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L'invasion armée de l'IRAQ et l'avenir de l'organisation des Nations unies

Eric, Lunes, Julio 7, 2003 - 12:30

Jules Dufour, Ph.D.

Texte d'une conférence prononcée dans le cadre d'une réunion du Conseil de l'Union des forces progressistes du Québec, arrondissement Chicoutimi, Saguenay, le 14 juin 2003

Chers amis, Mesdames et Messieurs,

Je suis heureux d'être avec vous cet après-midi et de partager avec vous mes réflexions sur l'avenir que l'on peut envisager pour l'Organisation des Nations unies à la suite de l'invasion armée illégale de l'Iraq par la "Coalition" et de son occupation tout aussi illégale.

La course aux armements vient de nouveau hanter le développement mondial. La paix universelle promise à tous les peuples par les fondateurs de l'ONU semble de plus en plus une utopie. Au contraire, les économies de guerre se fortifient et laissent entrevoir des jours sombres pour l'ensemble de l'humanité. Le budget américain de la défense dépassera sans doute les 500 milliards de dollars en 2004 et poussera les dépenses militaires mondiales vers les 1000 milliards de dollars. Les dividendes de la paix que nous avait réservées la fin de la guerre froide ne se sont pas matérialisées très longtemps et le pouvoir planétaire que veulent conserver à tous prix les Américains les amènera à bouleverser complètement les sociétés pour les assujettir totalement à leurs intérêts. Selon le Monde diplomatique,

"au multilaralisme de 1990 s'est substitué un unilatéralisme débridé. Washington agit désormais sans même consulter ses propres alliés - comme le désaveu apporté à la politique d'ouverture pratiquée par Séoul envers Pyongyang - et multiplie les ruptures du consensus international : rejet des traités limitant la prolifération des armements non conventionnels et autres armes meurtrières pour les civils (interdiction des essais nucléaires, des mines antipersonnel, des armes biologiques) ; abrogation unilatérale du traité de limitation des missiles antimissiles, afin de déployer un réseau de défense antimissile réprouvé pour son effet proliférateur ; rejet des accords environnementaux de Kyoto ; rejet de la Cour pénale internationale ; etc." (L'Atlas du Monde diplomatique, 2003).

L'humanité sera de plus en plus en otage et sera soumise à un esclavage dont il est bien difficile de prévoir l'ampleur et la profondeur. L'Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS) va accélérer ce processus. Les services vont échapper progressivement aux états nationaux et vont devenir une marchandise que les entreprises multinationales vont désormais contrôler : l'éducation, la santé, le bien-être social, la culture, bref, à peu près tout ce qui est requis pour répondre aux besoins essentiels d'une société. L'économie va devenir, comme le désirent les plus riches, globale et totalitaire ; les règles seront dictées par le marché comme dans le domaine commercial strictement dit :

"En clair, cela signifie que des domaines aussi cruciaux que la distribution d'eau, les chemins de fer, la santé, les services sociaux, l'éducation, la culture, les sports, les loisirs, les services financiers, la poste, l'énergie, l'environnement, les télécommunications ou le ramassage des ordures tombent sous le coup de l'AGCS. On comprend les convoitises qui se manifestent quand on sait que le marché mondial de l'éducation est évalué à quelques 2000 milliards de dollars et celui de la santé à 3500 milliards de dollars. Vos enfants à l'école Nestlé ou Vivendi ? C'est pour demain, puisque l'accord entrera en vigueur à la fin de l'année 2005. Et l'enseignement public ? conformément à la clause du « traitement national », les pays membres devront accorder les mêmes conditions et subventions aux puissantes multinationales étrangères qu'aux entreprises nationales, publiques ou privées. Autant dire que ces dernières ne résisteront pas aux dures lois de la concurrence. Les normes légales (droit du travail, protection de l'environnement, santé publique, etc...) n'y résisteront pas non plus. Pour exemple, l'un des « modes de fournitures » des services prévu par l'AGCS illustre bien cette problématique : une entreprise pourra importer le personnel jugé nécessaire à la fourniture d'un service sur le territoire d'un autre pays membre, important en même temps des conditions salariales nettement plus basses que celles en vigueur dans ledit pays. Ca ressemble à de l'esclavage" (Forum Social /G8 Evian).

