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Pour une définition du concept de décadence(suite)

Steve Tremblay, Viernes, Octubre 15, 2004 - 08:06

Fabio Damen

Les taux de profits bas ont favorisé et accéléré entre les années 60 et 80, l’intervention de l’Etat dans l’économie. L’objectif était de soutenir les secteurs productifs nationaux qui majoritairement subissaient les dégradations, le moyen pour réussir était le déficit public, l’émission de titres d’Etat à taux fixes jusqu’à rendre insoutenable cette manœuvre.

Voici la dernière partie d’un texte paru en italien dans Prometeo (décembre 2003), revue théorique du Parti Communiste Internationaliste-Battaglia Comunista

Pour une définition du concept de décadence(suite)

Mais l’énumération des phénomènes économiques et sociaux une fois identifiés et décrits, ne peut être considérée elle-même comme la démonstration de la phase de décadence du capitalisme ; en effet, ces phénomènes n’en sont que les effets et la cause première qui les impose, réside dans la loi de la crise des profits. C’est en ce sens et avec cette perspective, que sont compris les facteurs qui rendent décadent le capitalisme, non parce qu’il ne produirait plus, mais parce qu’il est contraint de ralentir le rythme de croissance, non parce qu’il continuerait à faire la guerre, mais parce les guerres sont devenues le mode permanent de son être, non pace qu’il produit des crises, mais parce que le déséquilibre économique est devenu une constante, une sorte de crise permanente, et enfin, non parce qu’il exploite plus ou moins intensément la classe travailleuse mais parce que l’assaut sans précédent contre le salaire indirect et le salaire direct, le travail de démantèlement constant de l’Etat social, l’utilisation de la force de travail en termes de flexibilité, c’est à dire une utilisation temporaire en cohérence unique avec les nécessités productives du moment dans les entreprises, sont devenus les priorités auxquelles le capitalisme ne peut renoncer sous peine de s’écrouler.

Les taux de profits bas ont favorisé et accéléré entre les années 60 et 80, l’intervention de l’Etat dans l’économie. L’objectif était de soutenir les secteurs productifs nationaux qui majoritairement subissaient les dégradations, le moyen pour réussir était le déficit public, l’émission de titres d’Etat à taux fixes jusqu’à rendre insoutenable cette manœuvre. Les crédits consentis à taux réduits, la gestion bienveillante de la part de l’Etat de secteurs entiers de l’économie ont eu pour résultat l’énorme expansion des dettes publiques avec le risque d’un krach financier de l’Etat. A la fin des années 80, il n’y avait pas un pays industrialisé, des Etats Unis, à la majeure partie des pays européens et au Japon qui n’aient pas eu un déficit financier d’au moins 60% du PIB ou même à atteindre dans certains cas les 110-120% du PIB. C’est seulement arrivé à cette situation que le capital international a jugé nécessaire de choisir la voie du néo-libéralisme, avec l’hypothèse fausse que l’Etat était la cause des crises économiques et que le retour au libre marché était la recette juste pour regagner les profits perdus et pour remettre en route le processus de valorisation et d’accumulation. Quinze ans de néo-libéralisme et de globalisation de l’économie ont reproduit pour l’énième fois la crise et remis en évidence tous les problèmes que l’on souhaitait résoudre en abandonnant un Etat qui ne pouvait pas poursuivre sa politique de sauvetage des rapports de production capitalistes parce qu’il était au bord de la banqueroute. Cela signifie deux choses : la première, c’est que le capitalisme ne peut pas dépasser ses propres contradictions en changeant la forme de gestion et de propriété des moyens de production, la deuxième démontre que la chute tendancielle du taux de profit moyen continue à faire son œuvre parce qu’elle est afférente aux inévitables modifications entre le capital constant et le capital variable et que les politiques de contre tendances trouvent toujours plus de difficultés à être mises en acte. Toutefois, l’Etat continue à être invoqué dans les moments d’acuité particulière de récession, subventionnant les secteurs possédant les taux de profit les plus bas comme l’agriculture, soutenant et protégeant le marché intérieur des assauts de la concurrence internationale à la barbe des lois du libre marché auxquelles pourtant il adhère et il fait référence. Dans un cours parallèle mais avec une certaine accélération, l’Etat a commencé à démanteler l’assistance, la prévoyance et la santé, comme l’école et la recherche. Mais, le couple endettements et profits bas et donc moins de taxes provenant des secteurs productifs et de plus faibles possibilités d’autofinancement, rend insupportable le poids de l’Etat providence qui a dû être progressivement réduit entraînant de graves conséquences dont on ne voit pas encore la fin. L’actuelle société capitaliste vit un paradoxe inconnu dans les décennies précédentes, avec des potentialités technologiques jamais rencontrées dans l’histoire de l’humanité l’on produit toujours plus mais à des taux de croissance inférieurs, et une partie toujours plus réduite de cette richesse est destinée à l’Etat social.

