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A propos du caractère antidémocratique de la Charte Démocratique Interaméricaine

vieuxcmaq, Saturday, September 8, 2001 - 11:00

Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) Le marxiste-léniniste quotidien (pmlq@aei.ca)

Mémoire de Jeunesse Référendum 800 millions remis à l'Organisation des États américains

Publication: LML QUOTIDIEN VOL. 31 NO. 146
DATE: 8/22/2001 (MM/DD/YY)

Titre: À propos du caractère antidémocratique de la
Charte démocratique interaméricaine: Mémoire de
Jeunesse Référendum 800 Millions remis: à
l'Organisation des États Américains, août 2001
Nous reproduisons ci-dessous le mémoire présenté par Jeunesse
Référendum 800 millions au «Forum d'idées» présenté par
l'Organisation des États américains sur son site Internet du 9
juillet au 10 août sur la Charte démocratique interaméricaine que
l'OÉA est censée adopter à sa session spéciale le 10 septembre à
Lima, Pérou. Cette «consultation des peuples des Amériques» via
Internet est si peu annoncée que JR800 a dû l'apprendre dans un
article de la presse le 29 juillet!
* * *
Jeunesse Référendum 800 Millions veut présenter ici son
point de vue concernant la Charte démocratique interaméricaine.
Auparavant, il nous faut souligner deux choses: non
seulement la consultation des peuples au sujet de la Charte se
fait-elle par le seul biais d'Internet, mais la Charte proposée
n'existe même pas en langue française.
Pourquoi cette consultation publique durant un mois n'a
t-elle pas été annoncée bruyamment? Presque personne ne sait
qu'elle a lieu.
Comment les populations privées d'électricité et de
téléphone peuvent-elles participer à ce forum d'idées sur
Internet? Des régions entières du continent sont ainsi exclues.
Pourquoi les documents du Sommet de Québec (avril 2001) ne
pouvaient-ils pas être rendus publics avant sa tenue parce qu'ils
n'étaient pas traduits dans les quatre langues principales alors
que la Charte est non seulement rendue publique malgré l'absence
d'une version en langue française, mais en plus, le continent au
complet est invité à se prononcer? Cela donne à penser que la
nécessité de traduire dans les quatre langues est un argument
conjoncturel et que l'actuelle consultation qui ne s'embarrasse
pas d'une version en langue française considère cette dernière
comme une langue en voie de disparition.
1) Jeunesse Référendum 800 Millions est une organisation
composée de jeunes du Québec. Nous partons du point de vue que
c'est dans le peuple que réside le pouvoir souverain et que c'est
lui qui a le droit de décider de son avenir. Parce qu'ils
naissent en société et non pas isolément dans la nature, les être
humains que sont les membres de la société ont le droit inhérent
et fondamental de participer à la gouvernance de leur société, de
prendre et d'appliquer les décisions qui affectent leur vie en
société. Notre point de vue est ainsi en conformité avec la
définition populaire spontanée de la démocratie: pouvoir du
peuple, par le peuple, pour le peuple. Ceci nous amène à
souligner notre accord avec l'Article 1 de la Charte qui stipule
que les peuples du continent Amérique ont le droit à la
démocratie.
2) Jeunesse Référendum 800 Millions fait signer une pétition
réclamant un référendum exécutoire pan- canadien sur la ZLÉA
précédé de l'envoi dans chaque foyer du Canada de la
documentation finale des négociations actuellement secrètes.
C'est donc en connaissance de cause que chaque personne pourra
alors voter pour ou contre l'adhésion du pays à la ZLÉA. Au moins
huit personnes sur dix rencontrées signent cette pétition, ce qui
montre bien que la tâche que s'est assignée JR800 correspond à
une réclamation populaire. Nous savons que cette même réclamation
traverse tous les pays du continent et rejoint 800 millions
d'habitants. En incorporant 800 millions dans notre nom, notre
travail s'inscrit donc dans une réclamation populaire
continentale. De plus, notons qu'on voit s'exprimer ainsi le
désir des signataires de prendre part à la décision, ce qui est
l'expression de leur droit inhérent et fondamental de participer
à la gouverne du pays.
De là, il s'ensuit que le travail entrepris par JR800 est en
droite ligne avec l'Article 1 de la Charte qui stipule que les
peuples ont le droit à la démocratie.