Ce sera même plus l'état minimal ou minimaliste, ce ne sera plus l'état tout simplement. Ce seront les lois de la jungle qui vont désormais régir les relations internationales et intranationales. Ce seront les lois du plus fort, du plus riche, du plus violent.

Heureusement, des mouvements de résistance et de lutte prennent naissance et se déployent un peu partout dans le monde à l'instar du processus qui anime les Sommets de Porto Alegre. Tous les espoirs sont permis. Joignons les rangs de ceux et celles qui croyent que le développement peut se faire autrement, un développement coopératif et solidaire.

I. LE DÉSORDRE MONDIAL

À la suite des invasions armées de l'Afghanistan et de l'Iraq quels constats peut-on faire lorsque l'on s'interroge sur la réalité d'aujourd'hui et l'avenir qui nous est réservé ?

-La naissance de facto d'une dictature mondiale composée essentiellement par les USA et l'Angleterre ;

-La disparition des principes du multilatéralisme et l'apparition d'un unilatéralisme débridé selon l'expression du Monde diplomatique ;

-Le risque de rupture des consensus obtenus lors des Sommets de la Terre tenus à Rio de Janeiro en 1992 et à Johannesburg en 2002 ;

-Le danger de voir les grandes conventions mondiales signées et ratifiées au cours de la dernière décennie devenir inopérantes étant à toutes fins pratiques mises au rancart par cette dictature ;

-La création d'un climat d'insécurité générale avec l'application de la doctrine de l'intervention militaire unilatérale préventive et le déclenchement de la guerre contre le terrorisme en soi et tout simplement la défense armée des intérêts américains dans le monde et la poursuite voire l'anéantissement pur et simple de ceux et celles qui pourraient éventuellement les menacer ;

-La mise en place d'un ordre mondial qui rendra légitime désormais le recours à la violence armée en abandonnant progressivement les règles du droit.

Donc, de façon schématique on peut conclure que nous aurons désormais :

-Une dictature mondiale imposée par les État-Unis d'Amérique (USA) ;

o Washington règne en maître omnipotent sur l'ensemble de la Planète ;
o Vers un nouvel ordre dicté par Washington (tous doivent se plier à l'ordre établi par les USA) ;
o Vers un impérialisme absolu (un unilatéralisme débridé selon l'expression du Monde diplomatique) ;
o Avec l'application de la doctrine de l'intervention militaire préventive.

-Une marginalisation accrue du système des Nations Unies fomentée par les USA et l'Angleterre

o Le boycott des institutions de l'ONU ;
o Ruptures du consensus international provoquées par les USA :
o Rejet des traités limitant la prolifération des armements non conventionnels et autres armes meurtrières pour les civils (interdiction des essais nucléaires, des mines antipersonnel, des armes biologiques) ;
o Abrogation unilatérale du traité de limitation des missiles antimissiles, afin de déployer un réseau de défense antimissile réprouvé pour son effet proliférateur ;
o Rejet des accords environnementaux de Kyoto ;
o Rejet de la Cour pénale internationale.

-La concentration du pouvoir politique entre quelques mains

o L'Administration américaine décide du bien et du mal ;
o Les États nationaux subissent la menace de sévères réprimandes, de sanctions et même d'interventions armées (si nécessaire) s'ils ne se soumettent pas au nouvel ordre établi.

-Un climat généralisé d'insécurité

o L'affaiblissement du pouvoir politique des gouvernements ;
o La marginalisation accrue des masses populaires ;
o Un processus de militarisation accéléré ;
o Une perte de jouissance des droits humains et des libertés fondamentales ;
o Un terrorisme d'état encouragé par les grandes puissances.

