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Silvia Cattori: Genève un plan de paix sur fond de sang et de larmes

Anonyme, Domingo, Diciembre 7, 2003 - 08:48

silvia cattori

Pendant que ce beau monde se pavanait dans les salons de la cité de Calvin, autour d'une paix morte née, les Palestiniens n'ont jamais autant souffert sur les check points et autres lieux de torture.

Genève : un plan de paix sur fond de sang et de larmes
Par Silvia Cattori

www.ism-suisse.org

Palestine occupée, 5 décembre 2003

La Suisse s'est totalement décrédibilisée aux yeux des Palestiniens qui sont dans la hâte d'échapper à ce face à face terrifiant que leur impose Israël.

Pendant que ce beau monde se pavanait dans les salons de la cité de Calvin, autour d'une paix morte née, les Palestiniens n'ont jamais autant souffert sur les check points et autres lieux de torture.

Cette nuit, les tanks, les jeeps, avec leurs escadrons de la mort sont rentrés dans un quartier de Naplouse, ont frappé aux portes, fait un bruit du diable, procédé à des rafles, embarqué des hommes, coupables d'êtres jeunes, terrorisé les enfants, humilié les parents, coupables d'être nés sur cette terre. Les coups de feu ont blessé un jeune homme.Ils ont aussi chassé quantités de gens hors de leurs lits, pour occuper leurs maisons, les transformer en casernes.

Dans le camp de Balata les tanks et les jeeps n'ont eu de cesse de venir terroriser les gens, provoquer les enfants - durant toute une semaine - en jetant sur eux des bombes assourdissantes très blessantes, quand elles explosent à leurs pieds, jusqu'à ce que tout le camp se mette en révolte.

Tous les gens qui arrivent de l'extérieur vous parlent des mauvais traitements qu'ils ont subi sur la route, et des caravanes postées ces jours-ci à quelques centaines de mètres du chek point d'Howwara, caravanes qui annoncent une nouvelle colonie.

La Suisse, qui voulait bien faire, ne pouvait pas faire plus mal. Le plan de Genève a mené à plus de catastrophes et d'effusions de sang, comme tous les mauvais plans qui l'avaient précédé.

Ne pas avoir intégré dans les discussions - qui ont duré de longs mois - toutes les forces politiques représentatives de la population, c'était faire preuve de mépris à l'égard de ceux qui payent le prix fort sur le terrain, mais aussi d'imbécillité.

Avec sa diplomatie de paillettes, la Suisse a vivement heurté les Palestiniens. Quoi de plus choquant pour eux que de voir à la télévision des illustres inconnus, des gens qui n'ont jamais mis les pieds dans leurs ghettos infâmes, à cent lieux de connaître leur tragique vécu, qui parlent en leur nom de choses qu'eux, ne veulent pas entendre.

Les Palestiniens ont manifesté un peu partout en Palestine pour exprimer leur colère contre la Suisse, crier leur désespoir, crier leur refus d'un plan qui ne fait qu'ajouter plus de peines aux peines, revendiquer leur droit légitime de se déplacer sans entrave, leur droit d'exister, leur droit d'aller se faire enterrer sur leur terre, s'ils en ont le désir.

Ici à Naplouse, après la prière du vendredi, une imposante manifestation a réuni tous les mouvements religieux et politiques. Les enfants étaient là, un peu inquiets, qui s'accrochaient aux jambes de leurs parents. On sentait tout ce monde au comble de la souffrance humaine. A l'issue de cette manifestation ordonnée et grave, j'ai eu la surprise de voir, tout à coup, le drapeau Suisse se déployer, flotter dans les airs, puis, partir en fumée.

