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Initiations universitairesSylvestre, Sunday, September 1, 2002 - 23:30 (Analyses | Repression)
Evelyne B.
Quel pourrait être le véritable rôle joué par les initiations, que l'on impose aux collégiens et aux universitaires comme un véritable rite de passage de l'état d'"enfance de l'art" à l'état de "sous-adulte", catégorie de gens sous-estimés parce considérés comme non-rentables économiquement, que l'on appelera ici "étudiants"? C’est le temps de la rentrée scolaire pour les grands, et avec ça le retour en force de la fameuse initiation, ce fameux "test" de rentrée scolaire qui consiste en une humiliation par le port d’un costume ou la manifestation aux yeux de tous d’un comportement considéré par tous comme ridicule, qui identifie l’étudiant au monde de l’enfance, de l’animal, d’emplois peu prestigieux, de la saleté ou encore de la femme, dans les disciplines traditionnellement masculines. Par exemple le port du soutien-gorge obligatoire chez des étudiants en génie mécanique. On impose cette stupidité aux cégépiens, et plus grave encore, aux universitaires. Seuls les enfants semblent épargnés par ce mode d’initiation au monde "adulte", probablement parce qu’ils représentent tout ce dont les collégiens et les universitaires veulent se distancier. Il est vrai que nos jeunes adultes sont traités comme des enfants, et ceci de plus en plus tard, par des baby-boomers terrorisés à l’idée de vieillir et d’être "jetés" comme les vieillards qui sont dans les hospices, seuls et pauvres, ici dans nos pays occidentaux. Ces baby-boomers ne font rien pour favoriser l’émancipation, l’autonomie de leurs enfants, et tentant sans cesse de les contrôler, les perdent pourtant, comme leurs propres parents les avaient perdus, répétant à chaque génération un scénario de rejet… Cégépiens comme universitaires se voient fortement suggérés, voire obligés, par l’exemple du groupe auxquels ils veulent appartenir, à participer à ces épreuves, supposé les aider à établir de bonnes relations amicales, voire à amorcer des liaisons amoureuses, à l’université. Qu’en est-il réellement ? Réunir un groupe pour permettre à des amitiés de se nouer est une chose, lorsque des activités intéressantes sont proposées, mais ça devient un réel problème lorsque des gens en ressortent traumatisés. On à qu`à regarder "La Revenge des Nerds" à la télévision pour savoir ce à quoi une initiation universitaire ressemble… Les beuveries, les rixes, les dérapages divers sont des problèmes fréquemment rencontrés lors de telles occasions de se réunir, en grosse partie parce que l’alcool y est librement vendu aux étudiants, et aussi à cause de la nervosité des gens qui ne voulant pas passer pour des souffre-douleurs, sont prêts à tout pour favoriser leur intégration sociale. L’initiation, en tant que telle, se déroule dans une atmosphère tendue parce que les gens qui y participent n’ont pas vraiment eu le temps de faire connaissance avec toutes les personnes de leur groupe. La confiance n’est pas vraiment établie entre les membres de ce groupe, certains masques sont plus durs à faire tomber que d’autres. Pour que l’on établisse vraiment un lien de confiance, il faut être entré en contact avec les "zones sombres" de l’interlocuteur, sans pour autant que le rapport social se soit rompu. La "zone sombre" étant tout ce qui choque notre sens moral chez l’autre : sa façon de penser, son comportement. Cela nécessite du temps, parce qu’il est évident que l’autre ne se livre pas du premier coup, et qu’on à tendance à résister à l’idée que notre comportement est la valeur ultime, à cause de notre égocentrisme naturel. Ce n’est donc pas dans une seule soirée que ce lien de confiance s’établit, mais dans toutes les occasions de collaboration entre élèves, confrontations d’égos s’il en est…Je crois que les gens se donnent au fond d’eux-mêmes des raisons à leur amitié. Les initiations humiliantes, à mon avis, ne rapprochent pas réellement les gens entre eux, mais les mettent dans un rapport de compétition, qui fond la division des tâches, inhérente au processus de morcellement de la science, morcellement qui reflète la spécialisation des métiers imposée sur le marché du travail. Pourquoi ? Les initiations, du fait, au lieu de l’abaisser, augmente le niveau de stress lié à l’estime de soi chancelante des nouveaux arrivants, souvent loin de leur domicile familial, et se sentant isolés. Qui dit solitude dans la culture nord-américaine dit "perdant", et personne n’aime penser qu’il est un "perdant". Bon vous voyez le genre… Ils ont aussi peur qu’on les rejette à cause de leur allure vestimentaire. Il n’est pas enrichissant pour soi-même, en temps de rentrée scolaire, période de tension psychologique, de ressembler à un clown ! Les employeurs désignent toujours des travailleurs considérés comme moins importants pour la compagnie (comprendre "jetables") pour porter des costumes de mascotte ridicules… Il est bon de proposer des occasions aux étudiants de faire connaissance les uns avec les autres mais pas de les distraire les uns des autres par ces activités ou de quelque autre manière que ce soit. Le port de costumes ridicules entre autre, n’incite pas les étudiants à entrer en contact avec la personnalité profonde des autres étudiants, mais avec le costume qu’ils portent. Le costume, véritable symbole de ce que les gens crucifient en eux, crée un artefact de relation humaine en ce sens qu’il devient la cible de la désapprobation intrinsèque à tout début de relation, et qu’il dévie ce rejet primordial hors du corps de la cible primordiale(être), sur le costume recouvrant comme une seconde peau l’autre. Les comportements humiliants jouent le même rôle. Le contact entre êtres véritables est remplacé par un contact entre "formes", coquilles vides, opposant masque sur masque. L’artefact en question est une cible impersonnelle, de sorte que l’on peut affirmer qu’il ne reflète pas les dispositions de chacun à la dissimulation :la dissimulation des personnalités véritables est sciemment imposée . Si les occasions de pouvoir se connaître sont pauvres, on peut être assuré que bon nombre des élèves plus timides abandonneront leurs études au cours de leur session, et surtout, que ceux qui restent auront des rapports sociaux fondés sur la comparaison, la compétition, de sorte qu’ainsi un gouvernement dictatorial peut limiter la coopération des élèves entre eux, de manière à ce que toute révolte estudiantine soit étouffée dans l’œuf. On sait combien les gouvernements répressifs ont peur des étudiants.
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