pas une fois de plus ! »

En fait, il y a eu des manifestations regroupant des gens de tous les horizons, à chaque jour depuis le rétablissement du parlement. Tenue au début du mois de mai, une marche d'étudiantEs en colère et arméEs de bâtons fut parmi les plus remarquables. Le lieu privilégié par les manifestantes et manifestants est Singhadarbar (le bureau du Premier ministre); depuis le rétablissement de la Chambre, cet endroit est assiégé presque à chaque jour par des manifestantEs méfiantEs de ce qui s'y passe. Dans une dépêche datée du 19 mai, la BBC rapportait qu'"une des mesures discrètement appliquées par les autorités fut d'interdire les manifestations dans les quartiers de Katmandou situés autour des bâtiments gouvernementaux et du palais royal, tout comme les autorités précédentes l'avaient fait".

Lorsqu'il a présenté la proclamation à la Chambre, le Premier ministre Girija Koirala a déclaré: "Grâce à notre mouvement pacifique, nous avons réussi à redonner le pouvoir souverain au peuple et à établir le peuple comme l'unique source du pouvoir d'État." Cette déclaration pour le moins trompeuse vient contredire son propre aveu à l'effet que "chacun des mots contenus dans la proclamation a été écrit avec le sang des martyrEs". D'une part, Koirala ignore totalement la véritable force qui a rendu possible la bataille victorieuse d'avril, sans laquelle la grève générale n'aurait pas eu lieu: savoir la guerre populaire menée depuis plus de 10 ans par le Parti communiste du Népal (maoïste).

D'autre part, la réalité est que ces 19 jours de lutte n'ont pas été pacifiques du tout - loin s'en faut. Cela est certes incontestable pour ce qui est du régime royal. En effet, le roi Gyanendra a déchaîné la police et l'armée contre les manifestantes et manifestants, dont deux douzaines ont perdu la vie, tandis qu'au moins 5 000 autres ont été blesséEs. Des milliers de personnes ont également été arrêtées et jetées en prison. Du côté du peuple, on ne peut pas dire non plus que le mouvement fut caractérisé par le pacifisme. Bien que le PCN(M) ait appelé à un cessez-le-feu dans la vallée de Katmandou, l'Armée populaire de libération qu'il dirige a gardé le contrôle sur l'ensemble des grandes routes du pays. Durant ces 19 jours, l'APL a lancé des assauts majeurs contre des installations gouvernementales et militaires, et elle a même abattu un hélicoptère de l'Armée royale à l'est de Katmandou. Dans la capitale elle-même ainsi que dans la plupart des villes, les manifestantes et manifestants ont affronté les forces de sécurité à plusieurs reprises, même s'ils et elles étaient uniquement arméEs de roches et d'autres armes primitives. Elles et ils ont creusé des tranchées pour empêcher l'Armée royale d'entrer dans les villes de Latitpur et Kirtipur, et organisé une résistance violente à Bhaktapur, Thimi et dans les secteurs entourant Katmandou.

Dans un communiqué du Comité central du PCN(M) émis le 18 mai, le président du parti, Prachanda, a déclaré: "Notre parti accueille et soutient la déclaration proposée par le gouvernement des sept partis et approuvée aujourd'hui par la Chambre des représentants; cette déclaration reflète la victoire de l'entente en 12 points [signée par les sept partis et le PCN(M) et qui a permis la grève générale d'avril] et de l'historique mouvement populaire. Cette déclaration comprend d'importantes avancées politiques contre la monarchie féodale autocratique. De cet angle, notre parti est fier de la satisfaction, quoique partielle, de certaines des revendications que nous avions soulevées bien avant l'historique déclenchement de la guerre populaire." "Néanmoins, poursuit-il, cette déclaration, dans l'ensemble, ne répond pas aux besoins et aux aspirations du peuple".

La déclaration a officiellement mis fin à l'autorité du roi sur l'armée royale. Elle introduit plusieurs changements formels, tels que la modification du nom de l'Armée royale du Népal pour l'Armée du Népal, et celui du "Gouvernement de Sa Majesté" pour le "Gouvernement du Népal". Elle proclame également que l'ancien royaume hindou du Népal sera désormais un État laïque. Mais selon Prachanda, le fait de réduire le roi à une position plutôt honorifique demeure "incomplet", étant donné "la volonté fondamentale du peuple d'abolir la monarchie et d'établir une république".

