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Quelle démocratie syndicale pour quel syndicalisme ?

Anonyme, Sábado, Diciembre 27, 2003 - 19:01

Sam (CNT Education 69-01)

Un article français très intéressant qui pose des questions fondamentales sur le syndicalisme

Le récent mouvement de mai-juin sur les retraites et ses prolongements
ont reposé de nouveau et de manière explicite la question de la
démocratie syndicale.
Cette question est, en tant qu'anarcho syndicalistes, au centre de nos
préoccupations.
Mais qu'entendons nous par démocratie syndicale ?
Eclaircir cette question est d'importance, tant ce slogan est également
souvent le leitmotiv de différents groupes trotskystes, qui pour agir en
tant que fraction au sein des organisations syndicales, au mépris de
cette même « démocratie » syndicale, n'en ratent pas une pour se servir
de cet étendard issu su syndicalisme révolutionnaire afin d'affermir leur
positions, et notamment au sein des appareilsŠ

** "Démocratie syndicale" et syndicalisme "professionnalisé"

Par démocratie syndicale, nous entendons les modes de fonctionnement qui
permettent de rendre le syndicat aux syndiqué-e-s, de revenir à ce qui
faisait le syndicalisme : l'organisation autonome des travailleurs et
travailleuses pour la défense de leurs intérêts de classe, loin des
intérêts des fractions politiciennes.
Cette démocratie syndicale est contenue dans la quasi-totalité des
statuts des confédérations, au travers du double fédéralisme, bien que la
bureaucratisation ait vidé celui-ci de son contenu.
En tant qu'anarcho-syndicalistes, nous entendons contribuer à développer
les capacités d'auto-organisation de la classe laborieuse.
Le syndicat nous parait un moyen incontournable pour y arriver. Mais,
nous ne pouvons manquer de constater que le syndicalisme, et
particulièrement dans les grandes confédérations est aujourd'hui
confronté à la
bureaucratisation, au mépris des ses statuts et de ses origines, à la
délégation sans contrôle, qui liquide progressivement l'autonomie de
classe au profit d'une logique de service confinant le syndicalisme à une
fonction d'assurance sociale dont les prestations reposent sur une
poignée de militants professionnalisés.

La démocratie syndicale dans les actes, c'est le regroupement des
travailleurs et travailleuses, s'organisant de manière active pour
défendre leur droit. La décomposition syndicale qui continue son cours
prend ses racines dans plusieurs phénomènes :
Le développement d'un « syndicalisme » professionnalisé, à travers les
postes de permanents et les décharges.
On substitue la délégation sans contrôle à l'action collective, la
répartition des tâches, la construction coopérative de la lutte
syndicale, et le mandatement impératif et révocable dans les instances
syndicales. Le développement de strates successives d'une bureaucratie
syndicale, où plus l'on monte dans les instances fédérales et
confédérales, plus les
responsables syndicaux sont coupés du salariat par l'accumulation de
décharges ou par le statut de permanent, dépossède les syndiqué-e-s de
leur contrôle sur le syndicat.
Ce qui était au début du siècle une démarche coopérative, basée sur
l'organisation et l'investissement direct des travailleurs et
travailleuses, une émanation de leur autonomie, s'est peu à peu, sous
l'influence de l'institutionnalisation et de la professionnalisation
militante, qui va avec l'émergence individualiste et l'érosion de la
conscience de classe, transformé en système assurantiel où l'on prends sa
carte en déléguant à des professionnels la défense individuel et
collective.
Le syndicat devient dès lors une assurance vie à stricte vocation
individuelle, réduit au statut de lobby quand il s'agit de la défense des
intérêts collectifs du prolétariat, dépendant du bon vouloir de
politiques, qui, sans surprises quelles que soient leur tendances, ne
sont que les porte- voix des intérêts du patronat.