ABANDON DES RÈGLES DU DROIT
SPIRALE DE LA VIOLENCE
CONFLITS, GUERRES ET GÉNOCIDES

Selon l'ONU, depuis 1945 plus de 200 conflits armés ont affligé l'humanité, conflits extrêmement meurtriers qui ont fait au-delà de 50 millions de morts et des centaines de millions de victimes, surtout des femmes, des enfants et des personnes âgées (à plus de 85%).

Aux guerres de Corée, du Vietnam et de l'Iraq se sont ajoutées des dizaines de conflits interethniques, de nombreux mouvements armés de libération et nombre de conflits frontaliers. De 1950 à 1990 les conflits furent avant tout interétatiques (Les deux Corées, Colombia/Ecuador, Angleterre/Argentine, El Salvador/Honduras, etc. Après le démantèlement de l'URSS les guerres furent presque toutes intraétatiques.

Entre 1992 et 2001 plus de 52 pays ont été éprouvés par un conflit armé, quatre dans les Amériques, 23 en Afrique, cinq au Moyen Orient, cinq en Europe et une quinzaine en Asie. Ces conflits ont fait des centaines de milliers de morts et détruit l'économie de plusieurs dizaines de pays. L'Afrique et l'Asie ont été les plus touchées. En fait, c'est toute l'Afrique qui a été en guerre au cours de la période (Sources : Le Monde diplomatique, 2003 ; Noël, A., La Presse, 2003).

II. Les facteurs responsables

Le facteur responsable de la situation difficile que traverse l'humanité est le système économique lui-même, le système capitaliste laissé libre de s'exercer selon les caprices et les intérêts de ceux qui le contrôlent. La stratégie du système capitaliste est de rendre la pensée et les consciences capitalistes, de promouvoir les valeurs du capitalisme. Cela signifie la promotion des vertus de la compétition, du profit maximal instantané, de la productivité au détriment de l'environnement biophysique, humain et social, cela signifie la promotion de l'excellence pour le profit et le couronnement des champions capitalistes et ils sont nombreux les galas qui les honorent et qui rendent légitimes leur fortune.

Quels sont les principaux promoteurs du capitalisme qui détruit et qui tue ?

Le capitalisme néolibéral

Le modèle économique préconisé par les grandes puissances occidentales dans l'ensemble de la Planète, le libéralisme économique, exerce sur tous les pays du monde une pression énorme sur les ressources naturelles, les zones de vie et les populations les plus pauvres. Ce modèle entraîne la concentration de la richesse collective entre quelques mains. Le PNUD, dans son rapport mondial annuel sur le développement humain de 1998, fait état de l'importance de cette concentration. En fait, les 225 plus grosses fortunes du monde représentent un total de plus de mille milliards de dollars, soit l'équivalent du revenu annuel des 47% d'individus les plus pauvres de la population mondiale (2.5 milliards de personnes).Les trois personnes les plus riches du monde ont une fortune supérieure au PIB total des 48 pays en développement les plus pauvres (PNUD, 1998, p. 33).

L'application de ce modèle est assurée par les 65 000 entreprises multinationales et leurs 850 000 filiales à l'étranger qui cherchent à se soustraire de leurs responsabilités économiques et sociales. Ces entreprises cherchent à maximiser leurs profits au détriment de l'environnement biophysique et de la main d'oeuvre. En conséquence, la pauvreté augmente dans les zones rurales, ce qui provoque un exode massif vers les mégalopoles. C'est l'hyperconcentration des hommes dont la misère s'accentue de jour en jour. La mobilisation politique des populations les plus pauvres et les plus démunies est étouffée ou anéantie par les états corporatistes assujettis aux desiderata des pays riches et des riches des pays pauvres. Il s'agit d'un processus inéluctable qui entraîne la détérioration des services sociaux et de la qualité de vie de la majorité.

