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Luttes antilibérales: récupérations en vue...Anonyme, Martes, Diciembre 2, 2003 - 15:01
Le Trouble
[Éditorial du numéro 21 du Trouble.] La scène donnait envie de vomir. Première démonstration de force (sic!) de l'opposition des mouvements sociaux, la manifestation du 21 octobre dernier à Québec a été victime d'une grossière tentative de récupération politique par les ténors du P.Q.. Les ex-sinistres péquistes --les Marois, Legault, Maltais et cie-- sont presque tous et toutes sorti du parlement pour venir serrer des mains à tour de rôle. Nous étions bien trop peu nombreux et nombreuses à les huer pour avoir foi dans "l'opposition" qui se dessine actuellement. Si l'automne qui s'achève donne le ton de ce qui s'en vient comme luttes antilibérales, laissez-nous vous dire que ce sera pas beau à voir et que les révolutionnaires ont du pain sur la planche. La scène donnait envie de vomir. Première démonstration de force (sic!) de l'opposition des mouvements sociaux, la manifestation du 21 octobre dernier à Québec a été victime d'une grossière tentative de récupération politique par les ténors du P.Q.. Les ex-sinistres péquistes --les Marois, Legault, Maltais et cie-- sont presque tous et toutes sorti du parlement pour venir serrer des mains à tour de rôle. Nous étions bien trop peu nombreux et nombreuses à les huer pour avoir foi dans "l'opposition" qui se dessine actuellement. Si l'automne qui s'achève donne le ton de ce qui s'en vient comme luttes antilibérales, laissez-nous vous dire que ce sera pas beau à voir et que les révolutionnaires ont du pain sur la planche. Le piège à ours du P.Q.... Les bureaucrates péquistes viennent de se réveiller après huit ans de sommeil profond qui nous avait presque fait oublier leur misérable existence. Ils et elles sont encore au poste, prêt-e-s, au nom de la sacro-sainte question nationale, à saborder toute lutte le moindrement autonome qui pourrait éventuellement-peut-être-un-jour déborder de la voie étroite du réformisme électoralo-péquiste à la petite semaine. Il y a, bien sur, les fils et les filles à papa de la FECQ et de la FEUQ --dont on n'avait plus réentendu parlé depuis leur participation aux sommets bidons du P.Q. et leur sabotage de la grève étudiante de 1996-- qui, sentant la soupe chaude dans les cégeps et les universités, se sont empressés d'engager leurs troupes dans la voie de garage de "la plus grande campagne de l'histoire du mouvement étudiant". Les bureaucrates des Fédérations avaient juste oublier de spécifier à leur base que s'était d'une campagne de pub dont il était question. Il y a aussi Henri Massé, le PDG de la FTQ, qui, de peur de perdre le contrôle de sa base (c'est qu'elle est volatile et potentiellement explosive), refuse toute alliance avec des forces qu'il ne contrôlerait pas de A à Z. Pire, le bonhomme décrète, au nom de tout le monde et sans consulter personne, quel reculs seront acceptable ou pas. Comment s'opposer à la hausse des tarifs d'Hydro après que le président de la plus grande centrale syndicale québécoise et celui du syndicat d'Hydro aient décrétés que "cela est juste et bon"? Au lieu d'envisager une mobilisation de ses troupes, trop dangereux, Massé se positionne plutôt comme le leader syndical parlable, celui qui donnera sa caution à [presque] toutes les saloperies, espérant sans doute marginaliser un peu plus les autres forces sociales et tirer ses marrons du feu. Du côté des militant-e-s, finalement, il y a une grande campagne de propagande pour leur faire passer le goût d'un éventuel engagement socio-politique autonome et radical. Il y a eu Monique Simard qui nous a sorti un film de son chapeau où les organisations maoistes des années 1970 sont littéralement présentées comme des sectes téléguidées par Ottawa et responsables de l'échec du référendum de 1980 (rien que ça!). Il y a aussi Pierre Dubuc qui nous sort un livre reprenant sensiblement la même thèse --les maos sont responsables de l'échec référendaire-- et qui invite la gauche, du haut de sa tribune à l'Aut'Journal, à former une tendance dans le P.Q. (!!). Se battre, mais avec quoi? Il est décourageant de constater à quel point les armes de combats des classes ouvrière et populaire sont émoussées et détournées de leur mission première par l'appareil qui les contrôle. Et on ne parle pas ici seulement de la FTQ, que nous sommes plutôt habitués de voir prendre le côté du pouvoir en temps