|
Information-consommation, information-spectacle et information propagande : une nouvelle ère est née, la guerre de l’informaLBR, Viernes, Octubre 10, 2003 - 13:52
Alain Bergeron
Il est de plus en plus évident que nous entrons dans une nouvelle phase dans le domaine de la communication. Une étape que l’on peut décrire comme une véritable crise de l’information. Il faudrait être de mauvaise foi pour ne pas reconnaître qu’il existe un malaise général à ce chapitre et qu’il se révèle sous diverses formes et dans plusieurs situations. Par exemple, l’émission de télévision, diffusée sur le réseau TVA, animée par Claude Charron et intitulée « Les sept mensonges de Georges Bush », ne peut laisser personne indifférent. En effet, une équipe de communicateurs chevronnés démontre de manière éloquente aux téléspectateurs qu’ils se sont faits royalement tromper par l’administration américaine lors de la couverture des évènements menant à la guerre contre l’Irak. Dans la foulée, a fortiori, ils font la démonstration d’une presse vulnérable, manipulable et au service des antagonistes. On entend, on écoute et on comprend; mais on reste là, un peu benêt, avec une plaie ouverte! Puis, il y a quelques jours, ce fut le tour de la diffusion du documentaire : « À hauteur d’homme » de Jean-Claude Labrecque : une production présentée comme de la télé-réalité qui devait nous faire voir autre chose!? Pourtant, force nous est de constater que nous sommes loin du concept de la caméra cachée et de la spontanéité. Cela ressemble plutôt à un show, telle Star Académie du groupe Québecor, cependant en version politique. Le documentaire est essentiellement un simple montage (150 heures de pellicules synthétisées arbitrairement) dans lequel on sent les acteurs jouer le grand jeu sous l’œil faussement indiscret du téléspectateur. Dans cet ouvrage de communication, on élabore (choisit) le scénario sur le bras de fer que se livrent les politiciens et les médias pour le contrôle du contenu et du processus informationnel. Cette information-consommation ou information-spectacle a cependant le mérite de nous laisser entrevoir comment les communicateurs professionnels considèrent leur public-consommateur. Certaines de leurs remarques à ce chapitre sont très révélatrices de leurs préjugés relativement aux divers publics-cibles. L’émission soulève également un questionnement sur le rôle des médias et particulièrement la manière dont les journalistes accomplissent leur boulot. On s’interroge à savoir si les journalistes vont trop loin en jouant un rôle dévolu à une opposition ou si tout au contraire, ils doivent être de simples courroies de transmission des messages livrés au public par les acteurs en présence. La question est pertinente, le problème est réel, mais la plaie demeure ouverte et la réponse se fait attendre! Beaucoup d’autres faits viennent alimenter les préoccupations de la population face à l’information. L’attaque du Word Trade Center, la guerre en Afghanistan et dernièrement la guerre en Irak ont mis en évidence les nouvelles tendances de la communication moderne dans le cadre de l’instantanéité. Ces évènements nous ont fait connaître entre autres la nouvelle chaîne Al-jazira, un regard sur le monde sans censure ni restriction. C’est sur cette chaîne que nous avons pu entendre les premiers enregistrements vidéo d'Oussama ben Laden et des membres d'Al-Qaeda. Était-ce des documents authentiques et pertinents? Seul Dieu le sait mais le diable s’en doute! Les spécialistes des divers camps en font leurs choux gras, pour le public c’est autre chose. Serions-nous devant des cas patents d’information-propagande? Actuellement, nous assistons passivement au positionnement des acteurs de la nouvelle guerre de l’information. Nous avons, depuis peu, vu apparaître la toute nouvelle chaîne, Al-Arabiya, une chaîne satellitaire d'information continue, basée à Dubaï (Emirats arabes unis) qui devrait faire contrepoids à Al-Jazira. C’est ce réseau qui a diffusé en juillet dernier une bande sonore attribuée à Saddam pleurant la mort de ses fils. De son côté, Al-Jazira projette de mettre en opération une deuxième chaîne diffusant tout en anglais. Le réseau CNN, quant à lui, a fait connaître son intention d’avoir sa propre chaîne en arabe pendant que d’autres acteurs manifestent également leur intérêt à joindre le « cirque médiatique. » Ça promet pour la prochaine décennie! Les deux chaînes : Al-Jazira et Al-Arabiya, sont actuellement menacées d’interdiction en Irak par le conseil intérimaire de gouvernement (CIG). On leur reproche de diffuser des messages d’incitation à la violence et d’encouragement au terrorisme. "Le Conseil intérimaire de gouvernement a décidé, en guise d'avertissement et de mesure temporaire, d'interdire à Al Djazira et Al Arabia de couvrir ses activités et les conférences de presse officielles (...) pendant deux semaines." L’organisme Reporters sans frontières (RSF) a déjà condamné "vigoureusement" la décision du CIG et dénoncé une "atteinte à la liberté de la presse". Comme on peut le constater, le problème est criant et les enjeux sont considérables. En l’état actuel de la société de l’information, le droit du public se trouve escamoté et pris en otage dans cette effervescence médiatique. Ici le droit du public fait référence au droit des citoyens à l’information, au sens de la démocratie dans une société civile, et non pas à celui des consommateurs, dont la liberté s’exerce à travers un geste de nature strictement commerciale. Dans une situation idéale, les médias et leurs représentants devraient jouer un rôle d’éveilleur et agir en bon pédagogue. C’est-à-dire de fouiller les sujets, les analyser, les critiquer et étaler sur la place publique les tenants et aboutissants des questions soulevées et faire ressortir les intérêts en cause. Le droit à l’information réclame pour tous les citoyens une égale possibilité d’accès à tous les faits de l’actualité, que ceux-ci résident dans les événements eux-mêmes ou dans l’expression de jugements ou d’opinions, à condition que ces faits soient présentés de manière intelligible pour chacun. Et, le plus important, ce serait de voir ces professionnels de l’information laisser aux citoyens l’étape la plus importante, c’est -à-dire celle de tirer les conclusions qui s’imposent. Assisterons-nous passivement à la guerre de l’information et au détournement insidieux d’un outil de communication, qui devrait desservir la vie démocratique, à des fins partisanes au profit des intérêts économiques et politiques d’élites, d’états, de multinationales?
Le Bulletin Régional met en perspective l'individu, à travers ses institutions, ses structures, ses interventions et créations, en tant qu'acteur et auteur du développement local et régional. Il s'inspire des concepts du développement durable et du
|
|
|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Ceci est un média alternatif de publication ouverte. Le collectif CMAQ, qui gère la validation des contributions sur le Indymedia-Québec, n'endosse aucunement les propos et ne juge pas de la véracité des informations. Ce sont les commentaires des Internautes, comme vous, qui servent à évaluer la qualité de l'information. Nous avons néanmoins une
Politique éditoriale
, qui essentiellement demande que les contributions portent sur une question d'émancipation et ne proviennent pas de médias commerciaux.
|