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L'INDÉPENDANCE

Anonyme, Sábado, Mayo 13, 2006 - 13:13

Alain Tremblay

La raison d’être de notre organisation est la réalisation de l’indépendance du peuple québécois. L’indépendance que nous prônons n’est pas une autre façon de dire que nous voulons plus de marge de manœuvre, ou un meilleur rapport de force dans une superstructure confédérale qui nous désavantagerait moins. En ce sens, nous ne sommes ni séparatistes, ni souverainistes. Si nous rejetons l’appellation séparatiste, ce n’est pas uniquement à cause de sa teneur péjorative, mais c’est aussi, et surtout, parce qu’elle n’exprime d’aucune manière ce que nous voulons. Dire que nous voulons nous séparer, c’est considérer le Canada comme un tout jouissant d’une unité naturelle, comme une communauté d’appartenance que nous voudrions briser. Or, le Canada n’est pas un tout prédestiné : c’est la continuité d’un empire coloniale, l’instrument de l’impérialisme, qui a soumis peuples et territoires. Ce qui nous lie, c’est l’exploitation et la spoliation.

La souveraineté n’exprime pas mieux ce que nous souhaitons pour le Québec; quoi qu’on en dise, souveraineté ne veut pas dire indépendance. Cette confusion entre ces deux termes ne sert qu’aux nationalistes canadiens. On pouvait parler de la souveraineté de l’Angleterre sur l'Irlande du Nord, mais certainement pas de l’indépendance de l’Irlande du Nord sur l'Angleterre. Un état souverain peut dépendre d’une monarchie étrangère, d’une banque générale, de lois et autorités étrangères, si elle l’a souverainement choisi. Mais un peuple indépendant ne peut dépendre de qui que ce soit sinon il n’est, de toute évidence, pas indépendant. Les souverainistes ont eux-mêmes défini la souveraineté comme voter ses lois, percevoir ses impôts, et signer ses traités. Est-ce que les peuples indépendants ne se limitent qu’à ces trois pouvoirs?

Ce que nous voulons, c’est l’indépendance avec tout ce que cela implique. L’indépendance n’est pas une histoire de conflit linguistique. C’est d’abord et avant tout une question de classes sociales. Que l’on soit anglophone ou francophone, quand on est pauvre, on a tout intérêt à être pour l’indépendance. Quand on est riche, que l’on soit anglophone ou francophone, on a tout intérêt à être contre. Il ne faut toutefois pas nier que la grande bourgeoisie capitaliste s’est servi de la langue, de la «race» et de l’ethnie, pour discriminer, pour donner l’accès aux finances et aux palais de Westmount à certains et des places dans les HLM et les jobs d’ouvriers dans les usines qui «scrapent» le monde, à d’autres. Lutter pour la libération exige d’avoir conscience de l’oppression que nous subissons. C’est parce que nous sommes opprimés que nous voulons l’indépendance, et cette oppression ne s’enraye pas par une meilleure représentation ou par des élus aux bonnes intentions. L’indépendance exige que nous ne dépendions politiquement, économiquement, socialement et culturellement d’aucun empire, d’aucune puissance, que nous soyons indépendant du capital tant étranger que local, de leurs institutions, de leurs valeurs, de toutes formes d’oppression découlant du capitalisme et de la classe dominante.

Contrairement à ce que prétendent les "fédéralistes", l’indépendance n’est pas un projet nationaliste, elle est plutôt internationaliste. Nous ne sommes en rien centrés sur la nation grande, forte et conquérante. Nous ne voulons pas être une nation qui domine d’une mer à l’autre, à l’image des empires romain, étasunien, du troisième Reich ou du Commonwealth. Nous ne voulons que l’affranchissement du peuple québécois comme l’affranchissement de tous les peuples du monde. Nous sommes plus que solidaires des luttes de libération des autre peuples. Leur lutte est la nôtre. La meilleure façon de lutter pour la libération des autres peuples opprimés, c’est lutter là où nous avons les pieds, car nous luttons tous et toutes contre le même oppresseur, le capitalisme international sous toutes ses manifestations. C’est pourquoi nous ne ferons pas faux bond aux Corses, Bretons, Basques, Kanakes, Martiniquais, Guadeloupéens, sous prétexte que la France est un appui potentiel. Elle n’est en fait qu’un empire comme un autre. La lutte des Innus, Mohawks, Cris, Inuits, Hurons-Wendat, Attikameks, Algonquiens, Mic-macs, Naskapis, Malécites, ainsi que celle de tous les peuples opprimés par l’Empire canadian, sont d’autant plus liés à la nôtre. Nous devons nous unir pour démanteler le fédéralisme canadian et sa mainmise sur nous tous. Tous les peuples ont droit à leur indépendance, dans tout ce que cela comporte, incluant un territoire indépendant même si cela «fragmentait» la Province of Quebec (bien que les traditionalistes amérindiens parlent généralement d’autonomie gouvernementale et de coexistence avec les «blancs»).

