Les manœuvres navales que les Etats-Unis réalisent dans la région n'ont pas un caractère de routine. C'est une démonstration de force.

Gêner et provoquer dans les eaux bleues de la Caraïbe
(20/04/ 2006)

En termes strictement techniques, les manœuvres militaires se réalisent pour :
1- Entraîner les troupes et le commandement dans les conditions les plus proches possibles des batailles éventuelles.
2- Vérifier la viabilité des stratégies et des tactiques qui servent de base à la planification des opérations militaires.
3- Affiner les plans d'attaque jusqu'au détail
4- Etudier le théâtre des opérations de manière à amener les troupes à se familiariser avec lui.

Ces objectifs peuvent paraître justifier l'action, surtout si elle se passe dans un cadre local et sur le territoire national dans les limites duquel chaque Etat est souverain et dont la défense est, normalement, la raison d'être des forces armées. Souvent, cependant, viennent s'ajouter des considérations, voire des manipulations politiques qui transforment certaines manœuvres en démonstration de force et même en véritables actes d'intimidation.

Et c'est ce qui se passe en ce moment dans la Caraïbe.

Si vous regardez une carte, la Caraïbe, c'est une poussière d'île, plus ou moins grandes, comme Saint Domingue, Porto Rico, la Jamaïque ou Cuba, mais aussi des pays comme Panama, le Venezuela et la Colombie. Tous ces noms évoquent la plage, les palmiers, des stations balnéaires comme Varadero ou Cancun, des îles paradisiaques comme Cayo Largo, des pans d'histoire comme la culture maya ou la conquête espagnole.

Ce qui est clair, c'est que les Etats-Unis ne font pas partie de cette région. Ils ne sont pas un pays caribéen, n'ont pas de côte sur la Caraïbe et contrairement à ce qu'ils croient, la Mer des Caraïbes, n'est pas leur " mare nostrum ".

Cela va loin puisque la Colombie et le Venezuela ouvrent la porte au Brésil, en plein Atlantique sud et c'est ainsi qu'est né le concept de " Grande Caraïbe " un terme qui englobe, au-delà de la géographie, la musique, la culture en général, le métissage, la négritude, en résumé, l'identité.

Pendant la Seconde Guerre Mondiale, les aspects militaires de la Caraïbe ont été liés à la défense du Canal de Panama, ce qui a permis aux Etats-Unis de justifier leur maintien de la base de Guantanamo, de créer des grandes bases près de La Havane, plus précisément à San Antonio de Los Baños, et à San Julian dans l'extrême Ouest de notre île. Ils ont également obtenu des facilités pour leurs forces en Amérique Centrale.

Certains de ces critères ont survécu à la défaire du nazisme et se sont maintenus pendant la guerre froide, mais ils n'ont plus rien à voir avec la réalité actuelle.

Rien ne menace le Canal aujourd'hui, il n'y pas de conflits dans la région, au contraire il régnerait plutôt une bonne ambiance avec la création de Petrocaribe, une compagnie pétrolière qui réunit 14 pays et à laquelle Haïti vient d'annoncer qu'elle voulait se joindre, la bonne marche du Caricom, la Communauté Economique Caribéenne. L'ambiance amicale de la région, c'est aussi l'Association des Etats de la Caraïbe qui met en place des projets communs, le développement du tourisme multi-destinations qui présente à un seul visiteur plusieurs aspects de nos îles… C'est peut-être cela qui n'a pas l'heur de plaire à Washington…

Les navires de croisière, les yachts, les divers bateaux qui parcourent les eaux bleus et calmes de la Mer des Caraïbes devront ces jours-ci cohabiter avec des navires de guerre étasuniens et des milliers d'hommes en armes.

Ils gênent, ils provoquent. Personne ne les a invités.