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PERSONNEL DE SANTE : PENURIE MORTELLE DANS LES PAYS DU SUD

Anonyme, Jueves, Abril 13, 2006 - 07:39

RUBY BIRD

RUBY BIRD - Journaliste Indépendante
PERSONNEL DE SANTE : PENURIE MORTELLE DANS LES PAYS DU SUD

Dans le monde, près de 200 000 enfants meurent chaque semaine de maladies qui auraient pu être soignées ou évitées. Cela est dû à la profonde déliquescence d’un grand nombre de systèmes publics de santé. A l’échelle mondiale, 4 millions de professionnels supplémentaires seraient nécessaires pour endiguer la pénurie. L’OMS a consacré son Rapport 2006 (Organisation Mondiale de la Santé) à ce problème de pénurie de personnel soignant dans les pays du Sud. Dans ce Cadre, Agir Ici, Aide Médicale Internationale, Médecins du Monde et le Secours Catholique-Caritas France engagent une campagne « Personnel de Santé au Sud : pénurie mortelle ». Ils demandent aussi aux citoyens d’interpeller le gouvernement français via le ministre des Affaires Etrangères. Un week-end de mobilisation sera organisé les 20-21 mai à Paris et dans de nombreuses villes en France. Le thème sera « La Santé sous tension ». Cette mobilisation sera en amont de l’Assemblée Mondiale de la Santé du 22 au 27 mais à Genève.

Est estimé le montant de 4 millions de soignants manquants dans le monde (médecins, infirmiers et sage-femmes). Tous les pays sont confrontés à des carences de ressources humaines de santé, surtout dans les pays en développement. L’Afrique subsaharienne est la région la plus touchée, à elle seule 1 million de soignants manquent.

Dans les pays les plus démunis, le ratio minimal dont ils auraient besoin, serait de 250 soignants pour 100 000 habitants. Cela permettrait 80% des accouchements d’être assistés par une personne compétente et une couverture vaccinale de 80%. Actuellement, 2,5 millions de personnes ne bénéficient pas de ce minimum. 10% de la population mondiale vit en Afrique subsaharienne : il n’y a là-bas qu’1% des médecins du monde, 3% des infirmières et sages-femmes. L’Afrique regroupe 25% des maladies mondiales. L’Europe forme 173 800 médecins par an, l’Afrique 5 100, ce qui revient à 1 médecin pour 115 000 habitants (en Afrique subsaharienne). La mortalité maternelle et infantile est directement liée au nombre de soignants.

Les zones rurales sont généralement les moins bien dotées. Exemple :
- En tanzanie, Dar-es-Salaam, l’ancienne capitale compte 30 fois plus de personnel médical que n’importe quel autre district du pays.
- La moitié des médecins du Sénégal sont à Dakar où ne vit que 20% de la population du pays.
- En Argentine, 54,2% des médecins se concentrent dans les principaux centres urbains tandis que 1% exercent dans les zones les plus reculées.

Sur les 47 pays d’Afrique subsaharienne, s’y trouvent 87 écoles de médecine. 11 pays n’en possèdent pas et 24 en ont une. Aucune ne permet une formation complète. Beaucoup sont sommairement équipées, laboratoires et revues médicales sont rares. L’enseignement est peu conforme à la réalité car s’aligne sur d’anciens standards des pays occidentaux.

En Afrique, chaque année, 15% à 40% des professionnels de santé abandonnent le système de santé public pour le privé. L’émigration est aussi envisagée vers les pays proches offrant de meilleures conditions de vie. La majorité des émigrants vont vers les pays occidentaux qui offrent de largement meilleurs salaires. Les médecins acceptant de se requalifier en infirmiers pour quitter le pays. Exemple :
- Aux Philippines, en 2003, 25 000 infirmières ont quitté le pays, 8 400 avaient été diplômées cette même année.
- Au Ghana, 75% des médecins émigrent 9 ans et demi après l’obtention de leur diplôme.
- Dans la seule ville de Manchester (GB), il y a plus de médecins Malawites que dans le pays tout entier.