Il s'agit d'une dictature. C'est la dictature du capitalisme totalitaire. Les pouvoirs impériaux déchus tels que celui de l'Angleterre ou maintenant et plus que jamais celui des États-Unis imposent leur hégémonie à l'humanité toute entière. Plus que jamais se manifeste une volonté de l'asservir et de détruire ses relations avec son milieu et son passé.

Les empires se construisent et se maintiennent grâce à un système d'exploitation des masses humaines qui obéissent aux règles de ce système. Aujourd'hui, ces règles sont celles d'un capitalisme qui prend le contrôle des ressources stratégiques et vitales (y compris les ressources alimentaires) et des économies régionales, qui élimine tout sur son passage en s'imposant comme la seule logique de développement. Grâce aux entreprises multinationales ce système pénètre dans tous les secteurs de l'activité humaine. Les États sont assujettis également à ces règles. Tout doit être déployé pour favoriser l'imposition de la logique de ce processus. Le slogan est simple. Tout doit être sacrifié aux intérêts de l'empereur. Toute résistance qui prend naissance pour contrecarrer ce processus doit être immédiatement neutralisée et annihilée.

L'hégémonie américaine

L'hégémonie américaine maintenant basée sur le principe de l'intervention militaire unilatérale préventive constitue la principale menace qui pèse sur l'avenir de l'humanité. Les USA se sentent davantage menacés depuis le 11 septembre 2001. Leurs intérêts dans le monde augmentent et, par le fait même, leur degré de vulnérabilité. En attaquant l'Iraq ils seront effectivement davantage menacés, car ce qu'ils ont réalisé est une agression armée illégale (sans l'aval de l'ONU), un acte terroriste contre tout le monde musulman, la guerre étant l'acte terroriste suprême.

L'invasion armée de l'Iraq s'avère le rejet absolu de la démocratie entendue dans son sens le plus profond. On a fait fi de l'opposition considérable des peuples et des citoyens du monde entier. Pour moi, c'est l'instauration et la mise au rancart de l'ONU et de ses institutions ; d'ailleurs, un courant d'idées très fort prône ce processus depuis très longtemps. Pensons au retrait des USA, de l'Angleterre et de Singapour de l'Unesco en 1984 et au boycott financier de l'institution par les Américains.

Cette dictature va désormais dicter la conduite des affaires de la planète. C'est un jour triste qui commence, un jour qui ne peut que nous inquiéter.

Les promoteurs

Quels sont les principaux promoteurs ou protagonistes du capitalisme qui détruit et qui tue ?

-Le G8
-Les gouvernements occidentaux
-Le FMI et la Banque mondiale
-Les entreprises multinationales et leurs filiales à l'étranger
-Les organismes de la société civile réactionnaires
-Les media de communication
-Les universités qui continuent d'enseigner et de promouvoir les doctrines du capitalisme totalitaire et transnationalisé et qui collaborent avec les entreprises multinationales qui ne respectent pas les droits humains et les libertés fondamentales.

Ces éléments occupent à peu près tout l'espace. Comment organiser la résistance ? Comment faire pour entreprendre la transformation de ce système voire la diminution progressive de son emprise ?

III. L'avenir

L'ONU s'avère encore une référence incontournable en ce qui qui concerne la protection des droits humains et des libertés fondamentales, le processus du désarmement, l'assainissement de l'environnement, la défense des minorités ethniques, la protection des réfugiés, la protection des cultures, les processus de décolonisation, la résolution non violente des conflits et le maintien de même que la construction de la paix.

Les institutions de l'ONU demeurent encore les phares qui déterminent les normes de la gouvernance et de la conduite du monde. En organisant des conférences mondiales et les Sommets de la Terre l'ONU rappelle à tous les états la nécessité, pour eux, d'assurer le développement de la démocratie participative et la protection des droits tant individuels que collectifs, de sauvegarder la diversité des cultures et de poursuivre sans relâche le travail du désarmement afin d'en arriver à abolir définitivement la guerre.

