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La pollution de l’âmeAnonyme, Jueves, Mayo 18, 2006 - 01:14
Olivier D. Asselin
En réaction à deux textes de Pierre Karl Péladeau publiés dans le Devoir, il y a quelques semaines et qui présente son émission Star Académie comme le défenseur de la culture québécoise... J’écris ici en réaction à deux textes de Pierre Karl Péladeau publiés dans le Devoir, il y a quelques semaines et qui présente son émission Star Académie comme le défenseur de la culture québécoise. Selon lui, sans Star Académie la jeunesse québécoise n’aurait jamais entendue parler de Paul Piché et d’Yvon Deschamps. Il va jusqu’à revendiquer la même aide gouvernementale en crédits d’impôts que les plus petits producteurs de séries, ce qui aurait probablement comme conséquence de faire disparaître tous les petits producteurs devant la machine Quebecor. Navrant. Ça sent le marketing où n’importe quelle absurdité peut être présenté comme étant véridique si elle est bien emballée. L’ancien allié de la CIA dans sa lutte contre l’URSS, Ousama Ben Laden, peut devenir l’homme à abattre pour tous les Américains si leurs politiciens retors les inondent de messages en ce sens. Comme ça, la culture québécoise ne pourrait survivre sans Star Académie ? Premièrement on parle d’un concept français. À la base, la mode actuelle d’achat d’un concept pré-embalé et fourrée à la sauce québécoise ne représente pas une innovation québécoise dont on peut s’enorgueillir. Ça témoigne plutôt de la tendance très américaine d’achat des droits de films européens et mondiaux pour en reproduire de A à Z des clones à la sauce bien grasse de Hollywood. Comme si les Américains étaient littéralement allergiques à la différence culturelle. En fait, c’est ce procédé très capitaliste de nourrir leur population avec une seule façon de voir le monde qui appauvrit la nation de l’Oncle SAM. Mais revenons à Star Académie. Pierre-Karl Péladeau qui pourfend l’hallucinante puissance de diffusion de la machine culturelle américaine (ce sont ses propres mots) semble totalement ignorant du moule typiquement américain de son émission: D’une part, on parle du Star-système. Qu’est-ce que le Star-système sinon que de stimuler l’adulation envers une image construite. C’est se satisfaire de notre misère populaire en transférant nos rêves, nos désirs et nos responsabilités entre les mains d’un héros extérieur. C’est gaspiller une vitrine médiatique monstre autour des futilités quotidiennes des stars. C’est le divertissement à outrance pendant que la terre tremble de nos abus épicuriens. Ensuite, Star Académie c’est une compétition. Comme les gladiateurs, les combats de coqs ou de Pit-bulls, Star Académie carbure à l’obsession très américaine de la compétitivité qui fait toujours 10 fois plus de perdants que de gagnants mais qui sépare irrémédiablement le monde entre les deux. Comment donner l’illusion d’un pouvoir au peuple qui, évincé de la direction politique de sa Nation par les rois nègres des grands créanciers internationaux, ces sbires de Wall Street, sinon en lui conférant un vote dans l’élection de ses stars favorites ? Enfin, Star Académie c’est aussi toute la culture du jetable. Une usine qui produit des stars comme d’autres des saucisses. Il y a un phénomène naturel qui fait que plus quelque chose monte vite, plus cette chose redescend vite. Quand ton objectif est de créer des stars pendant une saison télé et de les lancer par la suite dans le Show-business comme on lance une tarte à la crème au visage d’un PDG médiatique, les qualités à long terme ne sont pas ta priorité. Consommez et n’oubliez pas de jeter car une autre star arrive pour votre plus passif bonheur… Maintenant, avec un cadre aussi truffé de références américanisantes t’aurais beau faire chanter plume saoul raide, ta culture québécoise paraîtrait pâlotte sous des néons d’une telle nature. Ce qui m’amène à l’enjeu central de toute cette question : L’empire Québécor représente le plus fidèle cheval de Troie de l’Empire américain. D’abord reconnaissons d’emblé l’apport des baby-boomers dans l’émancipation québécoise des années’60. Nos parents symbolisent réellement l’accession du peuple québécois à une légitimité politique jusque-là volée. Nous sommes effectivement devenus maître chez nous. Et après? J’ose croire que la révolution tranquille était porteuse de plus grands rêves que celui d’avoir nos propres « porn-stars », made in Quebec. Où sont ceux qui dénonçaient la décadence culturelle du modèle américain et la boulimie industrielle qui l’anime? Maître chez nous? Les Canadiens de MTL appartiennent à un millionnaire américain ; La première superstar des jeunes Québécois se révèle être la victime sexuelle d’un respectable symbole du show-business québécois? Hydro Québec qui couche avec les promoteurs privés de mini-centrales et salive devant d’éventuelles mannes pétrolières dans le St-Laurent? La lutte des Baby-boomers a été essentielle. Elle nous a menée à une situation socio-économique similaire aux autres nations occidentales. Mais était-ce ça l’objectif? N’est-ce pas justement quand on est enfin en possession de tous nos moyens qu’on devrait proposer de réelles alternatives à cette société de surconsommation et d’individualisme pathologiques? Comme si les hérauts de la révolution tranquille s’étaient peu à peu repliés sur un seul aspect identitaire pour défendre leur culture : la langue. Désolé mais aujourd’hui je me sens culturellement plus proche de l’environnementaliste allemand, du paysan indien qui lutte contre Monsato ou du membre d’une coopérative familiale sénégalaise que du patron d’une multinationale québécoise. Le Nous québécois n’existe plus. Car la séparation entre la sphère sociale et l’élite politico-économique est rendue aussi vive à Montréal qu’à Los Angeles. C’est probablement ce qui empêche M.Péladeau de percevoir que son empire médiatique est le meilleur allié de l’Oncle SAM pour conquérir ce qui reste de la culture québécoise. La langue française constitue l’illusion de protection la plus efficace chez une culture qui mange américain, qui s’habille américain, qui écoute américain. Un hamburger est-il meilleur pour la santé quand il est produit en français? Brandir Star Académie pour défendre l’identité québécoise est aussi futile que tragique. Il était plus facile de s’opposer à la loi du marché quand son messager venait d’ailleurs. Depuis qu’on produit nous-même du divertissement insignifiant, la culture québécoise est plus que jamais en danger.
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