Un taux de profit bas a pour conséquence de contribuer au ralentissement de la production de richesses sous la forme de marchandises et de services. Le PIB des pays ayant une forte industrialisation était autour de 5% -7% dans les années qui ont suivi immédiatement la deuxième guerre mondiale, il s’est réduit à 3%-4% dans les années 60-80 pour ensuite se réduire à 2,5% dans la dernière décennie. Le système peut encore produire de la richesse mais il le fait avec plus de lenteur et de difficultés. Les investissements productifs croissent moins que ceux qui sont spéculatifs, les entreprises produisent à seulement 75%-80% de leur potentialité, tandis que le pourcentage de capitaux destiné à la recherche décroît. La raison réside toujours dans la diminution de la profitabilité du système capitaliste qui, malgré l’augmentation de la productivité, pousse les capitaux à se diriger en priorité dans l’investissement spéculatif au détriment du secteur productif et à rechercher un profit facile plus dans de courtes que dans de longues périodes. A un tel stade de développement des rapports entre le capital constant et le capital variable il se crée une relative absence de capital qui influe négativement sur le processus d’accumulation. Quand la quantité minimale nécessaire de capital qui est à la base des investissements pour la phase de reproduction élargie croit, le taux de profit diminue et il se crée les conditions d’un ralentissement de la croissance de la masse des profits, exposant toujours plus le secteur de la production au crédit et à l’endettement. Ce dernier impose au système la course au contrôle des marchés financiers, à l’innovation des instruments boursiers aptes à dégager l’épargne et les capitaux spéculatifs, à la création de formes plus sophistiquées de concentration de capitaux financiers pour couvrir la nécessité des investissements. Le parasitisme, la répétition des bulles boursières, les crises financières, l’endettement des entreprises en sont les effets les plus évidents.

Il en est de même du paradoxe de l’attaque du salaire direct et des conditions de vie du prolétariat. Plus la productivité des entreprises augmente, plus la technologie réduit les temps et les coûts de production, plus le chômage croit ainsi que la précarité et la pauvreté du monde du travail. La baisse du taux des profits que l’introduction de la technologie impose, brefs moments de récupération du processus de valorisation du capital, entraîne la nécessité de comprimer encore plus les salaires, principal moyen de réduction du coût de production. Tandis que la richesse sociale augmente même si c’est moins et avec plus de difficultés, le taux de profit diminue et le capital est contraint d’attaquer le monde du travail, d’augmenter l’exploitation en le rendant momentanément apte à la nécessité productive du moment où il s’exprime et non pas à une autre période. Toute la gamme des nouveaux contrats temporaires : à la demande, intérimaire, de vacation pour utiliser une terminologie qui ne rend pas l’idée et la tentative de pousser les salariés aux limites les plus basses possibles, sont les instruments que le capital use pour faire face à la situation de difficile valorisation sans précédente. L’agression contre le salaire direct, précédé de l’érosion du salaire indirect qui est survenu rapidement et avec une accélération jamais vue et qui se produit dans tous les pays capitalistes avancés dans un temps très bref, ne peut être imputée à une férocité imprévue du capital international mais à un facteur objectif uniforme qui a imposé en réponse un comportement économique uniforme.

Les guerres ponctuelles et dévastatrices comme les crises économiques qui les génèrent, sont devenus la situation permanente du capitalisme. Les taux de profit bas ont créé une situation de crise permanente dans lequel la distinction entre récession et reprise économique est fugitive et brève et où la solution guerrière apparaît comme le principal moyen pour résoudre les problèmes de valorisation du capital. L’usage de la violence préventive ou non, l’agression systématique sur tous les marchés d’intérêt stratégique, l’utilisation de force comme modèle institutionnel pour exprimer la concurrence internationale dans les différents segments impérialistes sont devenu l’expression normale des rapports de production capitalistique et de la structure du pouvoir de référence. En seulement 12 ans de l’écoulement de l’impérialisme soviétique à aujourd’hui, on a connu bien 5 guerres en Europe balkanique et au Moyen – Extrême Orient sans solution de continuité. Les mêmes analystes bourgeois qui ont théorisé qu’après l’écroulement de l’URSS s’ouvrirait pour l’humanité un scénario de paix et de prospérité économique, n’ont pas fait les comptes avec leur propre incapacité d’analyse et avec la chute tendancielle de taux moyen de profit. Ils ont confondu la victoire sur l’URSS avec la fin du communisme sans imaginer que c’était la chute d’un capitalisme d’un type particulier et l’idée ne leur est pas venue que les problèmes du capitalisme occidental subsisteraient, plus grands et exaspérés du fait de leurs plus grandes contradictions incontrôlées.

Réédition du Groupe Internationaliste Ouvrier/Notes Internationalistes

Pour se procurer la brochure: can...@ibpr.org

Site du Bureau International pour le Parti Révolutionnaire
www.ibrp.org


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