Le plus souvent, les États ont répondu et continuent de répondre bien timidement à ces appels en priorisant des mesures de court terme et en laissant libre accès à l'économie dominante aux ressources planétaires stratégiques entraînant ainsi un pillage généralisé perpétré au détriment des plus pauvres et des plus misérables.

L'ONU a été ce que ses membres ont bien voulu qu'elle soit : une institution remplie de bonnes volontés mais souvent laissée sans moyens. Donc, beaucoup d'engagements, beaucoup de programmes d'intervention, beaucoup de plans d'action, mais des réalisations qui auraient pu être plus nombreuses et davantage porteuses d'avenir. En fait, l'ONU a été tout simplement incapables d'imposer un ordre mondial juste dans l'ensemble de la Planète. Elle est donc restée assujettie à l'ordre dominant, un ordre destructeur des économies régionales et locales.

Ce qu'il importe de faire dès maintenant :

-Le rejet de l'ordre mondial imposé par les USA ;

-L'intégration du concept du développement durable à l'intérieur de l'économie avec l'application des Conventions internationales et du Plan d'action de Johannesburg ;

-Une mobilisation mondiale derrière le processus de Porto Alegre.

Permettez-moi de rêver, à la fin de cet exposé, en vous citant le texte d'introduction publié par l'UNICEF dans son rapport sur le Progrès des Nations en 2000 :

"Le jour viendra où l'on n'appréciera plus le progrès des nations selon leurs forces militaires ou économiques, la splendeur des capitales ou celle des bâtiments publics, mais selon le bien-être des habitants : leur niveau de santé, de nutrition et d'éducation ; la possibilité d'obtenir une juste rémunération pour leur travail ; la participation aux décisions leur permettant de maîtriser leur existence, le respect des libertés civiles et politiques ; l'aide dispensée aux plus vulnérables et démunis ; et la protection de la croissance physique et mentale de leurs enfants. Le progrès des nations, publié chaque par le Fonds des Nations Unies pour l'enfance, est une contribution aux efforts déployés pour que ce jour arrive enfin" (UNICEF, 2000, p. i).

Pour que ce jour arrive il faudra déployer des efforts gigantesques car les forces de l'Empire sont considérables. Les ONGs du monde devront redoubler d'ardeur, car c'est à une tâche de reconversion extraordinaire à laquelle il faut continuer de se consacrer : La transformation de la pensée capitaliste vers la pensée coopérative et solidaire, la métamorphose de l'être et une vision renouvelée de la Planète et de ses écosystèmes. Pour ce faire l'Organisation des Nations Unies continuera d'être un atout considérable. Il faudra cependant qu'elle se libère du joug que lui imposent les membres permanents du Conseil de sécurité. S'il s'avère qu'il n'est pas possible de réformer l'ONU il faudra résolument envisager la création d'une Assemblée des Peuples que le mouvement social altermondialiste pourrait certainement nous conduire dans un avenir pas trop lointain.

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DUFOUR, Jules, A. Ntêtu et B. Abderrazak (Sous la dir.). 2003. La situation économique et sociale de l'Afrique. Quel partenariat ? Pour quel développement ? Actes du colloque tenu à l'Université du Québec à Chicoutimi (UQAC) le 31 octobre 2002. GRIR/UQAC (à paraître).

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WORLD RESOURCES INSTITUTE, THE WORLD CONSERVATION UNION ANDUNITED NATIONS ENVIRONMENT PROGRAMME. 1992. Global Biodiversity Strategy. Washington, D.C., 243 pages.

Liens utiles

Alternatives
Centre de recherche sur la mondialisation
Sommet mondial pour le développement durable
UN Commission on Sustainable Development
Organisation des Nations Unies
Appel de la Haye pour la paix 1999
Convention mondiale sur la diversité biologique
International Environmental Governance
Le Monde diplomatique
Organisation des Nations Unies (ONU)
Oxfam
Programme des Nations Unies pour l'environnement
Unesco
Union mondiale de la nature

Annexe I.