LE VIH-SIDA
L’incapacité des pays à organiser rapidement leur système de santé pour lutter contre le VIH est un facteur prépondérant. On considère que la cause principale est la pénurie de personnel de santé compétent. Exemple :
- Fuite des intellectuels hors des zones de conflits
- Non-paiement des salaires depuis des mois donc il y a fuite vers le secteur privé ou une reconversion dans des petites boulots
- Négation de la réalité du SIDA qui a conduit les gouvernements à négliger la formation de personnel de santé. Donc, c’est dans l’urgence que des programmes sont lancés.

Les femmes représentent plus de la moitié des nouvelles contaminations, c’est chez elles et ceci dans le monde entier, que se passe la plus forte progression. En Afrique et dans les Caraïbes, elles représentent plus de la moitié des personnes séropositives. Leurs enfants sont souvent contaminés ou deviennent des orphelins.

« 5 ans après la session spéciale de l’Assemblée générale des Nations-Unies sur le VIH/SIDA, l’ONU tiendra une nouvelle session du 31 mais au 2 juin (UNGASS + 5 – United Nations General Assembly Special Session on HIV/AIDS 2006) pour faire le point sur les engagements en matière de lutte contre le SIDA. Le rôle du Fonds mondial de Lutte contre le Sida, la Tuberculose et le Paludisme (Fonds Mondial STP) et la reconstitution de ses ressources financières seront notamment à l’ordre du jour ».

Renforcement des systèmes de santé
« Le Fonds Mondial accepte de financer des programmes dédiés spécifiquement au renforcement des systèmes de santé et notamment du personnel de santé pourvu qu’il soit démontré que ce renforcement constitue un préalable essentiel pour améliorer la lutte contre les maladies visées par le Fonds. Pourtant, dans le cadre du 5ème round de financement, seules 3 des 30 propositions axées sur le renforcement des systèmes de santé ont été retenues. Parmi les 3, une seule concernait le développement des ressources humaines. Il est donc essentiel qu’à l’occasion de l’UNGASS + 5 soit rappelée la possibilité du Fonds de financer des programmes en faveur du personnel de santé et que les pays en développement soient incités à présenter des propositions en ce sens. »

Depuis plus de 20 ans, on identifie la pénurie de personnel soignant comme un des premiers freins à la lutte contre les grandes pandémies et à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) en matière de santé.

- Initiative pour Apprendre Ensemble (Joint Learning Initiative) : lancée en 2002, cette initiative regroupe plus de 100 leaders des secteurs de la santé, publiant en novembre 2004 un rapport « Ressources humaines pour la santé : surmonter la crise ».
- Forum de Haut niveau sur les OMD Santé : en 2004 et 2005, trois Forums de haut niveau sur les OMD relatifs à la santé ont réuni des ministres de la santé et des Finances de près 40 pays ainsi que la représentation de diverses institutions internationales. La pénurie des professionnels de santé a été abordée lors des Forums d’Abuja (décembre 2004) et de Paris (novembre 2005).
- Organisation Mondiale de la Santé (OMS) : en mais 2004, lors de la 57ème Assemblée Mondiale de la santé, l’OMS a adapté la résolution 57.19 consacrée à la migration internationale de professionnels de la santé. Cette question sera à l’ordre du jour de la 59ème Assemblée Générale de l’OMS du 22 au 27 mai 2006 (résolution 58.17).
- Commission des Droits de l’Homme, Assemblée Générale des Nations Unies : le rapporteur spécial de la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies a produit le 12 septembre 2005 le rapport « Le droit de toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible » consacré aux professionnels de la santé.
- Commission européenne, Stratégie d’Action Communautaire concernant la pénurie de ressources humaines dans le secteur de la santé dans les pays en développent, le 12 décembre 2005 : c’est la réponse de l’Union européenne et de la Commission dans la contexte de la décennie de l’action en matière de ressources humaines 2006-2015, proposée par la 57ème Assemblée mondiale de la santé. L’UE s’engage « en faveur de l’accroissement du volume de l’aide au développement et de son renforcement afin de la rendre moins instable et plus prévisible ».
- Conseil National du Sida : en France, le Conseil National du Sida a récemment porté son attention sur la question de la pénurie de personnel soignant dans les pays en développement.
- Public Service International « ethical recruitment campaing » : le 18 décembre 2005, Public Service International, fédération regroupant plus de 600 syndicats, a lancé une nouvelle campagne sur le recrutement éthique du personnel de santé. Nécessité de lutter contre les pratiques discriminatoires dont font l’objet les professionnels de santé avec un diplôme étranger exerçant dans les pays développés. L’impact négatif que les pratiques de débauchage peuvent avoir sur les systèmes de santé dans les pays du sud.
- Initiative des ONG américaines en faveur du personnel de santé dans le spays touchés par le VIH/SIDA : le 1er janvier 2006, un collectif ONG américaines ont lancé un appel à l’action d’urgence face à la crise des ressources humaines dans les pays confrontés aux ravages causés par le VIH/SIDA. Elles veulent également une réforme des politiques macroéconomiques soutenues par le FMI qui ont pour conséquence de limiter les capacités des Etats à investir dans les secteurs sociaux de base.
- Physicians for Human Rights « An action plan to prevent brain drain » : publication en juin 2004 d’un rapport très complet sur la problématique de la pénurie de personnel de santé dans les pays en développement.

