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G8 contre G-monde

Anonyme, Martes, Junio 3, 2003 - 17:10

yoran jolivet

Du 28 mai au 3 juin, des citoyens du monde entier se sont réunis à Annemasse (Haute-Savoie), Genève et Lausanne pour protester contre la tenue du sommet du g8 à Evian. Récit d’un week-end mouvementé.

G8 CONTRE G-MONDE

Samedi, il est 6 heures du matin et les bus arrivent sur l’aérodrome d’Annemasse converti en podium altermondialiste. Les couleurs du soleil flamboient et se reflètent sur le massif de montagnes qui surplombe le lac Léman. Les visages des militants s’égayent un peu après une longue nuit en bus. Car les cars arrivent de toute l’Europe avec une forte majorité de français, anglais et allemands. Il s’agit maintenant de trouver le village adéquat : trois villages alternatifs ont été mis en place aux alentours depuis le début du contre sommet, le jeudi 29 mai. Il y a le Village Inter galactique (VIG), camping accessible à tous regroupant des militants d’ATTAC (Association pour la Taxation des Transactions Financières pour l’Aide aux Citoyens), des partis politiques, des familles... Un kilomètre et demi plus loin se trouve le Village alternatif anti capitaliste et anti guerre (VAAAG). En arrivant dans ce village, on vous explique les règles à respecter car ce village observe un fonctionnement autogéré. Tous les matins des réunions ont lieu pour parler des problèmes et répartir les tâches de la journée. Enfin, un peu plus loin se trouve le point G ; village féministe non mixte.

Les forums de discussion
Un des points fort du contre sommet est le déroulement de forums de discussion reprenant des thèmes globaux abordés, ou omis, par le G8. Ces sujets sont discutés officieusement dans les campings, autour des tables et dans les points de rencontre. Mais les co-organisateurs du contre sommet ont établi un programme officiel en utilisant des lieux de la commune d’Annemasse. On retrouve parmi les organisateurs de nombreuses associations et ONG comme Attac, le CRID (Centre de Recherche et d’information pour le Développement), Agir ici, Greenpeace.... Le centre de ces réunions se trouve dans la salle Martin Luther King à deux pas de la gare. On est tout d’abord frappé en approchant par les immenses barrières de barbelés et les véhicules de la police armés de pelleteuses (attendaient-ils des chars ?) De plus, la plus part des commerces sont fermés et barricadés de planches et de panneaux d’agglomérés. C’est peut-être cela qui fait dire à Jean-Pierre, membre d’Attac, bénévole : « c’est la guerre à Annemasse, il nous faut remplir la ville pour la faire vivre ». L’arrivée au centre MLK dénote grandement avec ce climat de tension. Les gens sont habillés de couleur, discutent vivement, sous la chaleur écrasante. Dans la cour principale, les « artisans du monde » présentent leurs produits du commerce équitable, Amnesty international vend des affiches et des Tee-Shirt, Attac des programmes .... Deux auditoriums accueillent des conférences et on trouve à l’étage un espace pour les médias alternatifs ainsi qu’une salle accueillant des avocats qui soutiennent le contre sommet.

Foisonnement d’idées

Dans les forums et les rencontres, une très grande multitude de thèmes sont abordés. Samedi matin lors du forum « Sida et solidarité Nord/Sud » au centre Martin Luther King, Tobias Luppé de Médecin Sans Frontière expliquait : « la domination [du Nord] n’est pas seulement économique mais elle a des effets sur le développement de la pandémie ». Pendant ce temps Attac mettait en scène avec succès un tribunal pour juger le libéralisme avec les grandes instances internationales sur le banc des accusés. La Confédération Paysanne, avec José Bové a organisé un débat autour de l’agriculture. Dans les gymnases de la ville les participants ont abordé depuis mercredi la répercussion des lois anti-terroristes sur les droits humains, la responsabilité des états dans le trafic d’arme, le problème de l’eau et un débat très suivi sur le régime des retraites et du service public...On peut regrouper les sujets de débat en quatre thèmes principaux : la démocratie, la sécurité (le président de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme nous parle de « lutter contre les causes du terrorisme »), la responsabilité (évocation de la mise en place d’une instance mondiale de l’environnement par Zaina Helaag, représentant Greenpeace international) et la solidarité.
Le Parti Socialiste a tenté d’organiser des débats dans la journée du samedi pour renouer avec les militants altermondialistes. Mais en début d’après-midi, un groupe d’environ 1000 personnes est arrivé du VAAAG (Village Alternatif) pour protester contre la présence du P.S. Après des échauffourées avec le service d’ordre - il est impossible de savoir qui a commencé -15 cars de C.R.S. sont arrivés et on dispersé la foule dans un nuage de gaz lacrymogènes.....

Festivités

Après une journée intense de discussions et de rencontres, les festivités peuvent commencer. Les 8000 personnes présentes lors des forum se dirigent vers le « centre de convergence », sur l’aérodrome. Ils sont vite rejoints par 15000 personnes venant des villages alternatifs et par des amateurs de musique. Les militants se restaurent dans de nombreux postes de vente de chipolatas ou de sandwichs végétariens. Alors que la lumière s’estompe sur les montagnes, l’aérodrome se couvre de milliers de familles, jeunes, vieux et enfants qui mangent festoient et reconstruisent le monde en attendant de faire la fête. En effet, un grand concert pour l’annulation de la dette a lieu avec la présence de Manu Ciao et de nombreux groupes. Plus de 20 000 personnes dansent ensemble exprimant leur joie d’être là, sous les étoiles. Ils soutiennent les intervenants qui parlent des effets de la dette sur les pays du Sud entre deux morceaux de musique...

Actions
Dès 4 heure du matin des militants quittent les villages pour aller faire des blocages à Genève ou sur la route d’Evian. Ils seront évacués sans incident malgré une bande de casseurs qui sillonne la capitale Suisse. A 10 heures, c’est le grand départ de la manif à Annemasse. Les cortèges se mettent en place méthodiquement. Les syndicats prennent le devant avec la CNT et la CFDT (à qui il arrive de se faire huer). Suivent les milieux associatifs (Attac est présent en très grand nombre) et les partis politiques. Un grand absent : le P.S. qui a préféré manifester incognito. Le cortège, long de 4 kilomètres avance dans la grande banlieue genevoise sans incidents. Il n’y a pas de douanier au poste frontière pendant que la manifestation émigre pour rejoindre la partie suisse. Le slogan le plus repris est, « ils sont huit et nous sommes des milliards » ; du coté de la CNT on y ajoute « union, action, autogestion ». On entend aussi « de l’argent il y en a, dans les caisses du patronat » ou encore, « g8 illégal, à bas le capital ». Le début du cortège arrive vers 13 heures sur l’autoroute A41 où il rejoint la manifestation venant de Genève. Plus de 100 000 personnes se retrouvent dans une ambiance festive et calme. Cependant une station service est attaquée, quelques vitres sont cassées mais les pompiers et les manifestants contrôlent rapidement les casseurs. Avec 12 kilomètres dans les pieds, les militants altermondialistes doivent rentrer sur Annemasse pour prendre les bus de retour pour la plupart. Seuls quelques uns continueront d’occuper les villages alternatifs jusqu’à mardi 3 février.
En se quittant on se dit : « à la revoyure , pour manifester contre l’OMC à Cancun (Mexique) ou à St Denis pour le FSE (Forum Social Européen) » ; en bref, la lutte continue.

Yoran Jolivet



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