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Lancement du rapport annuel d’Amnistie internationale - Des États et des groupes armés mènent une guerre contre les valeurs

Louise-Ann Maher, Jueves, Junio 10, 2004 - 23:19

Amnistie Internationale

Lancement du rapport annuel d’Amnistie internationale - Des États et des groupes armés mènent une guerre contre les valeurs universelles et battent en brèche les droits fondamentaux de citoyens ordinaires

Montréal, le 26 mai 2004. - « Le constat que pose Amnistie internationale sur l’état des droits humains dans le monde en 2003 est sombre. Et les événements survenus jusqu’à maintenant en 2004 ne peuvent que renforcer notre inquiétude. »
Pour Michel Frenette, directeur général de la section canadienne francophone d’Amnistie internationale, jamais les droits humains et le droit humanitaire n’avaient été aussi systématiquement pris à partie depuis la proclamation de la Déclaration universelle, en 1948. Ces droits ont subi en effet des reculs majeurs face aux exactions perpétrées par les groupes armés et les violations commises par les États.

Les meurtres de civils, qu’ils soient le fait de membres d’Al-Qaïda, du parti communiste népalais maoïste, des FARC de Colombie, ou des groupes armés palestiniens – pour ne mentionner que ceux-là – ont montré à quel point des groupes armés sont prêts à aller jusqu’au bout dans l’horreur pour parvenir à leurs fins politiques.

Pour Amnistie, aucune cause ne peut justifier ces actes impitoyables qui constituent des atteintes graves aux droits humains. Ces actes sapent le fondement même d’un monde basé sur le droit. Leurs auteurs doivent être traduits en justice… mais ils doivent l’être conformément aux normes du droit international.

Ce n’est malheureusement pas le point de vue des gouvernements, ceux-là mêmes qui sont chargés de l’application de la loi.

Au nom de la « guerre contre le terrorisme », un grand nombre d’États s’en sont pris aux principes, aux valeurs et aux normes des droits humains. Sous la pression américaine et suivant l’exemple de son « Patriot Act », ils ont durci leur législation et donné naissance à des lois présentant des caractéristiques communes inquiétantes : définition vague des infractions visées; emprisonnement sans inculpation ni jugement, le plus souvent sur la base d’éléments de preuve secrets; dispositions entourant la détention au secret qui favorise notoirement la torture; mesures interdisant ou restreignant de facto la possibilité de bénéficier de l’asile, tout en facilitant les expulsions.

L’attitude paradoxale du Canada

Le Canada lui-même n’a pas échappé à l’obsession sécuritaire, notamment par sa loi antiterroriste C-36, dont non seulement la nécessité n’a jamais été démontrée, mais dont les effets pervers vont à l’encontre de plusieurs droits fondamentaux dont la présomption d’innocence, la contestation de la légalité de la détention, l’accès à la preuve, le droit au silence.

De plus en plus la force prend le pas sur le droit. Quitte à affaiblir ce dernier. Un exemple patent concerne l’attitude des États-Unis face à la Cour pénale internationale (CPI). Ne se contentant pas de ne pas avoir ratifié le Statut de Rome de la CPI, les États-Unis ont exigé des gouvernements désireux d’obtenir son assistance militaire qu’ils s’engagent à ne pas y déférer les ressortissants américains accusés de génocide, de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité. Trente-cinq pays récalcitrants se sont ainsi vus retirer cette assistance militaire.

En mai, éclatait le scandale des photos des prisonniers irakiens victimes de mauvais traitements. Le Secrétaire à la défense Rumsfeld a parlé d’abus (et non de torture) et il a insisté sur le fait qu’il s’agissait de cas isolés ne s’inscrivant nullement dans le cadre d’une pratique généralisée. Pour Amnistie, au contraire, il s’agit de crimes de guerre dans la lignée de ceux commis à Bagram, à Guantanamo ou au centre de Diego Garcia dans l’Océan indien.

Autre mépris du droit, en toute illégalité et en dehors de tout mécanisme d’extradition, les forces américaines transfèrent des personnes vers des pays où elles savent qu’elles vont être soumises à la torture. En octobre 2002, les États-Unis n’ont pas hésité à expulser le citoyen canadien Maher Arar vers la Syrie.

