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FSM 2004 : ça commence aujourd’hui !

jplarche, Viernes, Enero 16, 2004 - 10:37

Auteur : Propos recueillis par Isabelle (attac.info)

À la veille de l’ouverture officielle, P.K. Murthy, membre du Comité indien d’organisation nous a précisé quels seront les temps forts du Forum et ses spécificités par rapport aux précédentes rencontres.

Q : Quelles sont les principales forces indiennes qui ont participé à l’organisation du Forum ?

R : Nous avons réussi à réunir un éventail très large de forces politiques : depuis les socialistes modérés, en passant par les Gandhiens et les Dalits (tribus indigènes), jusqu’aux communistes marxistes-léninistes. Les mouvements sociaux et populaires sont également représentés, les syndicats de gauche, les mouvements de femmes, de nombreuses ONG, et des organisations de jeunesse et d’étudiants. Au total, environ 185 organisations forment ce que nous appelons le « Conseil des organisations ». Nous avons ensuite un Comité de travail constitué des organisations qui se sont engagées à assumer des responsabilités spécifiques ; enfin, un Comité d’organisation formé d’une quarantaine de personnes, dont une partie basées à Mumbai, décidées à consacrer du temps et beaucoup d’énergie pour préparer ce Forum.

Q : Et au-delà de l’Inde ?

R : C’est la première fois qu’un événement social de cette ampleur a lieu en Asie et l’Inde est plutôt bien placée pour accueillir des participants de ses pays voisins - Pakistan, Népal, Sri Lanka -, mais aussi de plus loin : Japon, Corée, Thaïlande, Malaisie, Indonésie, Philippines. Nous attendons aussi, plus nombreux que les années précédentes, des militants africains et des pays arabes. Q : Alors justement, quelles sont les particularités de ce Forum par rapport aux précédents ?

R : Les thèmes de travail ont évolué dans deux directions. Tout d’abord, on traitera évidemment de la guerre à nouveau car cette question a pris une nouvelle actualité avec l’occupation de l’Irak, et également de la mondialisation néo-libérale, mais dans une approche plus politique puisque désormais nous la qualifions d’ « impérialiste ». Ensuite, trois thèmes nouveaux ont été ajoutés : la question du racisme et des castes, que nous appelons ici le « castéisme » ; l’intolérance religieuse ou « communalisme » (terme d’origine anglaise auquel il faut donner le sens, non de communautarisme, mais de fondamentalisme religieux) ; la question des femmes (dans le contexte indien, c’est une question prioritaire : chez nous, la femme est vraiment une victime, quelle que soit sa caste).

Q : Venons-en aux temps forts. Quels vont-ils être, selon toi ?

R : Trois débats devraient avoir lieu avec une intensité particulière. Celui qui porte sur les rapports entre mouvements sociaux et partis politiques (les mouvements doivent-ils se limiter à exercer un droit de revendication, sans pouvoir mettre en œuvre leurs propositions ?). Le débat sur les alternatives (quelles propositions ? comment faire en sorte qu’elles soient prises en compte ?). Enfin, quel sera l’avenir du Forum (va-t-on continuer comme cela tous les ans à la même cadence ?) : selon moi, il est temps maintenant d’ouvrir les portes à un nouveau dynamisme qui nous rassemble et nous renforce en élargissant notre mouvement, et ce indépendamment des forums.

Q : Pour terminer, un mot de la situation en Inde ?

R : On a l’habitude d’entendre qu’ici « il y a de la place pour tout le monde » et peu de partis se disent ouvertement fondamentalistes ou fascistes. Malgré tout, la réalité est qu’avec la mondialisation, malheureusement la gauche a perdu pas mal de terrain et que si les rapports ne se posent plus exactement en termes de classes, les inégalités et les tensions entre communautés sont exploitées de façon de plus en plus insupportable par les partis au pouvoir. Le parti de droite au pouvoir, le BJP, a réussi à former une coalition avec une vingtaine de partis qui continuent à le soutenir alors qu’il a commis des atrocités contre la communauté musulmane du Gujarat l’an dernier. Quant au Parti du Congrès, plutôt centriste, il s’aligne généralement sur les positions du gouvernement dès qu’il s’agit de questions économiques importantes. Seul un très petit nombre de partis de gauche dénonce les ravages de la mondialisation libérale en Inde.

Q : On avait pourtant pu penser, après Cancun, qu’en refusant de s’incliner devant les exigences des Etats-Unis et de l’Europe, l’Inde renouerait avec son passé de pays non-aligné. Qu’en est-il exactement ?

R : Pas grand-chose à espérer de ce côté-là… En réalité, ce sont surtout le Brésil et des petits pays comme le Kenya qui ont entraîné le groupe des 21. En raison de la proximité des élections, l’Inde était coincée, elle n’avait pas d’autre possibilité que de se joindre au mouvement. C’est contre sa volonté que le gouvernement indien a dû faire cause commune avec le Brésil, la Chine et l’Afrique du sud, et uniquement pour des raisons électoralistes internes. Mais depuis Cancun, des pourparlers efficaces ont eu lieu pour que l’Inde « assouplisse » sa position. L’inde n’est pas le Brésil ! Depuis que le monde est devenu unipolaire, le gouvernement indien est totalement aligné sur les Etats-Unis : bien sûr qu’ici « nous » sommes aussi contre le terrorisme, puisque cela « nous » permet de nous attaquer à la communauté musulmane indienne ou de continuer à faire la guerre avec le Pakistan, sauf quand les Américains commencent à nous tirer un peu l’oreille…

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