3) Le Premier Ministre du Canada, chef du parti politique
ayant pris le pouvoir et formant l'actuel gouvernement, négocie
seul et en secret la ZLÉA avec l'intention avouée de l'adopter
seul et publiquement. Jusqu'à maintenant, il refuse de soumettre
le projet final au vote des députés de tous les partis siégeant à
la Chambres des Communes. Même s'il change d'idée et soumet le
projet à la Chambre des Communes, le vote majoritaire de ses
députés (soumis à la discipline de parti) assurerait
automatiquement l'adoption du projet de la ZLÉA. En un mot: le
Premier Ministre prévoit adopter le projet de ZLÉA
automatiquement par simple décision de sa part ou par le vote
majoritaire qu'il détient au niveau législatif.
De là, il s'ensuit que la domination du législatif par
l'exécutif permet à l'exécutif de régner comme bon lui semble car
il peut utiliser le poids du nombre qu'il détient au niveau
législatif pour présenter son choix comme étant l'expression de
la volonté de la nation, le choix de tous.
Si le parti au pouvoir, qui est justement au pouvoir parce
qu'il détient le plus grand nombre de sièges à la Chambre des
Communes, ou si l'exécutif est justement l'exécutif par ce qu'il
domine le législatif par le poids du nombre de députés, en quoi
cela nous renseigne-t-il au sujet du verdict du peuple concernant
la ZLÉA? La décision du chef du parti qui détient le pouvoir
est-elle la décision majoritaire du peuple? Si tous les députés
des partis qui ne sont pas au pouvoir votent contre le projet de
ZLÉA, cela signifie quoi par rapport à la volonté populaire? Et
s'ils votent tous en faveur du projet, cela signifie-t-il pour
autant que la majorité du peuple est en faveur?
En d'autres termes, la question est la suivante: Qui décide?
Au nom du droit à la démocratie, JR800 soutient que le peuple
doit décider à l'occasion d'un référendum, d'autant plus que le
parti au pouvoir ne détient aucun mandat de l'électorat pour
négocier une ZLÉA ni rédiger la Charte proposée. Au nom de la
démocratie représentative, le système politique au Canada, le
Premier Ministre prétend de son côté avoir le mandat de faire ce
qu'il veut parce qu'il a été élu et qu'il représente tous les
membres du pays (bien que son parti représente le choix de
seulement une minorité de l'électorat.)
Bref, si la position de JR800 peut se réclamer de l'Article
1 de la Charte proposée et stipulant le droit des peuples à la
démocratie, la position du parti au pouvoir peut se réclamer de
l'Article 2 qui affirme que la démocratie représentative est le
système politique des États membres de l'Organisation des États
Américains...
De là, il s'ensuit que la Charte proposée sème la confusion
en mettant sur le même pied le concept de démocratie et le
système de démocratie représentative, deux catégories distinctes
où la première concerne le contenu et la seconde, la forme.
Puisque l'essentiel de la Charte proposée concerne le système, sa
consolidation, sa promotion, sa défense ainsi que son
rétablissement là où il aurait été remplacé par un autre système,
la Charte gagnerait en cohérence en amendant ainsi son Article 1:
«Les peuples des Amériques ont le droit à la démocratie
représentative.» Il serait clair désormais pour tous que la
Charte ne défend pas le droit des peuples à la démocratie en tant
que concept mais bien leur droit de n'avoir qu'un type de
système, qu'une seule des formes de la démocratie.
4) Si au concept de démocratie est rattachée l'idée que le
pouvoir souverain réside dans le peuple, au système appelé
démocratie représentative au Canada est rattaché le mécanisme
transférant ce même pouvoir souverain du peuple à ses
représentants élus qui l'exercent à sa place tout en lui imposant
désormais leurs décisions, en particulier celles du parti qui
s'accapare le pouvoir exécutif du fait de sa domination numérique
du pouvoir législatif. Bref, le peuple souverain ne détient plus
aucun pouvoir entre deux élections, son pouvoir souverain se
limitant à l'exercice du droit de vote, du droit de choisir son
parti-maître pour quatre ans. C'est comme si les rois
héréditaires avaient été remplacés par des rois élus!