"Étant donné qu'elle ne se prononce pas contre l'intervention étrangère grandissante dans la vie politique népalaise; qu'elle ne dit rien à propos d'une restructuration globale de l'État (ce qui signifie principalement, dans le contexte du Népal, la reconnaissance du droit à l'autodétermination pour les nationalités opprimées); qu'elle n'aborde pas la question de l'autonomie nationale et régionale et ne prévoit pas l'établissement d'une structure d'État de type fédéral; qu'elle ne dit rien à propos de l'adoption d'une politique économique indépendante, non plus que de la nécessité de remettre la terre à ceux et celles qui la travaillent; qu'on n'y trouve aucune mention du respect des droits fondamentaux du peuple à l'éducation, la santé et l'emploi; et qu'elle ne dit rien à propos des droits spéciaux nécessaires pour les femmes et les castes opprimées [les dalits, ou les soi-disant 'intouchables']: il apparaît très clairement que les problèmes fondamentaux que le peuple népalais rencontre dans son quotidien ne seront pas résolus par cette déclaration."

"Le silence surprenant qu'elle affiche en ce qui concerne la résolution des problèmes les plus sérieux de la société népalaise, qui ont été mis en lumière par les dix années de guerre populaire et le dialogue imminent, fait naître de sérieux doutes sur la déclaration. Les Népalaises et Népalais devraient réfléchir sérieusement à la possibilité que cette déclaration fasse partie d'une grave conspiration visant à éclipser le dialogue, l'élection d'une assemblée constituante et l'élaboration d'une solution politique progressiste, et à répandre la confusion au sein du peuple. Chose certaine, on y décèle une odeur de mauvaise intention, notamment parce qu'on n'y fait aucune référence à l'entente historique en 12 points; en outre, la déclaration est rédigée de façon à donner tout le crédit aux partis parlementaires pour les réalisations du mouvement populaire. La question de savoir si les sept partis ne sont pas en train de détourner l'esprit et la volonté de l'entente en 12 points se pose donc sérieusement."

"Ayant exprimé notre engagement à ramener toutes ces questions à la table de négociation et parmi les masses populaires, nous appelons l'ensemble des partis politiques, la société civile, les organisations sociales, les intellectuelLEs et personnalités éminentes ainsi que les larges masses populaires à s'engager dans un débat sérieux sur ces questions fondamentales", conclut Prachanda.

Suite au rétablissement de la Chambre et après la tenue réussie d'une réunion de son Comité central, le PCN(M) a envoyé aux partis parlementaires une proposition de feuille de route pour l'avenir du Népal. Le 13 mai, l'agence KantipurOnline rapportait que les 22 points contenus dans la proposition des maoïstes comprennent notamment: "la déclaration d'un cessez-le-feu; la finalisation d'un code de conduite; la formation d'une équipe de négociation; la libération des prisonniers et prisonnières politiques; le début des négociations; la dissolution de l'ancien parlement, de l'ancienne constitution et de l'ancien gouvernement; la formation d'un gouvernement provisoire postérieure à la tenue d'une conférence politique dans laquelle les partis politiques, la société civile et des personnalités renommées de différents secteurs seront représentéEs; la délimitation des circonscriptions électorales de façon à assurer la représentation du peuple de toutes les classes, castes, secteurs et genres; la tenue d'élections pour une assemblée constituante sous une supervision internationale fiable; la restructuration de l'ensemble des structures étatiques, incluant l'Armée populaire de libération et l'Armée royale du Népal, en fonction du mandat populaire exprimé à travers les élections pour une assemblée constituante".

Le parti maoïste a également annoncé que les travaux préparatoires en vue des négociations seront menés par une équipe de trois personnes dirigée par un membre du Comité central, Krishna Bahadur Mahara, qui est arrivé à Katmandou par avion, en provenance de la ville de Nepalgung, située dans l'ouest du pays.

Une équipe de 13 porte-parole a aussi été mise sur pied pour s'adresser aux rassemblements de masse pacifiques que le PCN(M) a commencé à organiser à travers le pays. Selon la BBC, des dizaines de milliers de personnes ont participé à un tel rassemblement le 20 mai dans la ville de Biratnagar, située dans l'est du Népal, où un membre de l'équipe de négociation du parti a pris la parole. Parmi les membres de cette équipe, on retrouve notamment Martrika Prasad Yadav. Ce dernier avait été enlevé en Inde et transféré au Népal en février 2004 en compagnie d'un autre dirigeant du PCN(M), Suresh Ale Magar; les deux prisonniers politiques, qui étaient détenus dans une prison militaire, ont enfin été libérés le 12 mai dernier.

Entre-temps, les grandes puissances poursuivent leur ingérence politique dans les affaires du Népal. Tout de suite après le rétablissement du parlement, le secrétaire d'État adjoint des États-Unis chargé de l'Asie centrale et du Sud, Richard Boucher, s'est rendu au Népal. La première chose qu'il a offert au nouveau Premier ministre, ce sont des armes... Dans un discours prononcé devant un comité du Congrès américain, Boucher a précisé: "Nous sommes également prêts à fournir de l'aide aux forces de sécurité, si le nouveau gouvernement le demande; j'ai dit la même chose au Premier ministre Koirala quand je l'ai rencontré le 2 mai."

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Article paru dans Arsenal-express, nº 104, le 4 juin 2006.

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