** Contrôle de l'information

Le contrôle de l'information, le monopole de celle-ci par quelques uns,
est un outil de pouvoir important pour la bureaucratie.
L'absence de circulation de l'information permet de concentrer le pouvoir
de décision au sein de quelques mains, situées au c¦ur des structures
syndicales, transformées d'instances de décisions dans le cadre du
mandatement en structures de pouvoir personnelles ou fractionnels.
L'absence ou la faiblesse de l'information sur les luttes qui se mènent
hors du secteur géographique ou de la branche affaibli la dimension
interprofessionnelle du syndicalisme, base de la conscience du classe,
tout autant qu'elle renforce le contrôle des bureaucraties sur les
mobilisations. Outil pour prévenir l'extension « incontrôlée » des
mouvements de luttes, complété par le silence des médias bourgeois, ce
monopole de l'information est également souvent accompagné d'une
faiblesse dans la formation syndicale, principalement pour les
militant-e-s de base, ce qui a pour conséquence de renforcer la
spécialisation, mais également de faire passer des vessies pour des
lanternes ouvrant la voie à l'acceptation de lignes fédérales ou
confédérales défavorables aux salarié-e-s par absence de retour critique
sur leur impact négatif pour les travailleuses et travailleurs. L'accord
sur la formation professionnelle en est un exemple : présenté par les
confédérations comme un progrès pour les salarié-e-s, il ne résiste pas à
une analyse poussée sur sa fonction d'atomisation du salariat, qui, avec
la casse du principe de faveur par la réforme sur la « démocratie sociale
» (sic) et la destruction du cadre collectif des diplômes par la réforme
universitaires LMD, constitue une attaque sans précédent sur les
conventions collectives et les garanties collectives de salaire en
substituant la validation de compétences individualisées à celle des
qualifications, étalon collectif de valeur.
L'absence de formation syndicale, ou le contrôle de cette formation
l'expurgeant de tout discours critique, est un outil de taille pour
enfermer les syndiqué-e-s dans la délégation, pour assurer aux
bureaucraties le contrôle des syndicats.
La Lettre des militant-e-s syndicalistes libertaires, parallèlement à
d'autres publications (Syndicaliste !, L'Emancipation syndicale et
pédagogique, et bien d'autres), tente d'apporter sa contribution
­modeste- aux efforts faits pour briser ce monopole, à cette nécessaire
mise en circulation de l'information et de l'analyse critique, rendue
plus aisée par la technologie internet, même si celle-ci est encore loin
d'être accessible à tout-e-s les syndicalistes.

** Contre le travail de "fraction"

L'action de fractions politiques, de gauches ou d'extrême gauche est
également une attaque contre la démocratie syndicale.
Celles-ci visent à inféoder le syndicat (et donc l'autonomie
prolétarienne) à la logique des partis, en s'emparant ou en gardant le
contrôle des structures décisionnelles des organisations syndicales, en
utilisant des moyens comme la répartition clientéliste des décharges, la
désignation par le haut des mandatés de congrès en fonction des
proximités politiques, validés par les syndicats de base en l'absence de
pratique démocratique à la base.
Les fractions politiques, qu'il s'agisse de la social-démocratie, des
résidus staliniens ou des trotskystes ont tous en commun le mépris pour
les capacités de décisions et de gestion du salariat.
Elles prétendent inféoder l'action syndicale au parti, cantonnant le
syndicat au rôle de groupe de pression, lui déniant toute action
autonome, c'est-à-dire qui n'aurait pas comme aboutissement le débouché
politique partidaire : ainsi a-t-on vu les réseaux de gauche freiner la
lutte dans certains secteurs en mai-juin, considérant que construire la
grève générale porterait un risque de faire tomber le gouvernement,
risque que certain-e-s ne souhaitaient pas prendre en l'absence
d'alternative à gauche.
Cette conception marxiste du syndicalisme, a pour conséquence non
seulement d'entraver le fonctionnement démocratique des syndicats en y
introduisant des logiques extérieures, en totale contradiction avec la
charte d'Amiens, mais plus concrètement de désarmer les travailleurs et
les travailleuses face au patronat.
La gauche trotskyste, elle, enfermée dans son appel aux « directions
syndicales », est passée à côté d'un élément essentiel : si
effectivement, des choix clairs au niveau confédéral auraient permis une
extension du mouvement et la construction d'un rapport de force,
notamment dans les transports ou le sabotage de la bureaucratie CGT a été
évident, l'analyse de la bureaucratisation du syndicalisme devrait
conduire plus à déterminer quels moyens, dans cette situation, doivent se
donner le salariat et les syndicats de bases pour s'organiser et mener la
lutte en se passant des structures confédérales quand celles-ci ne
remplissent pas leur fonction de défense du salariat.

