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A BOGOTA POUR INGRID PAR Alain LIPIETZ

Anonyme, Viernes, Febrero 10, 2006 - 07:51

Libertad para ingrid

A BOGOTA POUR INGRID

Jeudi 3 novembre 2005

Mercredi après-midi, je rejoins à Bogota une délégation des Verts mondiaux venus apporter leur soutien à Ingrid, à sa famille, ses amis, à son parti Oxygeno Verde. Il y a là des députés, des sénateurs, des militant-e-s de tous les continents (sauf l’Afrique) : Italienne, Belge, Hollandaise, Bosniaque, Australienne, Japonais, Brésilien, Etats-Unien...

Disons-le d’emblée : je n’ai pas de bonne nouvelle sur Ingrid et sur Clara Rojas. Il y a en fait deux "processus" en cours et tous deux sont paralysés.

Officiellement, la gauche, l’Eglise, le Partido Verde Oxygeno, etc. et même verbalement le Président Uribe et les FARC (Forces Armées Révolutionnaires de Colombie, qui détiennent Ingrid et Clara) sont pour un accord humanitaire global, échangeant les prisonniers de guerre des deux camps et les secuestrados (les otages). En réalité, Uribe et les FARC montent les enchères, et il est peu crédible que cela se réalise avant la prochaine élection présidentielle tant l’enjeu est devenu politique.

D’autre part la France a mené cet été une négociation secrète, prétendant avoir l’accord d’Uribe ; dans les faits ça ne s’est pas vraiment bien passé entre la Colombie et la France. Le Quai d’Orsay est maintenant accusé de traiter la question de manière "sentimentale", nuisant aux intérêts français en Colombie. Sur ce point, la position du nouvel ambassadeur de France est quasiment celle exprimée par Alain Abellard dans Le Monde. Pire, il nous explique que jamais les FARC n’ont communiqué aux Français les minimes "preuves de vie" qu’ils demandaient. Mais pas de panique : les FARC communiquent rarement des preuves de vie, et selon mes propres contacts les nouvelles sont plutôt rassurantes. Donc ? Donc rien.
Quant à ma position, qui est aussi celle d’Ingrid elle-même, je l’ai déjà écrit : on ne peut pas mettre, au plan des principes, les prisonniers de guerre et les otages civils (en particulier les élus, candidats, émissaires etc.) sur le même plan. Les premiers doivent être échangés, les seconds libérés inconditionnellement. Et tant mieux si les deux opérations ont lieu en même temps ;-)

Lorsque j’arrive, notre délégation a déjà pas mal de choses à son actif : une petite manif avec le mouvement des familles d’otages, et des visites aux forces de gauche ; aucun officiel du gouvernement ou de la présidence n’a voulu nous recevoir !

Dès mercredi soir, réunion avec les organisations des droits de l’homme, qui portent des jugements sévères sur la loi Justice et Paix), tout en reconnaissant qu’elle offre quelques espaces pour les victimes des paramilitaires, qu’il faut savoir utiliser... Bref pas très loin de la position européenne. Par la suite, nous rencontrons des collectifs d’avocats, ou d’autres organisations des droits de l’homme. Ou encore, le sénateur indigène Jésus Piñacue qui faisait « binome » avec Ingrid

(…)

Alain Lipietz :

Je me concentrerai sur deux visites clés.
La première est la rencontre avec le Parti Communiste Colombien. Ce parti a été autrefois à la tête d’une guérilla, d’ailleurs insérée dans les FARC de l’époque, qui a été la première à négocier sa réintégration dans la vie civile sous le nom d’Union Patriotique. Ce fût un désastre : en quelques semaines, des milliers de cadres en furent assassinés par les escadrons de la mort et autres paramilitaires. Cette expérience traumatisante est un des principaux obstacles au retour à la paix en Colombie : malgré l’expérience plus positive du retour à la vie civile du M19, personne ne peut véritablement faire confiance à un futur accord de paix. (Voir ici un résumé de toute cette histoire) http://www.monde-diplomatique.fr/cahier/ameriquelatine/guerillacolombie-...