La démocratie représentative canadienne prive le peuple de
son pouvoir souverain parce qu'il transfère ce dernier à un parti
politique et à son chef qui détiennent des leviers décisionnels
s'imposant à tout le corps politique. L'expression populaire d'un
point de vue contraire à celui de ce Parti-État est perçue alors
comme une nuisance par le pouvoir. Après le Sommet de Québec
(avril 2001), le Premier Ministre déclarait à propos des
manifestants qu'ils n'avaient qu'à faire comme lui: investir de
l'argent dans des campagnes électorales, attendre vingt ans, être
élus puis faire comme bon leur semblera.
C'est ce qu'on pourrait appeler Démocratie Représentative
101! Une fois élus, le chef et son parti font ce qu'ils
veulent...
Parce que l'actuelle démocratie représentative limite le
pouvoir souverain du peuple à l'expression de son vote (comme
l'approuve l'Article 3 de la Charte) et le prive de tout pouvoir
décisionnel entre deux élections, ce système le prive donc de son
droit inhérent et fondamental de participer à la gouvernance de
sa société. Puisque l'Article 1 stipule le droit à la démocratie
et que l'actuel système représentatif fait obstacle à ce droit,
la Charte devrait annuler l'Article 2 stipulant que ce système
est celui des États membres. Autrement, il nous faudra comprendre
que le but de la Charte est justement de s'assurer que le pouvoir
souverain du peuple ne puisse pas avoir les mécanismes lui
assurant sa participation au processus décisionnel; que ce
pouvoir souverain soit toujours transféré aux élus pour en faire
les seuls décideurs; que rien ne change avec cette Charte
chapeautant la ZLÉA.
5) La Charte proposée érige en un absolu obligatoire pour
tous les peuples des Amériques le mécanisme politique appelé
démocratie représentative au nom du droit des peuples à la
démocratie. Ce droit est donc subordonné à un mécanisme décidé
d'avance. Le problème est que ce mécanisme exproprie le pouvoir
souverain du peuple en faveur des élus, ce qui leur permet de
décider comme bon leur semble. Avec ce système, le pouvoir
souverain du peuple se limite au suffrage universel, c'est-à-dire
au droit de voter pour ceux qui vont prendre les décisions à sa
place, ce que l'Article 3 qualifie d'expression de la
souveraineté du peuple. Le suffrage universel ou le droit de vote
de l'électorat est le point de départ du pouvoir souverain mais
parce que la Charte proposée impose la démocratie représentative,
il se transforme en point d'arrivée.
Plus exactement, le suffrage universel servant à transférer
le droit de décider aux élus en général et au parti élu en
particulier, il devient en réalité l'expression de l'abandon du
pouvoir souverain du peuple. Dans ce sens, la démocratie
représentative avec le droit de vote universel nie le pouvoir
souverain du peuple car il l'en prive absolument au profit des
élus au lieu de s'assurer qu'il soit un pouvoir partagé entre le
peuple et ses élus.
Historiquement, nos ancêtres se sont battus pour avoir le
droit de vote. Leur but n'était pas de l'acquérir puis de s'en
servir afin de donner à d'autres le pouvoir de décider, ce qui
était déjà le cas au moment où ils n'avaient pas le droit de
voter!
Quand le pouvoir de décider fut arraché des mains exclusives
des rois, des reines et de l'ensemble de l'aristocratie, la
bourgeoisie de l'époque en fit sa chasse- gardée. A l'ancien
critère médiéval du droit divin et du sang succéda celui de la
richesse. Il fallait détenir une certaine somme d'argent ou
certaines possessions pour avoir le droit d'élire et d'être élu.
Dans le langage de l'époque il fallait être un homme de
propriété. Le droit de vote n'était pas un droit mais un
privilège soumis à un critère économique. Cette conception est
d'ailleurs à l'origine du Canada en tant que pays. Ainsi durant
les pourparlers de 1865 entre les élites des colonies qui
allaient bientôt se métamorphoser en provinces d'un pays appelé
Canada deux ans plus tard, Sir John A. MacDonald déclarait: «Le
droit inaliénable d'exercer le droit de suffrage n'existe pour
personne». Il devient ensuite le premier Premier Ministre du
Canada...