** Sur les "comités" et les "collectifs"

Les comités interprofessionnels, et les collectifs de luttes, n'en
déplaisent aux camarades du collectif La sociale, sont avant tout des
réponses à la bureaucratisation des centrales syndicales, lorsque de
catalyseurs de la lutte elles se transforment, par choix politiciens, en
frein.
Questionner les manquements démocratiques de tels comités ou de telles
AG, c'est une tâches effectivement qu'il nous appartient de faire,
anarcho-syndicalistes, et c'est ce que nous avons fait sur Lyon en
luttant pour des mandatements par établissements, AG de secteurs, etcŠ,
mais pas pour y opposer le caractère prétendument démocratique d'un
syndicalisme confédéré, dont le caractère bureaucratique est une évidence
pour un nombre de plus en plus important de salarié-e-s, qu'ils soient à
la CGT, la CFDT, FO, SUD ou autreŠ
Doit-on alors s'étonner que ces formes d'organisations émergent,
lorsqu'un Thibault va parader au congrès du PS en pleine grève
reconductible, lorsque les Unions départementales s'abstiennent
d'organiser une AG interpro le 13 mai à Lyon, dénient l'accès à une salle
de la bourse du travail au comité intersyndical de défense des retraites,
qui réunissait des syndicalistes de bases CGT, FO, SUD, CFDT, CNT, et qui
souhaitait organiser une rencontre pour organiser la lutte sous un angle
interprofessionnel pour tenter de palier au fait que les UD ne faisaient
pas leur travail ?
Doit on fustiger ces initiatives qui correspondent avant tout à une
volonté de contrôle de la grève par les grévistes, à une tentative
d'auto-organisation des salarié-e-s en lutte (qu'aurions nous à y redire,
en tant qu'anarcho-syndicalistes qui défendons l'auto-organisation du
salariat), ou s'interroger sur ce qu'elles révèlent comme
dysfonctionnement du syndicalisme, un syndicalisme qui par sa
bureaucratisation et ses inconséquences bureaucratiques ne rempli plus,
au-delà de la base, son rôle de catalyseur et organisateur des luttes en
défense du salariat ?
Souligner les manipulations gauchistes des AG, c'est une tâche
nécessaire, mais comment peut on interpréter une telle démarche si elle
ne s'accompagne pas d'une dénonciation des manipulations des réseaux
d'extrême gauche, de gauche, ou tout simplement bureaucratiques qui
liquident le syndicalisme ? Les camarades de la Sociale croient ils que
les organisations confédérées, par leur caractère permanent, sont
épargnées par de telles manipulations politiciennes ?
Ce serait là une nouveauté, qui ferait l'impasse sur un sacré bout
d'histoire syndicale qui a abouti notamment à la multiplication des
scissions syndicales et la liquidation du syndicalisme révolutionnaire
comme tendance dominante du syndicalisme français.
Oui, ces coordinations et ces structures éphémères ne peuvent se
substituer à l'organisation permanente des salarié-e-s dans des
syndicats, il n'est pas dans mon propos de faire de l'antisyndicalisme,
je serais bien en peine, en tant que syndicaliste qui comme les autres
s'échine sur son lieu de travail à faire avancer la syndicalisation.
Mais en attendant, tant que les syndicats ne seront pas à même de
questionner leur fonctionnement, il ne faut pas s'étonner qu'une part de
plus en plus large du salariat recherche hors de leur sein les moyens de
son auto-organisation dans la lutte.
Ce n'est pas un hasard si nombre de syndiqué-e-s participaient à ces
comités.
Pas par anti-syndicalisme, mais parce qu'à choisir entre
auto-organisation et fonctionnement dans le cadre strict du syndicat, ils
choisissaient la première option.
En tant qu'anarcho-syndicaliste, je pense que l'auto-organisation est
conciliable avec le syndicalisme, que concilier l'un et l'autre est
nécessaire et indispensable dans la lutte des classes, que le choix ne
devrait pas se poser en ces termes, qu'il faut restituer au syndicalisme
sa fonction d'outil d'auto-organisation du salariat. Mais réconcilier
syndicalisme et auto-organisation des grévistes, du salariat, c'est poser
la question de la démocratie syndicale. Une telle synergie, qui est un
élément incontournable du rapport de force face au patronat, ne peut se
faire sans que le fonctionnement démocratique qui existe dans les statuts
des organisations syndicales ne redevienne une réalité pratique et
concrète.

