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Une nouvelle conjoncture en matière de répression politique à Montréal ?

Anonyme, Sábado, Noviembre 20, 2004 - 18:19

COBP

 
Les arrestations de masse se suivent mais ne se ressemblent pas. Quand la répression politique n'est plus à l'abri des politiques comptables de rationalisation.

 
MONTRÉAL, le 20 novembre 2004. Finalement, la manifestation d’hier de la CLAC appelant à la perturbation du congrès du Parti libéral du Québec s’est terminée par une arrestation de masse. Rien de très étonnant jusqu’à présent. Après tout, la CLAC et ses sympathisantEs sont des cibles officielles du Service de police de la ville de Montréal (SPVM) depuis plusieurs années.

Pourtant, il y avait quelque chose de différent dans l’approche répressive adopté par le SPVM à l’occasion de la manifestation du vendredi 19 novembre 2004. Je ne suis pas le seul à penser que si cette même manifestation avait eu lieu il y a deux ou trois ans, les personnes arrêtées auraient vraisemblablement tous et toutes écopées d’une accusation criminelle d’« attroupement illégal ».

Or, la plupart des personnes interpellées vendredi dernier n’ont reçu qu’un constat d’infraction émis en vertu du fameux règlement anti-manifestation P-6, le même qu’avait utilisé le SPVM lors de l’arrestation de masse préventive du 26 avril 2002, au square Dorchester. Au lieu d’un casier judiciaire, le pire qui attend les personnes arrêtées le 19 novembre est une amende de 138 $.

Au moment d’écrire ces lignes, on ne connaît pas encore le nombre exact de personnes qui ont été encerclées par la police—bien que le chiffre qui circule le plus est celui de 175 personnes. On sait cependant que sept personnes font figure d’exception puisqu’ils et elles font face à différents chefs d’accusation criminelles.

Plusieurs personnes peuvent néanmoins témoigner que les flics auraient pu arrêter encore plus de manifestantEs s’ils l’auraient voulu. Mais voilà, il semble que « les ordres venant d’en haut » ne consistaient pas à faire le plein au niveau des arrestations, contrairement à ce que les flics de Montréal nous avaient habitués ces dernières années (OMC 28 juillet 2003, COBP 15 mars 2002 et ainsi de suite).

Hier, la télévision, le chef du SPVM, Michel Sarrazin, aurait déclaré que les arrestations massives étaient coûteuses. C’est bien la première fois que la police évoque publiquement des considérations d’ordre budgétaire pour expliquer sa retenue en matière d’arrestations de manifestantEs.

Depuis plusieurs années, on nous arrête et on nous fait des procès en série, qui traînent souvent en longueur. L’État investissait alors, et continue de le faire, dans la judiciarisation de la dissidence sans regarder aux dépenses. Comme si l’État était parti du principe que de persécuter les opposantEs au système ne pouvait en aucun cas constituer un gaspillage en fonds publics—même en prenant en considération que de nombreuses affaires d’arrestations amenées devant les tribunaux ont abouti à des acquittements.

En fait, pour corriger le tir des propos de M. Sarrazin, ce ne sont pas tant les arrestations qui sont coûteuses—après tout, au pire on parle d’une opération policière qui se limite dans le temps à quelques heures—ce sont les procès. Ces fameux procès politiques dont on ne sait jamais quand est-ce qu’ils commenceront et encore moins quand est-ce qu’ils finiront.

Je ne suis pas le seul à soupçonner que ce qui commence réellement à faire grincer des dents chez certaines instances gouvernementales, ce sont les fortunes en fonds publics qui sont investis aveuglément dans des procédures judiciaires.

Est-ce que quelqu’un dans le vaste appareil gouvernemental en est arrivé à la conclusion que nous ne valions pas tant d’efforts ? Est-ce que des éminences grises ont réalisé que le mouvement d’opposition au capitalisme globalisé a beaucoup perdu de son audace et est rongé par la psychose de répression grâce aux assauts répétés des forces de l’ordre sur nos droits et libertés fondamentales ?

À moins que ce soit la multiplication des poursuites au civil dans des dossiers d’arrestation de masse (OMC, Westmount 2000, S29, Snack de minuit, etc.) qui incite le SPVM à faire preuve de davantage de modération dans son dosage répressif. Toutes ces hypothèses sont valables.

La décision du SPVM d’opter pour des accusations de nature pénale au détriment de charges criminelles n’est pas rappeler la volonté d’Ottawa de déjudiciariser la possession simple de marijuana avec son projet de loi qui est revenu récemment à l’ordre du jour du feuilleton parlementaire après la ré-élection des libéraux de Paul Martin.

En effet, la logique comptable qui est mise de l’avant par le projet de loi sur la possession simple de marijuana ressemble à s’y méprendre à celle que nous servent les autorités en matière d’arrestation de masse. Après plus de 70 ans de prohibition et de lutte anti-drogue, force est de constater que la demande est toujours aussi forte. Tout ce que la croisade anti-stupéfiant a vraiment réussi à accomplir, c’est à embourber les tribunaux criminels.

On pourrait dire la même chose en ce qui concerne les dossiers d’arrestation de masse. Les méga-procès de manifestantEs encombrent le rôle de comparution de la cour municipale de Montréal depuis quelques années déjà. Les juges sont saturés, les procureurs de la poursuite aussi.

Et à cause de ça, le citoyen ordinaire qui conteste un ticket de parking que lui a remit un fonctionnaire zélé devra attendre pendant un an avant d’avoir une date d’audition à la cour municipale. Ce citoyen se rend alors compte que ce système qu’il finance de sa poche en payant ses impôts et ses taxes fonctionne tout croche. Et c’est la confiance du public dans l’administration de la justice qui en prend dès lors pour son rhume.

D’ailleurs, la preuve que la décision du SPVM de privilégier la voie pénale au lieu de la voie criminelle en ce qui a trait aux manifestantEs du 19 novembre n’a pas été prise sur l’inspiration du moment est le fait que l’infraction inscrite sur la contravention n’a été rédigée à la main, comme c’est normalement le cas.

Non, les policiers avaient une étampe de prête sur laquelle était inscrit le libellé de l’infraction prévue à l’article 2 du règlement P-6 de la ville de Montréal—mieux connu sous le nom de règlement anti-manifestation. Alors au lieu d’avoir à écrire le libellé de l’art. 2, les policiers n’avaient qu’à étamper le ticket purement et simplement.

On peut d’ailleurs penser que c’est un signe que les réunions bilan que tient la direction du SPVM après chaque arrestation de masse servent ici à quelque chose. On peut facilement imaginer qu’un pauvre constable se soit plaint lors d’une de ces réunions d’avoir pogné une enflure au poignet après avoir écrit des dizaines et des dizaines de tickets à des manifestantEs encercléEs…

Toujours est-il que cette nouvelle tendance en matière de répression politique ne signifie aucunement une hausse de la tolérance policière face au phénomène contestataire et encore moins la fin des arrestations de masse. Au fond, la police a brisé une manifestation qui était somme toute assez paisible, mise à part le fait qu’une poignée de personnes se soient amusés à se défouler sur une poignée de voitures de luxe.

Il y a des choses qui ne changent pas et qui ne changeront jamais tant que le statu quo capitaliste continuera à gouverner notre société. Cependant, il faudrait éviter le piège de schématiser à outrance en prétendant que tout revient systématiquement du pareil au même. C’est faux ici. Il y a une nouvelle conjoncture et il n’en tient qu’au mouvement contestataire d’en tirer le meilleur parti.



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