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Élections fédérales: "Alternance" et parti uniqueAnonyme, Martes, Enero 17, 2006 - 20:23
Arsenal-express
À quelques jours du scrutin prévu pour le 23 janvier, il est désormais presque assuré que les Conservateurs de Stephen Harper formeront le prochain gouvernement - le seul "enjeu" qui reste étant de savoir s'il s'agira d'un gouvernement majoritaire, ou pas. À en juger par le traitement que les commentateurs, analystes et autres grenouilleurs qui s'agitent autour de la classe politique canadienne lui réservent, il semble évident que la grande bourgeoisie a décidé de lâcher son favori, Paul Martin. Celui qu'on a encensé pendant tant d'années comme un "ministre des Finances hors pair" et le successeur naturel de l'ancien Premier ministre Jean Chrétien apparaît maintenant comme le dernier des incompétents. Il est vrai que les innombrables cafouillages ayant ponctué sa campagne, dont certains tirent vraisemblablement leur origine de l'entourage même de son prédécesseur, ont contribué à cette impression qu'il n'est plus l'homme de la situation. Pourtant, pendant toutes ces années, Paul Martin fut un des principaux architectes de ces politiques qui font la "fierté du Canada" (lire: qui servent à promouvoir les intérêts de la bourgeoisie impérialiste canadienne dans le contexte de la globalisation). Seulement, Martin et les Libéraux semblent avoir épuisé leur capital de sympathie, i.e. leur capacité de faire passer et de mettre en œuvre des politiques qui correspondent, fondamentalement, aux intérêts d'une petite minorité, avec l'aval de la majorité - en réalité, sinon en apparence. Tout le système parlementaire est basé sur cette grande illusion, dans la plupart des pays capitalistes avancés: alternance entre la "gauche" et la droite en France; entre les Tories et les travaillistes au Royaume-Uni; entre les Démocrates et les Républicains aux États-Unis; entre les Libéraux et les Conservateurs au Canada. Cette équation, qui semble indiquer un choix, vise à faire en sorte que ceux et celles qui ne détiennent aucun pouvoir réel - les travailleurs, les travailleuses et les masses exploitées - continuent à croire qu'ils et elles ont un mot à dire dans la direction et l'organisation de la société. Dans le cadre du régime politique bourgeois, les élections, que la chroniqueuse politique Lysiane Gagnon a récemment qualifié de "jour de l'alternance" (sic) (La Presse, 14/01/2006), ne servent en effet qu'à ça, i.e. à maintenir cette grande illusion, à renouveler le personnel politique qui gouvernera pour le compte de la bourgeoisie avec une légitimité suffisante pour assurer le maintien de la paix sociale, et au besoin à apporter quelques ajustements quant aux politiques mises de l'avant, sans rien changer, toutefois, aux caractéristiques fondamentales du capitalisme (défense du système de la propriété privée et du profit, division de la société en classes, etc.). Entre les Démocrates et les Républicains aux États-Unis, il y a certes des nuances, mais peut-on dire que depuis l'accession de la bourgeoisie américaine au stade du puissant impérialisme qu'elle a atteint, les politiques mises en place par les gouvernements successifs ont servi autre chose que ses intérêts? Peut-on dire que l'alternance entre les deux grands partis, Libéraux et Conservateurs, qui a marqué sans interruption aucune toute l'histoire moderne du Canada a signifié un changement qualitatif quelconque dans l'organisation sociale du Canada (domination de la bourgeoisie sur le prolétariat, dans tous les domaines; maintien du vol et de la spoliation des ressources et des territoires ayant appartenu aux nations autochtones; etc.)? Y a-t-il un moment dans l'histoire de ce pays où la bourgeoisie n'a pas été la classe dominante et où les politiques mises de l'avant par le gouvernement central ont porté atteinte de quelconque façon aux intérêts des capitalistes? La réponse à toutes ces questions est évidente. Comme l'a écrit candidement la même chroniqueuse, l'alternance est "un phénomène nécessaire dans toute démocratie" (dans toute démocratie bourgeoise, s'entend); cela, justement parce qu'elle permet de renouveler et de perpétuer cette grande illusion. Nous, maoïstes, disons que le Canada est dominé par un parti unique: celui de la grande bourgeoisie. Dans un dossier publié à l'occasion du dernier scrutin, nos camarades du journal Le Drapeau rouge ont écrit: "Que ce 'parti unique' soit bicéphale ou tricéphale, qu'il se compose d'un gros corps obèse et totalitaire libéralo-conservateur et de deux flancs: un flanc gauche et un flanc droit plus ou moins visibles et discrets selon les époques et les circonstances, cela importe tout compte fait assez peu. Ce qui compte vraiment c'est que les mêmes intérêts (ceux des capitalistes) règnent à la fois au gouvernement et dans l'opposition, si bien que quand la représentation parlementaire change d'une élection à l'autre (et elle doit changer pour que l'édifice tienne), la nature du parlement, elle, reste la même." C'est précisément ce phénomène qui va se (re)produire lundi prochain. Ce n'est pas sans raison que les stratèges conservateurs ont "recentré" leur programme et adouci l'image de leur chef. Sur certaines questions, certes, Stephen Harper introduira des politiques quelque peu différentes de celles que prônent les Libéraux - bien qu'encore là, on doive faire la distinction entre le discours électoral d'un Paul Martin et la réalité. Ainsi, sur la question d'un "rapprochement" entre le Canada et les États-Unis prôné par Harper, il faut voir qu'il s'agit d'une orientation déjà bien entamée par le gouvernement sortant, et qui correspond aux intérêts de la bourgeoisie impérialiste canadienne (intervention militaire en Afghanistan et en Haïti, établissement de politiques de défense et de sécurité communes, etc.). Sur les questions sociales, qui en inquiètent plusieurs, il est à peu près clair qu'un gouvernement conservateur ne fera rien qui soit susceptible de remettre la paix sociale en question, à moins que cela s'avère absolument nécessaire à la défense des intérêts de la bourgeoisie: cela explique que Harper se soit engagé à ne pas modifier le statu quo actuel sur des questions comme le droit à l'avortement et la peine de mort, en dépit des positions historiques de son parti. En 2004, 40% des électeurs et électrices canadienNEs ont choisi de ne pas voter et de ne conférer aucune légitimité à ce cirque navrant. En appelant encore une fois les masses prolétariennes et les nations autochtones à boycotter les élections!, les maoïstes souhaitent ouvrir la voie à une autre politique: non pas une énième "alternative politique" bidon, qui chercherait à revamper un régime politique qui a fait son temps, mais une politique révolutionnaire, qui s'attaquera au système capitaliste lui-même et préparera l'établissement d'une société nouvelle, dans laquelle les oppriméEs d'aujourd'hui deviendront les acteurs et les actrices d'un monde libre de toute forme d'exploitation. _____ Article paru dans Arsenal-express, nº 79, le 15 janvier 2006. Arsenal-express est une liste de nouvelles du Parti communiste révolutionnaire (comités d'organisation). Pour vous abonner: faites parvenir un courriel à
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