Je n'ai pas caché aux gens qui me demandaient de quel pays je venais - les Palestiniens sont toujours très accueillants, très curieux, très heureux de voir qu'il y a dans leurs lieux de vie martyrisés par Israël des internationaux - que c'était le drapeau de mon pays qui brûlait. Et combien cela m'attristait de savoir que ce plan de Genève leur avait apporté plus de peines que de solutions. Ils ont precisé qu'ils n'avaient rien contre le peuple Suisse mais qu'ils s'en prenaient aux dirigeants.

Pourquoi les Etats, nos élus, ne comprennent pas que l'on ne peut parler sérieusement de paix et festoyer à Genève, pendant qu'Israël affame, terrorise, massacre tout un peuple, avec d'autant plus d'intensité que dehors, on veut faire taire les armes ?

Si Mme Calmy Rey, le Ministre des affaires étrangères d'Helvétie, était venue sur ces lieux de mort, sans escorte ni officialité, si elle avait vécu une heure, un jour, au milieu de la boue et de l'épouvante - dans les camps de réfugiés de Rafah, Balata, Jenin - elle n'aurait jamais pu se moquer publiquement de ces gens plongés dans la tragédie, comme elle l'a fait, en défendant l'indéfendable : un plan porteur de plus de discorde et de souffrance.

Avant de lancer des initiatives de paix, les chefs de nos Etats, devraient prendre exemple sur Anna Lindh, mystérieusement assassinée... C'est-à-dire, avoir le courage de condamner la colonisation de l'Etat d'Israël sans faux-fuyants, de dénoncer ses actions terroristes sans peur, et de contraindre l'Etat juif arrogant - par des mesures coercitives - à se retirer des terres qu'il occupe illégalement, sans conditions, sans délai.

Powell, Bush, Blair, qui répètent jusqu'à la nausée, que "la violence doit cesser" pourquoi ne viennent-ils pas en Palestine voir dans quel camp la violence se situe ?

C'est de la violence israélienne qu'il convient de se préoccuper sans tarder.

Les Palestiniens sont des êtres étonnamment calmes, au regard des violences et abus qu'ils subissent. Le monde devrait s'étonner qu'il y ait si peu d'actes de résistance de leur part.

Israël qui a toujours opté pour une dynamique de guerre, n'apprécie pas que le monde se mêle de ses affaires. Il a donc profité de cette période, où l'on faisait beaucoup de bruit pour rien à Genève, pour lancer encore plus de soldats à l'assaut des camps de réfugiés et des villes. Esperant, par l'escalade, éloigner toute idée de paix.

Israël a toujours procédé ainsi. Chaque fois que des plans de paix sont avancés, il s'est toujours ingénié à multiplier les provocations, jusqu'à ce que, poussés à bout, les Palestiniens répondent au sang par plus de sang.

La Suisse a dépensé des sommes colossales, pour rien. Pour avoir fait confiance à des universitaires médiocres, à des diplomates bornés, à des négociateurs peu recommandables, en lieu et place d'être à l'écoute de ceux qui sont les vrais interlocuteurs : les victimes de ce désastre. En quoi elle s'est montrée aussi peu humaine que l'Amérique.

La brochure censée expliquer aux populations concernées le contenu de ce plan, qui devait être distribué dans des millions de foyers au frais de la Suisse, personne ne l'a jamais reçue en Palestine. L'auraient-ils reçue, qu'ils l'auraient jetée au feu, sans même la lire. Les Palestiniens sont des gens instruits, et non pas ces sauvages que l'Etat d'Israël nous décrit. Il leur a suffi de regarder qui étaient les "architectes" de cette farce, pour comprendre que la diplomatie Suisse n'était pas plus éclairée que la diplomatie américaine.

Raison pour laquelle ils se sont dressés contre le plan offensant qu'elle leur offrait, qui plus est, sur fond de sang et de larmes.

Le point de départ de toutes négociations doit être l'équité. De quelle équité peut-on parler, tant que les Palestiniens vivent sous la terreur de l'occupant ?

Il ne peut y avoir de paix juste sans le retrait de l'armée israélienne hors de Palestine et la fin de l'apartheid.



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