Le droit de voter demeura le privilège de voter pendant
longtemps. Si on s'en tient à l'essentiel, l'obligation de
posséder une certaine richesse ou certains biens pour pouvoir
élire ou être élus (cens électoral) ne fut aboli qu'en 1929 au
Canada et qu'en 1936 au Québec. Notons aussi que la femme ne fut
reconnue comme étant une personne qu'en 1929 au Canada; elle
obtint le vote au Québec en 1940, la dernière province à le lui
concéder. N'oublions pas que toutes ces conquêtes furent le
résultat de luttes de longue haleine où souvent le sang fut
versé.
Devant l'extension du droit de vote, la minorité constituée
des hommes de propriété risquait de se voir battue au vote par le
vote majoritaire du peuple composé de gens ordinaires,
individuellement ou regroupés au sein de leur groupe
d'appartenance, les différents collectifs constituant ce qui est
appelé la société civile. Pour contrecarrer cette tendance
imminente, les hommes de propriété transformèrent leurs
organisations électorales en partis politiques. Grâce au pouvoir
de l'argent, à leur contrôle des médias leur appartenant, etc.,
les hommes de propriété imposèrent leurs partis politiques à
l'électorat en expansion. En pratique, si le droit de vote
restreint du début permettait aux hommes de propriétés d'élire
les leurs au pouvoir, le suffrage universel faisait en sorte de
faire encore élire les leurs au pouvoir mais par le biais de
l'ensemble de la population. Si les hommes de propriété pouvaient
faire ce qu'ils voulaient au temps du suffrage censitaire, la
situation est essentiellement la même depuis l'avènement du
suffrage universel qui donne le pouvoir à un de leurs partis
politiques par le moyen du vote populaire.
En d'autres termes, la démocratie représentative prive le
peuple de son pouvoir souverain, de son pouvoir de décider des
choses concernant sa vie. Son droit de vote se résume à son droit
de désigner son maître. C'est la seule chose que le peuple peut
décider et c'est la seule chose à comprendre dans la Charte
proposée où l'Article 3 stipule que les élections sont
l'expression de la souveraineté populaire. Il s'agit ainsi du
pouvoir souverain du peuple d'abolir son propre pouvoir souverain
par le moyen du suffrage universel!
De là, il s'ensuit que la Charte, en soumettant le droit à
la démocratie à un mécanisme appelé démocratie représentative,
décidé d'avance et obligatoire pour tous les peuples, en vient à
ériger en loi du continent l'abandon du pouvoir souverain de
chaque peuple par chaque peuple par le moyen du droit de vote
universel, au profit des partis politiques des hommes de
propriété d'aujourd'hui dans chaque pays.
6) Puisque le peuple lui abandonne son pouvoir souverain, la
démocratie représentative porte bien mal son nom. La démocratie
représentative est non représentative du peuple puisqu'elle le
prive de son pouvoir de décider. Ce pouvoir est détenu par le
parti au pouvoir, qui prend le pouvoir grâce au vote du peuple et
qui s'impose à lui ensuite. Doit-on se surprendre du fait que
l'élite politique qui s'arroge le pouvoir de décider seule entre
deux élections soit obligée de se réunir derrière des périmètres
de sécurité, de tirer des balles de plastique ou des vraies en
direction de la société civile, de la noyer de gaz, puis d'aller
dormir sur des porte-avions comme à Gênes (Italie) cet été?
À l'époque où le peuple n'avait pas le droit de vote, la
lutte en dehors du Parlement était le seul moyen de faire
entendre sa voix. À l'époque du suffrage universel, le peuple
demeure absent du Parlement et sa lutte dehors demeure aussi
nécessaire qu'avant. Cela ne révèle-t-il pas une faille sérieuse
dans le mécanisme appelé démocratie représentative?
Dans son histoire du syndicalisme britannique (Seuil, 1967)
Henry Pelling décrit ainsi la situation avant le droit de vote:
«Jusqu'à cette époque, les revendications du monde du travail ne
pouvaient être soumises au Parlement ou au Gouvernement que sous
la forme de pétitions, de lobbying, de pamphlets, de
manifestations publiques, ou, plus brutalement, de perturbations
de l'ordre public» (p.11). Le suffrage universel n'a rien changé
à ce niveau.