D’autant que la quasi-amnistie apportée aux paramilitaires par le décret 128 et par la loi Justice et Paix a permis, sous la houlette du Président Uribe et de sa vaste majorité parlementaire (on estime que 30% des députés au Parlement représentent les paramilitaires), une infiltration massive des anciens paramilitaires dans le Département de l’Administration de la Sécurité, c’est-à-dire la police fédérale.
Comme je viens de le dire, les FARC ne sont donc pas (ou ne sont plus) "la guérilla du PCC". En fait, les FARC actuelles viennent d’un morceau du Parti libéral qui s’était affronté avec le Parti conservateur dans la « Grande Violence », cette guerre civile des années 50 évoquée par Gabriel Garcia Marquez dans Cent ans de solitude. En gros, les FARC, ce sont les guérilleros libéraux paysans qui n’avaient pas eu de terres lors de l’armistice de cette guerre civile. Leur référence marxiste-léniniste est venue plus tard, et à ce moment les communistes ont combattu un moment en leur sein , avant la création de l’UP. Mais il est clair que le PCC, tout en n’ayant, encore une fois, aucune influence sur les FARC (pas plus que le Parti communiste cubain d’ailleurs), est sans doute le parti politique dont certaines tendances sont les plus proches des FARC, et servent de canal de communication avec elles.

Cette rencontre était donc tout à fait importante pour nous. Le Secrétaire général du Parti fait d’abord un long exposé, critiquant très classiquement le gouvernement Uribe, l’Impérialisme et la loi Justice et Paix, tout en imputant (tout à fait correctement !) l’interminable guerre civile colombienne aux profondes injustices sociales qui structurent ou déstructurent ce pays.
Je prends alors la parole, et sur le même ton, présente le mouvement Vert mondial comme un héritier des luttes du 18e siècle pour les libertés, et des luttes des 19e et 20e siècles pour la justice sociale, rajoutant une nouvelle valeur pour le 21e siècle, la recherche d’un bon rapport entre l’humanité en son écosystème planétaire. Tout le monde hoche la tête. Je rappelle mon rôle au Parlement européen, les positions répétées de ce Parlement pour des réformes sociales en Colombie, et le scepticisme affirmé par toutes les autorités de l’Union européenne contre la loi Justice et Paix.
J’enclenche alors sur le cas d’Ingrid. « Nous ne considérons pas que l’enlèvement d’Ingrid soit un problème entre le président Uribe et les FARC, mais entre les FARC et nous. Ingrid n’est pas dans le camp d’Uribe. Elle était une des grandes figures de notre mouvement, notre candidate aux élections présidentielles de Colombie. De façon tout à fait inattendue, les FARC l’ont enlevée, nous déclarant ainsi une guerre dont nous ne comprenons pas les raisons, d’autant moins qu’Ingrid était une personne qui combattait elle aussi la droite et les classes dirigeantes colombiennes, leur mépris pour la justice, leur corruption. Nous sommes donc pour un accord humanitaire permettant l’échange des combattants prisonniers de part et d’autre, mais nous n’admettons pas les prises d’otages civils, et en particulier, nous n’admettons pas l’enlèvement d’Ingrid. Nous exigeons sa libération immédiate et inconditionnelle. »

Toute la réunion se fige. Le représentant des Verts américains intervient pour condamner la responsabilité de son propre pays. Mais chacun attend la réponse du PCC à mon intervention. {{Elle vient de Carlos Lozano Guillèn, dirigeant de Voz

http://www.nodo50.org/voz/
, le journal du Parti : « Nous sommes totalement d’accord avec l’analyse d’Alain. Nous l’avons fait savoir aux FARC. Nous demandons nous aussi la libération inconditionnelle d’Ingrid. D’ailleurs je confirme que c’est une excellente personne qui, à plusieurs reprises, quand notre journal a été en difficulté, est intervenue en notre faveur en tant que sénatrice. »}}

Toute la salle se détend, on évoque la possibilité d’un communiqué commun entre la délégation et le PCC. Cette perspective n’enchante pas les Verts de tous les pays, un peu gênés que le seul communiqué commun soit fait avec le PCC. Il faudra, les jours suivants, les convaincre de l’importance toute particulière de cette déclaration avec le Parti communiste.

- Source Alain Lipietz, député Européen/ Les Verts/ Confédération écologiste - Parti écologiste :

http://lipietz.net/breve.php3?id_breve=109#up

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