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Le silence " électoral " des femmes ne sert pas la démocratie

Sisyphe, Martes, Marzo 18, 2003 - 11:51

Micheline Carrier

Je ne sais pas s'il est « immoral et irresponsable » de déclencher une élection à la veille d'une guerre en Irak. J'ai tendance à penser que non, mais je peux me tromper... Il se peut que le climat de guerre favorise le Parti québécois. La stabilité, vous savez...

Ce qui m'inquiète et m'intrigue davantage, c'est le silence des femmes et des groupes de femmes dans cette campagne (jeune, il est vrai), alors que les femmes ont fait l'objet, à deux reprises, du mépris du premier ministre sortant, et que leurs demandes légitimes sont ignorées de tous les partis.



Je ne sais pas s'il est « immoral et irresponsable » de déclencher une élection à la veille d'une guerre en Irak. J'ai tendance à penser que non, mais je peux me tromper... Il se peut que le climat de guerre favorise le Parti québécois. La stabilité, vous savez...

Ce qui m'inquiète et m'intrigue davantage, c'est le silence des femmes et des groupes de femmes dans cette campagne (jeune, il est vrai), alors que les femmes ont fait l'objet, à deux reprises, du mépris du premier ministre sortant, et que leurs demandes légitimes sont ignorées de tous les partis. Un exemple patent : le financement des maisons d'hébergement, dont l'augmentation du budget coûterait tout de même moins aux contribuables que la subvention de 30$ millions accordée il y a un an ou un an et demi à NASDAQ. La bourse a bien besoin d'argent, n'est-ce pas ? Il faut ajouter également le refus par le Parti québécois de favoriser la parité des candidatures des femmes et des hommes. Et le collectif Féminisme et démocratie, dont le colloque avait fait la promotion de cette proposition, l'entendrons-nous bientôt s'exprimer dans cette campagne lectorale?

Je me demande si le silence des femmes ne traduit pas la peur qu'on les accuse de faire déraper une campagne et de favoriser la droite. Depuis que j'ai l'âge de voter - oh ! il y a quelques décennies déjà - j'entends cette forme de chantage : « Si vous ne votez pas du «bon bord», vous ferez élire un gouvernement conservateur de droite». Une sorte de détournement de la démocratie, puisqu'on ne vote plus par conviction mais par peur des épouvantailles. Comment les partis alternatifs auraient-ils alors la chance de démontrer leur influence véritable ? On voterait pour eux, mais... on ne le fait pas parce qu'on a peur...

Dans cette camapgne, les masculinistes, eux, ne se taisent pas. L'attitude de tous les partis à l'égard des femmes pourrait bien découler de l'idéologie masculiniste qui séduit non seulement des médias, mais également des hommes et des femmes politiques. On le verra, après l'élection, quand cela se traduira par des changements aux lois, comme à Ottawa. Il sera trop tard pour réagir. «Profil bas» des femmes et hommes politiques sur des questions fondamentales pour les femmes afin de ne pas heurter les masculinistes ? «Profil bas» des femmes et des groupes pour ne pas ennuyer les chefs de parti, surtout M. Landry, dont le parti ignore les demandes des femmes parce qu'il les prend pour acquises et sait qu'elles ne «dérangeront» pas trop ?

Si c'est le cas, les femmes n'ont rien à attendre de l'après-élection, quel que soit le gagnant.

Alors, que faire ? demande-t-on.

Ce qu'on fait en dehors des campagnes électorales - et une élection
est la meilleure occasion de le faire : mettre sur la table les
principales revendications des femmes, qui concernent d'ailleurs
toute la population, exiger que tous les partis se prononcent sur ces questions, et revenir sans cesse à la charge. Quelques exemples :

1. Dans le sillage d'une loi anti-pauvreté adoptée à l'unanimité à
l'Assemblée nationale, que les partis annoncent des propositions
concrètes pour lutter contre la pauvreté et les injustices
socio-économiques (une soi-disant «obsession» de M. Landry quand il a succédé à M. Bouchard).
2. Dans la lutte contre la violence, que les partis s'engagent à
faire une campagne de sensibilisation sur le sujet et à soutenir à
hauteur de leurs besoins financiers les centres et les maisons
d'hébergement pour les femmes et les enfants victimes de violence en milieu familial (ce qui devrait en fait être une responsabilité de
l'État).
3. Dans la recherche d'une démocratie véritable, que les partis
s'engagent à prendre les moyens concrets d'accroître la place et le
rôle des femmes au sein de TOUTES les institutions, notamment les
institutions politiques.
4. Dans la recherche de l'équité sociale, que le gouvernement
respecte sa propre loi sur l'équité salariale dans le traitement des
employé-es de l'État.
5. Sur tous les enjeux de cette élection pour l'ensemble de la
société, les femmes peuvent se prononcer. Et interroger tous les
partis, sans oublier l'Union des forces progressites (UFP), sur des
propositions apparemment séduisantes, comme la conciliation
travail-famille et les propositions natalistes. Combien de femmes en profiteraient vraiment ? Quelle influence ces mesures auraient-elles à long terme sur leur avenir professionnel et sur leurs revenus futurs ?

Se taire ne favorise pas l'exercice de la démocratie. Exprimer son accord ou son désaccord, participer aux débats, tout vaut mieux que le silence. N'est-ce pas d'abord cela «prendre sa place» dans les institutions démocratiques ?

Un site d'où on peut télécharger ou imprimer plusieurs analyses.
sisyphe.levillage.org


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