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La culture en tant que pratique politique

karine, Domingo, Enero 26, 2003 - 20:06

karine

Sujet discuté depuis des décennies déjà avant d'être rendu particulièrement populaire au près des académiciens par le courant américain des Cultural Studies, le rôle politique de la culture était aujourd'hui à l'honneur dans l'une des tables-rondes du FSM 2003. Répondant à un sentiment, probablement partagé par plusieurs ici, de la futilité de tentatives de modification des institutions sociales afin de provoquer un réel changement de société, l'idée qu'il faille prioritairement se concentrer sur les productions et pratiques culturelles des individus afin de transformer l'imaginaire collectif était aujourd'hui présentée comme clé de voute de la construction d'un autre monde.

Particulièrement variées dans leur angle d'approche de la question, les interventions respectives des six personnes invitées à cette table ont permis de mettre en lumière différentes considérations, certaines d'ordre théorique mais aussi d'autres plus pratiques, reliées au politique intrisèque à toute manifestation artistique. En effet, tel que mis en évidence par Marc Le Glatin, directeur du théâtre de Chelles en France, l'expression artistique ne peut qu'être simultanément un acte politique puisque sa définition même est celle du politique, une mise en relation de l'individu avec sa communauté par le biais d'une interaction symbolique.

Très largement mis en perspective, par le biais de statistiques frappantes, par l'intervention d'un intellectuel cubain s'étant rajouté au panel à la dernière minute, la domination culturelle des États-Unis sur le reste de la planète a constitué le point de départ obligé de cette table-ronde.Bien que par la suite justement critiqué par un membre de l'auditoire pour sa compliance aux normes de la rationalité scientifique occidentale, ce détour par la quantification aura du moins eu le mérite d'exposer dans toute sa clarté, si besoin était, l'importance du problème de la domination culturelle. Majoritairement composés de gens pauvres n'ayant qu'un très faible accès aux lieux de culture extérieurs à leur domicile et concentrant donc une très grande proportion de leurs temps libres devant la télévision, les pays soumis à l'influence culturelle américaine se doivent d'opposer au plus tôt leurs alternatives propres à cette tendance par le biais de politiques culturelles claires.

S'ancrant dans le prolongement de cette première piste de pensée, le cadre d'analyse fourni par l'académicien américain Michael Denning est d'ailleurs venu brièvement clarifier les formes possibles de politique culturelle : la résistance, la lutte pour la justice et la révolution. Résistance, la politique culturelle prend la forme d'actes d'insubordination idéologique et se situe entre la culture dominante et celles underground alors que, lutte pour la justice culturelle, elle se caractérise plutôt comme un effort pour l'affirmation des identités particulières ou encore pour la transformation des industries de la culture de masse. La révolution culturelle, quant à elle, se fait bien plus rare mais peut prendre deux formes distinctes, celle d'un changement soudain et en profondeur de l'ensemble du système ou encore celle d'une longue révolution marquée par une modification graduelle des manières de faire individuelles.

Effectuant la transition entre concepts théoriques et considérations pratiques, Marc Le Glatin a pour sa part abordé la question de la domination culturelle à partir des notions de centre et de périphérie culturelles, le centre devant user soit de violence, soit du pouvoir symbolique immense des industries du divertissement afin de maintenir les pays périphériques en état d'infériorité. Ainsi, afin de sortir de l'aliénation où la plonge le flot d'images produit par la culture du centre, la périphérie doit au plus tôt développer sa propre vie artistique en prenant bien soin d'intègrer le destinataire à toutes les étapes du processus de production culturelle. Comme l'a souligné M. Le Glatin, il est dans cette perspective bien dommage de constater le très faible nombre de mouvements progressistes qui incluent les actions d'ordre culturel, artistique, comme base de leur tentative de transformation de la société.

Ainsi, outre l'exemple concret d'utilisation de la culture comme instrument politique relaté par M. LeGlatin, la table-ronde d'aujourd'hui nous a permis d'entendre la voix de représentantes de deux groupes particulièrement menaçés par la domination culturelle américaine de ces dernières décennies. Les 300 millions d'aborigènes de la planète, d'abord, qui, regroupés sous le Centre International des Peuples Aborigènes représenté au FSM par Victoria Tauli Corpuz, travaillent actuellement à contrer les effets de décennies de colonisation en se dotant d'une déclaration des droits des peuples indigènes qui veut renverser l'idée selon laquelle leurs cultures respectives ne sont que relents exotiques du passé qui méritent mépris ou curiosité.

Les peuples africains, ensuite, qui subissent un véritable viol de l'imaginaire, selon les mots de madame Aminata Traore, de par la prégnance dans leur esprit de l'idée que c'est à cause de leur inhabilité à copier les “avancées



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