La gouvernance

LE SOMMET DES ONG QUÉBEC/JOHANNESBURG

Une participation citoyenne active du Québec au Sommet mondial sur le Développement durable

Thématique : Gouvernance

Chers amis,

Je suis très heureux de pouvoir participer à ce second Sommet de la Terre. Les Sommets de ce genre sont des temps forts dont il faut profiter au maximum. Ils sont générateurs de réflexions profondes et d'engagements renouvelés.

Mon propos, ici, concerne la gouvernance. Mes activités à l interieur du système des Nations Unies depuis une vingtaine d'années, ma participation active en tant que membre commissaire ou expert d'une dizaine de commissions d'examen environnemental de projets de développement au cours des 12 dernières années m'ont permis d'acquérir une meilleure compréhension des enjeux entourant la mise en place et l'opérationalisation d'une bonne gouvernance pour le développement durable.

Je vous livrerai, d'abord, quelques réflexions sur la gouvernance mondiale, puis je dirai quelques mots sur la situation qui prévaut dans les Amériques et, enfin, je terminerai avec le Canada et le Québec.

La gouvernance mondiale

La multiplication des conflits armés au cours de la dernière décennie et le maintien voire l'augmentation des budgets militaires, nous indiquent que, dans la recherche de solutions aux conflits, le recours à la violence armée est encore malheureusement la règle. Le rêve caressé par les fondateurs de l'ONU de bâtir un monde sans guerre et en paix ne s'est pas encore réalisé. Nous pensions qu'avec la fin de la guerre froide il eût été possible d'entrer dans une ère de paix et de prospérité pour tous. Nous en sommes loin de là. Helas !

Cette seule dimension illustre combien la gouvernance mondiale ne va pas très bien. L'Organisation des Nations Unies est l'appareil, le système sur lequel nous comptons pour bâtir un monde dans lequel la coopération solidaire puisse l'emporter sur la compétition pour le pouvoir planétaire. L'ONU est surtout appelée à intervenir après les conflits pour rétablir ou maintenir la paix. Elle devrait pouvoir le faire avant le déclenchement des conflits. Elle existe pour prévenir les conflits. Bien souvent, les moyens lui sont donnés trop tard.

Bien des conflits s'éternisent sans qu'il lui soit possible d'intervenir. Le rôle qu'elle joue est primordial et plusieurs conflits ont trouvé une solution grâce à son concours. Je pense au conflit entre l'Éthiopie et l'Érythrée et à celui qui a sévi entre l'Indonésie et le Timor oriental. Elle a essuyé quelques revers dont ceux de la Somalie et du Rwanda.

Le système onusien a besoin d'être démocratisé. L'un de ses organes principaux, le Conseil de sécurité, a besoin d'une reforme en profondeur. L'élargissement de son membership et l'élimination du droit de veto des membres permanents sont parmi les principaux éléments de cette réforme fortement promue depuis 1995, année du cinquantième anniversaire de la fondation de l'organization.

Le système des Nations Unies assure certainement une gouvernance mondiale qui indique constamment à tous ses membres ce qu il faut faire pour assurer une paix durable et la sécurité pour tous et toutes par le développement économique et social durable. Il prône le désarmement général et complet et encourage ses membres à travailler à l'entreprise du désarmement. À mon avis, il n y aura pas de développement durable tant que des ressources considérables seront encore consacrées à l'arrmement et à la guerre. Ses programmes exercent une portée considérable sur la conduite du monde et contribuent de façon remarquable à l'amélioration des conditions de vie de l'humanité.

Les nombreux Sommets mondiaux que l'ONU a organisés depuis Rio ont permis de faire les constats qui s'imposent et de renouveler les engagements pris à cette occasion.