de crise. Que dire de la CSN et des autres syndicats, qui, en termes de mobilisations, sont restés presque immobiles cet automne malgré leurs nombreuses "déclarations de guerre" au gouvernement. Il parait qu'ils étaient occupés à un travail souterrain de sensibilisation et de mobilisation de masse et que ce prépare de grandes mobilisations dans les semaines et les mois à venir. "Attendez, vous allez voir ce que vous allez voir," qu'ils nous disent. Justement, on verra, et, en attendant, on nous pardonnera d'être très sceptiques et de ne voir surtout, dans les beaux discours des dirigeant-e-s, que de la réthorique. Ce n'est guère mieux du côté du mouvement populaire. Alors que le gouvernement parle de chasser des gens de l'aide sociale et de couper les prestations de ceux qui reste, les groupes de personnes assistées sociales sont parti sans laissé d'adresse. C'est bien d'avoir des luttes historiques et des revendications stratégiques mais n'y aurait-il pas lieu des les revoir légèrement à la lecture des journaux? Que se passe-t-il avec les avec les groupes de défense des retraités (réforme de la Régie des rentes)? Les groupes de femmes (réforme des pensions alimentaires)? Et que penser du FRAPRU qui a organisé deux manifs cet automne contre... Paul Martin! Vu de l'extérieur c'est à croire qu'il n'y a presque personne qui est à son affaire. Et même si le mouvement populaire se mettaient à manifester, vous vous imaginez sûrement qu'il n'y aurait pas plus de monde que lors de leurs réunions des lundi matin à 10h30, et vous aurez raison. À quand un mouvement social qui saura intégrer les précaires et les petits salariés? Ne soyons toutefois pas trop offusqués de l'immobilisme généralisé et de la trahison de certains dirigeants de la gauche sociale. À la longue on s'habitue. Ce n'est pas la première fois et ça ne sera pas la dernière, c'est devenu normal. Lorsqu'on s'éloigne trop de la base, qu'on a sa permanence quand la précarité se généralise, qu'on cotoit plus souvent d'autres permanents, des représentants patronaux, des ministres et des fonctionnaires que les gens qu'on est sensé défendre, on change forcément d'optique, on devient un facteur de conservation. Les intérêts des dirigeants de la gauche sociale ne sont pas les mêmes que ceux du monde ordinaire. Le front du refus dogmatique et sectaire Devant de si réjouissantes perspectives, la tentation est grande de s'enfermer à double tour dans une forteresse pure et radicale ou de s'isoler dans des actions ultraminoritaires. Il nous semble que ce n'est vraiment pas le temps de jetter la serviette. Partout il y a des gens qui refusent de prendre leur trou et de subir les assauts libéraux jusqu'aux prochaines élections. Pour les ridiculiser, Henri Massé parlait d'un "front du refus", dogmatique et sectaire. Disons le tout net: si être dogmatique c'est refuser l'appauvrissement individuel et collectif, le transfert de la richesse vers les élites économiques et la destruction de nos conditions de vie, alors il faut être dogmatiques; si être sectaire c'est huer les ministres d'hier et refuser les alliances avec les bureaucrates compromis avec les partis bourgeois, alors il faut être sectaire. Le vrai front du refus est à construire. Refus intrangisant des compromis, des concessions, des copinages et surtout refus radical de cette société, de ce système économique et politique comme horizon indépassable des luttes sociales. Soyons dogmatiques et sectaires: isolons le P.Q. sur tous les fronts, confinons le à la stérile arène parlementaire (et qu'il n'en sorte plus!). Il ne s'agit ni de simplement remplacer une direction par une autre plus combative, ni d'abandonner tout le terrain des organisations de masse aux réformistes. Ça ne sert à rien de se la jouer avant-gardiste, le vrai changement se construit à la base, dans nos comités logements de quartier, dans nos syndicats locaux et dans nos groupes anti-pauvreté avec le monde, par le déploiement de la pratique la plus autonome et démocratique possible. Qu'on se comprenne bien, il existe quantité d'organisations absolument irrécupérables, à chacun de juger des possibilités réelles. Mais critiquer la direction de l'extérieur n'est plus suffisant, encore faut-il avoir une alternative à proposer. L'autogestion des luttes n'est pas qu'un slogan à la mode, mais une véritable nécessité en ces temps de trahison et de récupération politique.
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