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L'information continue vue par les gens de l'info continue

Mary-Josée Brissette, Martes, Abril 29, 2003 - 11:10

Mary-Josée Brissette

Vendredi dernier se tenait une table ronde à l'Université de Montréal, qui avait pour thème "L'information continue, huit ans après". Michäelle Jean, de RDI, Georges Pothier, de LCN et Jacques Camirand, de Info 690 étaient invités à prendre position sur leur vision de ce qu'apporte les chaînes d'information continue à la société québécoise et ce qu'elles ont changé au point de vue médiatique. Une recontre intéressante où toutes les opinions, peu importe la station, convergeaient dans le même sens: l'information continue, c'est bien mais il y a des effets pervers.

« En 1995, avec l’arrivée de RDI, le visage de l’information a changé au Québec. Cela a permis à de jeunes journalistes de faire leurs preuves. En fait, ç’a bouleversé le genre journalistique, il n’y avait plus juste Bernard Derome! On comptait! », explique Michäelle Jean, de Radio-Canada. Cependant, elle affirme quel malgré tous les avantages que comportent ce genre informatif, comme savoir ce qui se passe ici et ailleurs n’importe quand dans la journée, des effets pervers se font ressentir. « La répétition. Pour moi, c’est l’exercice le plus difficile à faire que de devoir retourner au micro à la demi-heure et répéter la même chose! Il y a aussi d’étirer la nouvelle. Étirer pour étirer, pour garder ses cotes d’écoute. Des fois, on n’a plus rien à dire, mais il faut étirer le temps d’antenne, alors ça laisse beaucoup de place à l’improvisation. Il arrive aussi parfois qu’il y ait un phénomène de création d’événements », déplore la journaliste d’origine haïtienne.

Jacques Camirand, de la station radiophonique 690, voit l’information continue comme un dépanneur. « Le public fréquente l’information continue comme un dépanneur, il va chercher la nouvelle quand il en a besoin mais ne stationne pas là toute la journée parce qu’il y a autre chose. » Toutefois, lui aussi voit certains effets pervers à l’information en continu, mais insiste par contre sur le fait que ce genre de transmission de nouvelles ne tue pas l’information, parce que même avec l’arrivée de telles chaînes au Québec, les cotes d’écoute des grands rendez-vous (18 heures, 22 heures), n’ont pas bougé du tout. « A cause de l’intérêt de garder le spectateur le plus longtemps possible, il y a souvent un phénomène de taper, taper et retaper sur la nouvelle, l’étirer le plus possible. A un point tel que les autres nouvelles ressemblent à des pauses commerciales dans le téléroman de l’information. La nouvelle est une histoire qu’il faut enrichir. Vox pop, impacts économiques, etc. Tous les moyens sont bons pour l’étirer. Par exemple, la guerre est finie et les élections sont passées, alors vite, il faut trouver une nouvelle! Super, on a la pneumonie atypique à Toronto! Alors on assiste à un phénomène où tous les médias abusent de cette nouvelle, tellement qu’on s’imagine que tous les Chinois se promènent avec un masque et que celui qui n’a pas de masque à Toronto est un épais! », exprime M. Camirand. Il est vrai, toujours selon lui, que les médias d’information continue doivent tenir l’antenne, il ne sont pas pour dire « aujourd’hui tout va bien au Québec, il ne se passe rien dans l’actualité, alors retournez vaquer à vos occupations », comme il l'a mrentionné.

« Il faut tenir l’antenne avec beaucoup d’images mais très peu d’informations véritables, mais il faut avoir de l’humilité et ne pas dire à l’antenne ce qu’on ne sait pas, c’est une question d’éthique », dit Georges Pothier de la chaîne LCN, du Groupe TVA. Lui aussi affirme que l’information continue est une chose merveilleuse, mais dangereuse, parce qu’un des pièges de ce genre informatif est la recherche d’une autre histoire. « L’information continue est là pour rester, car elle fait maintenant partie du mode de vie des gens. Cependant, il faut s’abreuver à d’autres sources d’informations. Une chose qu’on pourrait améliorer serait de permettre aux gens de réfléchir, de faire des analyses en profondeur, laissant de la place pour la pensée. Tout est une question de volonté. Un peu comme l’a fait la chaîne TV5 durant la guerre en Irak, qui est, à mon avis, la meilleure couverture journalistique de la guerre qui a été faite », dit-il, suivi des autres journalistes qui acquiesent à cette remarque.

On peut donc constater que les journalistes des grosses institutions d’information continue sont conscients du danger et des effets pervers du type journalistique infini. Par contre, reste à savoir s’ils prendront les moyens pour améliorer l’information livrée...



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