La gouvernance assurée par les États ne fonctionne pas très bien et trios faits majeurs nous le démontrent clairement : La dégradation de l'environnement se poursuit dans la plupart des pays, y compris aux USA et au Canada selon le rapport de la Commission de coopération environnementale de l'ALENA sur l'état de l'environnement ; les femmes sont encore trop peu nombreuses dans les Parlements et les disparités écoonomiques et sociales s'accentuent.

Je voudrais, ici, formuler les recommandations suivantes :

-Que le Canada contribue encore davantage au financement des organismes de l'ONU ;
-Qu'il soit encore plus actif dans l'enterprise du désarmement ;
-Qu'il augmente de facon substantielle sa contribution à l'aide internationale publique au développement.

Les Amériques

Au niveau des Amériques, la gouvernance est dictée de plus en plus par l'agenda politique et économique des États-Unis. Les Accords de libre commerce laissent le champ libre aux enterprises multinationales américaines. Ils entraînent une diminution de la capacité des états de faire les choix sociaux et environnementaux qui s'imposent. Les disparités sociales s'accentuent, les situations deviennent intolérables et des populations entières prennent les armes impuissantes qu'elles sont de faire respecter, de façon non violente, leurs droits les plus fondamentaux. La guerre civile qui sévit en Colombie en est un exemple frappant. Pour plusieurs observateurs il ne s'agit pas d'une guerre conventionnelle, mais plutôt d'un véritable génocide.

Dans ce contexte, il faut exercer toutes les pressions possibles pour qu'une solution politique soit trouvée pour résoudre cette crise. Il ne semble pas qu'avec le président récemment élu dans ce pays, il soit possible, à court terme, d'envisager cette avenue.

Il faut aussi continuer de promouvoir, à l'échelle des continents, les programmes de coopération qui favorisent le développement des capacités des communautés régionales et locales. Je pense, ici, au projet de coopération WWF-Canada avec le Costa Rica qui s'est développé dans la zone de conservation de l'Arenal depuis 1993.

Le Canada et le Québec

Au Canada et au Québec, la gouvernance s'exerce dans un contexte qui laisse peu de marge de manoeuvre aux gouvernements. La dépendance élevée de notre économie vis-à-vis du marché américain exerce des pressions énormes sur les ressources naturelles, forestières, hydriques et énergétiques de notre territoire. Quand le marché est favorable cette pression s'accentue au détriment des écosystèmes et, en particulier, de ceux de la forêt boréale.

En effet, au cours de la dernière décennie, notre dépendance vis-à-vis du marché américain s'est accrue ; avec l'ALENA nous avons consenti à jouer les règles du jeu du plus fort et il nous est bien difficile d'adopter des politiques qui viendraient limiter ou contrecarrer son influence. Notre économie est foncièrement américaine. Notre style de vie et les valeurs qui le sous-tendent sont de plus en plus marqués du sceau de notre voisin. Notre adhésion éventuelle à la ZLEA illustre bien cet environnement global panaméricain dans lequel nous serons désormais amenés à manoeuvrer.

Sur le plan environnemental, au cours des deux dernières décennies, nous avons fait des progrès considérables Nous disposons d'un corpus législatif sur l'environnement à peu près complet, un corpus qui pourrait être encore plus efficace si nous avions une plus grande volonté politique de l'appliquer rigoureusement.

Nous avons maintenant une stratégie de mise en oeuvre de la Convention sur la diversité biologique et un plan d'action bien défini pour la rendre opérationnelle. À cet egard, la strategie sur les aires protégées que nous venons de lancer nous fait entrevoir que nous pourrons bientôt atteindre les standards souhaités par le rapport Bruntland.

Nous disposons du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE), un instrument démocratique efficace pour l'examen environnemental public des projets de développement. Je crois que le BAPE a rempli avec brio les mandats qui lui ont été confiés depuis sa création. Il faut s'assurer qu'il puisse continuer d'être financé adéquatement et qu'il puisse répondre à tous les besoins de la société québécoise en cette matière.

