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Droit au logement: le FRAPRU gagne une première mancheAnonyme, Jueves, Febrero 12, 2004 - 11:53
Nicolas Lefebvre Legault
Le Conseil des ministres a entériné hier (mercredi) un recul du gouvernement sur le front du logement: les mesures d'urgence sont maintenues et de l'aide sera accordée aux locataires qui se retrouveront sans logis le 1er juillet prochain. Le FRAPRU gagne donc une première manche contre le gouvernement libéral. Concrètement l'annonce du Ministre responsable de l'habitation, Jean-Marc Fournier, dit que les suppléments au loyer d'urgence accordés aux sinistrés des 1er juillet passés sont reconduits pour un an, que de l'argent est reservé pour la crise du 1er juillet prochain (dont 1 200 nouveaux suppléments pour les sans-logis à venir en 2004) et que la construction de la programmation 2005-2006 du programme provincial de logement social (1 300 logements) pourra débuter dès le 1er avril 2004. Le minimum vital Il s'agit là, dans les grandes lignes et à la baisse, du programme minimal de revendications pré-budgétaire sur les mesures de crise adoptées lors de la dernière assemblée générale du FRAPRU. Les militantEs pour le droit au logement restent évidement critiques et ne se contenteront pas du minimum vital. D'ailleurs, même au chapitre du minimum, il manque encore à l'appel les fonds nécessaires à l'entretien du parc de HLM québécois (16 millions de plus pour porter le budget total à 56 M), une bataille qui peut encore se gagner d'ici le dépôt du budget. Il est également douteux que 1 200 suppléments au loyer soient suffisant, compte tenu de la gravité de la crise. Le FRAPRU rappelle que l'an dernier, alors que 1 500 suppléments au loyer d'urgence avaient été prévus, il a commencé à en manquer dès le début du mois d'août. De plus, le gouvernement a beau arguer qu'il se rapproche de sa promesse de 13 000 nouveaux logements, encore faudrait-il qu'il s'agissent de logements sociaux et non de logements "abordables" privés qui n'ont d'abordables que le nom. Or, pour l'instant, les budgets ne permettent pas de réaliser autant de véritables logements sociaux que prévu (il manque au moins 58 M pour faire les 11 500 logements sociaux prévus sur les 13 000 annoncés). Finalement, pour éviter d'empirer la situation ailleurs sur le front du logement, il faudra s'assurer que tout cet argent provienne du budget Séguin et non du budget de la Société d'habitation du Québec (SHQ). Ce n'est qu'un début... Même s'il est heureux de ce résultat, le FRAPRU n'entend d'aucune manière relâcher la pression pour que le prochain budget prévoit des sommes importantes pour le logement social. Fort de cette victoire, il est au contraire convaincu de la nécessité d'augmenter la pression. L'organisme veut que le ministre des Finances, Yves Séguin "donne un grand coup pour le logement social dans ce budget", comme il l'a affirmé lors de leur rencontre de lundi dernier. Le FRAPRU continue donc de réclamer le financement de 8000 nouveaux logements sociaux par année, dont la moitié passant par la mise sur pied d'un programme de HLM. ...À propos de certaines critiques Plusieurs militantEs ont critiqué la participation du FRAPRU aux consultations pré-budgétaires du Ministre Séguin, puis son tête-à-tête du 9 février avec ce dernier et le Ministre responsable de l'habitation, Jean-Marc Fournier. Marc Bonhomme, ancien permanent d'un comité logement et militant de Gauche Socialiste, a même écris que le PLQ "savait qu'il pouvait compter sur l'inepte direction du FRAPRU, et tutti quanti, pour louanger [le Ministre Séguin] au nom d'un hypothétique plat de lentilles(1)". La plupart des critiques associent cette "proximité avec le pouvoir" à un réflexe de concertation et de collaboration. Or, il n'en est rien. La permanence du FRAPRU, dûment mandatée par l'assemblée générale, a voulu utiliser la tribune des consultations dans une perspective d'agitation-propagande dans le cadre d'une campagne pré-budgétaire plus large. Il faut lire le mémoire déposé par le FRAPRU et le communiqué l'accompagnant(2), ce que peu de militantEs se donnent la peine de faire, pour réaliser que l'organisme n'a répondu à aucune des questions du ministère et ne parle à peu près pas de l'objet des consultations. Le mémoire est en fait un pamphlet sur la crise du logement doté d'une plate-forme de revendications chiffrées en annexe. Personne ne s'attendait à ce que le Ministre Séguin ne morde à l'hameçon et embarque dans le jeu mais peut-on vraiment s'en plaindre maintenant que nous connaissons le résultat final? En demeurant souple sur la tactique mais ferme sur les principes, "l'inepte direction du FRAPRU" aura réussi à renverser la vapeur dans un contexte politique difficile et ce sans jamais se compromettre politiquement ni le faire au détriment d'autres secteurs en lutte. "L'hypothétique plats de lentilles" s'est transformé en monnaie sonnante et trébuchante dont ont absolument besoin de vraie personnes en chair et en os qui vivaient un calvaire depuis quelques semaines. Et parlant de "plats de lentilles", peut-être est-il utile de souligner que "l'inepte direction du FRAPRU" ne tirera aucun avantage financier des gains qui viennent d'être réalisés. Contrairement à d'autres secteurs, les budgets des groupes de défense du droit au logement ne dépendent ni des cotisations des locataires, ni de l'obtention de contrats de réalisation de logements sociaux, ni même d'éventuelles faveurs d'un des deux ministres rencontrés. La construction d'une riposte globale contre le gouvernement Charest est vitale et figure d'ailleurs parmis les priorités du FRAPRU. L'unité, qui existe déjà formellement par en haut, peut et doit se construire également à la base. Si le mouvement syndical a un rôle important à jouer, à la fois un rôle de locomotive et de "gros des troupes", les autres mouvements sociaux ne peuvent pas se permettre d'être purement et simplement à sa remorque. En tant que groupes de pression et groupes de défense de droits, les différents secteurs du mouvement populaire ont des luttes spécifiques et sectorielles importantes à mener. Avant de pouvoir passer à l'offensive, le mouvement pour le droit au logement doit pouvoir "sauver les meubles". Les batailles pour sauver les HLM, les mesures d'urgences, les programmes de développement de logements sociaux, le contrôle des loyer, etc., semblent bien mesquines aux grands théoriciens gauchistes qui pensent plutôt en terme d'alternatives politiques globales, de grands soirs et de grands fronts commun anti-néolibéraux, mais elles doivent être menées goutte que goutte par les organisations dont c'est la mission fondamentale. La grande bataille qui vient pour le mouvement pour le droit au logement concerne la méthode de fixation des loyers à la Régie du logement. Le Ministre Fournier a actuellement sur son bureau un rapport du groupe Roche qui lui suggère d'uniformiser les hausses de loyers sur la base de l'inflation, ce qui aurait pour effet de les faire augmenter encore plus vite qu'actuellement. Outre l'agitation médiatique et la bataille des idées, les comités logement et associations de locataire entendent descendre dans la rue le 10 mars prochain à l'appel du RCLALQ. C'est sûr que c'est moins excitant qu'une grève générale illégale, mais... Nicolas Lefebvre Legault Notes: (1) "La grande bataille qui vient", La Gauche, dimanche 1er février 2004. (2) "Parlons-en de déficits..." Mémoire présenté aux consultations pré-budgétaires du ministère des Finances du Québec, Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), Janvier 2004. Le communiqué de presse est disponible sur le site du FRAPRU. (3) Je le mentionne par honnêteté intellectuelle, il va sans dire que j'écris en mon nom personnel.
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