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Des médias alternatifs de toutes sortes se multiplientvieuxcmaq, Friday, March 23, 2001 - 12:00
Nicolas Lévesque (nicolaslevesque@hotmail.com)
Peut-être est-ce dû à l’avènement de ce nouvel outil de communication qu’est l’internet, ou à la médiocrité de la presse conventionnelle, ou aux deux à la fois, mais les médias alternatifs semblent se développer de plus en plus pour répondre à un besoin grandissant pour une information différente. Des médias alternatifs de tous les genres apparaissent, avec chacun ses propres préoccupations. En périphérie de la ville de São Paulo, au Brésil, une expérience de ce genre est en marche afin de combler le manque d’information que les habitants de la région du Capão Redondo ressentent par rapport à leur communauté. Des habitants ont mis sur pied l’Agência Capão, une agence de nouvelles communautaire sur internet. Cette agence de nouvelles s’intègre dans le projet Sampa.org qui vise la démocratisation de l’accès à internet. Par le projet pilote de Sampa.org, plus d’une centaine d’ordinateurs ont été installés dans une dizaine de centres communautaires de la région du Capão Redondo, pour donner une base de formation en informatique et l’accès à internet aux gens de la communauté. « Comme je suis journaliste, j’ai proposé de créer, à l’intérieur du projet Sampa.org, une agence de nouvelles communautaire, avec les gens de la communauté, pour les gens de la communauté », explique Fernanda Papa, coordonnatrice de l’Agência Capão. Le site internet de l’agence est en ligne depuis quelques semaines à peine. On y retrouve toutes sortes d’articles qui touchent particulièrement les préoccupations quotidiennes des résidents de la région, une région de 200 000 habitants dont la couverture par les journaux traditionnels fait souvent défaut. Cette agence de nouvelle répond à un réel besoin pour sortir les habitants du Capão Redondo de leur isolement au sein même de la métropole brésilienne. « Si on prend un grand journal de São Paulo, on ne lira jamais de nouvelles sur le Capão Redondo, sauf s’il y a des morts et des personnes assassinnées. On trouvera dans les journaux les résultats des parties de soccer mais on ne lira pas par exemple qu’un joueur de l’équipe de soccer Palmeiras est originaire du quartier et qu’il essaie d’ouvrir un centre pour les enfants vivant avec le sida. Ce n’est pas intéresant pour les grands médias parce que ça ne vend pas. Mais les gens de la région, eux, s’y intéresent. Ils ont droit à l’information et c’est une façon pour eux d’exercer leur citoyenneté en s’intéressant à ce qui se passe près de chez eux », de dire Fernanda Papa. Celle-ci rappelle qu’il s’agit d’un projet expérimental. La fréquentation du site ne fracasse peut-être pas de records jusqu’à maintenant mais le travail concret avec les journalistes et le collaborateurs bénévoles laissent croire que l’agence est sur le bonne voie pour s’implanter solidement. Faute de moyens financiers, la publicité pour faire connaître le site internet fonctionne selon la bonne vieille méthode du bouche à oreille. La coordonnatrice ne s’en fait pas outre mesure pour le moment en ce qui a trait à la fréquentation du site puisqu’il y a beaucoup à faire encore. Mais certains événements ponctuels suscitent parfois un intérêt accru pour le journal virtuel. Ainsi, lors d’une récente pluie torrentielle qui a causé des innondations dans la région, quelques centaines de personnes ont consulté l’article expliquant comment les résidents ayant connu des pertes matérielles pouvaient être dédommagés financièrement. « Les médias conventionnels n’ont pas cette préoccupation », poursuit Fernanda Papa. Dans cette agence de nouvelles peut commune, il y a place aux talents de chacun. Certains par exemple ont découvert un intérêt particulier pour la photographie ou l’informatique. Chacun y trouve son utilité. « Madame Maria José, par exemple, n’écrit pas d’articles mais elle est d’une aide formidable pour nous. Elle est plus âgée et est impliquée dans la vie communautaire de la région depuis longtemps. Elle connaît tout le monde et elle a toujours plein de suggestions de sujets à traiter », mentionne Fernanda Papa. Les collaborateurs et jourmalistes de l’agence sont de tous les profils. Ils sont âgés de 16 à 60 ans, certains sont sans emploi, d’autres étudient ou travaillent. Mais ils ont en commun leur intérêt pour le journalisme et le fait qu’ils habitent le même secteur. Vanessa da Conceição Silva, l’une des journalistes bénévoles de l’agence, étudie en parallèle le journalisme à l’université. Elle est pourtant très critique envers les grands médias. « Travailler avec l’Agência Capão me donne l’opportunité de montrer concrètement la réalité de mon quartier, explique-t-elle. Notre agence de nouvelles, c’est une façon de répondre à la grande presse qui diffuse des préjugés envers notre quartier, comme s’il n’y avait que de la criminalité ici. On n’y parle jamais des initiatives communautaires qui se déroulent ici, seulement des meurtres qui y sont commis. » Pour le moment, toutes les activités de l’agence se déroulent le samedi : les réunions de rédaction, la recherche, l’écriture des articles et la mise en ligne. Dans un futur proche, l’Agência Capão veut s’organiser davantage et obtenir un local permanent avec des ordinateurs disponibles pour travailler tout au long de la semaine afin d’avoir un rythme de travail plus normal. L’agence recherche aussi du financement pour aider minimalement les participants au projet en leur versant une bourse qui leur permmettrait d’étudier le journalisme ou la photographie. Pour l’instant, il s’agit d’un projet pilote, mais l’objectif demeure néanmoins de pouvoir développer ce genre d’agence dans chacune des régions de la métropole. Le pouvoir d’internet La première raison pour laquelle l’Agência Capão a choisi le support de l’internet, c’est évidemment une question financière puisque ce moyen s’avère plus économique que d’imprimer un journal. Mais internet peut avoir d’autres avantages. « Je crois qu’internet est un moyen important de diffusion des connaissances du fait qu’il s’agit d’un réseau. Dans un réseau, il n’y a pas de hiérarchie, tout est à la même égalité, de dire le journaliste Rogério Jordão, qui a lui-même travaillé pour d’importants journaux du Brésil, tel le Jornal da Tarde. Le droit à l’information, c’est fondamental. Dans ce sens, internet est une grande révolution, c’est un changement de paradigme. Internet a un très grand pouvoir puisqu’il permet de diffuser de l’information qui ne le serait pas autrement. »
Site de l'agence de nouvelles Agência Campão.
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