Décrivant la réaction du gouvernement des hommes de
propriété, les seules personnes ayant le droit d'élire et d'être
élues et détenant le pouvoir, Pelling souligne: «Tout embryon
d'organisation était fréquemment considéré avec inquiétude, comme
un germe d'activité criminelle, voire même séditieuse» (p.11-12).
N'est-ce pas là la réaction des élus de l'actuelle démocratie
représentative à l'égard de l'opposition populaire qu'exprime la
société civile? La criminalisation de la dissidence par le
pouvoir en place est un phénomène qui s'accentue présentement. Au
Canada comme ailleurs sont sans cesse révélées l'infiltration
policière des collectifs exprimant un point de vue contraire à
celui du gouvernement, l'écoute téléphonique, l'interception du
courriers électroniques, ou encore la mise sur pied d'unités
spéciales de la police. Dans la démocratie représentative se
targuant de reposer sur le consentement des gouvernés,
l'effritement de ce même consentement est bel et bien vu
aujourd'hui comme «un germe d'activité criminelle». Cette
réaction du pouvoir n'a rien à voir avec la survivance d'une
mentalité de la guerre froide: c'est un mécanisme de défense de
la démocratie représentative aux prises avec la conscience
croissante chez les gouvernés de son caractère non-représentatif
et qui ne trouvent que la rue pour l'exprimer. Cette remise en
question du système est taxée par le pouvoir de menace à la
sécurité nationale.
Il n'est pas du tout normal, ni cohérent avec l'existence du
suffrage universel, de parler en ce début de XXIe siècle de la
nécessité de mener une lutte hors du Parlement pour se faire
entendre de lui. Puisque les êtres humains vivant dans leur
société ont le droit inhérent et fondamental de participer à la
gouvernance de leur société, que vient faire ici la lutte dans la
rue? Et s'il est nécessaire de manifester dans la rue, n'est-ce
pas la preuve que le droit inhérent et fondamental de participer
à la gouvernance ne s'applique pas même s'il y a le suffrage
universel? Si le peuple se gouvernait lui- même et partageait
l'exercice du pouvoir avec ses représentants élus, il ne serait
pas dans la rue et ses représentants ne dormiraient pas sur des
portes-avions! Disparaîtrait alors la nécessité d'infiltrer le
peuple...
Au lieu de réfléchir à cela, au lieu d'examiner les failles
de la démocratie représentative non représentative, l'élite
politique aime répéter qu'elle a l'intention de consulter la
société civile. Depuis quand les gouvernements sont-ils devenus
quelque chose de séparé et de distinct de la société civile? Au
nom de quelle logique? Cette dite consultation n'est-elle pas la
preuve que le gouvernement n'est pas constitué d'élus au service
du peuple et sous son contrôle s'il faut qu'il consulte le
peuple? Cette consultation n'est-elle pas synonyme de lobbying,
cette méthode consistant à défendre ses intérêts particuliers en
s'activant dans les coulisses du pouvoir et qui remonte à
l'époque décrite par Pelling où le droit de vote n'était pas
universel? Tout cela ne revient-il pas à dire que le droit humain
de tous les membres de la société à participer à la prise des
décisions est carrément violé?
Sur cette question, la Charte proposée n'apporte pas de
solution, bien au contraire. Si l'Article 6 mentionne la
participation de la citoyenne et du citoyen dans les décisions au
nom de la démocratie en tant que concept, l'Article 21 y revient
sous l'angle de la consultation de la société civile par les
institutions élues afin de renforcer la démocratie
représentative. De là, il s'ensuit que la promotion de la
démocratie représentative force la Charte à ne rien proposer pour
résoudre le non-sens de la consultation de la société civile à
l'heure du suffrage universel. Le caractère non représentatif du
système est ainsi officialisé.
7) Au Canada, la démocratie représentative laisse apparaître
au grand jour son caractère non représentatif quand on réalise
que le droit de vote sert à la prise du pouvoir par un parti
politique. Puisque moins de 3% de la population canadienne est
membre d'un parti, près de 97% de la population n'a rien à dire
au sujet de la formulation des programmes politiques proposés à
l'électorat, ni rien à dire au sujet de la sélection des
candidats sollicitant le vote populaire. Cela explique-t-il
pourquoi les partis politiques traditionnels ou vieux partis se
considèrent eux-mêmes comme étant à l'écart de la société civile
et qu'ils se sentent obligés de la «consulter»?...