Nous savons ce qu'il faut faire pour désormais gérer les ressources forestières, hydriques et énergétiques de façon durable. Pour y parvenir, il faudra mobiliser toutes les énergies en ce sens dans les régions ressources. Des états généraux sur l'environnement et le développement durable devraient être tenus dans toutes les régions du Québec à l'instar de celui qui a été réalisé dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean en 1999.

Des expériences de développement durable ont cours dans toutes les régions. Un exemple de réussite exemplaire est le travail accompli par le comité de coordination du parc marin du Saguenay-Saint-Laurent depuis 1998.

Conclusion et recommandations

Pour poursuivre notre route vers le développement durable il importe de s'engager ou entreprendre les actions suivantes :

-Intégrer les principes du développement durable dans les politiques nationales de développement et les plans stratégiques régionaux de développement ;
-Accroître, dans la gouvernance globale, l'espace réservé à la société civile ;
-Promouvoir les principes de l'économie sociale et solidaire dans tous les secteurs d'activités ;
-Décentraliser de façon réelle les pouvoirs en faveur des communautés régionales et locales ;
-Reconnaître dans les faits et respecter les droits des Premières Nations et conclure, dans les meilleurs délais, une entente avec la nation ilnue selon l'approche commune ;
-Procéder a la création d'un gouvernement autonome au Nunavik en fonction des recommandations formulées par la Commission du Nunavik en 2001.

La doctrine du néolibéralisme qui semble désormais appliquée à l'ensemble de la Planète ne peut être compatible avec les principes du développement durable que dans la mesure où les états sont encore libres d'exercer leurs fonctions fondamentales. Si les forces du marché sont laissées libres d'agir à leur guise il en résulte des situations intolérables qu'il est ensuite difficile de corriger. L'érosion lente de la qualité de nos programmes sociaux à laquelle nous avons assisté au cours des dernières années devrait nous inciter à être plus vigilants et à redéfinir nos priorités de développement.

L'humanité qui souffre et qui meurt prématurement par suite de la très mauvaise répartition des richesses a besoin d'une action mondiale en sa faveur. Je souhaite que ce message soit bien compris à Johannesburg.

Merci de votre attention !

Dr Jules Dufour,
Professeur,
Département des sciences humaines,
Université du Québec à Chicoutimi

Johannesburg, Afrique du Sud, le 26 août 2002

Annexe II.

OÙ SE TROUVENT-ELLES LES ARMES DE DESTRUCTION MASSIVE ?

Par

Jules Dufour, Ph.D.
Président,
Association canadienne pour les Nations Unies (ACNU)
Section Saguenay-Lac-Saint-Jean
Saguenay

Mars 2003

S'il est nécessaire voire primordial pour la "sécurité mondiale" d'éliminer les armes de destruction massive de l'Iraq il semble aussi qu'il restera à l'humanité beaucoup de travail à faire pour se débarrasser des armes de destruction aussi massive (nucléaires, chimiques et biologiques) que l'on retrouve en Russie, aux États-Unis, en Angleterre, en Chine, en France, en Israel, en Iran, en ex-Yougoslavie, au Pakistan, en Égypte, en Inde, en Libye, en Syrie et dans les deux Corées et que possèderaient peut-être Cuba, Taiwan et le Soudan. On peut également constater que la portée des missiles dont disposent les cinq pays membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU dépasse les 5 500 kilomètres.

C'est ce que nous révèle une carte de la répartition mondiale des armes de destruction massive publiée récemment par Eric Waddell et Global Outlook TM2003 que l'on peut retrouver sur Internet à l'adresse suivante

Les priorités d'intervention de l'ONU en matière de désarmement devraient plutôt porter sur les pays qui en possèdent davantage à commencer par les États-Unis et la Russie qui disposeraient chacun de plus de 10 000 ogives nucléaires et d'énormes quantités d'armes chimiques et biologiques.

Le 9 mars 2003

Site de l'Union des forces progressistes
www.ufp.qc.ca


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