Les médias corporatistes les taxent de casseurs. Pour les pacifistes se sont souvent des agents provocateurs. Pourtant, en s'attaquant à l'État policier et aux compagnies privées, les groupes et les individus rassemblés en Black Blocs prétendent toucher au coeur du problème de la mondialisation néolibérale.

On parle beaucoup du Black Bloc et on en parle mal. Le paroxysme de la désinformation a été atteint hier soir alors qu'une radio montréalaise (AM 690) a annoncé en début de soirée que la police de Québec avait procédé "à l'arrestation du leader des Black Blocs" (sic). C'est sans compter sur le très médiatique inspecteur de police de la Sûreté du Québec, Robert Poeti, qui déclarait hier aux journalistes que la majorité des gens qui avaient fait une brèche dans le périmètre de sécurité étaient membres du Black Bloc" (Globe and Mail, 21 avril 2001).

Le terme Black Bloc est utilisé depuis le début du siècle. Il ne fait pas référence à un groupe en particulier, mais plutôt à une méthode d'organisation. Des groupes et des individus peuvent décider à un moment précis de s'organiser en Black Bloc pour une action ponctuelle.

Dans les rues de Québec hier on a pu apercevoir plusieurs petits groupes pouvant faire penser à des Black Blocs. HabilléEs en noir, portant des foulards ou des masques à gaz, ils fonctionnent en groupes de 3 ou 4 personnes. Très calmes, ils connaissent bien le terrain et ont souvent des objectifs précis. Ils passent à l'action, se retrouvent pour discuter de la prochaine cible et remontent ensuite au front. Bien équipés, ils peuvent agir pendant plusieurs heures.

Un peu avant le Sommet des Amériques, un appel avait été lancé pour la formation de Black Blocs à Québec. Près d'une dizaine de textes étaient alors publiés dans une liste de diffusion anarchiste ("Appel du Black Bloc, textes 1 à 8", A-Infos http://www.ainfos.ca ).

Cet appel pouvait se lire comme suit: "Formons nos Black Blocs, prenons le pouvoir de la rue. Créons nos Women Blocs et prenons le pouvoir sur notre vie. Organisons nos Commandos bouffe et prenons le pouvoir sur notre faim. Bâtissons nos Squatts et prenons le pouvoir sur nos logements. Faisons la révolution et redonnons le pouvoir à chacunes et chacuns pour que personnes n'en ait plus que les autres.".

Les Black Blocs visent deux objectifs: "à court terme, faire
connaître notre opposition farouche contre la tenue du
Sommet des Amériques. À long terme, la destruction totale de l'oppression engendrée par l'État, le Capital, le Patriarcat… en somme, chacun définit sa priorité". Voilà qui résume bien la philosophie de la méthode puisque le Black Bloc constitue un lieu de convergence pour les actions directes. De là, chacun est libre d'y définir ses objectifs et ses cibles.

Le Black Bloc cherche l'efficacité: "Nous prenons partie en faveur de la radicalité, de la destruction de la propriété privée par tous les moyens qui soient.". Ils ne se disent pas fondamentalement violentEs et n'agissent pas en réaction à la violence policière. Leurs actions se veulent pro-actives: "Nous ne laissons pas dans les mains de l'ennemi son arme la plus forte: la légitimité et l'usage exclusif de la violence [...]. Nous prenons ce que nous voulons. Si cela constitue un acte de violence, et bien tant pis. Mais ultimement, c'est l'ordre établi qui se trouve à être violenté, lézardé.".

De mouvance anarchiste, le Black Bloc s'en prend aussi à l'État et à ses lois: "L'état est la domination de la conduite humaine. Il enclave l'esprit humain en lui dictant sa conduite par des lois. C'est toujours une partie de la population qui fait les lois et une autre qui doit obéir : nous.".

Rappellons que le Black Bloc est entré de plein fouet dans l'actualité lors des manifestations de Seattle en novembre 1999. Plusieurs blocs décident alors de s'attaquer à des cibles corporatistes précises: Nike, Levi's, McDonald's, Starbucks etc.