L’aide internationale en matière de santé a augmenté mais le niveau reste largement en-dessous des montants nécessaires. Cela représente moins de 1% des dépenses militaires mondiales. En 2001, la Commission « Macroéconomie et Santé » de l’OMS a estimé que le niveau minimum des dépenses de santé par habitant devrait se situer, dans chaque pays, entre 30 & 40 $ par an pour garantir un accès universel aux soins les plus essentiels. L’effort à consentir devrait s’élever à 27 millions $ en 2007 et 36 millions $ en 2015. Pour la France, cela demanderait un effort additionnel de 1,5 millions d’Euros par an jusqu’en 2015.

La France
Selon le CICID (Comité Interministériel de la Coopération Internationale et du Développement) en mai 2005, le secteur de la santé représentait en moyenne, entre 2001 et 2003, 185 millions d’Euros, soir 4% de l’APD totale française. Cela place la France bien en-dessous de la moyenne des pays du Comité d’Aide au Développement de l’OCDE (Royaume-Uni = 21% ; Etats-Unis = 18%…). La France a pris de nouveaux engagements à la Conférence de Londres en septembre 2005, d’augmenter une nouvelle fois sa contribution au Fonds Mondial de Lutte Contre le Sida, la Tuberculose et la Paludisme. En 2006, cela passera à 225 millions d’Euros et en 2007 à 300 millions d’Euros.

