Action-Camping des sans-logis 1er juillet 2002

Le squatt fête son premier mois d'existence !

Voilà plus d'un mois que dure l'occupation d'un édifice vacant du quartier Saint-Jean-Baptiste, un bâtiment maintenant habité par des militants appuyés par le FRAPRU et le Comité Populaire St-Jean-Baptiste. Tout va pour le mieux pour les occupants et les choses s'organisent assez bien ces temps-ci.

Du nouveau sur de la Chevrotière

Voilà plus d'un mois que dure l'occupation d'un édifice vacant du quartier Saint-Jean-Baptiste, un bâtiment maintenant habité par des militants appuyés par le FRAPRU et le Comité Populaire St-Jean-Baptiste. Tout va pour le mieux pour les occupants et les choses s'organisent assez bien ces temps-ci.

Du nouveau sur de la Chevrotière

Il faut dire que les appuis affluent de partout et que l'occupation, loin de déranger, semble plaire à bien du monde, qui y voient un espoir de changement dans le dossier de la crise du logement. D'abord les voisins, notamment ceux des coopératives d'habitation environnantes, offrent leur support moral et même matériel aux militants, et les relations avec le voisinage sont des plus cordiales ces temps-ci. Il faut rappeler que le bâtiment occupé est situé dans l'îlot Berthelot, un bout de quartier qui a toute une histoire de lutte entre les intérêts de la ville, des promoteurs privés, et des gens du quartier. L'occupation ramène ce dossier à l'avant-scène et rappelle aux autorités que la situation n'est toujours pas résolue pour ce qui est de l'avenir de ce secteur. Les occupants sont sensibles aux revendications des gens du quartier et ont eu plusieurs rencontres avec eux, autant informelles que formelles. En fait, les occupants sont bien accueillis dans le quartier, on se rend service mutuellement, et on ne se surprend pas du tout de voir des enfants du coin venir faire leurs devoirs ou s'amuser chez les occupants après l'école...

Des anciens locataires de l'édifice, qui y habitaient avant d'en être délogés pour laisser la place à un projet qui ne s'est jamais concrétisé, ont décidé de faire une visite sur place lorsqu'ils ont appris par les journaux l'existence de la manifestation prolongée dans leur ancienne demeure. Ce fut un moment bien apprécié par les occupants, l'occasion d'obtenir un appui de plus et d'en apprendre encore plus sur l'histoire du lieu et du quartier.

L'appui se concrétise aussi par de nombreux dons reçus sur les lieux de l'événement. Matelas, peinture, meubles, bouffe, argent et autres biens de tous genres sont arrivés depuis le début de l'occupation et permettent actuellement aux militants de s'organiser un lieu de plus en plus habitable. Du côté des autorités de la ville, on ne semble pas trop dérangé par la situation: on ne manifeste pas de désir d'intervenir pour l'instant, en autant qu'elles n'observent pas de problèmes du côté de la salubrité, de la sécurité et du bon voisinage. Pour ce qui est de salubrité et sécurité, des inspecteurs des incendies sont passés à quelques reprises, identifiant des lacunes qui ont été aussitôt corrigées à leur satisfaction, donc pas trop de problèmes de ce côté. Pour ce qui est du bon voisinage, décidément difficile de faire mieux! Alors les autorités demeurent discrètes.

D'autres appuis de taille sont venus de diverses organisations sous différentes formes. Par exemple, la CADEUL (Confédération des Associations d'Étudiants de l'Université Laval) offre un soutien financier aux occupants. Le Conseil de Quartier St-Jean-Baptiste, comité de citoyens organisé par la Ville de Québec, a adopté une résolution d'appui à l'unanimité. D'autres organisations, comme l'ACEF de Québec (Association Coopérative d'Économie Familiale) l'a fait ce mercredi soir, offrent leur appui en devenant "occupants d'une nuit" grâce à la visite de leurs membres chez les occupants pour une soirée et une nuit.

Ces appuis ont le mérite de susciter du questionnement dans la population et chez les élus, et d'attirer l'attention des médias de masse. Ces derniers ont eu toutefois une approche qui a donné l'impression qu'ils y cherchaient un aspect "désobéissance" plutôt que de chercher à approfondir la cause derrière cette action directe. Malheureseument, il n'y a vraiment pas de eu matière à sensationalisme à trouver, donc la couverture médiatique qui en découlait fut assez pauvre.