L’INDÉPENDANCE A BESOIN D’INDÉPENDANTISTES

La lutte pour l’indépendance exige que nous soyons indépendantistes dans notre façon de penser, d’agir, de lutter. Il est nécessaire que nous nous décolonisions dans notre manière d’être. S'il apparaît évident que la lutte doit être menée contre les structures externes d'oppression, elle exige aussi de reconnaître et de combattre de manière permanente nos propres comportements aliénés, c'est-à-dire, ceux hérités des structures de domination tels que l'autoritarisme, la soumission, l'insécurité, la peur, etc. Se désaliéner, c'est aussi de ne plus dépendre de la terminologie des dominants, de cesser de s’identifier à la manière dont ils nous définissent.

Nos aspirations sont vaines si nous nous plaçons à la remorque des nationalistes canadiens en parlant de «la Province de Québec», en parlant du «reste du Canada», ou en parlant de «se divorcer du Canada anglais». Il faut d’abord prendre conscience de l’oppression que nous subissons, du fait que nous sommes occupéEs, coloniséEs, pour comprendre que nous ne sommes pas des adolescents qui veulent quitter la chaleur du foyer familial, mais des porteur d’eau qui veulent s’affranchir.

Il ne faut plus dépendre de leur justice en croyant à leur constitution, leur democracy de «spots» publicitaires et de gros sous façonnée pour leurs propres intérêts. Faire notre indépendance, c’est aussi être indépendant de leurs mécanismes d’oppression et de manipulation.

Il ne faut plus dépendre de leurs médias. Notre visibilité ne doit pas compter sur leur bonne volonté. Ces institutions n’ont qu’un seul but : promouvoir le régime canadien et les intérêts capitalistes. Cessons de viser l’impact médiatique, visons l’impact réel.

Il ne faut plus dépendre de leurs règles du jeu, dont le piège qu’est l’électoralisme. Les méga-organisations de cent milles membres n’ont mené à rien avec tout le temps qu’on y perd à administrer, à donner des jobs d’élection et à faire des réunions de cravates bavardes. En acceptant leurs façons de décider, nous collaborons à notre propre échec.

Nous refusons l’angélisme qui croit que l’indépendance viendra par un petit «x» qui n’a exigé aucune conviction. La belle democracy a mari usque ad mare n’est qu’un mensonge que l’on veut bien croire. L’indépendance se bâtit lorsque des étudiantEs refusent les commandements paternalistes d’une autorité qui les veut dociles et serviles, avant de les remettre entre les mains de leurs amis du Conseil du patronat. Elle se bâtit quand ils sortent de leurs écoles l’armée canadian qui vient faire sa propagande. Elle se bâtit quand les travailleurs et travailleuses prennent les moyens qui s’imposent pour devenir les gestionnaires de leurs usines. Elle se bâtit quand les artistes refusent les bonbons chromés des rois nègres ou de leurs académies. Elle se bâtit quand nous n’attendons pas l’organisation miracle et menons nos propres initiatives d’éducation et de lutte. Elle se bâtit quand dans les formulaires officiels nous refusons de nous identifier comme citoyenNEs canadienNEs. Elle se bâtit quand nous refusons d’avaler leur propagande journalistique. L’indépendance se bâtit aussi en s’opposant au vol de nos biens publics, forêts, rivières, services, etc., par l’entreprise privée sous l’égide de l’état. C’est dans tous les moments de la vie quotidienne que la lutte se mène.

L’ORGANISATION INDÉPENDANTISTE DE LIBÉRATION

L’Organisation est formée d’indépendantistes qui jugent l’indépendance nécessaire à l’émancipation du peuple québécois* et qui en assument toute la portée et toutes les conséquences. L’Organisation combat au même titre que les oppresseurs du peuple québécois, tous ceux qui défendent consciemment ou non leurs intérêts en détournant le sens de l’indépendance et par le fait même, en détruisent tous les fondements. L’Organisation ne cherche pas d’alliances avec des «modérés» qui craignent les conséquences de la lutte. Cela serait se duper soi-même en se faisant faussement croire que la cause gagne des appuis.

Pour nous l’indépendance ne peut se faire par «p’tits bouts», c’est un tout qui s’inscrit dans un processus révolutionnaire qui demande une implication totale et quotidienne. L’indépendance est l’affaire de tous et toutes, et chacunE de nous doit y travailler à la pleine mesure de ses capacités. Cette indépendance implique toutes les sphères de la vie humaine par la libération de tous les groupes opprimés soit par leur condition économique, leur ethnie, leur sexe ou leur âge.

Il s’agit de travailler à une prise de conscience de la nécessité de l’indépendance pour les oppriméEs. C’est aussi un travail de destruction par la dénonciation des structures d’oppression et par une opposition à la mise en place et à la continuité de ces dernières. C’en est un aussi de construction par la libération intellectuelle, politique et économique des QuébécoisES qui pour l’instant croient que rien d’autre que le capitalisme canadian peut régner au Québec. Quiconque adhère aux idées véhiculées dans ce fascicule et est prêt à en assumer toute sa portée est des nôtres.

Indépendantistes québécoisEs anticapitalistes qui combattent tant le colonialisme canadien que le nationalisme québécois.
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