** Sur "l'unité"

Alors combattre pour l'unité du mouvement syndical, c'est un objectif que
nous partageons tou-te-s, nous sommes pour l'unité du prolétariat face au
patronat, qui est la condition sine qua non d'un rapport de force
favorable dans la lutte des classes. Mais cette unité n'est possible que
dans le cadre d'un fonctionnement démocratique, et du respect de
l'indépendance syndicale, de l'autonomie du syndicalisme et sa complète
séparation des logiques politiciennes pour se cantonner à son objectif
originel : la défense du salariat dans la perspective d'une société sans
classe et sans Etat. Toute autre conception de l'unité ne correspond qu'à
la vulgate gauchiste du front unique ou l'unité n'est qu'un masque aux
ambitions de pouvoir d'une fraction.
L'unité dans le renoncement et la bureaucratisation, en l'absence de
démocratie syndicale c'est désarmer le salariat face au patronatŠ
Personne n'est contre l'unité, mais c'est sur quelle base elle se fait
dont il est question.
Or, tant que prédomine la conception d'un syndicalisme lobby, inféodé au
parti et incapable, par idéologie, de mener ses propres actions, tant que
ce syndicalisme s'appuie sur une négation dans les faits de la démocratie
syndicale, aucune unité n'est possible.
L'unité syndicale, sur des bases de classe, sur les bases d'une
conception d'un syndicalisme s'affranchissant de la bureaucratie, on l'a
trouvé dans la lutte, reste à se donner les moyens de construire de
manière permanente des réseaux qui permettront la reconstruction d'un
syndicalisme révolutionnaire, antibureaucratique, démocratique, et dès
lors, unifié.
Si l'on peut se lamenter en constatant que la CGT a bien changée depuis
la charte d'Amiens (c'est ce dont devraient se rendre compte les
camarades de La sociale), il s'agit surtout de se donner les moyens de
reconstruire un syndicalisme de classe, antibureaucratique.
C'est à ce prix que nous pourrons parler d'unité syndicale, car celle-ci
n'est possible que dans le cadre d'un syndicalisme antibureaucratique,
libéré des influences partidaires, respectant la démocratie syndicale et
le double fédéralisme, substituant l'action collective et la répartition
des tâches à la délégation de pouvoir et la professionnalisation
(décharges et permanents).

Nous sommes confrontés à un mouvement historique qui voit déferler
l'individualisme, la délégation de pouvoir et le consumérisme, y compris
militant.
C'est une nécessité, il me semble, d'inverser la tendance, en se donnant
les moyens de faire revivre ou d'assurer la continuité des pratiques
d'auto-organisation, d'action directe, de fédéralisme et de gestion
directe. Et cela passe par la pratique, la mise en cause des structures
et des fonctionnements qui renforcent la délégation, cette délégation qui
fossoie la démocratieŠ

Anarcho-syndicalistes, nous savons que les fins sont liées aux moyens, et
que l'on ne peut construire l'autonomie de classe en l'attaquant par nos
pratiques syndicalesŠ

Sam (CNT Education 69-01)

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Ce texte est extrait de la Lettre des militant-e-s syndicalistes
libertaires du mois de septembre 2003

Cette lettre est un outil d'échange d'informations et de réflexions qui
s'adresse à tous les militant(e)s syndicalistes, anarcho-syndicalistes ou
syndicalistes révolutionnaires, anarchistes ou "sympathisants"
libertaires. Les militants qui animent cette Lettre entendent agir dans
une logiquepluraliste et dans le respect intégral des choix organisationnels de
chacun. Autrement dit, la Lettre des militant(e)s syndicalistes
libertaires s'interdit toute exclusive ainsi que tout prosélytisme en
faveur de telle ou telle organisation syndicale en particulier. Elle peut
ainsi constituer un Lien solide entre des camarades / sympathisants
libertaires, impliqués dans diverses organisations syndicales : CFDT,
CGT, CGT-FO, CNT, Confédération Paysanne, FEN, FSU, PAS, SUD SOLIDAIRES,
UNEF, syndicats de chômeurs etc. Son but est:
1) La circulation d'informations utiles à nos activités syndicales
respectives2) La diffusion des idées, critiques et propositions anarchistes dans les
milieux militants syndicalistes,
3) Organiser des échanges de pratiques et permettre de coordonner
l'action des militant(e)s syndicalistes libertaires durant les luttes et
mouvements sociaux.

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