En pratique, les programmes et candidats sont parachutés
vers l'électorat; ce dernier ne participe pas à l'élaboration du
programme ni ne contribue au choix du candidat. Tout cela est
«l'affaire des politiciens». L'expérience accumulée, ici comme
dans les autres pays au système de démocratie représentative, a
donné naissance à la désaffection politique qui se traduit par la
non-participation croissante de l'électorat. Les gens votent de
moins en moins parce qu'il ne croient plus au système actuel. En
faisant comme si de rien n'était, la Charte qui rend obligatoire
ce même système ressemble à l'autruche qui se met la tête dans le
sable.
Cette désaffection mérite d'être considérée avec sérieux car
dans ce contexte, le parti qui prend le pouvoir le prend avec un
pourcentage de participation au vote qui fond comme neige au
soleil. Sur la base des chiffres officiels concernant la dernière
élection au Parlement du Canada (novembre 2000), on apprend par
exemple que seulement 57,8% des gens éligibles ont voté. Quant
aux votes reçus par le parti de l'actuel Premier Ministre, cela
représente 23,7% des gens éligibles. Comment ce parti peut-il
raisonnablement affirmer qu'il a un mandat du peuple? Comment son
chef devenu Premier Ministre peut-il déclarer qu'il représente
toutes les Canadiennes et tous les Canadiens?
Comment ce même Premier Ministre, qui n'est même pas le
choix d'une personne ayant droit de vote sur quatre, peut-il
négocier la ZLÉA et même penser à l'adopter lui- même ensuite?
Comment cette personne, élue par un système dont l'électorat se
détourne chaque jour d'avantage, peut-elle négocier une Charte
exigeant de tous les peuples du continent comme du Canada
d'endurer ce même système en perte de vitesse? Quand le Premier
Ministre répond que les gens n'ont qu'à faire comme lui, soit de
se faire élire pour ensuite agir comme ils le veulent, il
confirme le fait que le peuple n'exerce pas son pouvoir
souverain, que «les politiciens élus font ce qu'ils veulent, peu
importe ce que nous pensons». Il encourage la désaffection.
Bref, il ne donne pas à la politique le rôle élevé qui lui
revient lorsqu'on part du principe que les membres de la société
ont le droit inhérent et fondamental de participer au processus
décisionnel. À l'inverse, cela montre l'urgence de remédier au
caractère non représentatif du système actuel en inventant les
mécanismes et les arrangements nouveaux permettant à ce même
principe de devenir réalité. La Charte proposée n'est d'aucune
aide en ce domaine.
JR800 est une organisation de jeunes préoccupée par ce
problème, d'autant plus que les chiffres officiels révèlent qu'à
ces mêmes élections plus de 45% des 18-24 ans avaient renoncé à
exercer leur droit de vote, chiffre constamment à la hausse.
Contrairement à ce qu'affirme la Charte dans son Article 3, la
jeunesse au Canada d'un océan à l'autre ne ressent pas
l'expression de son pouvoir souverain dans le fait de voter pour
un parti qui lui imposera ensuite ses quatre volontés jusqu'aux
prochaines élections parce que ce parti et son chef peuvent faire
ce qu'ils veulent entre-temps. En un mot, la relève de la société
ne vote plus parce qu'elle voit dans le droit de voter dans le
système actuel comme un mécanisme assurant sa marginalisation.
La Charte proposée veut-elle jeter de l'huile sur le feu et
accentuer cette désaffection de l'électorat en général et de la
relève en particulier? Veut-elle cultiver ce sentiment fondé de
marginalisation, à l'échelle de tout le continent? Elle le
voudrait qu'elle ne s'y prendrait pas autrement puisqu'elle rend
obligatoire ce système comme condition des relations entre les
pays.
8) Au Canada, la démocratie représentative repose sur un
système électoral appelé vote majoritaire uninominal à un tour.
C'est ce qu'on appelle le scrutin anglais. En anglais, cela
s'appelle «first-past-the-post». Cela signifie que le premier
parti à remporter la majorité des voix par un tour de vote
remporte aussi automatiquement tous les votes: c'est lui qui
prend le pouvoir et les voix exprimées en faveur des autres
partis n'ont plus aucune signification. Ce système électoral
produit des effets hallucinants. À titre d'exemple, les dernières
élections au Québec (1998) ont permis à un parti de prendre le
pouvoir, de s'emparer du niveau exécutif parce qu'il s'est emparé
du niveau législatif (appelé Assemblée nationale) en y obtenant
61% des sièges. Par contre, ce parti au pouvoir, ce parti «first-
past-the-post» n'obtenait au même moment que 43% du vote
enregistré alors que l'Opposition en recueillait 44%!