Deux exemples de politique du FMI sur les systèmes de santé dans les pays du sud
- NICARAGUA : quelques 20 000 professionnels de santé sont en grève depuis mi-novembre pour demander une revalorisation de leur salaire de 70% par an sur les deux ans, qu’ils ont depuis accepté de baisser à 30%. Le 18 janvier, n’ayant obtenu aucun résultat, les médecins ont suspendu les soins d’urgence dans les hôpitaux du pays. Le président Enrique Bolanos a déclaré « qu’accorder de nouvelles hausses des salaires signifierait rompre les accords avec le FMI ». Le gouvernement a déjà licencié quelques-uns des médecins grévistes. Le FMI vient de prêter au Nicaragua 20,1 millions $. Cet accord n’est pas sans conditions. Il impose au gouvernement de geler la masse salariale globale réelle de la fonction publique. Une mission du FMI s’est rendue le 9 mars au Nicaragua mais il maintient ses exigences de gel des salaires réels et ne veut pas répondre partiellement aux revendications des médecins en remaniant la structure des dépenses publiques. Il y a omniprésence du FMI dans la gestion interne des pays dans lesquels il intervient. Manque aussi de transparence de ses actions.
- ZAMBIE : entre 1999 et 2002, le nombre de médecins est passé de 1 283 à 559. Soit un médecin pour 190 000 habitants. Ce pays est l’un des épicentres de la pandémie VIH/SIDA qui touchait près de 1 million de personnes en 2003. Depuis novembre 2002, le Zambie bénéficie de l’initiative Pays Pauvre Très Endetté (PPTE). Il aurait pu bénéficier en décembre 2003 d’un allègement de sa dette de 3,8 millions $ sur un montant de 6,8 millions $. Mais la Zambie a été exclue de l’initiative en avril 2003 car le gouvernement n’avait pas respecté les exigences du FMI visant à maintenir la masse salariale publique à 8% du PID en 2003. Le FMI a suspendu ses prêts à la Zambie et la plaça sur un « programme de référence » (Staff Monitored Programme) jusqu’en juin 2004 qui entraîne l’arrêt des programmes d’aide initiés par les autres bailleurs de fonds et le retardement des allègements de la dette. La Zambie doit payer 337 millions $ en 2004 pour rembourser sa dette. Pour réintégrer le PPTE doit adopter le budget « Austérité pour la postérité » : les salaires des fonctionnaires ont été gelés ; pas de recrutement de personnel supplémentaire malgré la pénurie de médecins et de professeurs dans les institutions publiques ; en février 2004 il y a eu hausse de la pression fiscale. En octobre 2005, le ministère de la santé n’est toujours pas autorisé à augmenté les dépenses pour recruter et retenir son personnel car des plafonds sont imposés sur la masse salariale globale de la fonction publique.

Les Associations Partenaires de la Campagne
- Agir Ici : née en 1988, loi 1901, Agir ici est une association se proclamant citoyenne de solidarité internationale luttant contre les injustices mondiales en proposant des solutions concrètes et durables. Pour cela, Agir ici s’engage à informer et mobiliser les citoyens et faire pression sur les décideurs. Ses actions déclarées : pour défendre l’égalité d’accès aux services de base, établir des règles commerciales plus équitables, réformer les institutions financières internationales, réglementer les transferts d’armes. Totalement indépendante de tout parti politique, mouvement syndical ou confessionnel. Fonctionne essentiellement grâce aux dons de ses membres et sympathisants. Membre observateur de la confédération Oxfam international.
- Aide Médicale Internationale : AMI, association humanitaire française se déclarant apolitique et laïque. Créée en 1979 et veut rétablir l’accès aux soins des populations exclues de tout système de santé où vivant dans des conditions d’extrême pauvreté. Elle forme du personnel médical local et soutient des centres de santé en s’appuyant sur les spécificités culturelles de chaque région. Intervient dans des situations de post-urgence auprès des populations oubliées à travers le monde en vue de leur autonomisation.
- Médecins du Monde : association de solidarité internationale qui s’appuie sur l’engagement de ses membres (professionnels de santé) pour porter secours, depuis plus de 25 ans, aux populations les plus vulnérables dans le monde et en France. Sa première mission est de soigner. Les volontaires s’engagent à venir en aide à toutes les personnes vulnérables : victimes de catastrophes naturelles, de famines, de maladies, de conflits armés, de violences politiques, réfugiés, déplacés, peuples minoritaires, enfants des rues, usagers de drogues et tous les exclus des soins. Se dit agir en toute indépendance. Témoigne des entraves à l’accès aux soins, des atteintes aux droits de l’homme et à sa dignité. Engage le dialogue avec les politiques pour améliorer la situation des populations civiles.
- Secours Catholiques-Caritas France : Association loi 1901, à but non lucratif ; se dit lutter contre toutes les formes de pauvreté et d’exclusion et cherche à promouvoir la justice sociale. Agit pour la transformation sociale et la justice à partir de l’échange avec les plus démunis, par la réalisation de projets et l’action institutionnelle, au plan local, national, et au sein du réseau Caritas, au plan international.

Journaliste indépendante


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