L’attitude du Canada nous semble paradoxale et de nature à susciter bien des inquiétudes :

le Canada est un défenseur du rôle des Nations unies et de son système de défense des droits humains; mais en même temps il appuie la détention des « combattants illégaux » à Guantanamo et il négocie une entente de tiers pays sûr avec les États-Unis, quitte à ce que des personnes qui cherchent protection en paient le prix;

le Canada croit en la voie de la justice, mais il privilégie aux poursuites le recours aux certificats de sécurité et l’expulsion, des voies qui ouvrent la porte à d’autres violations des droits humains.

le Canada s’oppose à la torture, mais il continue de remettre aux forces américaines des personnes capturées dans le cadre de son action en Afghanistan.

le Canada plaide pour le droit d’asile, mais il refuse toujours la mise en place d’un droit d’appel et, en créant l’Agence des services frontaliers, il traite les demandeurs d’asile comme des candidats à la détention et à la déportation.

Les conflits oubliés

Les dérives auxquelles a donné lieu la « guerre contre le terrorisme » laissent dans l’ombre nombre de conflits oubliés : Colombie, Népal, Soudan, Tchétchénie, République démocratique du Congo (RDC)…

Depuis 1998, les conflits prévalant en RDC ont entraîné la mort de plus de trois millions de personnes et le déplacement forcé d’un nombre équivalent. Malgré la mise en place d’un gouvernement intérimaire d’unité nationale, en 2003, et le retrait officiel des forces rwandaises et ougandaises, l’est du pays (province de l’Ituri et des Kivus) demeure de facto sous le contrôle de différents groupes et milices armés, perpétuant ainsi le cycle de la violence : exécutions illégales et torture à l’encontre des populations civiles; destruction de maisons, de champs, d’écoles, de centres médicaux, d’institutions religieuses; recours aux enfants soldats; violence sexuelle contre des femmes de tous âges. Entre octobre 2002 et février 2003, dans le sud Kivu, on a dénombré une moyenne de 40 viols par jour.

Deux facteurs servent de force motrice à ce conflit : le pillage des ressources naturelles et la prolifération des armes légères. Pour Amnistie, il importe en priorité de s’attaquer à ces catalyseurs de l’insécurité et de la violence.

L’Organisation a en effet largement documenté le lien entre l’exploitation économique des ressources (le diamant, l’or et le coltan) et la poursuite des conflits. Dans l’est congolais, le Rwanda et l’Ouganda, alliés à des groupes politiques armés congolais, ont systématiquement pillé la région justifiant leurs interventions militaires par la menace que représentaient les groupes rebelles opérant depuis la RDC. Un groupe d’experts des Nations unies a démontré la mécanique de fonctionnement de ce réseau d’acteurs nationaux et régionaux et attiré l’attention sur la participation directe ou indirecte d’entreprises étrangères au prolongement de l’une des pires crises humanitaires du continent africain. Parmi elles, l’entreprise minière canadienne International Panorama Resources Corporation, maintenant connue sous le nom de Kakenda Development Corp.

Enrichies par le pillage des ressources naturelles, les forces belligérantes n’ont évidemment eu aucune difficulté à se procurer des quantités importantes d’armes et de munitions qui sont venues s’ajouter aux stocks déjà considérables résultant de conflits précédents. L’embargo sur les armes imposé en juillet 2003 par le Conseil de sécurité s’est avéré d’une efficacité limitée, étant donné le manque de moyens et de soutien accordé à la MONUC (Mission d’Observation de l’ONU en RDC) pour en surveiller l’application.

En 2003, Amnistie internationale, OXFAM et le Réseau d’action internationale sur les armes légères ont initié une campagne visant à obtenir des gouvernements un traité sur le commerce international des armes. Ce traité interdirait les transferts d’armes vers des destinations où risquent d’être commises de graves atteintes aux droits humains ou au droit international humanitaire.

Amnistie internationale a aussi entrepris d’intensifier ses efforts pour faire reconnaître aux acteurs économiques leurs responsabilités dans les atteintes aux droits humains commises lors des conflits armés. À ce chapitre, l’attitude du Canada pour qui les investissements privés dans des pays en conflit relèvent strictement de la politique interne des pays hôtes s’avère décevante. Elle témoigne qu’au-delà du discours, le droit au commerce passe avant les droits humains.

Dernière mise à jour: 10 juin 2004



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