Si l'Article 3 de la Charte stipule que les élections
représentent l'expression de la souveraineté du peuple, ses
auteurs seront donc intéressés de savoir que le peuple s'est
prononcé majoritairement en faveur d'un parti, qui s'est retrouvé
dans l'opposition! À l'inverse, le parti arrivé deuxième s'est
emparé du pouvoir! De là, il s'ensuit que non seulement le droit
de vote du peule exproprie son pouvoir souverain parce qu'il
donne le pouvoir à un parti, mais la démocratie représentative
dans notre pays peut même faire en sorte que ce pouvoir souverain
du peuple n'est pas exproprié au profit du parti désigné par le
peuple!
Pour corriger ce que certains appellent la «distorsion»
caractéristique du système d'élections majoritaires uninominales
à un tour, l'idée d'une représentation proportionnelle est
proposée. Le principe de base est qu'un parti devrait avoir un
nombre de sièges en proportion du nombre de votes exprimés. Par
conséquent, le parti arrivé deuxième se serait retrouvé dans
l'opposition, pas au pouvoir. Le mérite de cette proposition
réside dans le fait qu'elle corrige la distorsion de notre
système majoritaire uninominal à un tour. Par contre, elle ne
touche pas au problème de fond, à cette «distorsion»
caractéristique de la démocratie représentative, soit la remise
du pouvoir à un parti. Si la représentativité électorale est
corrigée, la non-représentativité du système n'est, quant à elle,
pas touchée puisque c'est toujours un parti qui s'empare du
pouvoir et qui décide.
9) Puisque les partis prennent le pouvoir et privent le
peuple de son pouvoir, puisque le peuple se détourne de ce
mécanisme, les partis doivent s'ouvrir les yeux. Il faut que les
partis pensent aux moyens permettant que le pouvoir du peuple
devienne réalité. Les partis dont les chefs ne visent qu'à
prendre le pouvoir pour ensuite faire ce qu'ils veulent font
fausse route. Le suffrage universel exige un renouvellement de la
démocratie qui passe par l'invention de mécanismes assurant au
peuple que son vote ne soit pas la fin de son pouvoir. Le peuple
a besoin d'élus pour le représenter mais il doit garder le
contrôle final sur leur activité. Les partis doivent mettre à
leur ordre du jour ce qui est à l'ordre du jour du développement
ultérieur de la démocratie à partir de ses manques qui sont
ressentis, vécus, analysés. Les partis doivent oeuvrer à les
combler en aidant l'électorat à assumer son pouvoir. Les partis
doivent suggérer des mécanismes mettant fin à la marginalisation
de l'électorat.
La Charte propose une autre voie, celle consistant à
convaincre que la démocratie représentative est LE système.
L'Article 20 suggère de faire la promotion des pratiques de la
démocratie représentative par le biais de l'enseignement aux
enfants et aux jeunes. L'Article 22 souligne que les partis
politiques étant des composants essentiels de la démocratie (en
tant que concept), il faut alors promouvoir l'augmentation de la
participation du peuple à la vie des partis politiques afin de
renforcer le mode de vie démocratique (soit le système).
La Charte semble déconnectée de la réalité. L'heure est à la
réflexion, à la discussion portant sur les manques et la
non-représentativité de la démocratie représentative.
L'expérience accumulée force l'être pensant qui prend conscience
de ce qui manque à inventer ce qu'il faut pour le combler puis à
agir pour lui donner naissance. Les partis politiques sont
interpellés par l'évolution de la société à jouer un rôle dans ce
comblement de ce qui cause la marginalisation du peuple. La
Charte croit-elle que la promotion de ce qui cause le manque va
finir par combler le manque? Au contraire: même la promotion de
la démocratie représentative fait réaliser à la personne qui n'en
a pas l'expérience que c'est un mécanisme privant le peuple de
son pouvoir souverain en le transférant à une org

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