La vie des derniers jours

La chaleur des derniers jours fut la bienvenue, après cette série de nuits froides qui a marqué le début de l'occupation. Chaque nuit, au moins une douzaine de personnes "gardent le fort", souvent plus, et elles sont rejointes par des renforts durant le jour pour aider au boulot et à l'accueil des visiteurs. Chaque jour débute par une assemblée générale, où on se distribue les tâches à accomplir, qui varient de travaux de rénovation jusqu'aux démarches avec divers organismes. Chacun s'affaire à son mandat du jour et la journée se terminera souvent par une autre assemblée générale, où un bilan des réalisations est mis à jour, avec souvent des discussions sur les stratégies à adopter pour la suite des événements. Le tout se déroule toujours dans un esprit de coopération et de dialogue où chacun trouve une place de choix et où les échanges sont des plus enrichissants.

Plusieurs journées sont aussi marquées par des événements particuliers. Les occupants organisent eux-mêmes plusieurs événements offerts aux gens du quartier : prestations artistiques, conférences, soupes populaires, assemblées publiques, etc. Depuis le début de l'occupation, de telles occasions ont été produites à tous les deux ou trois jours. Il y a aussi la visite de médias qu'il faut gérer, ou encore l'arrivée de groupes d'appuis, comme par exemple une marche des participants au "Forum citoyen pour un Québec et un monde sans pauvreté", qui a fait une pause tout près de l'immeuble occupé samedi dernier.

Du côté de l'aménagement, ça avance assez bien. Divers travaux ont d'abord été faits pour sécuriser les lieux, entre autres pour répondre aux demandes des inspecteurs des pompiers, et ensuite pour compléter certaines rénovations nécessaires pour améliorer la vie de tout le monde, comme de réparer un plancher, installer une toilette, enlever des traces de moisissures, etc. Maintenant, les occupants s'occupent de l'aménagement lui-même, autant celui du terrain que l'aménagement approprié des pièces.

Beaucoup de monde vient faire son tour, car l'occupation est de type "ouverte" et les visiteurs sont les bienvenus, leur permettant de jeter un coup d'oeil au rez-de-chaussée et d'échanger quelques mots avec les gens sur place. Chaque visiteur est sollicité de manifester son appui, s'il le désire, en signant une pétition géante affichée dans le salon. Déjà plusieurs pétitions géantes ont été remplies et ça continue toujours.

D'ici quelques jours, on devrait aussi trouver une sorte "d'info-shop" au sous-sol de l'édifice, qui est aussi accessible de la rue. Les détails sont à venir, il s'agirait d'un espace autonome offrant des publications diverses reliées aux différents sujets qui touchent les militants.

Un rappel des revendications

Les médias de masse n'ayant pas été particulièrement efficaces pour rapporter correctement et sans distorsion les revendications des militants-occupants, voici un rappel.

Premièrement, les occupants demandent que les gens de la communauté puissent réaliser un projet de coopérative d'habitation avec les bâtiments du 920 et 921 rue de la Chevrotière et les terrains qui les entourent. On ne parle pas ici de projet mixte ni de démolition, mais bien de garder ces édifices pour en faire des coops et de construire de nouvelles unités en coopérative sur terrains vacants adjacents.

Ensuite, les occupants demandent que la Ville de Québec établisse un moratoire sur la conversion de logements existants en condominiums, tant et aussi longtemps que le taux d'inoccupation des logements demeure inférieur à 3%.

Finalement, les occupants demandent que le gouvernement du Québec s'engage à construire 8 000 unités de logement social par année, dont au moins 1000 logements pour la ville de Québec.

Bien que la ville fasse paraître un discours conciliant en réponse à ces revendications, celles-ci n'ont toujours pas été comblées. D'abord, le projet de développement qui semble être proposé pour l'îlot Berthelot serait un projet mixte coop/condo qui comprendrait une partie en condominiums "de prestige" du côté du boulevard René-Lévesque. Ce projet hypothétique suppose toujours la démolition des bâtiments revendiqués. Ensuite, la Ville a émis l'idée d'accélérer son plan de construction de logements sociaux pour arriver à un total de 700 nouveaux logements pour les prochains 18 mois, ce qui n'atteint pas l'objectif revendiqué. Pour ce qui est du moratoire, rien n'a été proposé en ce sens jusqu'à maintenant.

Alors les occupants ont bien l'intention de demeurer en place tant et aussi longtemps que nécessaire. Et le support obtenu en masse depuis le début les rend encore plus convaincus. En espérant bien que ce ne sera pas un chantier de démolition qui les chassera de ce lieu.

photo du squat